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Antisémitisme : contre la haine, la connaissance...

racisme,antisémitisme,judaïsme,delphine horvilleur,pinchas goldschmidt,elie wiesel,akadem,c.c.l.j.,centre laïc juif,dire l'antisémitisme avec des mots fermes,ignorer l'antisémitisme peut tuerL’ANTISÉMITISME. En 2018 les actes antisémites ont augmenté de 74%. En février 2019, Le Monde, en première page, listait brièvement les différentes sortes d’antisémitisme qui se rejoignent (mais la première page en oubliait un). Donc (je liste à ma manière)… 
. Celui, ancien et toujours présent, de l’extrême droite, avec ses fantasmes identitaires et ses haines constitutives d’une idéologie entre fascisme et néo-nazisme (ce que montrent les fréquentations internationales des responsables du RN, par exemple, réseaux de l’Ultra-Right américaine, populistes européens souverainistes à tendance identitaire, mouvances pro-Kremlin, et flirt avec des négationnistes qui ne sont exclus que lorsque des photos dérangeantes sortent dans les médias ou les réseaux sociaux). Antisémitisme que certains milieux catholiques, encore imprégnés de vieilleries idéologiques,  partagent (derrière des rideaux de fumée pour faire respectable : ainsi on adore que quelqu’un défende le Céline des Pamphlets, entre deux signes de croix). Cela, c’est un constat que je viens de faire en observant des réactions à des textes, sur Facebook.
. Celui des islamistes (très inspirés aussi par les thèses complotistes…), et cherchant dans la ‘cause’ palestinienne de quoi légitimer des délires. Porosité qui atteint des gens qui ne pourraient peut-être pas être qualifiés d’islamistes, mais qui adoptent des rigidités et des rejets qui viennent de leur propagande. Contagions idéologiques, et terreau accueillant. 
. Les conspirationnistes sévissant sur Internet, et fascinés par des sites que le négationnisme ne gêne pas. Les Gilets jaunes ont été pas mal dans cette mouvance (on l’a vu à des banderoles, des tags, des commentaires en ligne, et des agressions).
. L’extrême-gauche qui se croit pro-palestinienne. De celle qui se fait récupérer par le complotiste Chouard, celui qui ne sait pas ce qu’on doit penser des camps de la mort (réponse, émission de télé, et dont Ruffin fit l'éloge au Parlement...).
… Après avoir vu en quoi consiste le nazisme d’un Céline, savoir cela est inquiétant. Les germes fascistes sont là. Ils ont toujours été là, mais ils n’ont pas toujours rencontré des complaisances lâches. Et les mots du pire n’ont pas toujours été ‘pardonnés’ quand ils ne devaient pas l’être, pour un prétexte ou un autre. (Ainsi les ‘charmantes’ céliniennes obtues sont des criminelles de papier. Et le flirt avec ces discours est un flirt avec la mort. Pinchas Goldschmidt, grand rabbin européen, le rappelait dans le JDD du 17-02-19 : "Elie Wiesel disait qu’Auschwitz n’a pas été construit avec des briques mais avec des mots". Ce grand rabbin, condamnant toutes les compromissions, avait lancé un appel au pouvoir israélien au sujet des liens avec des pouvoirs populistes européens, peu critiques de l’antisémitisme… Mais comme le montre un livre de Jean-Pierre Filiu, "Main basse sur Israël. Netanyahou et la fin du rêve sioniste", la radicalité intérieure a des effets extérieurs. Les ressorts qui motivent les uns ou les autres (intérêts, calculs et ambitions) pour accepter d’accepter sont porteurs de catastrophes. 
 
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Delphine Horvilleur, rabbin, Le Figaro, 14-02-2019. Entretien au sujet de son livre, Réflexions sur la question antisémite, Grasset, 2019...
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HAINE. "Les discours de haine embrasent le monde, les réseaux sociaux sont exploités pour véhiculer le sectarisme. Les mouvements néonazis et les idéologies de la suprématie blanche prolifèrent.  (…) Au cours des dernières décennies, les discours de haine ont été annonciateurs des crimes atroces qui les ont suivis, génocides compris. Je crains que le monde ne se trouve à nouveau dans une période critique de la bataille contre le démon de la haine. (…) La haine est un danger pour tous et c’est donc l’affaire de tous que de la combattre." 
António Guterres, Secrétaire général des Nations Unies, Le JDD, 30-06-2019
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INDIFFÉRENCE. "Les pires crimes de l’histoire ont été pour la plupart commis non par haine mais par indifférence. Ils ont été engendrés par des gens qui auraient pu faire quelque chose mais qui n’ont pas même pris la peine de lever le petit doigt. L’indifférence tue.  Peut-être que votre indifférence ne vous tuera pas, vous, mais il est probable qu’elle tuera quelqu’un d’autre."
Yuval Noah Harari, Le Monde, 24-05-2019. (Auteur de Sapiens : une brève histoire de l’humanité, Albin Michel, 2015, et de 21 leçons pour le XXIème siècle, Albin Michel, 2018.
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Lire Caroline Fourest (le début de la chronique est en ligne), "Ignorer l’antisémitisme peut tuer", Marianne, 30-03-18. Je copie les trois dernières phrases : "L’antisémitisme tue. Celui-là, en prime, annonce le totalitarisme. Ne l’oublions jamais".
 
"Dire l'antisémitisme avec des mots fermes" (parole d'un chrétien), Jean-Pierre Denis, La Vie, 17-02-2015... http://www.lavie.fr/debats/edito/dire-l-antisemitisme-ave...
 
TRIBUNE. Quand antisémitisme et racisme s'infiltrent chez les 'gilets jaunes'. Marc KNOBEL, 07-01-2019
 
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CONTRE l’antisémitisme, la CONNAISSANCE… 
Delphine Horvilleur, rabbin. Liens, France Culturehttps://www.franceculture.fr/personne-delphine-horvilleur
Akadem. "Ils ont fait le judaïsme français", rubrique... http://www.akadem.org/sommaire/cours/ils-ont-fait-le-juda...
Musée d’art et d’histoire du judaïsmehttps://www.mahj.org/fr
Collège des Bernardins (centre chrétien). Connaissance du judaïsme… https://www.collegedesbernardins.fr/formation/judaisme
CCLJ. Centre laïc Juif, Belgique… http://www.cclj.be
 
SPIRITUALITÉ...
LAMED. Connaissance du judaïsme, étude et vie pratique.
 
et 
Times of Israël, journal…  https://fr.timesofisrael.com
La Paix Maintenant… https://www.lapaixmaintenant.org
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MISE à JOUR. Sur l'ANTISÉMITISME, voir aussi des notes de la catégorie "Revues de presse", dont celle du 24-07-20 (un passage traite de cela, à partir d'un entretien lu, et donne une référence de livre - ouvrage de Joann Sfar).
Et consulter certaines notes de la catégorie "Abécédaires", dont celle du 27-07-19 (un passage en début de note).

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25/07/2019 | Lien permanent

POÉSIE. Les Cahiers du Sens N°30, Le silence. Et des livres associés...

Cahiers du Sens 30.jpgEn lisant la revue j’ai commencé par la fin, ou presque la fin, les voyages, puis les recensions. Notes de lecture de plusieurs intervenants. Les miennes, que je ne commenterai pas, sont le condensé de notes de blog trop amples pour la rubrique, et que j'ai donc résumées. Lecture de François Cheng et Patrick Le Bescont (Échos du silence), de Jean-Luc Leguay (Le Maître de lumière), et d’un numéro de Poésie première sur le silence. Je ne parlerai pas, là, non plus, de mon texte dans le dossier "Silence" (Déchiffrer ce qui lentement se déploie), ni de mes poèmes (je me contente d’en noter ici les titres : Des oiseaux… / L’apogée du parfum. (Et maintenant je ne m’occupe plus que des autres, notant et commentant). Mes publications, j’y reviendrai en automne... (Mise à jour 07-12-20. C'est fait. Deux mois après, j'ai repris mes trois textes (dont deux poèmes), et posé titres, exergues et fragments, tout en bas de la note...). 

Quatre parties, dans la revue... Dont je change l'ordre.

Voyage... Lectures... Textes sur le silence, le dossier... Anthologie, poèmes. 

Voyage...
J’ai parcouru les récits de voyage...
Et relu le texte d’Éric Desordre (dont je lis en ce moment le recueil Tu avanceras nu - ses poèmes, ses photographies). Népal dans la brume. D’abord, Katmandou, "la ville des signes", son fouillis urbain. Puis la route vers l’Himalaya. Les noms, déjà, font rêver, tant des repères culturels nous lient à ces contrées, repères parfois fantasmés, parfois justes. Mais le voyage est dans le réel : "Vu les conditions de vie, tout est courage". Éric Désordre note un message vu dans une boutique de cordonnier : "Life is hard but not impossible". Puis ce sont les routes vers les pentes pré-himalayennes. Humour. Il s’imagine dans l’émission Les routes de l’impossible, et a l’impression "d’être Charles Vanel dans Le Salaire de la peur, sans le salaire"… Paradoxes, dans ce qui est vu. D’un côté un univers de détritus, qui semble ne déranger personne dans le pays. De l’autre ces êtres qui vivent là, habités par le sacré. Il cite la pensée de quelqu’un dont il ne donne que le prénom, Patrick, phrase qui résonne en lui : "Nous sommes faits pour l’infini, nous ne sommes pas faits pour ce qui est fini". Et il ajoute le questionnement que cela provoque. "Comment relier notre compréhension de l’univers, notre propre recherche spirituelle à celle qui s’exprime ici, sous nos yeux étonnés ?". La réponse est peut-être dans ce qui suit, ces moines bouddhistes croisés, qui connaissent Matthieu Ricard. La culture, le métissage spirituel. Et le regard sur notre Orient spirituel, dans les paroles des sages d’ici. La phrase de Patrick m’a immédiatement fait évoquer celle de Pierre Teilhard de Chardin : "Nous ne sommes pas des êtres humains vivant une expérience spirituelle, nous sommes des êtres spirituels vivant une expérience humaine"…
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Lisant les choix de la rubrique Lecture cela me donne envie de me procurer certains ouvrages (ou confirme un choix déjà fait). 
… Ainsi je remarque, dans les notes de Jacqueline Persini, le recueil d'Isabelle Lelouch, Le banquet des solitudes, chez Unicité (une traversée de douleur cherchant la lumière). Puis le livret de Felip Costaglioli et Vincent Rougier (peintre et éditeur), Le revenant, dans cette précieuse collection-revue, Ficelle (Comment on est habité par des présences, mais aussi par des parts inconnues de soi). Et enfin la revue Arpa N° 127 (de Gérard Bocholier). Et je note la présence d’auteurs dont j’ai lu des textes ou livres, et que j’apprécie (Werner Lambersy, Philippe Mac Leod, Michel Diaz…). 
… Des choix de Maurice Cury je retiens le livre de Matthias Vincenot et André Prodhomme (que je lis, lui, dans la revue À l’Index, notamment, comme Werner Lambersy d’ailleurs), La chair des mots.
... Marie-Josée Christien a la bonne idée de nous signaler l’ouvrage de Guy Allix et Pointilleuse, Les couleurs du Petit Peintre. Livre à s’offrir et offrir.
... Bruno Thomas parle d'abord de la revue Thauma, qui allie poésie et philosophie, en les maintenant "dans la différence de leur être". Je suis intriguée (et attirée) par ce qu’il dit, ensuite, du recueil de Claude Cailleau, Anthologie poétique, de ses décisions de silence, le trou de nombreuses années entre deux temps des poèmes de ce recueil, sa décision d’arrêter d’écrire de la poésie (qu’il la tienne ou pas, car on a le droit de changer d’avis).
. Réfléchissant encore aux silences de Claude Cailleau (que Bruno Thomas me donne envie de lire...)  je trouve, en relisant une préface de Marcello-Fabri où il définit sa conception de la poésie, des pensées qui relativisent la question de la production et de la publication (Marcello-Fabri est le pseudonyme espérantiste du poète Marcel Louis Faivre, 1889-1945, Algérie). Voici ce qu’il écrit dans ce texte liminaire du recueil Les chers esclavages (titre du texte sur la poésie et du recueil - 1938, réédition 1989)… Est poète, pour lui, "celui qui crée, à son seul usage sa métaphysique et celui qui nourrit le plus grand nombre d’intuitions" (…) "celui qui crée en lui un monde personnel - féérie intime parfois, enfer mythique aussi, ou les deux ensemble, - et dont la volonté sensible, continuellement, fait obstacle aux ruées du monde extérieur. Et, surtout, celui qui, ayant ouvert à son esprit ce monde visionnaire, tente - avec ou sans réussite, de le rendre tangible…" (…) "Le poète peut ne rien créer, et conserver ses droits à son titre. Il y a certainement des poètes, et des grands, dont les rêves seront à jamais ignorés." Claude Cailleau doit être de la trempe de Marcello-Fabri, peu soucieux des gloires illusoires… 
Guy Allix parle avec douleur du recueil de Michel Baglin, Les mots nous manquent. Poète décédé qu’il faut lire et relire encore (poète et passeur généreux). Commentant l’ouvrage de Marie-José Christien, Affolement du sang, il dit la densité de ses poèmes courts, opposant cela à la fausse brièveté des "haïkus à la mode". Éloge pour un livre qui est, écrit-il, "une traversée, un livre de solitude, de lucidité et de vrai courage signé par une des plus vraies poètes d’aujourd’hui".
. J’apprécie particulièrement sa remarque sur les haïkus. Car si j’aime (beaucoup) les haïkus de la tradition japonaise et les très brefs poèmes des maîtres du zen ou de la dynastie chinoise Tang, je ne supporte pas la médiocrité de tant de publications de haïkus qui sont complètement à l’opposé de ces créations originelles. Les textes authentiques des sages d’autrefois (ou plus rares contemporains) sont le produit de lentes maturations, d’instants qui extirpent le diamant d’une conscience méditante. Pas les superficielles descriptions qui ne disent rien d’autre que leur brièveté ou la stérilité d’auteurs sans souffle (quand ce n’est pas sans maîtrise grammaticale, faiblesse cachée par le vide… et que la prose révélerait). Oui, rares, les haïkus de valeur (j’y mets ceux de Christian Tortel, lisibles sur son site - là il y a une densité, une pensée).
… Six livres dans le bouquet de Jean-Luc Maxence. Dont celui de Bernard Perroy, Un rendez-vous avec la neige. ll lui dit, avec amitié, qu’il aimerait voir sortir, de la douceur habituelle de ses textes, des "vents contraires" ("ses révoltes et ses doutes, en dépit de la beauté des astres mystiques entrevus dans la nuit…"). Ayant lu - et apprécié - depuis, le texte de Bernard Perroy sur le silence, j’ai l’impression que c’est dans la prose qu’il peut plus facilement aller vers les ombres contraires, autre écriture que celle des intuitions spirituelles qu’il choisit d'inscrire dans ses poèmes. Lecture de Jean-Luc Maxence, aussi, celle du recueil de Gabriel Zimmermann, Depuis la cendre, sur "le deuil impossible des êtres que nous avons tant aimés". "Ce poète est rare, parfois exceptionnel". 
…  De Jean-Luc Maxence, c’est Frédérique Kerbellec qui a lu Tout est dit ?. Elle en parle avec intuition et profondeur. Ayant lu ce recueil je reconnais la qualité de sa lecture (j’en ferai aussi une recension, à l’automne). Pour elle, en plus, ouvrir le recueil a été l’occasion d’une expérience de synchronicité bienfaitrice (sur la peur qu’on a de voir mourir qui on aime…). Elle apprécie la parole juste sur l’amour vécu qui dure, le couple de beaucoup d’années, écriture plus rare peut-être que celle des passions éphémères. Mais elle mentionne aussi ce qui concerne la mémoire de la jeunesse, des élans et colères d’alors, des douleurs et du pire. 
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Mais les premières pages de la revue sont celles du dossier Le silence… Une centaine de pages et beaucoup d’auteurs. Tout est intéressant, même si, bien sûr, je préfère certains textes. Paradoxe, pourrait-on dire, tant de pages pour ce qui est le retrait hors des mots. Sauf que, et c’est le point commun à beaucoup de réflexions, le silence fait partie de l’univers de la poésie, il lui est nécessaire. L’écriture de la poésie puise dans les tréfonds inconscients des savoirs et des émotions. C’est une démarche de création qui passe par un processus de mise à l’écart du langage ordinaire. Une plongée en soi vécue dans la solitude d’instants radicaux hors communication. Cela, les poètes le disent tous à leur manière.
Impossible de parler de tous : il faudra lire… Et j’espère que d’autres poètes-blogueurs feront des recensions en repérant d’autres noms… C’est ce croisement des lectures qui fait vivre la poésie. (Je suis l’ordre des pages…).
 
Pour commencer, le très beau texte de Guy Allix (Si lent ce silence…), riche de références, d’échos. En exergue Shakespeare et Louis Lavelle. Guy Allix traite d’un silence "habité", que beaucoup fuient, et que le "bruit" social anéantit. "Oui", écrit-il, rejoignant une réflexion de Michel Baglin, "le silence fait peur, comme la solitude, comme l’ennui, comme la lenteur, comme la nuit, nous confronte à ce que nous redoutons le plus quand pourtant la pensée de la mort elle-même nous construit et nous rend véritablement libres" (et il cite Char, "la blessure la plus rapprochée du soleil", à laquelle nous sommes "ouverts" par la capacité de penser la mort). Par cette peur, on se détourne du "réel à soi", ou "réel en soi". "Dénuement", "sobriété", sont les mots des valeurs que Guy Allix inscrit contre le "brouhaha" qui nous éloigne de nous, ce "vacarme du monde".  Loin du vacarme se rencontrent pour lui deux démarches, celles du marcheur et du poète.
 
J’ai apprécié qu’Annie Coll (La poésie fait hurler le silence) cite Paul Celan : "La poésie est un cadeau fait aux attentifs". L’attention, oui. La poésie dont elle dit qu’elle "rend compte du mystère, de l’inconnu du réel" et qu’elle "élargit notre conscience". Pas d’exergue, pour Annie Coll. Cependant elle dit que son texte lui est inspiré par le livre de Jean-Pierre Siméon, La poésie sauvera le monde.
 
Mais il y a aussi des silences qui sont toxiques. Ceux qui occultent des faits qui nous ont construits ou déconstruits, détruits parfois. Occultation par amnésie ou manque d’informations. Et les non-dits, l’impossible à penser ou dire. Jacqueline Persini (Une traversée du silence) a eu la bonne idée de parler de Georges Perec, à partir de son livre W ou le souvenir d’enfance. Son histoire personnelle terrible enfouie dans le silence de la mémoire et de l’Histoire. La mort des parents, la disparition de la mère en camp nazi d’extermination. "Sans l’écriture, Perec n’aurait-il pas été affronté à la folie ?", se demande-t-elle ? Juste question, car lui-même l’évoqua (et elle le cite beaucoup). Il dit devoir se "recréer". Oui, l’écriture peut sauver, être une descente dans l’archéologie de soi.
 
Texte essentiel, aussi, celui de Bernard Renaud de la Faverie (Silence, méditation et ego). En exergue, Paul Valéry et Fritjof Schuon. Pour lui, le silence est "lieu de conscience profonde". Et, pour mieux définir ce qu’il désigne par "château intérieur", ce lieu en nous auquel on accède notamment par la méditation, ce "lieu intime d’où vient la parole", il se réfère à Robert Mizrahi, pour Construction d’un château. Cependant il exprime une mise en garde importante, le refus des pièges. Dont celui de fausses approches de la méditation, qui développeraient l’ego alors que le but de la méditation authentique est de le faire disparaître, dit-il. Mais là on peut peut-être nuancer, car chercher la disparition de l’ego peut être aussi un piège mental. D’une part car cette dissolution de l’ego ne peut être la première étape, l’être doit d’abord se structurer, ego compris (ou, même, avec l’ego). Dissoudre l’ego, je crois, ne se cherche pas, cela advient. Autre nuance. C’est vrai que beaucoup d’Occidentaux semblent chercher des voies orientales alors, dit-il que le christianisme, ici, a ses méthodes, "une discipline du silence et de la méditation". Oui, d’ailleurs les trois monothéismes ont leurs méthodes et mystiques. Mais c’est religieux. L’Orient propose aussi des approches a-religieuses. Enfin peu importe que les voies soient occidentales ou orientales. Ce qui convient à quelqu’un n’est pas forcément ce qu’il pratiquera pour l’avoir cherché, mais plutôt pour avoir été rencontré. Et même la méditation de pleine conscience, dont il pense qu’elle n’est "qu’une forme détournée et appauvrie de la vraie recherche du silence" (car sans référence spirituelle et trop diffusée ?), peut être, pour certains, un chemin vers eux-mêmes (notamment s’ils refusent, autrement, des pratiques associées à des univers religieux, à des dogmes). La réalité est plurielle. Et comment pourrions-nous savoir ce que les adeptes de telle ou telle pratique vivent réellement (d’où ils viennent et où ils vont) ? 
 
La mise au monde, dit Laurence Cécile Golan, dès son titre. Elle décrit un "accouchement" de soi. Qui passe par le courage de lâcher "tout repère" et "d’arracher un à un les masques".
 
Frédéric Vincent, lui (L’inconscient est silence ?) parle de "l’expérience du silence" qui "mène à l’ataraxie", "une abolition permanente du mal-être ?". Ce qu’il faut assumer c’est d’accéder à la capacité de "se choisir", au lieu de vivre dans "les carcans idéologiques", enfermé dans le "ON". Vers "une régénération de l’âme".
 
Pour Claire Dumay (Une espérance forte), aborder le sujet du silence, c’est, comme toujours chez elle, un exercice-scalpel de retour sur soi. La recherche du silence est douloureuse, il est encombré par des "fermentations vénéneuses", ou rencontre une "vacuité" angoissante. Mais cette vacuité, "proche de l’épouvante", semble, perçue du dehors, comme ce qui serait juste avant une frontière à traverser, révélant l’inverse. 
 
Jacques Sommer (Marguerite Duras et l’éloquence du silence) rend compte d’une fascination, au point d’une lecture qui provoque "une métamorphose". En exergue, elle, bien sûr (Césarée).
 
Pour Jean-François Migaud (Diagonale du silence), constat, d’abord, d’un paradoxe. Car on ne parle du silence que de "biais", "en parlant d’autre chose". Comme le fait, dit-il en note, Jean-Claude Pirotte, dans son livre Le silence. Et justement il associe le silence à des éléments ("feu", "neige").  C’est une poétique de la métaphysique. C’est pour lui le tableau d’Edward Munch, son CRI, qui donne à voir le mieux "un silence viscéral fait d’une angoisse coincée au fond du gosier". Il évoque aussi d’autres tableaux. Un passage essentiel de cette riche réflexion est celui sur l’expérience d’éveil de Gustave Roud, telle qu’il en rend compte dans son Journal. Un moment de révélation spirituelle qu’il traduit notamment ainsi : "Instant d’extase imprévisible", ajoutant que "le temps s’arrête" et que les éléments du paysage autour de lui sont "saisis par l’éternité", c’est un "suspens indicible". En note Jean-François Nigaud corrige cette notion d’éternité ("confusion", dit-il) en se référant au philosophe mystique Angelus Silesius qui préfère parler de "temps éternel". Mais de grands textes d’éveil refusent aussi le terme "éternel", parlant plutôt de "hors temps", d’accès à une dimension difficile à saisir à partir de notre réalité ancrée dans l’espace-temps. Car "éternel" c’est encore le temps…  
 
Liliane Limonchik (Il était une fois…) partage le souvenir de silences posés sur des mémoires impossibles, comme le sont celles d’une famille exterminée. Les ombres des morts rendent les joies indécentes. Alors on se tait. Puis les deuils révèlent la force paradoxale du "silence partagé", car partage cependant, ce silence du terrible.
 
Marie-Claire Bancquart est en exergue du texte de Bernard Perroy (Devant toi le silence). Questionnement métaphysique sur le "silence de Dieu". En sous-titre il y met un point d’interrogation. Et il répond avec des poètes, dont Marie Noël, pour qui le silence contenu dans un chant est critère de beauté, et Pablo Neruda ("La parole est une aile du silence"). Très intéressante approche de la poésie à travers ses références et commentaires. Mais aussi avec ce dont il parle en évoquant le pochoir-autoportrait de son frère, Chuuuttt (on peut le voir quartier Beaubourg). Le street-artiste, Jef Aérosol, se peint "le doigt sur la bouche", pour dire "chut", donc inviter à se taire pour écouter le monde autour de nous, et peut-être le monde en nou

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26/08/2020 | Lien permanent

2. ANTISÉMITISME. Faits et réactions... (dossier, note 2/5)

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lls vinrent / firent griller nos vêtements / et notre peau /  Ils vinrent / pour brûler notre sang / nous étions les bûchers de notre temps.

Rose Ausländer 

Voir, sur Rose Ausländer, la page d'Esprits nomades...
"L'antisémitisme est un marqueur de la destruction des sociétés, et l'histoire nous l'enseigne." Vincent Duclert, "L'antisémitisme sans fin", Esprit, janvier 2019... https://bit.ly/2TccdWG
 
Des FAITS… 
Michel Jonasz témoigne, lors d’un rendez-vous sur la 2, pour parler d’une pièce de théâtre sur Einstein (ses drames personnels et la période du nazisme).
"Je me disais, heureusement que ma mère (qui a eu ses parents et quatre de ses frères qui sont partis en fumée par les cheminées d'Auschwitz) n'est plus là pour voir ça. Heureusement qu'elle n'est pas là pour voir les croix gammées sur les portraits de Simone Veil, pour voir marquer "Juden" sur la vitrine d'un commerçant juif ... Sarah Halimi et Mireille Knoll assassinées parce que juives, la mémoire d’Ilan Halimi souillée , et tant d’autres actes antisémites, encore hier… (l'agression visant Alain Finkielkraut, samedi 16 février 2019, à Paris, lors d’une manifestation de "gilets jaunes", alors que, simplement, il rentrait chez lui]. Elle me dirait... ‘Mais Michel, je ne comprends pas, ça existe encore ?' Eh bien oui…".
Émission, vidéo et page, FranceTv... https://bit.ly/2SfE1V6
 
Antisémitisme ? Série de faits récents et d'articles, à travers la page des tags "antisémitisme"sur 20 Minutes...
 
Actes antisémites recensés sur France Info
 
Émission sur le phénomène de la parole antisémite assumée
"Élie sans interdit". VIDÉO. Reportage d’Élie Chouraqui sur l’antisémitisme : la parole libérée (la parole des racistes et celle des personnes atteintes), I24NEWS. 
 
L’agression visant Alain Finkielkraut ...
Manifestation des G.Jaunes. Insultes antisémites contre Alain Finkielkraut (sale sioniste ! on est chez nous ! on est le peuple ! etc.) Pas étonnant, quand 34% des GJ croient au complot sioniste mondial, qu’il y ait infiltration d’islamistes qui y croient aussi. Et pas étonnant, quand certains leaders des GJ veulent un coup d’État. Car les islamistes veulent aux aussi détruire la démocratie et déstabiliser le pays... VIDÉO, Yahoo...
 
Alain Finkielkraut : "Quelque chose me gêne dans la mobilisation de demain" (de mardi 19 février). (…) "On y revient, on se mobilise contre, si j'ose dire, le bon vieil antisémitisme, (croix gammées, mot ‘ Juden") celui qu'on aime détester". Or "ce n'est pas lui qui était à l'œuvre contre moi en tout cas. Est-ce que c'est lui (ce bon vieil antisémitisme) qui est à l'œuvre de manière générale en France ? Je ne le crois pas. »  Il considère que "tous les partis républicains devraient être invités », RN compris (aux nombreux électeurs). 
Je trouve qu’il a raison. On combat les idées du FN, réelle extrême droite aux  réseaux problématiques. Mais, quand on fait front commun, on n’exclut pas du champ collectif ceux qui s’y seraient peut-être joints (d’autant plus que certains partis qui seront présents sont loin d’être plus clairs avec l’antisémitisme, mais sur d’autres bases idéologiques). Vidéo et page, France Info...
 
GILETS JAUNES. L’intox double d'un GJ sur la kippa
(1) Faire croire qu’un Juif manifeste tranquilement avec une kippa sur la tête, sans être agressé (pour démontrer que les GJ ne sont pas antisémites) : sauf que c’est un GJ pas du tout Juif, avec ses amis GJ.
(2) Relayer l’idée que la kippa protège de la répression. (Puisque, croient les complotistes antisémites, la police étant sous les ordres des Juifs, elle ne réprimera pas un Juif (Juif en apparence).
Décryptage sur FranceInfo... https://bit.ly/2T5Usrc
 
DES RÉACTIONS.
 
Réactions à l’augmentation importante des actes antisémites et aux agressions récentes... (Des articles, des dossiers, des déclarations, des émissions, des débats, des protestations, un appel à manifester le 19 février…). 

Témoignage et APPEL d'une rescapée d'Auschwitz, Magda Hollander-Lafon (danger pour tous, vigilance de tous...)... "Des tags antisémites, des croix gammées sur des murs ou sur le portrait de Simone Veil... Voilà des images que Magda Hollander-Lafon espérait ne jamais revoir. À 91 ans, cette rescapée du camp d'Auschwitz regarde avec effroi le retour de ces expressions antisémites, elle qui dit porter cette douloureuse mémoire dans la peau. "Quand le juif est en danger, le monde est en danger. On commence toujours par ce petit peuple-là", dit Magda Hollander-Lafon, rescapée d’ Auschwitz où elle fut déportée à 16 ans.". Émission, la 3. FranceTv,vidéo et texte... https://bit.ly/2Sbi6yj

Et, ainsi, un APPEL, en Provence, de 150 personnalités contre l'antisémitisme... "Les 150 signataires de la tribune font part de leur indignation totale et demandent une réaction républicaine forte, implacable et sans merci contre toutes celles et ceux qui se rendent coupables de tels agissements." Sur 20 minutes… 
 
TRIBUNE de Mario Stasi, LICRA. "La République doit se réarmer contre la haine". Trois directions. L'éducation dans le respect de la République, la réponse juridique du droit sanctionnant les infractions antisémites, la régulation de l'expression sur l'espace virtuel ("régulation numérique")... 
 
L’UEJF (Union des Étudiants Juifs de France) demande des réactions fermes (une déclaration"d’état d’urgence face à l’antisémitisme"). 
 
APPEL transpartisan à manifester mardi 19, Paris et autres villes). Même les partis non invités par le PS (qui a eu l’initiative) disent soutenir le combat contre l’antisémitisme. Mais certains des partis signataires de l’appel ont souvent été très en retrait de la lutte contre l’antisémitisme. (A noter que l’appel général contre le terrorisme avait suivi l’assassinat de Charlie Hebdo, pas celui des enfants de l’école juive de Toulouse). L'article ne le mentionne pas, mais on a appris qu'une certaine extrême gauche, comme le NPA, s'associait à un autre rassemblement, celui du PIR racialiste. Leur appel, même s'il mentionne l'antisémitisme, met l'accent sur le refus de... "l'instrumentalisation" de l'antisémitisme (et fait une liste de multiples racismes éventuels, pour ne surtout pas reconnaître le contexte particulier). Leur rassemblement fait le procès d'un antisémitisme dont ils réfutent la réalité, l'importance, et le caractère. On trouve de forts échos à cela dans les déclarations des responsables du LFI... (Instrumentaliser quoi, pourquoi? C'est très inspiré des thèses complotistes... Pour occulter le déni.)
Voir l'appel sur 20 minutes.
 
Regard extérieur… Article critique. L'écrivain et chroniqueur Amin Zaoui montre comment on peut, en France, se tromper sur ce que sont réellement des individus et des lieux. (Certains, ici, pratiquant la taqiya, masque idéologique, il faut une vigilance extrême pour ne pas se faire piéger, et savoir lire les indices... Mais d'autres, qui sévissent à visage découvert, en France ou à l'étranger, ne devraient jamais être sollicités d'aucune manière. Et pourtant…).
Liberté-Algérie...
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Bertrand Delanoë, France Inter, 18-02-19
"Il ne faut pas dénoncer que l’antisémitisme, il faut aussi dénoncer les antisémites  : derrière cette vague qui est particulièrement dangereuse, il y a des gens qui profèrent des idées de haine". (…) "Tous ceux qui sont identifiés dans les médias, sur les réseaux sociaux, comme proférant des propos antisémites doivent être poursuivis fermement."
 
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Mise à jour, 1er mars 19
"L'antisémitisme sans fin"
Vincent Duclert (historien : affaire Dreyfus, étude des génocides) rappelle, dans "Esprit", janvier 19, l’article d’Émile Zola, en 1896, condamnant l’antisémitisme, les luttes antijuives de l’extrême droite (article qui précède de près de deux ans son "J’accuse" pour défendre Dreyfus injustement diffamé et accusé). Vincent Duclert recense les différents courants de l’antisémitisme actuel, cinq. Et affirme que les luttes antijuives "du présent" sont très graves. Qu’il faut donc s’inscrire dans la lignée de Zola pour s’y opposer.
....
Les idées claires. FranceTV. 27-02-19
"D’où vient le mythe du complot juif?"
(Certains croient que les Juifs veulent dominer le monde...)
Texte de présentation et vidéo (légendes-textes). 
On peut écouter ou lire la vidéo aussi.

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17/02/2019 | Lien permanent

Javier Vicedo Alós, Insinuations sur fond de pluie, anthologie bilingue

1 Insinuations JVAlós.jpgEchamos fuego al agua…
 
Nous mettons le feu à l’eau
et éteignons la transparence.
C’est ainsi que l’homme brûle la clarté du monde
et l’embrase de silence.
Le tremblement humain du feu,
fracas d’une voix qui s’ouvre,
fait taire toute parole.
Le feu, il lui suffit de brûler.
          Javier Vicedo Alós, Insinuations sur fond de pluie, anthologie bilingue, Fondencre, 2015
          trad. Édouard Pons
          (Début d’un poème dédié à Roberto Juarroz, Hommage vertical).
 
 Ce recueil regroupe des textes provenant de trois des ouvrages publiés en Espagne. (Avec des créations graphiques de Monique Tello). 
 
Insinuations, terme polysémique, et plus encore polysémique, d’évidence, à la lecture des poèmes. C’est, d’abord, un geste mental pour glisser des mots entre le silence de sa musique intérieure et le silence qu’on trouve en ‘scrutant l’infini’.
Entrer dans ce silence en faisant "un pas vers le monde". S’insinuer soi-même entre la lumière et la nuit, le feu et l’eau, car vivre c’est prendre "ce risque de l’être". Il y a une distance indéchiffrable, de sens, entre sa voix et la voix à inscrire pour autrui. Comme celle des gestes du corps, qui n’abolissent pas la séparation. Insinuations, parce que l’approche de soi est celle "des riens". Car "l’infime contient l’immensité". Mais pas le corps, "contenant" limité. Alors que Javier Vicedo Alós y vit "désirant vivre l’incontenable". 
 
Entrer dans le vivant, c’est "habiter le monde" et cela passe par la solitude et la nuit. Pour que soit possible "l’insinuation de la lumière". Là, le geste mental est l’acceptation, une sorte d’élection intérieure légitime, pour qui sait sa propre présence à l’ampleur du monde. 
Cela passe aussi par les tours, vueltas. Tourner, écrivant, "autour des mots". Tourner, vivant, "autour de la mort". Pour mesurer l’usure du corps (sans que ce soit la vieillesse), comme un dépouillement, une dépossession nécessaire. Et pour parfois en mesurer la peur (que la mort soit médiocre, honteuse). Les autres aussi tournent, autour de "leur histoire", comme on tourne en rond sans avancer (poème Cercles/Circular). 
Mais ce n’est pas une perception sombre du réel. Juste un regard lucide, acéré.  Et sensible, même pour parler du quotidien des objets, du partage de la familiarité avec les choses - sèche-cheveux, balai (dans un poème dédié à ses parents, Avenida del golf, 8). 
Car l’autre cercle c’est "la rotation d’un astre" qu’il "comprend avec le cœur". Et "Il y a des pierres allumées dans la nuit du corps". Cela c’est le poète qui le sait, en lecteur d’Antonio Porchia (qu’il cite en exergue d’un poème), de Roberto Juarroz (l’hommage, poème dédié), et de José Angel Valente, ces géants, ces proches... Comment aurais-je pu rater un poète qui a les mêmes élans d'admiration que moi ? Et qui a, avec ces auteurs aimés, tant de points communs, et en lui cette même verticalité, en affinité de conscience... 
 
"Je voudrais, dit-il, répondre avec mon émerveillement au mystère brûlant de l’univers". Pour cela l’autre geste intérieur de "vivre" c’est prendre "une indécision". Ne pas savoir, hésiter, douter, être entre présence et absence. Et dire ainsi "son silence, son enthousiasme face à l’abîme". Car ni soi ni le monde n’est "vide". Non, "c’est le sens qui est vide".
Il n’est pas vide, son monde. Il y a aussi le ciel, la mer, le soleil, les oiseaux, et les arbres. L’arbre, comme dans les poèmes Dépossession, Carte postale méditerranéenne avec arbres, Arbre sans feuilles, ou La solitude de l’arbre. Les oiseaux, comme dans Triptyque de la chute, Dépossession (aussi), Il y a/Hay, ou Chanson sans raison… Les arbres, il en parle comme quelqu’un qui les contemple beaucoup.
 
Le dernier poème, Humilité, contient le vers qui a donné le titre de l’anthologie, "insinuations sur fond de pluie". L’éthique du retrait, de l’esquisse légère, des "traits à peine", de l’hésitation, de l’absence de réponses, de l’incertitude.
Pourquoi la pluie ? 
Pour "ôter de la douleur au monde".
L’eau qui lave et disperse. 
Mais surtout eau du premier poème, dont il ne faut pas éteindre "la transparence", pour ne pas brûler "la clarté du monde". Peut-être, aussi, parce que la pluie c’est le gris, les couleurs et les formes estompées. Ainsi, ayant moins à voir de trop net, et moins à être vu, rendu "néant visible et pure émotion", il est possible de "vivre avec d’autres yeux, ceux qui voient au-delà du miroir". (Citations du poème Ruines, celui où le corps "tombe en ruines", se dépossède de lui-même, se libère.) Texte central qui inscrit le paradoxe comme méthode. Plus le corps est "décrépi" (croit-il !) plus le poète est "heureux". Plus il est "insignifiant", son corps, plus il a "le plaisir d’exister". Ne pas voir en cela un goût pour la laideur et un rejet du charnel, mais plutôt une démarche de pensée, pour un auteur qui a une formation philosophique. (Et qui ne peut donc qu’avoir été, ou être, un lecteur de Miguel Unamuno). Le poète, qui sait penser "Le sentiment tragique de la vie" (Unamuno, théorisant l’ADN culturel espagnol) et la mort, sait aussi "aspirer cette bouffée d’éternité qui guette derrière tous les mots" (poème Derrière les mots). Les mots, car, comme l’a dit Unamuno, "La philosophie se rapproche davantage de la poésie que de la science".
"Sur fond de pluie". C’est une expression de peintre, aussi. De regardant. L’écriture s’inscrit sur le papier, mais le visuel c’est l’écran du monde, non pour cacher mais pour révéler. Même si des fenêtres donnent "sur nulle part". 
 
Les hispanophones auront le privilège d'une lecture intense, double. Dès l'ouverture du livre on lit deux fois.
 
Pour ceux qui lisent l'espagnol, voici un entretien très intéressant, où on voit la liberté de l'auteur (par une distance critique avec les codes habituels d'un certain monde culturel, et des notes légères d'humour, d'autodérision), où il donne ses références, littéraires et artistiques, les créateurs qui comptent. Répondant à une question sur les disciplines fondamentales pour lui, formatrices, il cite (tel que) : "la philosophie, le jardinage, le silence, la mer, l'ennui, la mort, la nuit". Cela peut paraître étrange de considérer la conscience de la mort (ou la rencontre du deuil ?) et l'expérience de la nuit comme "disciplines", mais c'est révélateur de sa démarche d'être : la présence du vivre aussi forte que le culturel - alors qu'il est, évidemment, très lecteur, et très connaisseur des arts. Les "disciplines" ne sont pas conçues, ainsi, comme des exercices qu’on exige de soi, ou des "matières" d'apprentissage, mais comme l’acceptation du temps offert à des vécus.
Des auteurs qu'il "recommande" ? (c'était la question) :  Ribeyro,  Cernuda, Cioran, Fabián Casas.
Et le métier pour gagner sa vie ? (juin 2017) : serveur (à Madrid). Sauf ponctuelles bourses de fondations...
Au sujet de l’œuvre qui lui a demandé le plus de temps de travail (Cuando caiga la nieve / Quand tombe la neige, théâtre) il dit que c’était un cheminement vers "l’intérieur".
 
Impossible de clore cette recension sans évoquer la préface d’Édouard Pons (que j’ai préféré ne lire qu’après avoir achevé  lecture, relecture, et note). En titre il reprend une citation que j’avais relevée aussi ("l’infime contient l’immensité"). Effectivement elle rend compte de l’essentiel d’une écriture, d’une pensée attentive aux choses ordinaires de la vie et de la nature, mais aussi à leur dimension connectée à l'infini. Je retiens des notations qui me semblent importantes et justes (mais il faudra lire ces quelques pages d’un traducteur qui est un excellent lecteur). "Chez Javier Vicedo  Alós, dit-il, nulle désespérance", et "Persiste aussi le refus de feindre", ou (…) "le poète qui nous invite à ne pas déserter ni renoncer au désir d’infini". Et il achève sa préface par la citation des quatre vers se terminant par cette expression que j’ai reprise aussi : "ce risque de l’être" (Il y a des vers qui sont des repères pour tout lecteur attentif, car on sent qu’ils contiennent ce qui est la marque centrale du souffle du poète, ce que lui veut qu’on retienne, comprenne, intègre...
 
recension © MC San Juan
 
LIENS
 
Insinuations sur fond de pluie. Page de l’édition Fondencre...
 
De la traduction, par Édouard Pons. Texte sur le site de Terre à ciel...
Passionnant… C’est une réflexion profonde tant sur la traduction que sur la poésie et ce qu’est lire (avant de traduire)... Je trouve une proximité de démarche (et d'effets sur soi) entre la traduction et l'écriture de recensions.
Citations : "Je lis le poème et le dis. Je l'écoute. Il m'accroche, je le regarde, il me séduit. Je le lis encore. Il me laisse venir, je le laisse s'approcher, et le relis. Il me bouscule. Il me dit des choses sur moi que je ne savais pas. Car il me lit autant que je le lis. (...) Ainsi donc j'entre dans le poème en mineur de fond, spéléologue, archéologue et musicien." (...) Comment traduire ce qui est écrit, ce qui n'est pas écrit, ce qui ne peut s'écrire ? C'est ce défi, que d'aucuns diraient impossible, qu'il s'agit de relever."
..............................
MISE à jour, 03-07-20
À lire, une belle recension de Michel Diaz (2016)... que je découvre... (Il avait réagi plus vite que moi, lectrice de cet ouvrage en 2018...).

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30/06/2020 | Lien permanent

POÉSIE. Saraswati 10, parcours de citations...

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Je commence par les citations hors textes, choix de l’édition qui dit une orientation (éthique, esthétique, philosophique, spirituelle). Ces phrases d’auteurs sont des signes posés entre les différentes parties (les onze chapitres des réponses aux questions), séparées aussi par des poèmes. C’est un peu une discrète réponse indirecte aux questions par l’éditrice, Silvaine Arabo. J’en retiens ce à quoi j’adhère plus (parfois je ne copie qu’un fragment d’une citation plus longue…).
Je remets les couvertures d’autres numéros de la revue, en lien visuel entre ces deux notes.
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"Ne méprisez la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c’est son génie."
Et j’ai mentionné, note précédente,
 la citation de Jean-Pierre Siméon (dans l’éditorial de Silvaine Arabo).
 
Suivent, citations hors textes… 
On peut lire ces phrases comme un programme sacré…
 
Arthur Rimbaud : Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant.
Pierre Reverdy : Rien ne vaut d’être dit en poésie que l’indicible.
Octavio Paz : La création poétique est d’abord une violence faite au langage. Son premier acte est de déraciner les mots.
Charles Baudelaire : Qu’est-ce qu’un poète si ce n’est un traducteur, un déchiffreur ?
Victor Hugo : Au reste, le domaine de la poésie est illimité. 
Stéphane Mallarmé : Il doit toujours y avoir une énigme en poésie.
Paul Éluard : Toutes les paroles seront sacrées.
Paul Valéry : Le poème, cette hésitation prolongée entre le son et le sens.
Saint-John Perse : Poète est celui-là qui rompt avec l’accoutumance.
Nathalie Sarraute : La poésie dans une œuvre, c’est ce qui fait apparaître l’invisible.
Platon : Ce n’est pas l’art, mais une force divine qui leur inspire leurs vers.
Stéphane Mallarmé : Un poème est un mystère dont le lecteur doit chercher la clef.
René Char : Un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. Seules les traces font rêver.
…………………………...
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"LA BEAUTÉ, DISAIT-IL, te tombe des yeux. Elle ouvre sa lueur dans l’échancrure de la pierre, répand son bleu    dans les rafales des feuilles, trace ses chemins dans le désordre du jour. La beauté est le contour de feu qui cerne chaque chose, la consume et la transfigure." (…)  
"Elle n’est, éblouissante, que l’ombre portée de ton désir. Elle est ton désespoir."
                                                            Jacques Ancet
.
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 (…) 
Aimante-toi. Regarde le Nord.
                                         Silvaine Arabo, Nord 
.
L’envol du corps
cette gangue
sonore
sous ses épines
depuis désertée
                           Anne-Lise Blanchard
.
Il crut s’impliquer dans ses livres.
C’est un autre qui lui parlait.
                        Jacques Canut, Gravillons
.
On a fouillé tous les hasards on a
repeint les mots
(…)
Que reste-t-il à la splendeur sinon ces pieds levés
ces oiseaux fous chargés de rythmes et d’effrois
                 Jean Chatard, La houle des hasards
.
clairvoyance 
entrevue
plus loin que l’horizon
de la raison 
      Marie-Josée Christien, Présence de Guy Allix
(en exergue une citation de Guy Allix : 
 "Pour preuve d’exister (…)
Une feuille prête à tous les vents")
.
Combien de silence
à chercher la parole
 
Et combien de paroles
errantes dans le silence
                       Jean-Louis Clarac, Filigranes du silence
.
Il y a là un mur blanc 
granulé comme une peau
travaillé par le soleil et la neige 
assoiffé comme un désert
ou une transhumance
               Michel Cosem, Les confins ensemble
.
J’étais dans la caverne
là où l’ermite et l’arpenteur lisent dans les ombres
et peignent sur les parois le bestiaire de l’avenir
               Jean-Pierre Crespel, Le chant des isthmes
.
Existe-t-il en moi des lieux inexplorés
 
Un lopin, vierge encor, qu’il faut que je défriche ?
 
Terra incognita qui peut me rendre riche
 
De sagesse, savoirs et talents ignorés ?
          Louis Delorme, L’inachevée, Journal en Pointillés
.
Il est un monde sans choix
où l’on va simplement parce qu’il faut
aller,
il suffit d’avancer, la route se trace ; 
avant, elle n’existait pas ; après, elle
disparaîtra.
            Paule Domenech, Recherche
.
- Un autre nom donné aux poètes : les insomniaques -
(…) 
Pour le droit (‘devoir’ serait présomptueux)
                         de veiller,
                             j’écris.
         Chantal Dupuy-Dunier, Mille grues de papier
.
Pour dire la naissance il faudrait un recommencement dans l’espoir d’un dess(e)in. Pour dire la naissance il faudrait le biffer.
       Jean-Paul Gavard-Perret, Faubourg Reclus
.
Verttiges
De ce qui dans l’invisible
Nous écrit.
     Bruno Geneste, Expérience atlantique des lisières
.
Ce qui s’achève a goût d’étoiles
filantes dans la nuit
et paroles d’écume
(…)
Ce qui s’achève ne cesse pas
Ne cède pas 
                Colette Gibelin
.
Un masque pour toi,
Que tu traces ta légende
Sur sa page d’écorce
Puis le cèdes à la mort
              Emmanuel Hiriart
.
L’absolue routine
ramène la vérité
comme la poussière des greniers
éveille l’image de l’ancêtre
                  Gilles Lades
.
Sages ou délurées
fées et nymphes ne peuvent
traverser l’invisible
limite qui nous cache
l’Autre-Temps l’Outre-Monde.
                 Michel-François Lavaur 
.
Je défiais vent debout mes désespérances
(…)
Et tout recommençait de l’orgasme du monde
Dans l’éblouissement soudain des blocs de neige 
                            Jean-Luc Maxence, Histoire de fjords
.
Il ne manque rien à rien. Que pourrait-il manquer à ce jeu nu de fictions et d’artifices ? Même l’absence n’est pas manque, mais songe ajouté au songe, et celle de Dieu, vertige ajouté au vertige. Tout est là, et qu’on le veuille ou non, il faut tout prendre et tout nous prend : les galets comme les rivières, les routes comme les villes, les dieux comme les fleurs.
                    Christian Monginot, Textes, Voix inverse 
.
        Irréfutable
Désert  Désert  Désert
       (…)
même pas l’os blanc
ni le sable
tout juste la cendre
du silence
               Martine Morillon-Carreau
.
  Alors l’Arbre Ancestral devient vitrail
        feuilles en éclats de couleurs
Ses reflets dispersés sur les herbes humides
        proclament la Vie réconciliée
       Roland Nadaus, Le grand Hêtre/Le grand Être
.
lire le monde
n’oblige en rien
le regard seul suffit
au mot unique
étranger à lui-même
           Ludmilla Podkosova
.
(…) Je suis là-bas
vers le cap du figuier
Je suis là-bas et pourtant ici,
dans un autre port, un autre gué sableux, en partance
et pourtant arrivé depuis longtemps déjà.
                   Jean-Claude Tardif
.
Paupières scellées aux confins de dunes improbables
 
La lumière incontinente serpente les lézardes de l’oubli 
 
        Olivier Verdun, Au gré des regs contondants
.
  Des feuillets étoilés accrochés
                à mon rêve
                   vibrent
     (…)
             à travers l’espace
vers une constellation imaginaire
   de feuillets étoilés suspendus   
                  à un mot
          Dany Vinet, Feuillets étoilés
.
Je me souviens précisément
 
précisément
 
d’un instant de ce jour
où rien n’avait lieu
que d’être un jour comme les autres
          Serge Wellens, Précisément ou presque 
…………………………………………………………….
Note précédente, la recension…
………….
Si on veut découvrir les éditions AlcyoneSilvaine Arabo poursuit son travail éditorial, voici le lien…

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12/05/2020 | Lien permanent

MILA. Harcèlement, ”blasphème”, laïcité, réactions… Et (mise à jour) geste du recteur de la mosquée de Paris

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Déjà se remettre en mémoire ce qui s’est produit, résumé ici, avec le rappel de certaines réactions. (Qui révèlent plus sur ceux qui s’expriment, parfois, qu’autre chose. Ainsi d’un responsable religieux, ainsi d’une ministre, et d’une ex-ministre…)….
Fiche wikipedia. Affaire Mila... https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Mila
 
………………………………………………………………………….
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Fiche wikipedia. Blasphème... https://fr.wikipedia.org/wiki/Blasphème
 
Je me souviens du début, pour Mila. Il me semblait que les réactions hostiles venaient plutôt de gens qui ne supportaient pas « l’atteinte » faite, selon eux, au sacré, à « leur » sacré : fausse conception d’appartenance, d'identification. (Le sacré, s’il est sacré, transcendant donc, se moque éperdument des gesticulations verbales des uns ou des autres - les croyants susceptibles ont une perception erronée du spirituel. Si une réalité dépasse l’humain, source cosmique du Tout alors, elle n’a qu’indifférence pour les prières ou les rejets des esprits humains. Ou elle n’est pas.). 
Mais pourtant au procès qui a lieu, les quelques accusés qui représentent la masse des harceleurs (et pourquoi si peu ? anonymat si efficace ?) ne semblent pas vraiment revendiquer une appartenance religieuse (et motivation), sauf deux, trois peut-être. 
Je n’ai pas l’impression que cela corresponde à la réelle proportion. 
Si c’est l’islam radical qui fait de Mila une cible, pourquoi ceux qui revendiquent l’attaquer pour refuser le « blasphème » dont ils l’accusent ne sont-ils pas réellement présents au procès ? 
 
Et cela pose alors d’autres questions, en plus de ce qui concerne le respect de la laïcité (qui nous rend libres de penser ce qu’on veut des religions et de le dire). 
L’adolescente (d’alors 16 ans) agacée par un dragueur qu’elle repousse, ne supporte pas qu’il l’injurie en se référant à la religion (musulmane précisément) et c’est pourquoi elle répond vivement sur ce terrain. Réponse assez vulgaire, oui.   Mais le style n’est pas ici le sujet… ! Et menace-t-on parce que les termes de quelqu’un nous déplaisent ? Sur les réseaux sociaux on peut signaler, bloquer pour soi, porter plainte même ensuite (la vulgarité momentanée d’un emportement n’est pas une raison pour aller jusqu’à la plainte). Menacer est signe d’autre chose. D’abord de groupes qui agissent en foule et une investigation pourrait révéler les racines de ces agissements. 
Si des jeunes, parmi les accusés, rejettent toute motivation religieuse, soit ils mentent (des convertis cachés ?) soit leur motivation est ailleurs. Haine de la femme, haine de l’homosexuelle qu’elle revendique être. Pulsions machistes qui se greffent sur un autre terrain pour se justifier. Ou, pire, pulsions réellement meurtrières qu’ils satisfont sans avoir à passer à l’acte.
 
Et que font les opérateurs de ces réseaux sociaux ?  Le problème central est aussi là. Lois. Règlements internationaux qui manquent. Pourquoi les harceleurs ne sont-ils pas exclus de ces espaces virtuels ? 
 
Déclarations de l’avocat de Mila, Richard Malka, sur FranceInfo, 03-06-2021… Sur ce Lynchage numérique effrayant et glaçant… https://www.lyoncapitale.fr/actualite/affaire-mila-ouvert...
…………….
 
ARTICLES...
 
Michel Taube, dans Opinion internationale, analyse le sens des errements choquants de Ségolène Royal et son rôle d’idiote utile, marque d’une gauche « archaïque » (je cite, mais je co-signe, hélas) qui dérive. Clair et net. À lire… 19-11-2020… https://www.opinion-internationale.com/2020/11/19/segolen...
 
Tribune de Jean-Pierre Sakoun, militant laïque, responsable d’association. Le symbole du naufrage de la pensée et de l’action démocratique s’appelle Mila. Marianne, 16-06-2021…  
Il analyse le contexte idéologique et politique de cette terrible affaire… 
 
Article de Marianne, 22-06-2021. Le point sur le procès. Désolantes réactions des accusés. Fans de mangas et haine pure...https://www.marianne.net/societe/police-et-justice/au-pro...
 
VIDÉO. Amine El Khatmi (président du Printemps républicain). Ce qui reste à Mila c’est la justice…  https://video-streaming.orange.fr/actu-politique/amine-el...
 
Sur le procès et le contexte politique (réactions…). Le Monde, 22-06-2021… https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/06/22/affaire...
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ACTIONS SOLIDAIRES ? Les féministes françaises sont globalement absentes des soutiens (trop d’entrisme religieux sans doute et de confusion idéologique). Par contre j’ai vu sur la page Facebook de Femmes contre les intégrismes (une des rares associations à intervenir) le partage d’une vidéo montrant des féministes marocaines taguer des soutiens à Mila en occupant des murs… Vidéo reprise par une page marocaine laïque, et précédée d’affirmations claires d’un soutien sans conditions. En France, à noter, le soutien du MPCT (mouvement laïque, pour la paix et contre le terrorisme). Et celui de la LICRA. Page... https://www.licra.org/liberte-dexpression-soutien-indefectible-a-mila
 
PÉTITION de soutien. Affirmer les valeurs qui nous rassemblent,  refuser ce qui permet cette situation effarante… https://www.change.org/p/liberation-autour-de-mila
 
VIDÉO. Sophia Aram, Ce silence… Sur la lâcheté de ceux qui ne disent rien pour soutenir Mila… Passage savoureux sur les féministes… https://www.youtube.com/watch?v=pdCCmy_ASUE
..................
Par contre, honteuse déclaration d’une féministe (ou déclarée telle), Lauren Bastide, qui publie son refus de soutenir celle qui est menacée de mort, en considérant qu’elle est, dit-elle, raciste (confondant son rejet d’une religion avec le rejet des personnes pour leur origine). Ceci est révélateur d’une tendance idéologique assumée, compromissions masquées. Jean-Loup Adenor en a fait une analyse dans Marianne, le 25-06-2021… https://www.marianne.net/societe/laicite-et-religions/je-...
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LIVRES
 
Celui de Mila. Je suis le prix de votre liberté, Grasset, juin 2021. Présentation par l'éditeur… https://www.grasset.fr/livres/je-suis-le-prix-de-votre-li...
 
Celui, à deux voix, de Richard Malka et Georges Kiejman, Éloge de l’irrévérence, Grasset, mars 2019… (Ou le contraire de la soumission…)… Leurs plaidoiries "déconstruisant le totalitarisme", au sujet de Charlie. Présentation par l'éditeur… https://www.grasset.fr/livres/eloge-de-lirreverence-97822...
 
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LIVRE, aussi. Puisque le blasphème est en question, on peut rappeler le témoignage de Waleed Al-Husseini, palestinien de Cisjordanie réfugié en France après avoir été emprisonné et torturé sur décision de l’Autorité palestinienne, pour athéisme. Blasphémateur ! Les prisons d’Allah, Grasset, janvier 2015… https://www.grasset.fr/livres/blasphemateur-9782246854616
 
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LIEN. Une chronique qui peut expliquer pourquoi des associations finissent par refuser des soutiens en se référant faussement à des valeurs déformées. Lire cette analyse. Regard tunisien sur les méthodes des islamistes.
Les associations et l'infiltration par l'idéologie des Frères musulmans. Par Rachid Barnat.
"Les islamistes habiles savent utiliser le droit et les valeurs de la France pour les retourner contre elle."...
 
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Mise à jour, 10-07-21… Mila reçue par le recteur de la grande mosquée de Paris… Un geste fort, à respecter.

Les mots de Richard Malka au sujet du recteur de la mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz, dont il dit qu’il est un humaniste présentant un autre islam que celui des harceleurs. Il a reçu la jeune Mila qui explique ainsi qu’elle n’a rien contre les musulmans en tant que personnes. Estime et espoir. FranceInfoTV, 09-07-21... https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/affaire-mila/mil...

Autre page, même source, FranceInfoTV. L’invitation du recteur de la mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz, qui est aussi un confrère et un ami de Richard Malka… Les signes du dialogue possible… https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/affaire-mila/mil...

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23/06/2021 | Lien permanent

Que penser du rapport de Benjamin Stora ?

STORA.jpgNous devrions nous taire
Si fiers de nos histoires, si fiers de nos mémoires
Si macabres et sans gloire…
Nous devrions nous taire
Se parler pour dire quoi ?
Qui comprend qui ? Qui comprend quoi ?
(…)
Les mots sourds… Les mots sont trop courts...
(…)
Depuis qu’il pleut ces mots,
n’y a-t-il plus de frontières ?
(…)
Et ces milliards d’écrits,
et ces milliards de cris
qui fondent dans l’oubli…
(…)
On nous dit que les mots,
que les mots sont des armes,
que les guerres ils désarment...
(…)
Mais
combien de fois le mot 'haine'
a vaincu les mots 'j’aime'
(…)
Les mots sourds… des comptes à rebours.
Nicolas Granier, chanson (paroles et musique). Les mots sourds
 
… Cet exergue s’est imposé, à l’issue du long travail de réflexion sur ce sujet,  déchiré entre différentes mémoires, dont certaines trahies par les mensonges de pouvoirs ou d’auteurs influencés par leur idéologie. Je ne sais pas à quoi pensait l’auteur exactement en écrivant cela. Sans doute pas à mon sujet, mais peut-être réfléchissait-il en fonction de ses lectures de la presse sur différents thèmes d’actualité (tant d’avis divers, tant de contradictions). Le poète-chanteur écrit, imprégné des douleurs qu’on entend ou lit, qui se mêlent à ses propres blessures, à cette difficulté de dire la complexité du réel, où le vrai se mêle au faux, où l’individu souffre de ce qui le nie, mais aussi de sa difficulté à ne pas se trahir lui-même, en choisissant les mots … 
 
Mais je l’associe à ceux qui suivent, dans l’axe du sujet traité…  Poème d’un auteur algérien, penseur en lucidité et humanisme, Ahmed Azeggah, citations de René-Jean Clot et Khrishnamurti...
Charef.jpgArrêtez de célébrer les massacres
Arrêtez de célébrer des noms
Arrêtez de célébrer les fantômes
Arrêtez de célébrer des dates
Arrêtez de célébrer l'Histoire
(…)
Ce sang coagulé
Venin de la haine
Levain du racisme
(…)
On en a marre de vos histoires et vos Idées
Elles rebuteraient tous les rats écumeurs de poubelles
(…)
Laissez-noius laissez-les vivre
En paix
Sur cet îlot de l’univers
L’univers seule patrie
Ahmed Azeggah, Arrêtez. Anthologie de la poésie algérienne, Quand la nuit se brise, Points.
 
Qu’avons-nous appris ? À vivre sans sombrer dans la haine. 
René-Jean Clot, Une Patrie de Sel ou Le Souvenir d’Alger 

Pour instaurer la paix dans le monde, pour mettre fin à toutes les guerres. (…)  Il faut une révolution dans l'individu, en vous et moi. (...) Ce qui nous apportera la paix ce sera une transformation intérieure qui nous conduira à une action extérieure. (...) Il n'y a pas de pensée claire sans connaissance de soi. Sans connaissance de soi, il n'y a pas de paix.                        Khrishnamurti (La Première et Dernière liberté)

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SOMMAIRE de la note (repérer les titres en majuscules) :
 
. Le rapport Stora dans l'actualité. Et Benjamin Stora, à travers son estime d'Albert Camus. 
. Mémoires à guérir et mémoires ostracisées encore. Mémoire et traces. Histoire du rabbin de Vienne. Le concept d’hantologie (Jacques Derrida). Albert Camus, d’avance… 
. Le rapport Stora (dont lien pour lecture, pdf en ligne, et livre éd. Albin Michel)
. Les enjeux du rapport Stora. (Deux regards, deux rives : affronter une parole authentique, et le futur en France et en Algérie)
. Albert Camus, au cœur d’affrontements. Lectures sur les deux rives, et rejets pour stratégies de pouvoir 
. Analyse critique d’historiens (JJ Jordi, Guy Pervillé et signataires)
. Synthèse critique, par Mohand Hamoumou, spécialiste de l’histoire des harkis. Et synthèse pour lectorat jeune, presse.
. Synthèse des réactions diverses, vues à l’étranger
. Réactions des communautés concernées (Pieds-Noirs, Harkis, anciens combattants). Différentes associations, textes et liens
. Réactions algériennes (et réponse de Benjamin Stora)
. Mémoires, blessures, traumatismes, textes et témoignages
. Mémoire, histoire, terrorisme. Citations (deux rives)
. Histoire, guerre, colonisation et décolonisation
. Articuler mémoire et histoire, analyses
. Le présent algérien (regard de J. Ferrandez, bédéiste + la presse algérienne, titres à lire en ligne)
. Le futur de l’Algérie 
. Le futur des relations France-Algérie (textes, liens) dont documentaire à deux voix (fille de Pieds-Noirs, et Algérien). Et éclairage tunisien...
. BIBLIOGRAPHIE. Dont LISTES et citations (liens) 
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Sirocco.jpgLE RAPPORT STORA DANS L’ACTUALITÉ...
 
Depuis des semaines, et plus, les discussions sur le rapport de Benjamin Stora, au lieu d’apaiser les esprits et d’aider le dialogue entre les rives (d’une part) et, en France, entre les communautés humaines concernées (d’autre part), n’ont fait qu’accentuer les tensions et remettre dans l’actualité des blessures que seuls l’Histoire et le temps peuvent calmer. J’ai l’impression qu’il y a des paris faits sur la disparition des générations directement impliquées (Algériens d’avant 62, indépendantistes engagés, Pieds-Noirs exilés, Harkis trahis, Franco-Algériens et Français d’origine algérienne par les parents, appelés traumatisés, etc.). Mais cela c’est oublier la transmission trans-générationnelle directe ou inconsciente. Les refoulés des traumatismes sortent plus violemment.  
 
De plus ces mémoires complexes (colonisation, décolonisation, guerre, terrorisme, massacres, exils) sont traitées très diversement par des courants politiques qui s’en saisissent. Soit pour attiser les douleurs en les manipulant idéologiquement et politiquement. Soit pour instrumentaliser la mémoire du passé pour des intérêts de pouvoir, des stratégies électoralistes, ou simplement se servir des émotions qu’on actualise pour créer des tensions et des haines. Diviser, certains partis extrémistes le cherchent. Il y a encore une extrême droite, en France, qui reste nostalgique d’une Algérie d’avant 62 dont le statut français serait inchangé. Posture a-historique que le FN/RN encourage. Mais il y a aussi les anciens porteurs de valises (favorables au FLN créateur d’un système que l’Algérie refuse et à ses méthodes, dont le terrorisme contre les civils). On les voit s’exprimer là et là, n’hésitant pas à mentir pour tordre les faits à leur manière (occultant, déformant). On pourrait croire que le débat Sartre contre Camus continue…  On trouve cela, cette fois, plutôt au PCF, chez Médiapart, et diverses extrêmes gauches… 
 
Le président Emmanuel Macron, qui cherche à clore des rapports faussés par des choix du passé (Afrique, Algérie, etc.), parfois très justement (Rwanda), parfois maladroitement (certaines déclarations sur la colonisation), le président, donc, a demandé à un historien, spécialiste de l’Histoire de la guerre d’Algérie, Benjamin Stora, de rédiger un rapport qui servirait de base à un nouveau dialogue avec l’Algérie , pouvoir et peuple. (En fait avec le pouvoir algérien actuel, qui utilise la colonisation pour masquer tous les manques de sa politique). 
Première erreur. Car (même en relation avec un historien algérien) un historien est un individu qui pense aussi en fonction de sa vision, de son positionnement idéologique (racines d’extrême gauche dans ce cas). Erreur, d’autant plus que des historiens spécialistes de cette histoire de l’Algérie avant 62  il y en a plusieurs de grande qualité. Dont certains sont pieds-noirs, une fille de harki, d’autres simplement des Français intéressés par cette période historique, du fait des drames qui y sont associés et des conséquences dans la société française.
 
Il n’est pas question de faire un procès d’intention à Benjamin Stora, natif d’Algérie, certainement sincèrement passionné par le sujet et les enjeux. Mais limité par l’immensité d’un matériel dont il ne domine pas tout (on le voit dans des erreurs pointées par les uns ou les autres, lisibles dans des réponses qui ont été rédigées). Et limité aussi par ses options idéologiques, un manque de recul critique au sujet du pouvoir algérien, des projections sur des réalités par méconnaissance du sujet (voir, encore, des textes  en réponse critique).
D’autant plus que Benjamin Stora (je l’ai écrit dans la note sur l’École d’Alger) montrait son attention aux mémoires partagées, en mentionnant la connivence qu’il avait notée entre les nombreux écrits de récits de femmes, algériennes et pieds-noirs (article de lui dans la revue Expressions maghrébines). Et en relisant plusieurs de ses déclarations au sujet d'Albert Camus on voit qu’on ne peut le considérer de manière manichéiste. Dans un entretien publié dans un hors-série de Philosophie magazine (avril-mai 2013) il rappelait l’évolution des positions de Camus, appelant à la trêve avec Ferhat Abbas, puis se rapprochant ensuite de Messali Hadj, du MNA (qui avait des affinités d’analyse avec Camus : "pour la pluralité politique, antistalinienne, antitotalitaire". C’est le massacre de Melouza (par le FLN, pour sanctionner leur choix du MNA) qui rapproche Camus de Messali Hadj. Or c’est sur Messali Hadj que Stora a fait sa thèse (on peut lire aussi le livre de la fille de cet homme sacrifié par le FLN, et exilé définitivement, désespéré). De Camus Stora dit qu’il est "homme de passerelles, pas un éradicateur", "attaché à une histoire méditerranéenne commune, faite de strates mêlées d’influences européennes et algériennes". Pour Stora, Le Premier Homme est le plus grand livre de Camus. 
Dans un autre entretien, Le Figaro du 24-10-2013. Benjamin Stora dit voir en Camus la possibilité de construire, à travers lui, "une passerelle entre les deux rives". Et il ajoute "d’autant plus que les extrémismes existent des deux côtés de la Méditerranée", et dit regretter que rien n’ait été fait à Alger pour signaler la maison où Camus a grandi.
C’est pourquoi c’est dommage que Stora n’ait pas travaillé avec  d’autres historiens pour ce rapport. La complexité aurait été mieux respectée (y compris la sienne…) et il y aurait eu moins de polémiques, plus de vérités abordées. 
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Nicole Garcia.jpgMÉMOIRES à GUÉRIR… et MÉMOIRES OSTRACISÉES ENCORE 
 
Même si, pour les historiens, comme c’est clairement dit dans le texte de Jean-Jacques Jordi, Guy Pervillé et des historiens associés à leur analyse du rapport, il faut passer "des mémoires à l’histoire". Oui, c’est très juste. Mais les mémoires sont matière, aussi, pour les historiens. Et les opinions des groupes influencent les décisions politiques (ou servent des manipulations partisanes par des leaders extrémistes parfois - dont des nostalgiques de divers groupes criminels). Et même, c’est ce qui est reproché au rapport Stora, l’opinion peut interférer dans les travaux de l’historien, entraînant occultations ou erreurs. 
 
Car les remontées de mémoire, associées à la réactivation des débats sur l’Histoire, cela se heurte aussi à des réactivations de déclarations ostracisantes et diffamantes. Ainsi le journaliste politique Jean-Michel Aphatie a tenu, sur France 5, le 23 janvier (C L’Hebdo) des propos méprisants de rejet des Pieds-Noirs, ces "étrangers" présents en Algérie. Y voyant une raison d’ironiser sur l’Algérie "française" habitée par des "étrangers". Pas gêné par sa xénophobie affichée. Pourtant, s’il avait lu Camus, il saurait que ces gens-là n’étaient pas les riches colons "français", et qu’ils étaient bien plus proches de la mère de Camus. C’est l’anticolonialisme de salon, qui se trompe de cible pour flatter des égos. De ceux qui pourtant, en tant que Français, descendent de ceux qui décidèrent - ou laissèrent décider - de coloniser.  Ce que ne firent pas ces "étrangers’" justement parce qu’ils n’étaient pas Français… Oubli, souvent, que la colonisation fut le choix d’une gauche qui se déculpabilise en projetant sur une communauté déjà traumatisée la responsabilité de ses actes. 
Au lieu d’avoir une réflexion sur les réalités de l’immigration (espagnole, italienne, maltaise…) et sur le métissage méditerranéen qui en résultait. (Ce qu’a fait très bien, au contraire, l’universitaire algérien Mourad Yelles dans son ouvrage sur les cultures et métissages en Algérie. Il consacre un chapitre aux "Algériens de l’entre-deux / Les identités orphelines".).  Mais cette immigration n’est pas présente en tant que telle au Musée de l’immigration, et pas plus dans l’imaginaire si souvent faussé de la métropole. Ainsi les Espagnols venus en France métropolitaine, oui. Mais les Espagnols andalous partis en Algérie voisine, non. Pas de reconnaissance de leur histoire.
Oubli, aussi, des Français dont les ancêtres furent des orphelins que l’État français fit partir en Algérie. Oubli des Communards exilés de force. Et des Alsaciens fuyant pour rester Français. 
C’est un exemple de cet ostracisme. On pourrait en citer bien d’autres. De quoi faire un

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Habiter poétiquement le monde, Poesis. Anthologie... / NOTE mise à jour, juin 2022

habiter poétiquement le monde,anthologie,anthologie-manifeste,poesis,hölderlin,frédéric brun,kenneth white,poésie,éthique,spiritualitéRiche en mérites, mais poétiquement toujours, / Sur terre habite l’homme

Friedrich Hölderlin, En bleu adorable, cité dans Habiter poétiquement le monde, Poesis, 2016

(Exergue de l’anthologie-manifeste réalisée par Frédéric Brun, et dont le titre s’inspire de cette pensée d’Hölderlin. Formule, non, bien plus. Fragment d’un poème, et vision-programme.)

...

Il faut, sans innocence et naïveté, certes, dépasser ses doutes pour s’offrir un chemin de résistance.  

Frédéric Brun, Avant-propos, Habiter poétiquement le monde

Dans cet avant-propos de l’anthologie, c'est ce chemin de résistance, qui est proposé, résistance car il n’est pas évident de suivre avec optimisme la formule d’Hölderlin. Le manifeste que veut être cette anthologie, pensée par Frédéric Brun, tient compte des difficultés d’un monde traversé par des laideurs qui peuvent masquer sa beauté, sa possible beauté. Résister par un acte de lucidité, un retour sur soi, une volonté de métamorphose. Pour créer un monde plus juste il faut d’abord se mettre en situation de refus. Résistance contre ce qui doit être refusé, et résistance contre la part amnésique de soi, oublieuse de son essence. Ensuite, alors, créer et agir. Mais comme le pense Michel Deguy (et c'est rappelé là en le citant) ce n'est pas forcément un chemin politique mais une habitation intérieure différente... http://www.poesis-editions.fr/habiter-poetiquement-le-mon... 

...

Cette anthologie, très ample (pas loin de quatre cent pages, 367 exactement) ne donne pas à lire des poèmes (sauf fragments de citations), mais des textes "sur" la poésie. Principalement des écrits de poètes sur leur art, mais pas uniquement : penseurs qui sont proches de la poésie, pour en être lecteurs attentifs, ou pour avoir une conception de leur écriture qui s’en rapproche, et personnalités qui, par leur vision et leur action, tentent de définir ce que peut être habiter poétiquement le monde. Ainsi Pierre Rabhi est présent, au même titre que Gaston Bachelard ou Hubert Reeves

Des poètes présents dans cet ouvrage je retrouve beaucoup de mes propres références. Ainsi, dès l’avant-propos, et dans la table des matières, je vois mentionnés des noms qui sont aussi sur les rayons de ma bibliothèque (mais je ne les citerai pas tous…). Voici : Joubert (celui des Pensées, pour moi coup de foudre absolu,) Baudelaire, Dickinson, Rimbaud, Mallarmé, Rilke, Valéry, Tagore, Pessoa, Tsvetaeva, Artaud, Michaux, Paz, Borges, Neruda, Bonnefoy, Aleixandre, Juarroz, White, Glissant, Adonis, Deguy, Cheng, Midal (dont j’ai apprécié certains textes dans la revue Ultreïa, Bobin (que je retiens aussi, à la mesure des résistances que certains lui opposent au nom d’une fausse rationalité confondue avec l’aveuglement arrogant), et Bianu, Velter, Siméon… et d’autres, tous qui comptent. 

J’aurais ajouté certains noms (Nerval...?!), comme celui de Jabès, par exemple…! Camus manque aussi, et Lorca (son texte sur El duende…!). De même Levis Mano, poète et éditeur génial… Et María Zambrano (philosophe espagnole, qui a écrit des pages magnifiques sur la poésie… et dont certains fragments sont à hauteur du poème). Et Anna Akhmatova ? J’aurais trouvé le moyen de placer Antonio Porchia… Les "trous" dans mon abécédaire idéal peuvent être dus à une volonté de cohérence intérieure, autre que celle que je projette…

Mais ce n’est pas mon anthologie… et elle est d’une telle richesse que je me contente de picorer de temps en temps des citations, pour me faire, en feuilleton, une anthologie mentale miniature…  Ainsi, partager un plaisir de lecture, dans ce considérable travail de lecture et recherche qui a été produit par Frédéric Brun… Il faut être, nous aussi, passeurs de ces messages qui ont un sens politique, bien au-dessus des batailles des égos politiciens. 

Pour Frédéric Brun, dans l'axe de pensée d'Hölderlin, habiter poétiquement le monde définit tout autant une conception de la manière de choisir de vivre sur cette planète pour le temps qui nous est réservé que la manière de concevoir le rôle de la poésie, cette écriture spécifique qui manie les mots mais vient d’un regard particulier d’êtres qui engagent une éthique de vie. Regard, âme, spiritualité, conscience… sont des termes qui peuvent aider à traduire ce qu’est l’expérience poétique, ses liens avec le quotidien banal et la hauteur d’une perception de ce qu’est "être", pas seulement exister. En fait, la mystique (que plusieurs assument en tant que telle pour exprimer ce qu’est leur itinéraire entre ciel et terre) rejoint l’écologie et la politique. Non la politique partisane, mais l’engagement d’un Hugo. Non l’écologie comme une mode sans remise en question profonde, mais une écologie qui est tout autant écologie de soi-même - comme l’affirme Michel Deguy, transformation intime, un pas vers autre chose (lire Pierre Rabhi..)…

L’autre nom majeur, ici, fondateur, en dehors d’Hölderlin, est celui de Kenneth White, car si éthique il y a, c’est bien dans la pensée de ce très grand poète, dont l’ambition n’est pas, pourtant, d’être cela (un "grand poète" reconnu, ou simplement connu) mais d’impulser une pensée du monde, dans le monde, solidaire, une  "géopoétique" d’êtres incarnés, soucieux de leur planète, et conscients de leur place dans le cosmos. 

Consulter ce site : http://www.kennethwhite.org/geopoetique/   

Et celui-ci : http://www.oeuvresouvertes.net/autres_espaces/white.html 

Pour Kenneth White, la poésie commence par un refus radical du monde, le monde tel qu’il est, fait par les hommes, pour l’injustice, la violence et la haine (ou l’ennui). Monde mobile, inachevé, il est là pour qu’on le crée et qu’on se crée en même temps, et ainsi qu’on crée les liens avec les autres humains, à la mesure de notre connexion cosmique, puisque nous sommes part du cosmos et devons nous en souvenir, pour devenir qui nous sommes… 

De Kenneth White j’ai envie de copier un poème du recueil La résidence de la solitude et de la lumière (William Blake and co, 1978). Car il dit une intention principale, sur quels refus se fonde sa démarche essentielle, et donc sur quelle création fondamentale et fondatrice.  

   Travaillant et retravaillant

   les mêmes textes

   jour après jour

   perdant tout sens

   de ‘production’ et de ‘publication’

   toute idée d’une ‘réputation’ à forger

   engagé plutôt dans quelque chose

   — loin de toute littérature —

  que l’on pourrait pertinemment nommer

  un yoga poétique

Sagesse humble, humble du vrai orgueil d’être, qui devrait être méditée par pas mal de gens qui jettent en pâture des écrits trop imprégnés d’une ambition qui suinte entre les mots et les pages, et nous fait remporter  certains livres achetés par erreur, vers des circuits moins exigeants… Car alors l’âme est désertée, il ne reste que le vide un peu trop "littéraire", au très mauvais sens du terme.

Je reviens donc à l’avant-propos de Frédéric Brun (une dizaine de pages).

Après avoir cité de nouveau Hölderlin : Et pourquoi des poètes en temps de détresse ?, il rappelle que l’habitat poétique exige une éthique, pour laquelle l’homme doit cesser de mettre l’économique en première place, et donc changer de priorités pour retrouver l’essence de son existence. Pour cela, notamment, se nourrir de beauté, regarder (s’en inondant l’âme et les yeux). Et il conclut : Cette attitude poétique pourrait, si nous étions plus nombreux à l’adopter ou au moins à en prendre conscience, devenir également un acte politique et écologique qui participerait au changement du monde. 

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Mise à jour, juin 2022

Pour le Marché de la poésie, j'ai l'habitude de faire un exercice de sagesse (pour éviter de charger mon sac de médiocrité, car la médiocrité est aussi présente sur certains stands - et mon exigence me fait ne vouloir lire que ce que je situe dans l'espace de la haute poésie, telle que je la pense et telle que je ne veux l'écrire qu'ainsi, car autrement... stérile occupation d'ego). Donc je programme mes choix, sélectionnant avec mesure. Et je reviens vers les éditions proches (au sens où j'y habite des pages, en affinité) et vers celles où j'ai eu aussi, en lectrice, la joie de grandes rencontres de lecture. Je suis donc revenue, aussi, vers Poesis, et j'ai recherché cette recension, qui date de plusieurs années. Notant d'abord (je n'y avais pas pensé avant) la proximité entre le sujet de mon livre sorti ce mois de juin 2022 (Le réel est un poème métaphysique, éds. Unicité) et les questionnements des pages de l'anthologie. Ma démarche rejoint l'éthique définie par les auteurs.

habiter poétiquement le monde,anthologie,anthologie-manifeste,poesis,hölderlin,frédéric brun,kenneth white,poésie,éthique,spiritualité,citations,livres,le plâtrier siffleur,christian bobinÀ côté de l'anthologie j'avais glissé, dans ma bibliothèque, en 2018, Le plâtrier siffleur de Christian Bobin, ce petit livret publié par Poesis et reprenant l'intégralité d'un texte publié dans la revue Canopée en 2012 (dans l'anthologie la contribution de Christian Bobin est ce texte, par de larges extraits). Relisant, là, je regrette de ne pas l'avoir fait plus tôt, car je tombe sur un passage dont j'extrais une pensée qui aurait pu s'ajouter aux exergues en tête de mon livre. Je vais garder cela en mémoire, le regard sur le réel restant toujours mon sujet, d'une manière ou d'une autre. Définissant sa conception de la poésie, et refusant l'excès technique, ce qui fait grandir une lèpre d'irréel qui envahit silencieusement le monde, il écrit, pour insister sur l'importance de regarder...

La contemplation (...) c'est comme mettre la main sur la pointe la plus fine du réel.

Voilà qui complète la vision qui est l'axe de cette édition, Poesis. Car si, comme le dit Maître Dogen, qu'il cite, l'univers entier est la pensée des fleurs, écrire de la poésie, en voulant habiter poétiquement le monde, c'est, écrit Christian Bobin, tendre le langage au maximum

habiter poétiquement le monde,anthologie,anthologie-manifeste,poesis,hölderlin,frédéric brun,kenneth white,poésie,éthique,spiritualité,citations,livres,le plâtrier siffleur,christian bobinÀ savoir, l'anthologie a été rééditée, version enrichie, "édition revue et augmentée", 2020.

habiter poétiquement le monde,anthologie,anthologie-manifeste,poesis,hölderlin,frédéric brun,kenneth white,poésie,éthique,spiritualité,citations,livres,le plâtrier siffleur,christian bobinMais, exercice de préparation du Marché, et des livres à rechercher plus tard, suite... 

J'ai regardé, sur le site de Poesis, ce qui est dit des publications. Plusieurs livres m'intéressent d'avance, la présentation qui est faite donne assez d'éléments pour permettre de choisir. J'ai très envie de découvrir d'abord l'ouvrage de Jean Onimus, Qu'est-ce que le poétique ? Sur ce livre j'ai lu aussi une recension ailleurs, mais qui dit qu'il oppose prose et poésie. Ce n'est pas ce qui me semble son approche dans ce livre, telle que présentée sur le site de Poesis. Il oppose le poétique et le prosaïque, ce n'est pas la même chose. La prose peut être très étrangère au prosaïque.

Les autres titres que je mentionne feront aussi un programme de lecture décalé...

habiter poétiquement le monde,anthologie,anthologie-manifeste,poesis,hölderlin,frédéric brun,kenneth white,poésie,éthique,spiritualité,citations,livres,le plâtrier siffleur,christian bobinAnthologie, encore (en tout cas livre collectif), un ouvrage sur la notion de beauté. Des auteurs de plusieurs époques... et François Cheng (argument d'achat suffisant pour moi...). 

Mais aussi, La poésie de la terre ne meurt jamais, de John Keats...

J'ai repéré deux livres de Carles Diaz, poète franco-chilien, et historien de l'art. Il entre dans l'univers d'un autre et rend compte de ses rêves

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23/11/2016 | Lien permanent

Islamisme et idéologie...

1 Courrier intcouv-ok_1.jpgSi l’homme veut se faire Dieu, il s’arroge le droit de vie ou de mort sur les autres. Fabricant de cadavres, et de sous-hommes, il est sous-homme lui-même et non pas Dieu, mais serviteur ignoble de la mort.
                                                                  Albert Camus, L'Homme révolté
 
 
Alors justement il faut vivre.
Patrick Pelloux, Urgences de vivre
 
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Notre horizon est fait aussi de débats sur les pressions idéologiques de courants identitaires islamistes, qui nourrissent le terrorisme. Sur ce dernier sujet ce sont souvent des intellectuels de culture musulmane (croyants ou agnostiques ou athées) qui savent le mieux en parler, ne tombant pas dans le piège de la crainte d’être taxés d’islamophobie. Et connaissant de l’intérieur la culture (dont la pensée des gens simples) ils évitent aussi les projections et rejets. Ils refusent l’amalgame que font les islamistes entre musulmans et islamistes (pour reporter sur toute une communauté le fantasme de stigmatisation quand seuls eux sont dénoncés). Mais hélas la porosité est aussi un fait entre une population attachée à sa croyance et des idéologues qui veulent la capturer. 

Un texte d’Abdennour Bidar. Percutant, nécessaire. Qui exprime sa rage de penser que les auteurs majeurs parlant de l’islam et combattant l’islamisme prêchent dans le désert. Colère contre les aveuglements complices et les confusions haineuses…

Citations : « En collectionnant les figures d’« imams progressistes » chez lesquels il n’y a le plus souvent qu’un effort parfois sincère mais toujours insuffisant d’adaptation de l’islam, nous avons franchi le pas scélérat de la complicité objective avec tout ce qui contredit les valeurs de la République et des droits de l’Homme. En ayant fait de Ramadan un phénomène médiatique (…) c’est en réalité sa starisation qu’on a organisée. » (…)

« Encourager une philosophie critique de l’islam. 

A l’arrivée, c’est le positionnement d’une trop grande partie de nos élites vis-à-vis de l’islamisme qui n’est ni lucide ni clair.» (…)

  « Meddeb est mort, Arkoun est mort, Chebel est mort, après avoir tous crié dans le même désert. C’est indigne de la France. Combien restons-nous désormais à produire une philosophie critique de l’islam ? Une pensée qui nourrisse en chacun les questions spirituelles aussi bien que l’appartenance citoyenne ? Une pensée qui réconcilie les identités, les appartenances, et qui œuvre pour une fraternité qui ne soit pas que de façade ou de fronton ? On pourrait nous compter sur les doigts d’une main » (…)

« Il est grand temps d’arrêter d’être aussi aveugles, complaisants ou lâches face à tout ce qui produit de la radicalité aujourd’hui au quotidien dans notre société. Il faut arrêter aussi, à toutes les échelles, les politiques de complicité avec l’islam politique « http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/11/14/tirons-les-lecons-de-l-affaire-ramadan_5214532_3232.html#1LGXIfxgV5HGqKbv.99

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Autre chronique, cette fois pour questionner le « lieu » idéologique de la parole de Plenel. Analyse excellente qui mérite une lecture intégrale attentive. Décryptage d’un positionnement complaisant qui a des racines politiques précises, des failles de pensée anciennes, des objectifs non dits. Réflexion d’Alain-Jacques Jacot sur son blog…

« Islamo-gauchisme, trotskisme et taqiya. D’où parles-tu, camarade Joseph Krasny? »

Citations (et lien) :

« Il était d’usage en 1968, lorsqu’un intervenant demandait la parole dans une AG, de lui demander « D’où parles-tu camarade? », histoire de savoir quel courant idéologique il réprésentait. Voilà longtemps que des journalistes paresseux ou ignares, représentant de médias complaisants, ne posent plus cette question au camarade Joseph Krasny (son pseudo de journaliste de « Rouge », l’organe de l’ex-Ligue Communiste Révolutionnaire, un certain Edwy Plenel qui depuis 20 ans, agit sous couvert de « recherche de vérité journalistique »! » (…)

« Voilà d’où parle le « camarade » Joseph Krasny-Edwy Plenel . Voilà ses buts, voilà ses méthodes! Il poursuit le même but avec les mêmes méthodes que tout militant trotskiste  » infiltré » dans un milieu ennemi. » (voir, sur la note du blog, la liste, qui précède cette phrase, des « méthodes » trotskistes). (…)

« Il se trouve que cet objectif est exactement le même que celui du prédicateur « frère musulman » Tariq Ramadan. Leurs méthodes également. Dans une répartition de rôles, l’un vise la gauche, l’autre les musulmans; l’un les médias, l’autre l’Université. 

Cette alliance objective, illustrée par la complicité entre Ramadan et Plenel, a été théorisée en 2004… » (…)

 « D’où parles-tu, camarade? .

Je demande aussi aux mêmes journalistes de poser à Tariq Ramadan, prédicateur des Frères Musulmans sous couvert d’islamologie, Islamiste qui veut prendre en otage nos concitoyens musulmans, cette même question. (…)

C’est donc maintenant aux républicains, de droite comme de gauche, à se mobiliser pour sauver l’essentiel : LA REPUBLIQUE FRANCAISE, Universaliste, une et indivisible, sociale et laïque. » https://leblogalupus.com/2017/11/13/islamo-gauchisme-trot... 

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A partir de ces questionnements toute intervention peut être située. 

Poser la question du lieu social, idéologique, et politique, d’où quelqu’un s’exprime, peut se faire directement (journalistes… à condition qu’ils aient fait le travail d’information indispensable). Mais il peut se faire (lecteurs, public qui s’informe) indirectement, en cherchant les traces, les sources, les modalités du « dire ». C’est appliquer simplement la règle de lecture qui est enseignée quand on explique ce qu’est l’énonciation, quand s'exprime un locuteur qui est quelque part, ceci ne signifiant évidemment pas seulement un lieu géographique, mais tout ce qui situe l'espace idéologique et intellectuel à partir duquel quelqu'un élabore son discours. « Qui parle? A qui? D’où? » Ce b.a. ba enseigné au collège est souvent oublié par des « intellectuels » négligeant la rigueur…  De plus, à cette triple question il faut ajouter « Comment? ». Les mots choisis, la structure des textes et des phrases, les références et les silences, voilà qui donne des clés. En plus des faits trop souvent occultés (comme ce livre de Plenel, soi-disant en soutien des musulmans, diffusé abondamment par le Qatar, pays auquel Ramadan est lié par des soutiens et engagements, etc.).

Dans un article Médiapart (Plenel) considérait qu’il existe « un islamisme démocrate que représentait Ramadan » (!!!). Et une responsable de Médiapart a déclaré que l’islamisme n’était « pas une chose grave »… La logique complaisante poussée à bout.

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Documents.
Un communiqué du Comité Laïcité République, qui pose les questions adéquates. "Plus de place, dit-il, pour les idiots utiles et les accusations d’islamophobie"…  https://www.laicite-republique.org/face-a-la-barbarie-plu...
 
"Les mots laïques de l'écrivain", de Kamel Bencheikh.  Voir notamment ce qu'il dit de l'islamogauchisme...
Il écrit ceci dans une note introductive : "Tout dire, et le dire à ma façon, voilà ma spécialité. Cette certitude absolue. Difficile d’en démordre quand on a soif de vérité et de liberté."
Voici une parole d'écrivain qui sait que parfois on doit poser d'un côté ses textes littéraires et prendre le temps d'inscrire ce que l'éthique et la raison exigent de soi sur l'autre part du réel, celle qui met en danger justement toute poésie et toute beauté. 
https://mobile.agoravox.fr/tribune-libre/article/les-mots...
De lui aussi, cette chronique sur les pressions antilaïques…
Et "La critique sauve les religions de ce qui les menace", voici ce que dit Rachid Benzine, islamologue… Page FranceInfo… 
Aussi…
Une chronique d’Amin Zaoui, sur Liberté-Algérie (où il publie régulièrement) qui évoque la rupture entre, d'un côté, les fanatiques religieux, et, de l'autre, les trois espaces pour une pensée libre : philosophie, poésie, laïcité.
Éditorial, Liberté-Algérie, par Hassane Ouali, "Gagner la bataille idéologique" (texte écrit après l’attentat de Nice). Ne pas faire l’erreur de cibler les musulmans en tant que tels, dit-il, mais mener la lutte "en amont", "sur le front idéologique".
De Kamel Daoud, "Il faut démanteler l’islamisme". Document audio, et page avec citations…  
Mohamed Adel Mtimet, chercheur, ne considère pas qu'il ne faut pas parler d'islamisme...
"Islam et dissonance cognitive"... Tribune de Maya Ksouri...
Cela date de 2015, et de 2016, mais c'est un témoignage important. D'Ahmed Meguini... 
et sur Huffingtonpost...
 
Entretien avec le préfet Michel Delpuech qui met en garde contre les remplis identitaires et l’islam radical… 
Didier Daeninckx, écrivain :
"Qui aurait pu imaginer que la gauche se déchirerait
à propos d’un délit imaginaire forgé par
des assassins ?"(Et liens vers d’autres articles)…

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CITATIONS et... TITRES. Lecture... Lecture... Lecture... (pour soi, ou pour offrir...)

Je crois que je devine pourquoi on écrit les vrais livres. Pas pour se rendre célèbre, mais pour mieux se rendre invisible, tout en réclamant à manger le vrai noyau du monde.

Kamel Daoud, Meursault, contre-enquête 

Donc, des livres écrits pour se rendre invisible (que les auteurs le sachent ou pas), des livres pour pénétrer le sens enfoui du réel… (le sachant). Des livres sur mon chemin, en phase avec ce chemin…

GESTE.jpgPOÉSIE. Le moindre geste, de Michel Bourçon, éd. pré#carré / Hervé Bougel, décembre 2015. Citations : « peut-être que la direction à prendre n’est ni en soi / ni au dehors, que le panneau indicateur se trouve / planté dans la divergence. » (…) « entre soi et les choses / quelque chose / qui ne rejoint rien » Page éditeur : http://precarrediteur.fr/?page_id=1529 

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ATTESTE.jpg

 

POÉSIE. (Et publication Jeunesse). J’atteste / contre la barbarie, d’Abdellatif Laâbi, éd. Rue du Monde (avec un dossier documentaire d’Alain Serres et des dessins de Zaü). Lecture pour tous les âges. Un poème écrit après la tuerie de janvier 2015, et publié en urgence après les massacres de novembre. Livre essentiel pour affirmer un idéal d’humanité, un refus des monstruosités produites par la haine et la folie idéologique. Page éditeur : http://www.rue-des-livres.com/livre/235504404X/j_atteste....  

Le Monde, article, « Parler des attentats aux jeunes lecteurs » : http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/12/15/parler-des... 


Abdellatif Laâbi.jpg

POÉSIE, même auteur, Abdellatif Laâbi, La saison manquante, Éds. de La DifférencePrésentation et autres titres de lui, site Decitre... https://www.decitre.fr/livres/la-saison-manquante-suivi-d...

 

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TURC.jpgPOÉSIE.Août 1936. Dernier mois dans le ventre de ma mère, d'Özdemir Ince. Préface de Lionel Ray, poèmes traduits du turc par Claire Lajus. Éd. A L’Index/Le livre à dire / Jean-Claude Tardif lelivreadire.blogspot.com / revue.alindex@free.fr. Citations : « Que je puisse voir à quoi ressemble une forêt de pluie » (…) « J’attends ma naissance depuis l’origine / de l’univers, je m’attends » (…) « Je serai un révolté, si jamais je me décide, / et si je reste là pour toujours » 

NAITRE.jpgPOÉSIE. Naître si mourir, de Hyam Yared (née à Beyrouth), éds. Mémoire d’encrier (Canada/Québec). Citations (son prologue) : « Naître de toute évidence, puisque mourir est le dernier rêve. » (…) « Car on ne meurt pas, on rejoue une dernière fois sa naissance. » Citations (poèmes) : « L’errance est mon décharnement. Nos regards / — nos déchirés. On court après nos visages. » (…) « Où tu es je suis / visage. Où peut-être / je ne suis. » (…)  « Les morts ont tous droit à l’obscure. » Page éditeur : http://memoiredencrier.com/naitre-si-mourir-hyam-yared/ 

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DIAMS.jpgESSAI. Je ne suis pas Diam’s, de Fawzia Zouari (franco-tunisienne), éd. Stock. Citations : « Je ne suis pas Diam’s. Ni par la naissance, ni par le parcours, ni par la conception de l’islam. J’ai vu le jour en Tunisie, dans un petit village où mon père avait le titre de "cheikh" qui lui conférait une autorité religieuse. Ma mère a passé sa vie enfermée derrière les murs de sa maison et je n’ ai aperçu sa chevelure que sur son lit de mort. Vers douze ans, mes soeurs aînées ont été interdites d’ école et cloîtrées. Je me suis alors promis d’aller jusqu’au bout de mes études et de ne pas me voiler. » Page éditeur http://www.editions-stock.fr/je-ne-suis-pas-diams-9782234...  Articles, Jeune Afrique : http://www.jeuneafrique.com/mag/274208/culture/livres-je-...  et Kapitalis (Tunisie) : http://kapitalis.com/tunisie/2015/11/23/je-ne-suis-pas-di... 

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NUIT.jpgFRAGMENTS (prose poétique, méditation et engagement). À ce stade de la nuit, De Maylis de Kerangal, éd. Verticales. Comment un nom entendu à la radio (Lampedusa) traverse (est traversé par) des sens divers : mémoire, rêve, et cauchemar réel, enfin. Citations : « à ce stade de la nuit je tourne toujours les pages du journal, je les balaie du regard, je repère les titres, les légendes des photographies » (…) « La nuit avance. Je suis maintenant rivée à l’île de Lampedusa comme on s’obsède d’une poussière sur une feuille vierge. » (…) « Heures nocturnes, lumière qui perle au bout des cils, fatigue extralucide, vitesse de la pensée : l’événement cristallise doucement. » (…) « Etrangement le toponyme insulaire (…) mais ce matin, matin du 3 octobre 2013, il s’est retourné comme un gant, Lampedusa concentrant en lui seul la honte et la révolte, le chagrin, désignant désormais un état du monde, un tout autre récit. » Page éditeur http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Verticales/Mi... 

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Les échappés, édition créée par Charlie-Hebdo...  https://charliehebdo.fr/editions-les-echappes/ 

Diffusion librairie en ligne, Decitre  http://www.decitre.fr/livres/tout-est-pardonne-9782357661... 

…....

EUX.jpgÉDITION JEUNESSE… Eux, c’est nous, Les éditeurs Jeunesse avec les réfugiés, éd. Cimade/Gallimard http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD-JEUNESSE/Cima... 

PETITS.jpg

 

et Les questions des tout-petits sur les méchants, de Marie Aubinais (illustrations d’Elsa Fouquier et Anouk Rucard), éd. Bayard Jeunesse. Présentation (illustrée) du livre, blog de Liyah. Sur la violence, la guerre, etc. http://www.leslecturesdeliyah.com/livre-pour-enfants-ques... 

 

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19/12/2015 | Lien permanent

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