LIU XIAOBO, ombre et lumière de la Chine
07/06/2019
Ombre, oui, car une tache sur l’histoire de la Chine, tache retentissante autant que le massacre de la Place Tiananmen, ou la persécution des Ouïghours et des adeptes du Falun gong.
Lumière, car honneur d’une culture formidable, celle des lettrés chinois ouverts à la culture du monde tout autant que maîtres de leur culture séculaire.
Et c’est bien ma double perception du pays, ombre et lumière. D’un côté une culture que j’apprécie au plus haut point, étant nourrie de textes des grands penseurs chinois, et passionnée par les pratiques associées au taoïsme qui est une racine fondamentale de cette culture. De l’autre un régime qui me fait être signataire de pétitions encore et encore, tant il y a de problèmes…
Je reviens sur la Chine pour avoir lu un article qui m’a donné envie de repréciser un certain nombre de points.
C’est l’excellente chronique d’Alain Frachon dans Le Monde du 7 juin. Titre papier : "Histoire d’un grand chinois". Très juste.
Liu Xiaobo, c’est exactement cela, une immense conscience.
Alain Frachon montre que les deux grands impensés, les deux refoulés majeurs (cause de répression pour ceux qui veulent en parler) sont, d’égale manière, Liu Xiaobo et la Place Tananmen. Il analyse les causes de cette peur du pouvoir chinois. Et le paradoxe de cette peur. Car la Chine peut aussi être fière du chemin fait (famine et misère vaincue, progrès économiques et techniques indéniables). Mais la honte de la Chine est double. La manière dont le mouvement démocratique fut réprimé, dans la violence meurtrière, en 1989. Et le traitement atroce qui fut réservé au grand auteur (et Prix Nobel) Liu Xiaobo. (Et à sa femme, Liu Xia, photographe et poète, des années en résidence surveillée, privée de contacts avec son mari, forcée d’accepter qu’il n’ait pas de tombe, mais enfin réfugiée en Allemagne, tout récemment). Liens sur elle (dont ses photos, en fin de note).
Pourquoi cette peur du pouvoir ? Parce que les dissidents démocrates mettent en question la puissance du parti communiste, et portent en eux les prémices possibles d’une transformation qui serait la fin du monopole du PCC (de ce parti qui s’accorde avec un capitalisme dont il tire bénéfice). La Charte 08, de 2008 (dont Liu Xiaobo fut un rédacteur) préparait une libéralisation du système chinois, avec un parfum de liberté occidentale.
Cette histoire, dit Alain Frachon, "est la part d’ombre du succès de la Chine de ces trente dernières années, facette sombre mais inséparable d’un pays en passe de devenir la plus grande puissance du monde." Il rappelle la nécessité de lire les essais de Liu Xiaobo (comme,dit-il, le recommandait Simon Leys, sinologue avisé). Et il redonne les références du livre de Pierre Haski, "Liu Xiaobo : L'Homme qui a défié Pékin" (le film est à voir en replay sur Arte jusqu'au 3 juillet)...
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ESSAIS de Liu Xiaobo, éd. Gallimard…
La philosophie du porc / Vivre dans la vérité / Élégies du 4 juin...
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Sur Liu Xia, article au moment de son départ, enfin, de Chine, HuffingtonPost…
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Et son arrivée en Allemagne, Le Monde...
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Fiche Wikipedia. Liu Xia…
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Photographies de Liu Xia...
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