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Quelque part la lumière pleut, de MICHEL DIAZ. Poésie (Alcyone, 2022, collection Surya)
tu savais que le temps se cachait dans le battement de tes cils, mais ne pouvais que demeurer ainsi, et enclos en toi-même, comme un arbre veillant le silence de ses blessures
Michel Diaz, Quelque part la lumière pleut, p. 13 (le titre vient d’un poème de Silvaine Arabo)
on n’écrit rien avec le rien, même en lisant dans son miroir ce vide qui s’étonne, ni rien non plus avec ce qui s’épuise à lutter contre l’ombre
Quelque part la lumière pleut, p. 25
mais surtout j’écoute le vent, j’écoute les murs, j’écoute les âmes
Quelque part la lumière pleut, p. 71
Je regarde d’abord l’encre de Silvaine Arabo qui introduit le livre (juste après un texte avant-signe). Je la regarde avec la même liberté intérieure que celle que j’ai devant les affiches déchirées que je cherche dans le métro, en capturant du regard des fragments pour recréer un autre imaginaire que peut-être personne n’aurait vu. Évidemment, là, nulle affiche déchirée, mais une création pensée, structurée, de l’art.
Cependant je sens que je réinvente peut-être l’œuvre (après tout c’est ce que l’œuvre veut aussi, toujours).
Ivresse des vents, est le titre de lâencre. Et voilà , avant dâêtre un lieu du livre de Michel Diaz, ce qui prolonge ma lecture de Capter lâindicible de Silvaine Arabo, livre où lâair et le vent font lâépure du réel. Mais dans ce livre de Michel Diaz, ouvert par cette image, dans les dernières pages surtout, celles de lâespoir, épure par lâair et le vent, aussi. Parenté dâunivers dans lâexigence du regard et de lâécriture. Pas étonnant que ce livre de lâun soit dédié à lâautre. Par la dédicace, par le titre, par un exergue, par la citation finale et bien sûr avec cette encre.
Alors je regarde encore et reviennent deux vers de Silvaine Arabo⦠(Capter l'indicible).
Ultime salut au vent
Et à lâoiseau.
Et des mots de son livre, encore. Jubilation, vertige.
Puis deux autres vers d'elle, même recueilâ¦
Ce grand océan cosmique
Qui nous interpelle sans cesseâ¦
Toujours dans la présence de lâencre qui offre des clés pour lire ensuite au plus juste les pages qui viennent.
Câest cela que je vois dans lâencre, pas étonnée quâelle soit là . Car lâUlysse de Michel Diaz était déjà ce voyageur cosmique, dans lâabîme dâune profondeur, interrogeant le destin, les choix, et la bascule toujours possible vers un renoncement, un néant, ou au contraire lâancrage dâêtre, démarche métaphysique au-delà des temps (Le verger abandonné, recension à lire ici, lien en fin de note).
Dans lâencre, serait-ce Ulysse, ce personnage dont lâombre contemple un gouffre bleu, près dâune sorte de fleur verte géante ? Gouffre de lâinfini, car le bleu est sa couleur. Ombres séparées, deux silhouettes sombres, sur une rive ou un bateau, sous un fragment de ciel mauve et un envol dâoiseaux. La solitude des êtres dans les lieux vidés de vie. Mais ayant lu le livre qui suit, je vois aussi la barque de Charon dressé devant lââme dâun mort et traversant le Styx avec lui. Alors Ulysse est aussi lâauteur écrivant pendant lâhiver du confinement, entendant la litanie quotidienne des morts, et qui évoque les fantômes des êtres perdus, ces inconnus, mais aussi les deuils personnels, ces présences-absences dans une maison. Comment penser nos vies sans penser la mort ? Et comment penser le monde tel quâil est sans penser ce quâil fait de la mort ? Cela est dans lâencre comme je la perçois, assez riche pour porter tout lâunivers des pages de Michel Diaz en même temps que toutes les méditations de Silvaine Arabo.
Je ne peux quâassocier cette encre au logo de la couverture, belle conception de Silvaine Arabo, qui est la marque visuelle de lâédition Alcyone. J'y vois un infini, de la douceur.
Quelque part la lumière pleut. Magnifique titre, cet emprunt à la poésie de Silvaine Arabo. Thématique commune aux deux auteurs, la lumière. Croire quâun sens peut émerger, que lâécriture peut faire advenir et transmettre. Ou que, quelque part, cela sâoffre si on le déchiffre. La lumière câest aussi celle qui sourd du mystère de la camera obscura de nos yeux, au profond du regard, et dans la tension entre écrire et être.
Mais un texte précède lâencre.
La première phrase offre les trois titres des parties du livre.
Dans lâincertain du monde
Sâessayer à vivre plus loin
Travailler à lâoffrande
Partir du constat, dire lâintention, agir pour un possible horizon.
Superbe texte, entre prose poétique et philosophie. Constat lucide concernant lâétat du monde, et élan pour ne pas renoncer, éthique dâune présence agissante, par la conscience dans la création. Dans ce texte je trouve un souffle qui a la force de celui d'Albert Camus dans Noces ou LâÃté. Et justement des refus similaires, la même ardeur vitale pour choisir de FAIRE, et un mot commun, qui vient de la même perception dâune nécessité, résister. Recoudre.
Michel Diaz veut (lui et nous, humains) quâon travaille à recoudre les fêlures de lââme, et, avec ce qui nous reste de raison⦠affronter le crépuscule des désastres à venir. Plutôt que dâaccepter le désespoir (frôlé dans certains textesâ¦) il choisit dâécrire que rien ne sera perdu dans l'éternité du silence, tant que (â¦). Câest donc notre choixâ¦.
Albert Camus, qui parle du malheur du siècle en refusant lui aussi le désespoir, veut quâon sache sauver lâesprit, apaiser lâangoisse infinie des âmes libres. Et il écrit que Nous avons à recoudre ce qui est déchiré, à rendre la justice imaginable dans un monde si évidemment injuste (â¦). (Les Amandiers, dans LâÃté).
Recoudre. Cela signifie quâon part de ce qui est, et quâon fait lien. Câest tisser avec le réel, pas avec des projections mentales. Du concret. Chez les deux auteurs la nature, pour rappeler notre ancrage dans le présent matériel et le voisinage du vivant. Du réel. Camus insiste, au sujet des amandiers de son texte. Ce nâest pas là un symbole. Non, pas un symbole, des arbres vraiment. De même la mer présente dans les deux textes. Pour Albert Camus, câest le vent qui vient dâelle. Pour Michel Diaz câest, dans cette page, celle que va rejoindre une rivière. Lui aussi pourrait insister et rappeler que la nature dont il parle, si présente, nâest pas un symbole. Elle est le vrai chemin pour ses pas de marcheur, lâombre vraie du soir avec ses odeurs et ses sons, lâherbe réelle, des arbres quâon peut toucher, des pierres quâon ramasse (il en posait, raconte-t-il, comptant des jours dans notre hiver confiné).
Ce texte dâavant-signe, qui préfigure la structure et la dynamique du livre entier, sera à lire et relire, pour qui veut saisir la densité de lâensemble. Afin de sâen imprégner et dâen saisir la beauté. Il contient beaucoup, tant la perte que la joie, le temps, le silence, le visage et lâarbre. Et il inscrit une écriture qui nâappartient quâà lâunivers de Michel Diaz, une densité particulière, un rythme qui contient du silence, posé dans les virgules, dans les espaces entre les brefs paragraphes (pour le temps dâune respiration), et dans les mots qui donnent à voir, par touches légères (rose, mésanges, arbreâ¦). Car le regard ne se trouve que dans lâimmobilité du regard, même en marchant.
Chaque partie a ses exergues.
Silvaine Arabo pour la première. Cinq vers de Triptyque. Pour inscrire le même regard que celui de lâavant-signe, un constat, et le souffle portant au-delà des douleurs.
Ensuite câest Léon Bralda, La voix levée (pour un rêve vers un ailleurs autre), et Paul Verlaine, Sagesse (Lâespoir â¦).
Enfin, dernière partie, André Gide, Nouvelles nourritures (le don⦠lâoffrande).
â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦â¦..
Dans lâincertain du monde
On ouvre les pages et sâoffrent encore des paragraphes brefs, sans majuscules ni points, seulement des virgules pour marquer les espaces intérieurs. Ãcriture du marcheur qui dessine un chemin, un long couloir de mots où je vois lâimage du rouleau de Jack Kerouac (Sur la route), comme si lâhorizon dâun voyageur et celui dâun marcheur pouvaient se figurer de la même manière. Mais jâai en mémoire, aussi, de longs parchemins enroulés, portant des textes sacrés conservés dans des monastères lointains. Lâécriture et sa part sacrée, avec ou sans dieux. Lâabsence des majuscules fait couler doucement un fleuve de phrases, sans angles.
La route de Kerouac câest une errance, sacrée à sa façon. Celle de Michel Diaz câest une déambulation, autant intérieure que de pas, un parcours libre avec, comme bagage, le regard, des questions, et, peut-être, carnet et crayon. Les questions, câest justement ce dont lâauteur dit vouloir créer un nÅud coulant qui fera du lecteur inconnu le passager dâun espace de silence de funambule, le réceptacle, en son corps, dâune cicatrice inversée, mémoire dâune brûlure. Ambition, pour lâécriture, dâun pouvoir qui est très loin de la fadeur mièvre. Une conception de ce que doit être la poésie, le contraire dâune jolie distraction. Conception active de la lecture, faite pour des mains tisonnières capables de chercher la lumière dans les traces du feu qui a brûlé les questions (et les réponses ?) par lâécriture. Lâinconnu est aveugle, mais muet aussi. Car pour lire il faut se défaire de son propre regard et de ses propres mots, accepter lâeffraction de pensée par les yeux et les mots dâun autre.
Et effectivement on voit, avec les yeux du poète, traçant un poème-prose, un paysage de feuilles, terre, ciel, et forêt, yeux grands ouverts qui sont les yeux de lââme. On est dans un crépuscule dâombres et étoiles, on entend les voix obscures devinées.
Ãcriture du temps du confinement, où la réalité extérieure reste cependant violemment présente, un monde toujours en guerre contre les vivants et contre la vie elle-même (â¦) peu dâhorizon à cette absurde conjoncture quâest le fait dâêtre né.
Il cite Samuel Beckett (⦠juste avancer) et Michèle Vaucelle (déglutir le monde). Alors il faut écrire, et ce monde le restituer dans le cri. Injonction intérieure, éthique affirmée. Exigence qui croise celle de Jean-Pierre Siméon (La poésie sauvera le monde), quand il définit la poésie comme un acte de conscience aigu en sâappuyant sur Roberto Juarroz, quâil cite (la poésie⦠accélérateur de conscience). Ces deux mentions conviennent à la démarche de Michel Diaz, à la brûlure du poème vrai. Et de même ce que dit encore Jean-Pierre Siméon sur la poésie force dâobjection empêchant de se détourner du réel tel quâil est et tel que le livre la poésie. Câest cette vérité du langage qui ne ment pas que propose ce livre, tout en cheminant vers ce lieu où la lumière pleut.
Au bout du réel il y a la mort, celle que pense le guetteur crépusculaire qui écrit, et qui parle de nos peurs, et des impulsions de survie quâon dresse comme des écrans.
Ce livre ouvre ses pages, et il renvoie à dâautres chants, tristes ou pas. Au-delà de toute mélancolie il ouvre dâautres livres et entre dans un concerto de poèmes. Pas nâimporte lesquels, ceux qui contiennent le feu du duende (Lorcaâ¦). Ainsi, le lisant, jâentends, comme en surimpression, le Chant des âmes retrouvées, poème unique qui clôt le livre de François Cheng, ses récits de Quand reviennent les âmes errantes.
La mort a eu lieu ; la mort nâest plus, écrit François Cheng.
Et Michel Diaz poursuit sa méditation.
Il est celui qui penche son visage sur la mer (et nous aussi, lisant). Il regarde, écoute, accepte dâentendre les cris de peur, de douleur et de guerre, malgré le bruit des tumultes du monde, bruit qui les recouvre, masque. Sachant le silence il se lave et nous lave des bruits. Tension dâécriture, dire et les cris et le silence (celui qui permet dâatteindre le centre de la parole essentielle).
Jâai remarqué des reprises de mots sur une même page, toujours en tête des paragraphes.
Par exemple, tu et peut-être (p.11), deux fois chaque.
Et, page 17, répétition de celui qui penche son visage sur la mer, deux fois.
Prolongé, page 18, par trois paragraphes commençant par je lâeusse aimé (celui quiâ¦).
Ou ce vent, page 28, deux fois. devant, p.31, trois fois.
la nuit, tu marches dans toi-même, p.39, deux fois.
tu vis, tout le long de deux pages plus un paragaphe,p.42-43. Anaphoreâ¦
Je pourrais donner deux ou trois autres exemples. Et le dernier, offrande, p.86.
Lâeffet est rythmique. Ces mots ou bribes de phrases sont comme le battement dâune basse dans une composition musicale, permettant ensuite comme un envol du souffle.
Je relis la page 18 et câest tout son Ulysse que je retrouve, présence du personnage mythique tel que le voit Michel Diaz dans Le verger abandonné. Solitude libre qui assume tout de ses choix. Ulysse nâest pas nommé ici, pas évoqué. Mais son esprit hante cette page, à cause des étoiles, du corps ployé dans le vide, à cause des vagues, et de cet être, seul parmi les hommes (â¦) intraduisible et seul (â¦) unique survivant dâun impossible dire et dâune impensable pensée
Seul comme beaucoup dans ce temps de confinement.
Et sâil y a le matin, les collines, lâherbe, la terre, lâhorizon est vide dâêtresâ¦
Fracture bouleversante, le texte dédié à sa mère. En pleine période dâépidémie et dâenfermement, elle glisse dans lâoubli sans limite. Et il la voit se noyer au fond dâ
24/05/2022 | Lien permanent | Commentaires (2)
”La mort n’est point notre issue”. Parole de poète, François Cheng
24/04/2019 | Lien permanent | Commentaires (1)
”Méditerranées”, d’Olivier Py. Le court métrage commenté sur plusieurs blogs et sites...
« Le rapport que certains peuvent avoir avec une terre je l'ai avec une mer. » Olivier Py (Entretien, mickrociné) /
« L’ensemble de mon travail au cinéma comme au théâtre est une interrogation sur l’identité de « méditerranéen » Olivier Py (citation en exergue, article de Version originale)
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Sur le site « Vivre à Belcourt » de Luc Demarchi, une vidéo : extrait d’un court métrage d’Olivier Py, « Méditerranées » (le 's' de nos pluralités…) http://belcourtois.com/index.php/2015/05/11/mediterranees...
Du commentaire de Luc Demarchi, je copie la conclusion, beau message qui correspond totalement à ma vision de la Méditerranée : le lien que cette mer crée entre les êtres divers qui vivent sur ses rives, la fraternité à l’horizon. Voici :
« Le réalisateur conclut son film en évoquant la Mer Méditerranée comme une dimension commune à tous ceux qui vivent ou qui ont vécu dans les pays qui la bordent et c’est bien grâce à ces Méditerranées que nous nous rejoignons et que nous nous retrouvons.
Au-delà des conflits passés ou présents, la Mer apparaît comme le lieu sacré du baptême qui nous mène ensemble vers la voie de la paix et de la fraternité.
On ne peut visionner ce document sans faire la relation avec l’œuvre passionnée d’Albert Camus pour ce pays, une œuvre que l’on perçoit en filigrane tout au long du film. »
J'ai regardé. C'est très bref, cet extrait, mais suffisant pour capter la beauté de ces moments simples. Il y a de l'amour dans le regard de ces êtres, et de l'amour dans le double regard porté sur eux : regard de ceux qui filment, se filment (dans la présence de l'instant), et de celui qui reprend ces bribes familiales et les recrée. Une étrange sorte de double énonciation... Mais là ce ne sont pas des personnages qu'un auteur fait vivre devant nous : des personnes réelles dans un passage fugace de leur vie. Bribes de temps méditerranéen... Que la mer y est belle! Image de paix... Et je les vois, attentive, avec, en surimpression, l'accélération des vies, le fracas de la guerre, la rupture avec leur lieu d'ancrage, l'exil, les années qui passent. Et puis simplement, de nouveau, comme des méditerranéens à la source de leur force vitale. D'une rive à l'autre c'est toujours la même Méditerranée, la terre des Noces de Camus (Luc Demarchi a raison de faire le lien). Terre de danseurs, comme le père, jeune, dans son arbre, ou la mère, qu'elle marche ou nage... Magnifique.
Il me faudra voir intégralement ce film, que je découvre avec grand retard...
Ce que j'ai lu de la démarche d'Olivier Py me fait adhérer totalement à cette démarche. Et je cosigne la première citation, mise en exergue de ma note...
Entretien avec Olivier Py sur mickrociné. Passionnant (Et les commentaires sont aussi à lire) : http://on.fb.me/1aIrwq3 [Il insiste sur cette réalité métisse du Méditerranéen, et du Pied-Noir, sur le croisement de l’intime et de l’Histoire, sur la souffrance familiale, le refoulé, évoque les Harkis, les camps. Identité (nous pourrions tous écrire ça) : « Et comme il y a un exil qui est un peu à l'origine de l'histoire familiale, le centre en est la Méditerranée, pas une terre. Le rapport que certains peuvent avoir avec une terre je l'ai avec une mer. C'est pour ça que je suis arabo-italo-espagnol, et c'est plus fondamental pour moi que mon identité française par exemple. » Politique et identité (Le difficile lien… Il est conscient de donner des clés, loin des jugements anachroniques.) : « Le matériau que j’avais me permettait en quelque sorte d’utiliser un voile poétique pour raconter une histoire sans jeter de jugements politiques qui n'ont plus de sens. Je suis très content en tout cas si jamais une partie des Pieds-Noirs retrouvait leur histoire et leur identité à travers ce film. »
« Méditerranées », sur Doc en courts (Palmarès 2012, nominé). : (Où il est dit ce que je percevais en surimpression, mais qui n’est pas encore explicite dans l’extrait présenté) : « Comment montrer l’Histoire ? Comment parler d’un souvenir aussi vibrant que la pellicule Super 8 sur lequel il est inscrit ? » (…) « Ici la guerre est en coulisse, mais qu’est-ce qu’une image de la guerre finalement? » / Lien devenu inactif...
Et sur Mémoblog de Paul Souleyre (blog référencé ici, cf. liste « Pages tissées… ») : « Olivier Py est un méditerranéen » :http://www.memoblog.fr/olivier-py-est-un-mediterraneen/ (Où il évoque la rencontre, idéologique et éthique, avec Luc Demarchi (de « Vivre à Belcourt » et la portée du film d’Olivier Py). Comment la conscience de l’identité méditerranéenne permet (Olivier Py, Luc Demarchi, Paul Souleyre – sur cette page) de vivre en cohérence son identité particulière et d’échapper aux enfermements des appartenances, quand elles sont limitantes (Pieds-Noirs, fils de Pieds-Noirs, ici – mais c’est une vérité qui est valable pour toutes les communautés humaines). Beau portrait du webmestre de Vivre à Belcourt dans cette page, et ample citation.
Autre note, Mémoblog : « Méditerranées, un film d’Olivier Py » http://www.memoblog.fr/film-olivier-py/ (Où Paul Souleyre dit son agacement, à la lecture d’une fiche wikipedia, devant un contenu erroné sur l’enfance d’Olivier Py – comme si le message de l’œuvre n’avait pas été compris : déni, là aussi, dans cette incompréhension, explique-t-il à juste titre).
Ample et bel article, sur Algériades, au cœur de l’identité méditerranéenne comprise à travers l’origine et la référence algérienne : http://www.algeriades.com/olivier-py/article/mediterranees-d-olivier-py (En conclusion, citation d’Olivier Py – entretien : « Nous avons une histoire en commun mais aussi un avenir. Et c’est ce monde de la Méditerranée qui aujourd’hui me semble une vraie, une magnifique utopie". »)
Sur cinemaniac.fr, une lecture qui tient compte de l’essentiel du message, compris profondément. Le film intégral se déroule, comme si nous étions en train de le visionner : « Méditerranées, l’été qui ne reviendra plus » : http://www.cinemaniac.fr/news/mediterranees-l-ete-qui-ne-reviendra-plus
Article de Version originale : (En exergue, une citation d’Olivier Py : « L’ensemble de mon travail au cinéma comme au théâtre est une interrogation sur l’identité de « méditerranéen ».) / Lien devenu inactif...
Le blogueur, sur Vu du balcon, rappelant le Grand Prix obtenu par ce film au Festival de Nice 2012, relie les souvenirs évoqués dans le film aux siens, jeune à Paris, pendant la guerre d’Algérie… Histoire : http://vudubalcon.blogspot.fr/2012/10/mediterranees.html
... Deux pages sur le site d’ARTE...
Le film… http://cinema.arte.tv/fr/article/mediterranees-dolivier-py
Zoom… http://cinema.arte.tv/fr/article/zoom-mediterranees
... Le DVD, page FNAC... http://video.fnac.com/a6211320/Mediterranees-DVD-DVD-Zone-2
.................. Voir aussi, note, Andalousie (illusion?)... http://tramesnomades.hautetfort.com/archive/2013/10/18/an...
................... Andalousie, Méditerranée, voir catégories et TAGS...
24/07/2013 | Lien permanent
Huy Thiêp NGUYEN. Leçon d’écriture, leçon de liberté... ”Refuser de courber l'échine...”
Il en est de la littérature comme de la Voie. Etre, c'est ne pas être; ne pas être, c'est être. "Plein" et "vide" sont des catégories de la pensée (...) si l'on considère la littérature comme une voie parmi tant d'autres, afin de se perfectionner, on ne se sera pas trop trompé... (Un maître parle dans le récit..)
Huy Thiêp NGUYEN, Mon oncle Hoat et autres nouvelles
Il y a des relectures qui résonnent en nous particulièrement. Celle d’un article de L’Express, de 2012, prend un sens différent, en fonction de l’actualité récente, des dissensions idéologiques brutales qui font devoir se positionner dans le combat contre les fanatismes, les intégrismes, et les pensées de haine. (Mais ce ne sont pas vraiment des pensées, celles-ci, juste des fracas émotionnels qui sortant de la part la plus sombre des peurs souterraines construisent des machines mentales de destruction, ou des complicités avec ces machines mentales. Porosité des univers des mots...).
Dans cet article, qui suit l’interdiction faite à Huy Thiêp Nguyen de sortir du Vietnam, pour répondre à une invitation à l’étranger (France...), tout est dit de la situation des écrivains dans ce pays, et tout est dit de la manière dont cet auteur trouve le moyen de traverser les murs qu’on lui oppose. Tout est dit aussi du choix qui reste à ceux qui refusent les oppressions totalitaires, qu’elles soient politiques ou religieuses. Et du choix qui reste à tous, partout : « refuser de courber l’échine ».
Lire ceci : « L'écrivain doit nager à contre-courant et, par conséquent, il s'attire constamment des ennuis, dit Thiêp. Qu'importe qu'on cherche à lui couper les ailes, il doit refuser de courber l'échine. Car il aime la liberté, et c'est un réel handicap. Cherchons cette liberté dans la douleur, au sein même de la pauvreté et des coups bas politiques. » (Et lire ou relire tout cet article, précieux, et intégralement en ligne).
L’Express, 21/06/2012, par André Clavel : http://www.lexpress.fr/culture/livre/crimes-amour-et-chatiment_1128950.html
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Ses livres, référencés sur le site « vietnam.aujourdhui » : http://vietnam.aujourdhui.free.fr/livres/nguyenht.htm
Librairie internationale (livre mentionné en exergue et autres publications de l’auteur) : http://bit.ly/1HIGoHe
Fiche wikipedia : http://bit.ly/1yIZNWO
19/04/2015 | Lien permanent
2. Synchronicités ? Détour par l‘astrophysique et la cosmologie (pensée des multivers, voyage dans l’étrange…).
Multivers ? Vers l'écriture des MultiRêves (Jean-Philippe Cazier, voir ci-dessous).
Je disais donc (note précédente) que, pour comprendre plus facilement ces notions si complexes, si difficiles à envisager avec nos codes de pensée, il fallait se tourner vers des informations du côté de la science (recherches qui, d’ailleurs, font retomber sur philosophie et poésie…).
Et, pour commencer, le double DVD d’ARTE, coffret. Documentaire en plusieurs partes. Une extraordinaire réussite, et c’est très beau… (S’être intéressé d’abord à la synchronicité entraîne plus loin… )
DVD 1 : Espace, illusion du temps, saut quantique, univers et multivers.
DVD 2 : Le rêve d’Einstein, la théorie des cordes, la 11ème dimension.
"La magie du cosmos et l’univers élégant"... https://boutique.arte.tv/detail/la_magie_du_cosmos_l_univ...
Multivers ? Un billet sur un article posthume de Stephen Hawking. RFI science... http://www.rfi.fr/science/20180505-stephen-hawking-theori...
VIDÉO. CONFÉRENCE. Par l’astrophysicien et cosmologiste Aurélien Barrau, sur l’idée des multivers. A l’Institut de Physique Théorique du CEA. Avec un détour important par la philosophie, au début... https://www.youtube.com/watch?v=sKsiJgYUG50
VIDÉO. CONFÉRENCE (TEDx) en 10 minutes. Passionnante et claire. "Univers parallèles et révolution quantique". Par le physicien Christophe Galfard, qui fut doctorant avec Stephen Hawking… https://www.youtube.com/watch?v=J8PEymuDf6A
...............
Expérience de pensée, expérience de création. Un LIVRE... "Théorie des MultiRêves". Écrire le "vertige de faire face à l’impossible, l’impensable, l’infigurable". Voilà ce que fut l’enjeu, pour l’écrivain Jean-Philippe Cazier…
A partir d'une "matrice scientifique" fournie par Aurélien Barrau, auteur, notamment, d’un livre sur les univers multiples, dits multivers (hypothèse scientifique troublant notre conception du temps et de l’espace…), écrire (mais pas pour un compte-rendu de lecture, pour tout à fait autre chose : une métamorphose de pensée - et donc d'écriture). On est entre science et projection onirique quand on saisit cette possible réalité… Le résultat, ce livre, "Théorie des MultiRêves", a été publié par Dis Voir éds., coll. "Contes illustrés pour adultes". Ce que cette proposition a fait naître est une oeuvre très poétique.
A lire, la présentation sur Diacritik, excellente recension… Par Lucien Raphmaj, 2017... https://diacritik.com/2017/09/19/jean-philippe-cazier-the...
A lire aussi, sur Diacritik, un entretien avec Jean-Philippe Cazier au sujet de cette expérience de création. "Penser c’est inclure l’étranger en soi" (L'étranger, c’est à la fois le sujet du livre, et le triangle des créateurs : le scientifique, l’écrivain, l’illustrateur. Mystère de la présence de ces univers multiples, écho des pensées autres, intégration de l’étrange en soi)... https://diacritik.com/2017/12/21/penser-cest-inclure-letr...
Cette mise en situation d’une épreuve d’étrangeté, c’est ce que nous devons faire aussi.
Que ce soit pour accueillir la possibilité de l’hypothèse des multivers, des univers parallèles, même. Ou que ce soit pour s’interroger au sujet des synchronités qui ont été le fil à dérouler de cette entrée dans "l’impensable"..
De Jean-Pierre Luminet, astrophysicien et poète, lire
ceci : "La poésie dit beaucoup avec peu de mots. Les mathématiques
aussi". Et ceci : "Le but de l’astrophysique est d’explorer
le cosmos. Or le philosophe Gaston Bachelard évoque justement
la double profondeur du cosmos et de l’âme humaine, elle-même
thème de prédilection de la poésie". Et "Lire de la poésie,
pratiquer l’art en général, permet une fertilisation
souterraine de l’esprit."
Entretien.. - Le Temps.ch..
https://www.letemps.ch/sciences/jeanpierre-luminet-poesie...
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NOTE QUI SUIT : "Synchronicité, suite… LIENS (articles, textes, dossiers, recherches universitaires, essais, et sites dédiés).
Synchronicité moins impensable maintenant, peut-être, après ces lectures...
Car pour envisager que des synchronicités (que nous pouvons constater dans nos vies), ne sont pas seulement le pur produit de hasards sans signification (et totalement indépendants de notre pensée, de notre conscience, de notre énergie), pour commencer à oser penser cela, il faut aussi pouvoir concevoir que des informations circulent entre nous et le réel d’une manière qui n’est pas celle que notre conception limitée de l’univers ne peut laisser imaginer… Conscience, autre conscience, autre réalité, et autres possibles…
MC San Juan
01/04/2019 | Lien permanent
”Comme des marbres issus d'une carrière”... ”La Porte”, recueil de Pierre Perrin-Chassagne
02/07/2019 | Lien permanent
Gilets jaunes... Des ANALYSES, des points de vue, des questions.
« La révolte n’est pas le ressentiment ». ANALYSE de Brigitte Stora, auteur, pour le CCLJ belge (Juifs laïques). Elle décrypte les émotions en jeu, les concepts utilisés (qui traduisent quelle orientation ?), les revendications exprimées (qui signent quelle appartenance idéologique, quelle identité politique ?). Et elle prend en compte les « marges » qui, si on les néglige, empêchent de penser idéologiquement et politiquement ce qui se produit. Comment ne pas voir les dérapages antisémites, racistes, homophobes (tags, slogans, banderoles, violences et mises en question, rejets). Ceci sans jugement globalisant. Mais un courant collectif entraîne des individus qui sont pris dans la force dominante et suivent des « leaders » dont ils ne repèrent pas les composantes réelles, les itinéraires passés et les liens, les influences, les réseaux...
Dans ce texte elle affirme d’abord une volonté de reconnaître les légitimités et le refus de réduire un mouvement à ses marges : « On ne pourra jamais réduire la colère de milliers de personnes à un mouvement ou à un mot. La complexité, les contradictions, la richesse des êtres humains est toujours plus grande qu’une définition politique. La plupart des revendications des Gilets Jaunes sont légitimes et on ne peut se détourner d’une cause en raison de ses écarts. » Mais elle refuse aussi de croire que le début avait une « pureté » idéale : les dérives étaient là tout au début. Présents, la haine, le populisme, le complotisme. A l’injustice de la violence sociale la réaction n’est pas une critique des excès du capitalisme mais, dit-elle, une « réplique » utilisant la violence en miroir sans perspectives sociales, économiques, politiques. Rejet des institutions et des partis, rejet des élites (pas celles des grands profits, pas un capitalisme cynique, non, mais les intellectuels et les politiques élus).
Les « valeurs d’émancipation » ont été moquées (« Droits de l’hommisme », « bons sentiments » et « bien-pensance ». « Pourtant la colère populaire sans les valeurs d’émancipation, sans les organisations qui les ont portées, n’est hélas le plus souvent que la possibilité du fascisme. »
Elle cite Albert Camus, « L’homme révolté », avec une phrase essentielle (alors qu’elle a été citée ailleurs à contretemps, confondant Histoire et actualité). Cette phrase, au contraire, parle de processus généraux, répétitifs, réalités valables à toutes les périodes de l’Histoire : « Quand le ressentiment supplante la révolte », écrivait Albert Camus dans L'Homme révolté, « alors l’on voit se lever partout la cohorte ricanante de ces petits rebelles, graines d'esclaves, qui finissent par s'offrir, aujourd'hui, sur tous les marchés d'Europe, à n'importe quelle servitude ».’
En conclusion elle note que « La haine ne signe aucune authenticité autre que celle du fascisme. » Après avoir insisté sur le fait que le plus grand mépris des manifestants Gilets jaunes est celui qui ne dénonce pas les dérives (comme si cela était part d’eux, de cette partie du peuple qui se veut (à tort) tout le peuple. Or dénoncer ce qui devait l’être (dont le cadre de l’ensemble, la dominante complotiste qui va avec les restes des failles), cela a toujours été, depuis des semaines, pris comme mépris... http://www.cclj.be/node/12270
Un questionnement, venu de Belgique; Le Soir… https://plus.lesoir.be/199128/article/2019-01-07/gilets-j...
« L’urgence démocratique commence par le bas… »,
The conversation… https://theconversation.com/gilets-jaunes-lurgence-democr...
« L’antifascisme n’est pas une option »,
Le Monde… https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/15/sarah-kil...
DÉNONCER CE QUI DOIT L’ÊTRE… Cela s’est fait à partir d’enquêtes, investigations, observations, analyses. Et la simple attention à ce qu’on pouvait lire sur des pages ou entendre lors d’entretiens, de prises de parole (y compris à la télévision), cela suffisait pour faire des constats inquiétants.
Parcourir cette page pour prendre la mesure de l’influence des thèses complotistes chez les Gilets jaunes, Conspiracy Watch… https://www.conspiracywatch.info/etienne-chouard-gilets-j...
L’univers idéologique des Gilets jaunes…
Plongée au cœur des PAGES Facebook des GJ, Le Monde… Une France qui se sent humiliée, pas vraiment antisémite, raciste ou homophobe, mais dans la défiance des élites : « sentiment de persécution » et tendance au complotisme… https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/01/30/p...
Autre plongée dans l’univers des COMPTES Facebook des Gilets jaunes, Le Nouvel Observateur (une enquête faite par un journaliste pour la Fondation Jean Jaurès… Le constat est : « édifiant »... https://www.nouvelobs.com/politique/20190111.OBS8351/plon...
La démarche de ce décryptage, sur le site de la Fondation Jean Jaurès… https://jean-jaures.org/nos-productions/en-immersion-nume...
De nombreuses questions se posent. Dont celle des ingérences étrangères supposées (sans que la genèse du mouvement soit attribuée à des influences externes : il a sa logique et sa dynamique, avec ses causes et revendications). Mais des faits interrogent. Dont le constat sur l'activité intense de trolls russes et l'influence de sites comme Russia Today, RT, ou Sputnik. Lire l'investigation d'une journaliste finlandaise sur l'usine à trolls de Moscou... https://m.usbeketrica.com/article/les-ambitions-des-troll...
D'autre part Bannon s'installe à Bruxelles où il a un bureau et se déplace beaucoup en Europe pour soutenir les extrêmes droites. Avec M. Le Pen dans son sillage. Autre direction, même extrémisme... (Et les divers nationalistes européens soutiennent les GJ, s'affirmant en phase avec ce mouvement)... https://www.huffingtonpost.fr/2018/12/08/paris-brule-se-r...
Qu'y a -t-til derrière le RIC ? Des revendications de partis extrémistes et le militantisme ancien d'Étienne Chouard, apprécié par de nombreux Gilets jaunes. Or penser un référendum cadré pour respecter les institutions, ou rêver d'un outil pour destituer le gouvernement élu ce n'est pas la même chose. Et c'est là qu'il y a fracture entre des GJ démocrates - qui veulent améliorer la participation et rendre cette démocratie plus juste, notamment fiscalement - et des factieux (car comment le dire autrement ?) qui ne veulent pas de réformes, pas de débat, pas de démocratie représentative. Pour situer ces fractures, voir qui est ce personnage adulé par les plus réfractaires à tout dialogue, Chouard. Lire ceci... Conspiracy watch... https://www.conspiracywatch.info/pour-francois-ruffin-eti... Et lire cela, Huffingtonpost... https://www.huffingtonpost.fr/2018/12/19/etienne-chouard-...
Autre question, la violence. Celle des casseurs (venus pour cela, ultras), mais aussi celle de certains Gilets jaunes qui légitiment le fait d'incendier, détruire, agresser, bloquer. Et la violence verbale. Mots de haine (racisme, antisémitisme, homophobie, haine des élites, menaces). Pas une majorité, mais suffisamment pour faire nombre et inquiéter. Autre forme de violence, la durée qui coûte cher à tous, économiquement. Et la violence des armes utilisées pour maintenir l'ordre, non létales mais dangereuses (A Bauer lui-même a exprimé un désaccord). Dans un contexte où la police est exténuée par des semaines très dures et face à des gens qui viennent affronter (pas tous, non, mais trop). Un médecin a lancé une demande de moratoire. C'est à discuter... Il faut des solutions de remplacement.
Enfin, reste la réflexion que chacun doit avoir sur les perspectives. Un débat est proposé,et commencé . Peut-être même une consultation (...?). Si la société civile se saisit des outils qu'elle a, et des outils qui sont proposés là pour participer, beaucoup de pistes peuvent être ouvertes... (Pour plus de justice sociale - même si la France distribue plus que d'autres, des inégalités évidentes demeurent, précarité et travail insuffisamment reconnu, alors que des PDG ont des traitements indécents bien au-delà de ce qu'il faut pour vivre dans un luxe acceptable. Pour une fiscalité revue. Pour la laïcité respectée et les fondamentalismes combattus. Sans oublier les problèmes du logement, et le sujet de l'écologie...) MAIS en espérant que ce soit autrement que dans la posture de la revendication sans implication, dans l'attente passive de solutions venues "d'en haut". On peut inventer le "possible"... Cela passe par soi-même, pour chacun.
03/02/2019 | Lien permanent
1962-2012. GUERRE D’ALGERIE, Histoire, mémoires, présent, et futur à construire. DOSSIER... et LIENS
La presse a marqué l’anniversaire de mars (fin officielle de la guerre d’Algérie, mais pas des drames et des morts). L’indépendance, c’est après, et l’exode, c’est plus tard, l’été. J’ai lu, bien sûr, parfois avec une impression d’overdose (apprendre encore, apprendre, comprendre ? Ou réactiver des émotions ?). Parfois avec le sentiment, au contraire, d’un manque (tant de choses non dites, mal expliquées, refoulées, occultées).
J’ai mis du temps avant d’acheter le hors série du Monde, « Guerre d’Algérie, Mémoires parallèles ». D’abord à cause du titre. Parallèles, ces mémoires, vraiment ? Parallèles seulement ? Parallèles, lesquelles ? Algérie et France ? Mais quelle Algérie et quelle France ? L’Algérie du peuple ou l’Algérie du pouvoir ? La France métropolitaine ou celle des mémoires des natifs d’Algérie exilés ? Mémoires des historiens, des acteurs, ou des témoins ? Pays de 1962, ou pays actuels, en 2012 ? Oui, le numéro présente des mémoires parallèles, globalement. Mais les mémoires croisées de ceux qui veulent entrer dans la mémoire de l’autre, tout en assumant la leur, où sont-elles ? Je n’ai pas retrouvé tout à fait dans ce sommaire la force des problématiques posées avec tant d’humanisme lors de la conférence sur mémoire et histoire au Forum des images (voir ci-dessous, programme et bilan, deux notes). Mohammed Harbi, cependant, évoque la possibilité de mémoires partagées (pas encore communes, mais partagées).
Autre chose m’avait gênée, quand j’avais entrouvert le journal pour regarder rapidement l’avant-propos. Dès le début, une citation de Sartre, lui qui appelait au meurtre terroriste dans sa préface au livre de Frantz Fanon (ce qui avait scandalisé Jean Daniel). Sartre parlant de névrose au sujet de la France… on a les références qu’on peut… Mais le reste du texte de Michel Lefebvre pose d’une manière correcte la question des mémoires qui ne se rencontrent pas, dans cet avant-propos qui tient lieu d’éditorial…
J’ai donc lu. En commençant par la fin : la bibliographie. Je la trouve très insuffisante, il aurait fallu deux pages. Ce qui manque semble correspondre à des choix, une vision partielle ou partiale : d’autres titres auraient pu rendre compte d’une réalité plus complexe. Benjamin Stora est omniprésent, et d’autres à peine évoqués, ou pas du tout (Cf. letexte de Roger Vétillard, mentionné plus bas, à propos de La Déchirure : même questionnement). Peu d’Algériens, peu de Pieds-Noirs. Pas de sites, la Toile est négligée : pourtant bien des adresses auraient pu être données, bien des pages indiquées (ne serait-ce que l’INA, mais pas seulement…). Absence de l’apport de la littérature (une bibliographie sans Mouloud Feraoun, Kateb Yacine, Albert Camus, Jean Pélégri, René-Jean Clot, et tant d’autres). Pas de filmographie…
J’ai apprécié la publication du texte d’Albert Camus, sa « Trêve pour les civils », appel de 1956. J’ai lu les articles sur la torture, les viols (et la page, sur le poignard de Le Pen : http://www.lemonde.fr/afrique/article/2012/03/16/le-grand-blond-au-poignard_1669337_3212.html ), les pages sur Jacques Chevallier, éclairantes aussi sur l’OAS (et je note qu’un livre sur lui va paraître en mai, «J. Chevallier, l’homme qui voulait empêcher la guerre d’Algérie », de José-Alain Fralon). L’entretien avec Mohammed Harbi est riche d’informations, et il y montre un esprit qui rejette le sectarisme, les visions figées : « La colonisation est un fait historique et social. Elle est ambivalente dans ses manifestations et c’est une erreur de dire qu’elle a été globalement positive ou globalement négative. » (Là il renvoie dos à dos les ultras de tous bords, extrémistes de droite ou de gauche). J’ai été intéressée par les témoignages, et notamment l’article sur Ali Aissaoui, fils d'ancien harki. Et j’ai aimé retrouver Jacques Ferrandez et ses BD. Mais je trouve qu’il manque des éclairages importants. Peu ou pas d’antériorité historique (un peu comme El Watan le reproche à La Déchirure : voir ci-dessous). Pas de présence collective des populations qui vivaient en Algérie, la complexité du sentiment d’appartenance à cette terre, la complexité des liens. Absence des « petits », des humbles et des pauvres. Rien ou presque sur la réalité coloniale, avec ses aspects divers – faits sociaux et culturels, injustices et apports. Et pas de questionnement au sujet du terrorisme (comme c’est fait à juste titre pour la torture). Les attentats contre les civils ont juste une place dans la chronologie…
Dans son texte sur les mémoires sous tension, B. Stora évacue d’une phrase la question du mur des victimes du FLN (Disparus), comme si c’était un facteur aggravant des tensions actuelles, comme si ces victimes n’avaient pas droit au respect, et leurs familles à un lieu de recueillement… (Des controverses les avaient d’ailleurs assimilés à des activistes, ce qui est faux. Laissons les activistes avec les activistes et ne mélangeons pas tout…).
Un passage d'un texte (historienne, Sylvie Thénault) m'a interpellée. Idées reçues sur la guerre. Notamment une. Le fait qu'on ait confondu le rejet du FLN (pour ses méthodes, la terreur) et le rejet de l'indépendance. C'est une idée fausse qui perdure, oui. Mais de la même manière on confond l’anticolonialisme avec des pensées qu’on lui associe et qui n’ont pas à l’être. L'Histoire ne pouvait amener qu'à la fin de toutes les colonisations, quelle que soit leur forme (mais des colonisations continuent à être justifiées, cf. Tibet/Chine, pour ne donner qu’un exemple). Cependant refuser par principe le fait de coloniser ne force pas à penser le passé comme s’il se déroulait en 2012 : la conscience a changé dans les démocraties. Ces prises de conscience doivent être assumées par les pays, donc la France métropolitaine, dont les pouvoirs ont décidé de coloniser. Dénoncer le fait colonial ne doit pas devenir une condamnation des populations immigrées venues vivre et naître dans telle ou telle colonie. C’est pourtant ce qui se fait en France : les Pieds-Noirs sont utilisés comme alibi pour un déni historique (qui donc a colonisé si ce n’est la métropole des Français ? sûrement pas les immigrés espagnols ou les communards expulsés de force, ni les Alsaciens réfugiés, ni les Juifs berbères là depuis toujours… !). Jean Pélégri le disait bien dans son livre « Ma mère l’Algérie », on jettera l’opprobre sur les Pieds-Noirs qu’on accusera de tous les maux : habitude des métropoles, notait-il… Et penser la colonisation ne doit pas devenir (comme c’est souvent le cas) une sorte de catéchisme rigide posant des cadres où toute complexité des faits ne peut qu’échapper…
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INFORMATIONS :
1830-1940 : "Un siècle de passions algériennes, Une histoire de l'Algérie coloniale", somme de Pierre Darmon : http://www.lepoint.fr/culture/2009-11-29/l-algerie-des-pa...
Guerre d’Algérie, fiche wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_d'Alg%C3%A9rie
Chronologie, sur linternaute.com (quelques repères) : http://www.linternaute.com/histoire/categorie/49/a/1/1/histoire_de_la_guerre_d_algerie.shtml
Livre. « Que sais-je ?». La guerre d’Algérie, par Guy Pervillé : http://guy.perville.free.fr/spip/article.php3?id_article=107
Le camp de LODI. « Le camp des oubliés », Nouvel Observateur, 2010 (Centaines de Pieds-Noirs indépendantistes arrêtés) : http://tempsreel.nouvelobs.com/culture/20100318.OBS0307/lodi-le-camp-des-oublies.html
La Déchirure, documentaire France 2, de Benjamin Stora et Gabriel Le Bomin, avec la voix de Kad Merad. Lire l’article du Parisien (Kad Merad raconte la guerre d’Algérie) : http://www.leparisien.fr/tv/kad-merad-raconte-la-guerre-d-algerie-11-03-2012-1899832.php La qualité de ce documentaire n’est en général pas mise en doute, le sérieux de l’entreprise, mais il y a des controverses entre historiens français autour de ce documentaire. Cf. Benjamin Stora et Daniel Lefeuvre : http://etudescoloniales.canalblog.com/archives/2012/04/10/23971171.html Ou Roger Vétillard, qui met en question l’omniprésence de Benjamin Stora, et exprime quelques réserves concernant le film... La réception en Algérie est assez critique (El Watan pointe la limitation du film à un axe qui occulte l’antériorité historique).
Dossier "Guerre d'Algérie'", sur Herodote https://www.herodote.net/Guerre_d_Algerie-synthese-319.php
« Fin de la guerre d’Algérie : le massacre d’Oran reste dans les mémoires » https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_du_5_juillet_1962
Enlèvements, Disparus. "Les Pieds-Noirs ont-ils été abandonnés par la France?", Le Point, 25-01-12 : http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/francois-guil...
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La tragédie des HARKIS...
Documents sur le site de l'association AJIR pour les harkis : http://www.harkis.com et sur le blog d'Harkis et droits de l’homme : http://ahdh.blog.lemonde.fr
Harkis. VIdéo INA : http://www.ina.fr/video/CAA8200509301/les-harkis.fr.html
L'EXIL. Texte de Serge Molines, sur Algérie-Pyrénées : http://www.algeriepyrenees.com/article-algerie-mon-amour-...
Comment l'idéologie (des uns et des autres) déforme la réalité historique, jusqu'à nier des faits (massacres) ou à changer la réalité des causes (cf. Pierre Daum et son analyse idéologique haineuse de l'exode des Pieds-Noirs). Lire cette note au sujet des massacres de Harkis : Apprentis historiens (et manipulateurs), un article intéressant sur Harkis et Droits de l’homme : http://ahdh.blog.lemonde.fr/2016/04/02/les-harkis-la-2-cv...
Sur les PIEDS-NOIRS...
Les Pieds-Noirs, 50 ans après, Le Figaro : http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2012/01/27/01016-...
Pied-Noir (wiktionary) : https://fr.wiktionary.org/wiki/pied-noir
Note historique, dossier Migrations, Pieds-Noirs (7 pages) : http://migrations.besancon.fr/quitter-son-pays/rapatries/...
Fiche wikipedia, Pieds-Noirs : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pieds-noirs
<12/04/2012 | Lien permanent
Leo Zelada, Transpoétique. Anthologie poétique et inédits, éds Unicité
esprit de la nuit
esprit de la nuit
conduis-moi sur le chemin du feu
qui dévore et purifie tout
Machu Picchu, Transpoétique, p.20
Maître, comment atteindre la sagesse ?
Brûle le papier, la plume et le bâton
Koan de l’illumination, Transpoétique, p.34
Le monde regorge de signes pour qui veut voir. Mais c’est un brouillard si épais ce soir…
Dark Poetry, Transpoétique, p.59
Leo Zelada, Transpoétique. Anthologie poétique et inédits, éds. Unicité, 2022. Trad. Laura Magro Peralta et Maggy de Coster
Transpoétique, de Leo Zelada . Intéressant, ce titre de l’anthologie (qui reprend celui d’un des recueils de l’auteur), car suggérant étymologiquement une traversée de l’œuvre au-delà du poétique, et vers le poétique authentique, il dit aussi autre chose de la démarche du poète, dont l’écriture est une incessante traversée, en aller-retour intérieur, d’un continent à l’autre. Parcours intime de l’identité ancrée dans une mémoire et nostalgique d’une langue effacée, d’une culture trahie.
Car Péruvien aux ancêtres amérindiens (dynastie Inca) il est un poète du double exil. Au Pérou la colonisation espagnole a fait perdre bien des traces et voué les descendants des premiers habitants de ces terres à un douloureux renoncement. Et c’est pour lui une blessure que savoir écrire dans la langue du colonisateur. Même s’il la fait sienne et peut-être la travaille pour y faire entrer une autre structure et la mémoire d’autres mots. Le lisant je pense à ce que disait Kateb Yacine du français, butin de guerre. Même sans victoire la langue peut être un butin. Le deuxième exil est l’éloignement de la terre native vers l’Espagne. Le titre est à comprendre aussi en tenant compte du poème titré Bref Énoncé pour une Théorie Unifiée du Poème. La traversée est ici intérieure à l’écriture du poème, où il est lui et un autre (contraire), en des univers parallèles, dans la tension entre univers de mots et absence de mots. Transpoétique, synonyme d’exigence, car écrit-il dans le poème Dark Poetry, Je n’aime pas la plupart de la poésie actuelle. Tant de poètes sur internet (…) et si peu d’authenticité dans leurs poèmes. Je partage cet avis, l’ayant déjà exprimé ici au moins deux ou trois fois. Le facile partage du clavier n’encourage pas la limitation, le silence et le retrait. C’est aussi vrai pour des publications papier (et l’auto-édition aggrave cela).
La blessure linguistique et l’errance voulue dans la mémoire correspondent à ce qu’un autre livre a traduit magnifiquement, et qui pourrait intéresser Leo Zelada. Nezahualcoyotl, livre de Claude Beausoleil (voir ma note sur les publications de l’atelier Vincent Rougier, coll. Ficelle). L’auteur, Canadien du Québec, passionné par la poésie mexicaine, a rendu hommage, en poèmes, à ce prince et poète du XVème siècle. Nezahualcoyotl est un personnage réel, encore révéré au Mexique. Je l’associe à Pachacamac auquel se réfère Leo Zelada, même si c’est un dieu fondateur, fils non d’humains mais de la lune et du soleil (ce qui explique leur présence presque sacrée dans plusieurs poèmes de cette anthologie). Autre dieu créateur, Wiracocha (dieu de la foudre et des tempêtes), que l’auteur fait se promener symboliquement dans Madrid, compagnie d’exil pour interroger l’Inca Garcilaso (cet écrivain péruvien, de mère inca, écrivit l’histoire des Incas, et mourut en exil en Espagne, Cordoue, en 1616). Qu’a fait l’Inca Garcilaso pour guérir de l’agonie de son exil ?. Je note un autre sens, particulier. Wiracocha (ou Viracocha) est aussi le nom d’une divinité indienne (Inde) et d’un chakra (un centre énergétique dit source du sacré), étonnant hasard (ou lointain voyage de mots venant du sanscrit)...
Ce n’est pas étonnant que Leo Zelada trouve en Paris un lieu transférentiel, et y vive de plus en plus. Une autre langue, un autre espace, une affinité avec cette singulière lumière parisienne (ceux qui aiment cette ville y reconnaîtront leur ressenti). Ainsi il peut faire encore une autre traversée, opérer un détachement, et découvrir en lui un écho, un processus libérateur.
Avant de lire ce livre, lire la biographie (p.77). On voit déjà que l’écrivain qu’il est ne pourra être classé dans une catégorie d’auteurs (c’est d’ailleurs ce qu’il fait comprendre dans Dark Poetry). Mais, emprunt au titre d’un de ses livres, il serait un dernier nomade, libre de ses voyages, de ses transgressions littéraires, de ses contradictions, refusant les chemins balisés. C’est un libertaire écorché vif, tendu entre ombre et lumière, comme Jim Morrison auquel il consacre un poème (lui dont je sais que, depuis un événement d’enfance, il était très attiré par la culture amérindienne et le chamanisme - mais il n’a pas trouvé les repères lumineux qu’on déchiffre dans les textes de l’auteur de Transpoétique).
Il y a aussi en Leo Zelada de l’Asie. Le nom de son blog, Journal du Dragon, évoque autant le mythique dragon porteur de feu, qui peut figurer le feu du soleil inca, que le dragon chinois, représentation de la puissance. (Et justement ma recension précédente, ici, le met en bon voisinage – le hasard sait faire signe). L’Asie… Référence présente depuis longtemps, comme le montrent les cinq titres extraits du recueil Le chemin du dragon (La Senda del Dragón, Madrid 2008). Chine et Japon, Tao et Zen. Du poème d’hommage à l’immortel exilé Li Po (Li-Tai-Po), au superbe Koan de l’illumination.
Son écriture crée une tension entre la poésie de sombres bardes nocturnes, qui exprimeraient leur révolte et leurs contradictions, et la lumineuse et nue expression des poètes grands sages à la mesure d’un Li Po. Il y rencontre sa part mystique (même si le terme n’est peut-être pas tout à fait approprié, ou mériterait d’autres développements). Et le poème du Koan de l’illumination contient cinq questions que les maîtres zen ne renieraient pas et qui révèlent une profondeur de conscience qui éclaire toutes les autres pages…
Itinéraire… je hais la nuit écrivait-il dans Dark Poetry (poème d'un recueil de 2016).
Et, plus loin, dans un poème inédit (un texte 'parisien'…)
J’avais peur de la nuit
et maintenant moi je suis le bohème,
moi je suis la nuit.
Mais là, le nocturne n’est pas le sombre.
L a solitude est très fréquemment mentionnée. Est-ce l’exil ou une réalité intérieure dépassant les circonstances ?
derrière l’océan
un homme seul attend
L’espace de l’océan est ce qui déchire le reste des racines déjà arrachées.
Qu’est cette solitude indéfectible évoquée avec le souvenir désert de Sechura et les sables de Topaze ? S’impose-t-elle douloureusement ou n’est-elle que le résultat d’une irréductible volonté intime d’échapper aux masques de la communication artificielle, une nécessité éthique inséparable de la démarche du poète ?
Car… ne pas se fier aux apparences.
Enfin, un homme
Faisant du vélo dans un paysage désolé n’est pas seulement l’Image
d’un homme marchant dans un paysage désolé.
Mais si La solitude n’est pas notre destin, elle est froide comme l’hiver de l’Europe, ses silences, ses métaphores brisées. Et elle rend nostalgique de douceurs d’enfance.
Exercice de lucidité, questionnement existentiel, l’auteur interroge. Même s’il relie la solitude à l’exil et à la nostalgie, il déplace le questionnement.
La solitude est une plage déserte que l’on fabule pour ne pas accepter notre vide.
Certes l’exilé vit la séparation par la cassure identitaire. Mais il échappe à cela quand il cherche ailleurs des références et une pensée qui écartent ces amertumes, et c’est sa part d’Asie. Évoquant Pachacamac il posait une question philosophique et spirituelle à la fois.
où est l’abîme sacré
de l’éternel et du perdu ?
Cependant l’exil revenait encore, sujet de tout un poème,
Wiracocha se promène au pays des dieux blancs
Conscience d’une lignée presque éteinte, d’être l’un des derniers vestiges d’une grande splendeur, d’un complexe rapport à la langue, pour faire entrer dans les poèmes la langue de mon sang, et d’être un étranger sur les terres de Castille.
Ce travail sur la langue, venu des profondeurs, c’est Sisyphe roulant infiniment sa pierre. (Mais, dit Albert Camus, il faut imaginer Sisyphe heureux). Heureux, de vaincre l’angoisse, et parce qu’il y a une réponse à la question Que faire quand l’abîme vous attend lorsque vous fermez les yeux (…) ?Même si on se demande si on est
Le héros absurde qui refuse inutilement d’abolir la mémoire.
La réponse c’est Écrire de la poésie. Écrire de la poésie. Même si les mots sont vides de sens.
Oui, Jean-Pierre Siméon l’affirme, La poésie sauvera le monde… Et sauve celui qui écrit, Leo Zelada en est conscient pour lui, car elle a pouvoir de rendre du sens aux mots.
Relisant encore j’ai noté la répétition du mot suicide. Celui du dieu-père ancestral Pachacamac, jeté à la frontière intolérable du suicide. Celui de Jim Morrison, annoncé (même si dans les faits on pourrait plutôt parler de conduite suicidaire, une destruction de soi). Celui, proche, Suicide éternel d’une vie perçue comme mourante.
Crépuscule désespéré sur le point de s’éteindre.
Mais aussi cette frontière reconnue par le regard de junkies dans le poème L’Étreinte de la Nuit, comme une fuite métaphorique hors de soi.
Et simplement conscience du chemin inéluctable qui mène, lui et tous,
à l’abolition totale de mon corps
à la fin de mes morts
ou / ma libération définitive.
Il y a ce jeu avec la mort d’une course ivre sur l’autoroute, cherchant désespérément la nuit (Dark Poetry). Mais dans le même poème s’exprime l’idée que la fin de l’attente rend la chance possible. Dans Le mythe de Sisyphe c’est aussi l’aboutissement de la réflexion proposée par Camus contre la tentation du suicide. Ne pas espérer annule le désespoir.
Il y a donc de la tristesse dans bien des pages. Mais pas d’apitoiement su soi. Cela, il y voit un piège. Et la tristesse est aussi celle des autres (un groupe vu dans un bar, dont l’agitation est un masque) et celle pour les autres, qui rejoint la révolte sociale.
Rôde aussi l’ombre de la folie et le voisinage de la souffrance d’Artaud, la peur que le délire anéantisse. C’est un risque, une menace tentatrice, une crainte, une proximité propre à qui frôle des espaces nocturnes. Mais il sait écarter ces ombres. Seulement la poésie me sauvera du délire. Et, même poème, se référant à Bashô il s’imprègne de l’harmonie que le silence permet de percevoir.
Dans ces pages il peut évoquer l’esprit de la nuit, le prier, comme il peut chanter un Hymne au soleil qui dit la conscience de l’appartenance à la terre et au cosmos. Fidèle à sa culture originelle il sait retrouver le lien avec le vivant, et les animaux, se penser homme loup solitaire ou oiseau nocturne ou faucon brun, être accompagné par un corbeau, ou regarder une fourmi sur son livre de Pessoa…
Dans le balancement entre obscurité et lumière la réponse est dans le rapport à l’immense. Et dans la force de la poésie.
En cet instant comme de l’eau,
toutes les constellations de l’univers tiennent dans ma main.
Et ceci…
Jusqu’à ce que nous devenions la poésie même, la poussière interstellaire.
Car la poésie a un pouvoir...