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Jean-Michel Beaujon, itinéraire solidaire d’un natif d’Alger : l’art des sports extrêmes, le courage pour aider autrui…

Jean-Michel Beaujon, natif d'Algérie, association Les Intrépides. Actions solidaires financées par le courage physique comme art extrême. Un bel itinéraire... accompagné par une association de Pieds-Noirs de sa région.

Lu sur le blog de Claude Rivière (en 2008, lien inactif maintenant), page sur JM Beaujon (itinéraire, action), lien 2008 :  (« Jean-Michel Beaujon défend depuis 30 ans la cause de l'enfance handicapée, via son association Les Intrépides. Pour attirer l'attention du monde sur ce problème, il a conçu le projet Espoir Himalaya consistant à escalader le toit du monde pour y planter le drapeau de l'enfance inadaptée. » (…) « Jean-Michel Beaujon devant rééditer son exploit (de 2001) en 2009, Racine pieds-noirs se mobilise à nouveau à ses côtés : "Cette soirée est pour nous une belle occasion de l'aider à nouveau en nous associant à sa démarche humanitaire. Il fera flotter le drapeau de l'association aux côtés de celui de l'enfance inadaptée. Jean-Michel Beaujon est une personnalité hors-normes, une sorte de Jean Valjean d'aujourd'hui. Comme lui, il a connu des débuts chaotiques… »)

2013 : http://claude2k6.jeblog.fr/cassis-avec-jean-michel-beaujon-les-intrepides-hissent-les-voiles-a45837782
Article de La Montagne, 26-06-2013 (itinéraire, rencontre, évolution...)  http://www.lamontagne.fr/auvergne/actualite/departement/a...

 

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21/03/2013 | Lien permanent

”Le verger abandonné”, de Michel Diaz. Ulysse errant choisissant le non-retour, ou l’ascèse d’écriture et d’être, en réc

VERGER M DIAZ.jpg
 
 
 
 
 
 
Car...
 
 
 
 
(En couverture, une photographie de Pierre Fuentes, une des contrées d'Ulysse... Comme une peinture du "bord du monde")
 
 
Car Pauvreté est lumière éclatante de l’âme.
(…)
Venu de la clarté, il pénétrait 
dans une clarté toujours plus grande,
et la gaieté habitait sa cellule.
 Rainer Maria Rilke, Le Livre de la pauvreté et de la mort
 (trad. de Jacques Legrand, Seuil, œuvres 2, poésie)
 
 En nous le lieu
 En nous l’instant
 Nous consentons à être
          le jour dans la nuit
François Cheng, Le livre du Vide médian (préface et poèmes)
 
Pauvreté… Comprendre dépouillement, détachement, arrachement à l'inessentiel. Même si dans le grand poème de Rilke la pauvreté des humbles est aussi présente. 
J’ai choisi ces exergues car ils me semblent être une entrée possible dans ce livre particulièrement profond, qu’on doit relire et relire pour arriver à s’en extraire assez pour en parler. Et c’est Rilke que Michel Diaz a mis en exergue, citant un autre fragment du même grand texte (pour la notion de dénuement et la mention de l’exil, dont on peut entendre plusieurs sens, jusqu’à l’éloignement de soi par soi). 
La lecture de François Cheng (je le développe dans une des dernières parties de ma recension), permet de comprendre une dimension essentielle du livre de Michel Diaz. Et notons déjà la présence du "lieu" et la notation sur "le jour dans la nuit" (thématique de la lumière et de l’obscurtité, centrale chez Michel Diaz).
L’écriture de ce "verger" est magnifique, la pensée est troublante, une méditation où nous devenons Ulysse errant, retrouvant nos propres exils et cherchant à apprendre cet itinéraire qui nous rendrait assez allégés et libres pour rejoindre la plus authentique part de notre être. 
Je note que ce livre a été récemment primé (prix du Cercle Aliénor de poésie et esthétique). Et j’ai trouvé que c’était très mérité. 
 
Publication des Éditions Musimot.
……………………………………………………………..................................
Qu’est donc ce verger abandonné par Ulysse ? Et de quel verger Michel Diaz tisse l’arrachement ? 
C’est à la fois un lieu et son absence, la marque d’un exil (lisant un poème de Michel Diaz, autre, j’ai pensé aussi exil de corps et âme : celui qu’on constate, celui qu’on élabore).
Le choix qu’il a fait de Rilke comme exergue est absolument adéquat. Car ce poème, ample, un des trois du Livre d’heures est un des très grands textes de Rilke, en affinité de démarche avec ce qu’écrit Michel Diaz. Et il donne la dimension de l’interrogation que les pages qui suivent vont tenter de fouiller plutôt que de cerner (poésie en prose que ces lettres d’Ulysse…). 
Exil, le mot y est. "Tu es en exil", écrit Rilke, invoquant ce "dénué de tout" qu’est François d’Assise (qui fascine aussi François Cheng) et parlant aussi à l’être en chemin de lucidité, en capacité d’appauvrissement, pour un dénuement qui arrachera identité illusoire et ancrage éphémère. Deux espaces en cela, d'abord. Celui de l’errance réelle traversant les frontières et les mers, généalogie qui nous habite, et histoire personnelle dont on ne sait pas toujours quelle hantise est prégnante. Et celui de la tragédie humaine qu’est l’absence à soi, l’encombrement qui coupe de sa réalité. À l’inverse, le dépouillement est l’horizon désiré qui nous fera "dénué de tout", perdant ce qui nous empêche d’être notre essence.
Dans la traduction de Rilke par Jacques Legrand, Pauvre a une majuscule, Pauvreté aussi, dans deux vers. Quand cela signifie ce dénuement du sage accompli, hissé à sa dimension haute. Même si le texte de Rilke magnifie aussi les simples pauvres, ceux du manque, et constitue une sorte de prière à Dieu (à la transcendance) pour qu’il aide l’humain dans ce chemin de renoncement qui est la capacité de porter la conscience de sa propre mort. Mort finitude et mort symbolique des apparences.
 
Et c’est tout cela qu’aborde Michel Diaz. 
 
Autres clés liées à Rilke. Le Livre de la pauvreté et de la mort suit celui de la vie monastique, et celui du pèlerinage. Un ensemble mystique. Or le voyage d’Ulysse n’est-il pas en quelque sorte un pèlerinage ? Et sa solitude volontaire, ici, qui le fait renoncer, dans le livre de Michel Diaz, au confort affectif, n’est-ce pas démarche d’enfermement monastique ? 
Rilke est donc une porte pour entrer dans l’univers de ce livre.
J’étais intriguée, après avoir tant lu Audisio et son Ulysse, de retrouver ce personnage méditerranéen mythique, mais faisant d’autres choix. 
 
David Le Breton a écrit une préface intuitive (titrée Aspiration à l’absence), insistant sur le détachement qui remplace la nostalgie. Et son évocation de Simone Weil lui fait rejoindre aussi la dimension mystique de l’exergue. Le lien avec Edmond Jabès, qu’il cite aussi, est très bien pensé ("Le lieu véritable est-il dans l’absence de tout lieu ? Le lieu, justement, de cette inacceptable absence."). Car Jabès est à la fois l’écrivain de l’exil réel, su et non su (parfois perdu dans les strates de notre inconscient) et de l’exil métaphysique, qu’il transforme en épreuve de sens et alchimie d’âme, en grand commentateur de la langue qui s’inscrit en lui, en tissant plusieurs, à l’égal d’un talmudiste éclairé. 
 
L’Ulysse de Michel Diaz écrit des lettres en se cherchant. Il trace ses doutes et hésitations en lissant son chemin dans les mots autant que dans les lieux. Vraies lettres, adressées à l’épouse, au fils, au vieux père. Mais ce ne sont que superbes songes de lettres, mots rêvés, confiés à la mer, au vent, au temps. 
 
À Pénélope il dit le désir d’abolir "temps et distance", sans savoir comment. L’espace de séparation est fait aussi de tout ce qu’il a vécu, univers si différent de son lointain verger.  Il est déchiré, rêvant de ses arbres et nostalgique de la douceur de la proximité des corps, douloureux de ce qu’il sait vivre où il est, dans ce temps d’hésitation, comme "à côté d’une source sans eau". Il désirerait revenir, pour trouver peut-être une partielle amnésie, l’oubli des horreurs violentes vécues.  Mais s’il croit écouter "ce silence" d’autrefois, il doute déjà, ayant besoin de se rassurer, en imaginant que son rêve de la nuit est un "présage". Et son dernier paragraphe, s’il y présente négativement son présent loin d’elle, pose les questions qui sont celles des crises de rupture. 
"Qu’aurait-il donc fallu pour que je ne vous abandonne pas ?"
C’est dire les manques (car il les cite), donc les savoir. 
 
Dans une autre lettre à Pénélope, qui suit celle au père, il parle du besoin qu’il aura de solitude avec ses arbres, au retour, avant de la rejoindre, elle. Il exprime sa peur de ce que l’absence aura créé de distance charnelle. Encore le doute, qu’il essaie d’écarter en faisant le récit de leur désir passé. A-t-il vraiment encore en lui mémoire du goût d’elle ou veut-il s’en persuader, alors qu’elle est "la dernière question et l’ultime réponse" ? 
 
Au père, Laërte, il promet son retour, l’espère en vie en se fiant encore aux rêves et aux devins. Il lui faut interroger les "bouches d’ombre", comme pour se défaire d’une sourde culpabilité à l’idée de la mort possible du vieux père, sans retour. Il dépeint négativement son errance, "ces illusoires nécessités que fait miroiter le désir de toujours aller plus avant", et "ce long chemin hasardeux". 
Autre lettre. Où le père est celui qui sait son identité mieux que lui-même. Mais justement c’est cela qui s’échappe. Ulysse, aux noms multiples de voyageur, homme de mille rencontres, est aussi Personne, celui qui répondit ainsi par ruse au Cyclope comme à un sphinx du destin. Quelle est la vérité du nom et quoi dire au père pour se dire vrai ? Seulement tracer les pas d’autrefois, reconnaissables. Ulysse-Personne doute de pouvoir dire ce qu’il sait de commun à tous deux. Mais ce non-savoir est plus fort qu’un simple retour à la connaissance de ce qu’il fut. "Je te dirai que je ne sais rien d’autre que ce que je sais depuis toujours". Comme s’il voulait se dépouiller des mémoires de son errance. Et, là, Michel Diaz dessine un autre portrait. Ulysse errant qui doute et craint. C’est Michel Diaz poète qui pense l’identité, ses masques et ses failles et le rapport au langage, à l’écriture. Car "c’est le mot qui manque qui résonne le plus longtemps entre les parois de son crâne". Dans la difficulté de répondre au "bruit de la question". Ulysse rêve d’un contact sans mots. Que sait-on de la vérité de notre parole ? Ulysse "imposteur" devant son père ? L’écrivain imposteur, "volé" (comme Ulysse) par lui-même ? Sauf si l’imposture est alors un chemin d’authenticité. Car se dépouiller d’un masque antérieur passe par une apparente imposture. Le mentir-vrai d’Aragon (j’y pense, alors) fonctionne peut-être de soi à soi pour un chemin de dénuement. Perdre un visage qui fut vrai, pour, mentant, et se mentant, révéler le visage sous le visage, qui sera plus vrai encore. N’est-ce pas le sens de l’itinéraire d’Ulysse ? Oublier sa voix, en créer une autre.
Mais Ulysse doute encore. 
 
De Pénélope il sait l’attente, la longue patience, ou croit pouvoir deviner ce que ce fut. Il espère ne pas avoir à lui parler du "remords de ses trahisons", s’en libérant auprès des arbres du verger, gardant pour elle la possible "tendresse". 
 
Le verger, quand il en parle à Laërte, c’est pour un magnifique éloge de la nature, celle des arbres, avec ce rêve dont il se souvient, que lui confia son père, de transmigrer en arbre, en figuier peut-être. On pénètre, avec Michel Diaz, dans l’esprit de l’arbre. Racine, tronc, sève et feuilles. On respire arbre. Si Laërte se rêve arbre, Ulysse semble s’identifier à ce rêve de repos non humain, en se glissant dans les sensations d’un olivier, dans le balancement doux du vent et des éléments. Libre de langage, enfin… Fantasme dans lequel nous entrons avec Michel Diaz, ou connexion vraie, et métaphore d’une autre sorte de dépouillement. Car la force du rapport aux mots doit savoir passer par le renoncement aux mots, le silence que le lien avec la nature sait trouver mieux que tout. Et ainsi Ulysse permet une réflexion qui concerne le rapport au langage, et intéresse la création littéraire, au sommet de l’exigence. 
 
Que dire à un fils, qui n’est plus un enfant ?
Que dire à Télémaque ?
La promesse d’un retour et de l’effacement de la blessure du départ. La parole du guerrier conscient de l’indicible qui ne sera pas partagé, affirmant à la fois un devoir accompli et la faillite de tout récit. La mémoire d’Ulysse lui dit presque l’incapacité d’assumer, et, tout en essayant d’exprimer l’espoir d’autre chose, l’impossibilité de redevenir père ou fils. Vient-il lentement à la conscience de l’inéluctable ou le sait-il sans se le dire ? 
Et, traduction possible, quand on est déjà loin dans le chemin vers soi-même, que ce soit par le voyage errant ou par l’ascèse de l’écriture (ou, Rilke, par la voie spirituelle qu'est aussi l'écriture), comment rejoindre autrui par le langage des jours loin de l’écrit et des sommets de solitude ? 
Le temps passe et le retour s’éloigne. Bateau échoué, île où survivre. Dans cette hâte forcée le verger devient comme un temple que préparerait son fils, et où il renaîtrait. Mais espace qu’il faudrait détruire ensemble. Abattre les arbres abandonnés pour en replanter d’autres. Étrange projection d’un retour où tout effacer, et effacement du retour. Ou élaboration d’un effacement créé en soi par des gestes intérieurs de conscience ? 
 
L’étrange contrée que découvre et décrit Ulysse à Pénélope est troublante, un monde d’eau et ciel dont Michel Diaz fait un tableau (c’est pictural, presque cinématographique) mystérieux. Un monde qui serait un ailleurs où la nature crée un mélange de murs végétaux et d’infini spectral. Ce qui "secrètement" travaille "à la séparation de tout royaume". Est-ce la nature qu’on voit, ou la représentation d’un cheminement intérieur qui se fait souterrainement dans la conscience d’Ulysse ? Qu’est ce royaume sans "commencement" ni "fin" ?
Celui de la joie possible au retour ?
Ou de la solitude gagnée sur le renoncement ?
Ou de la tristesse malgré tout, mais choisie ?
L’hésitation entre deux états ? Séparation que cet éloignement de soi dans une marche difficile vers on ne sait quoi. Mais volonté "seulement d’aller vers plus haut et plus loin". Démarche presque mystique d’accès à ce qui dépasse. 
 
Et dans la quatrième lettre au père la tristesse est palpable. Magnifique texte, aussi fort que celui sur la contrée étrange décrite à Pénélope dans la cinquième lettre, ou que celui sur le verger temple à détruire et recréer plus tard, ou celui sur le père et ses rêves d’arbre. Quand il parle de la nature Michel Diaz atteint des sommets de densité visuelle et conceptuelle. On regarde en cinéaste et on médite en philosophe antique, entre Grèce et Chine. Ce texte qu’Ulysse trace sur sa paume, comme il tracerait son nom sur celle de son père, s’il revenait ("dans le creux aveugle de ta paume"…), ce texte décrit un lieu de solitude, "triste, inaccessible aux larmes", mais "où il y a quelque chose de sacré". Lieu des morts qu’Ulysse croit sentir présents, comme une mémoire figée là. Mais lieu qui le repousse et l’attire. Il erre, ne sachant plus qui être et où aller, "indécision" inscrite dans le lieu et en lui. 
Allant peut-être vers "le chemin d’où l’on ne revient pas". Qui semble être d’abord celui de l’affrontement à la langue, pour l’écoute de ce qui vient d’un monde souterrain, marge fantomatique de l’univers et de soi. Page intense, sur cet appel des mots, ce souffle de "l’imprononçable", "indicible", "ineffable". 
Mais ce lieu, qui a en lui du "sacré", entraîne aussi vers une autre sorte de transmutation. Dépasser ce qui, "inquestionnable présence", est enfoui "sous la cendre d’une inépuisable détresse". Car il y a le signe qu’est "la lumière", réelle et symbolique. 
Et la question centrale :
"Vers quelle région de l’être me conduisent mes pas ?"
J’entends Michel Diaz à travers Ulysse. 
Vers quelle métamorphose essentielle conduit l’entreprise d’écriture ? 
 
Ulysse, continuant à s’adresser à son fils, peint un univers effrayant, de silence et de mort. Mais achève sa lettre dans un paradoxal retour à la présence de la parole "qui jamais ne cesse", et à ce qui retrouve une possible "ferveur". 
 
Hésitation, encore, mots vers Laërte, avec cette conscience de ce qui "toujours nous échappe". 
Et s’adressant de nouveau à Pénélope, il décrit encore un lieu "de désolation", qui est plutôt son espace intérieur, celui de ses "doutes". 
 
Puis le doute est dépassé. 
"Quelle raison", écrit-il à Télémaque, "ai-je de revenir ?".
Étranger devant des étrangers que le temps a séparés. Peur de la mort en miroir. Conscience de ne plus vouloir que "tourner la page de son passé". 
 
Basculement. Il est sûr maintenant de ce qu’il se doit à lui-même. Le message envoyé (mentalement) à Laërte est un adieu sans dire adieu. Plutôt une méditation, que les maîtres du zen ne renieraient pas, sur ce "Rien" qui est le renoncement aux masques qui entravent. Plutôt choisir le chemin "vers soi-même", "ce chemin qui ne serait rien d’autre que la voie des dieux". Le but c’est d’aboutir à soi, dans une plongée intérieure vers son "accomplissement". 
 
L’identité d’Ulysse c’est l’errance, comme fidélité à soi-même, refusant tout "leurre" qui serait un retour voué au mensonge et à la tristesse. C’est son testament pour son fils, en message de vérité. 
 
Tentant d’apaiser Pénélope il insiste sur le "dépouillement". Valeur du "nulle part", du "Rien", donnant force, pour ce qu’est "vivre", au "chemin qui va de nulle part à nulle part", "de rien au Rien". Conscience de notre mesure d’errants éphémères. 
Le "rien" qui mène au "Rien" est un chemin de sagesse où être fidèle à soi est l’éthique centrale. On ne peut que rapprocher ce qu’énonce Michel Diaz des sagesses pensant le vide, non comme un trou béant de néant mais comme une dimension de sens, saisie de l’être incernable. Profonde intuition philosophique et esthétique que l’itinéraire qu’il choisit pour son

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14/12/2021 | Lien permanent

2. À L’Index n°37. Parcourir des pages. Donc lire dans le miroir des autres...

A l'Index n° 37.jpgDans cette note, une lecture non exhaustive de textes (poèmes principalement). Préférences, donc sélection. Ce que j’y lis, relis. Citations.
Le miroir des autres, bien sûr. Car on aime ce qui fait écho, même quand cela diffère de soi. Et dans les phrases des autres on se regarde aussi, intérieurement. Les auteurs tendent un miroir de l’universel humain et on emprunte le Je qui n’est pas Je… 
 
PARCOURS et CITATIONS...
 
Luis Mizon offre une dizaine de pages, poèmes, numérotés, qui font partie d’un ensemble, "Les entrepôts de l’instant". Il dit, justement, des instants, "libellules éphémères", trace "le filament caché" de ce qui fait ses "paroles". C’est visuel, coloré, ancré et incarné. Il transmet son "incandescence intérieure" :
 
"sur les vitraux multicolores
 je reconnais mon itinéraire inachevé
 la quête de mon âme
 et de l’amour des autres
 les échos de mon conte
 sont aussi des images en quête de paroles"
Yannick Ilito, dans "Fragments d’un au-delà du pas" (extraits), parle de la beauté, du corps, de l’âme, de la créativité, de l’exigence : "pouvoir surmonter les cimes". Il parle, c’est ainsi que je le comprends, de ce qui fait naître à soi-même, dit travailler à être "plus qu’une existence / une vie". Pour en donner une traduction il utilise le mot des Japonais : "Ikigai, trouver sa raison d’être".
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Pour Michel Cossec, le poème est précédé d’un long extrait d'un "carnet de voyage vers le nord", l’Arctique, vers le monde des Inuits, et de Paulussi Kuniliusee, chaman et sculpteur autant que pêcheur-chasseur. En exergue il inscrit une pensée de cet homme, qui met dans le mot "Art" le tout de la vie, "exprimer la vie" (en dansant, criant, et même pêchant, pour se nourrir).L’auteur transmet ce que les Inuits, et Paulussi, ont à nous dire sur le rapport à la nature, la planète, les animaux. Eux qui sont "encore détenteurs d’une sagesse que la certitude de notre universalité nous a fait perdre".
 
"Sur le toit du monde 
 source
 seule s’écoule la glace
 prémices sans les hommes, sententia.
 Ici s’ébauche le chant du monde."
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De Michel Lamart on lit une intéressante communication (faite lors d’une Journée d’études), sur lecture, écriture, et hasard. C’est un texte dense, qui rejoint la démarche philosophique de la vraie recherche littéraire, poussée plus loin que les questions de style et genre. Mais au-delà de la littérature c’est ici une réflexion sur le déterminisme de nos vies et les effets du hasard. En s’appuyant sur une lecture comparée de Dhôtel et Paulhan, dont il dit que ce qui les rapproche c’est Rimbaud. Cette lecture m’a donné envie de lire "La littérature et le hasard" d’André Dhôtel. Et me fait revenir à un sujet qui m’intéresse particulièrement. Tant en relation avec la création artistique (notamment photographique) que pour penser les faits de nos vies.
 
Mais, concernant l’art, la référence  essentielle est, pour moi, un texte d’August Strindberg, "Du hasard dans la production artistique" (éd. L’Échoppe). Et j’y associe deux passionnants ouvrages scientifiques (collection Sciences, Points/Seuil) : "Le hasard aujourd’hui", collectif, et "Le Calcul, l’Imprévu/ Les figures du temps de Kepler à Thom", du mathématicien Ivar Ekeland. Évidemment je relie aussi ces questionnements de Michel Lamart à ces lectures qui sont miennes et anciennes, et à celles, diverses, faites autour de trois notes récentes sur les synchronicités (récentes mais auxquelles je pensais depuis longtemps, deux ou trois ans…). Avoir relu son texte me rappelle que je dois aller aussi vers le livre de Dhôtel, et le lire en ayant sous les yeux, peu loin, Strindberg et les volumes que je viens de citer. L'analyse très littéraire de Michel Lamart relance un fil où poésie, philosophie, et science, se rejoignent... 
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Jacques Nuñez-Teodoro, rêve, dans ses poèmes (extraits de "La dérive des continents"), de lunes et de routes, d’aurores sans malheur, de miroirs de vérité. J’aurais envie de recopier beaucoup de passages, mais il faut choisir. Je sens dans ces textes une résistance au désespoir que peut causer le regard sur les ombres de la vie et des vies. Volonté de ne pas basculer dans le pessimisme, mais de rester sur le fil de la lucidité, qui frôle pourtant cette douleur. 
 
"Éviter la route noire
  Voie sans issue
  Personne n’en est jamais revenu"
    (…)
"La vie suppure des fleurs piétinées
  et pleurer évoque des vases renversés"
    (…) 
"Personne jamais n’atteint l’aubier de la vie
  À peine croit-on la sève dans nos veines
  pour accomplir le miracle du miroir"
.
J'ajoute ici une réflexion hors sujet, mais pas vraiment. J’ai respecté évidemment le tilde sur le n du nom, Nuñez.
Mais je n’ai pu m’empêcher de penser à quelque chose qui m’énerve particulièrement. Il semblerait qu’on ait enlevé le tilde du nom de Laurent Nuñez, récemment, dans des publications officielles, suite à la polémique autour du tilde d’un prénom breton. Parce que le tilde ne serait pas admis en français. Sauf qu’un nom de famille d’origine espagnole restera d’origine espagnole, et qu’un nom espagnol n’est pas un prénom breton. Et qu’est-ce que cette bêtise, ce refus d’un signe du pays voisin ? Laurent Nuñez devrait refuser cette atteinte à son identité, à ses racines, et à la prononciation correcte. Un nom est un nom. (Même si la graphie française de mon nom a fait sauter un accent sur les papiers officiels…).
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Pages bilingues, pour un poème inédit de Rebecca Morrison, anglais-français. Mystérieux texte, dont il me semble qu’il faut deviner plusieurs couches de sens. Un peu d’humour, avec sa boussole tendue pour être sûre de retrouver un chemin vers plus que le nord, vers soi peut-être, vers l’autre, ou vers ce colibri qui vient dans ses fleurs, elle dont l’univers est un jardin. Poème qui me fait penser à Colette, ou à la mère de Colette, femmes terriennes, aux présences fortes, dans la couleur du vivant. C’est léger en apparence, et profond. Car "dans la brume", douce, il n’y a pas que l’oiseau, il y a celle qui écrit. Et qui aime la présence de l’oiseau et des couleurs :
 
"yellow, scarlet, pink, white" / "jaune, écarlate, rose, blanc"
 
"He pierces the open mouths
 of my four o’clock flowers —" 
 
"Il pénètre les bouches ouvertes
 de mes fleurs belles-de-nuit — "
...................................
Je relis Véronique Joyaux
 
"car tout est vivant
 dans l’immensité du rien."
.
"Ne ferme pas les yeux
 Ce matin le monde est là tranquille
 Un arbre seul au milieu de la terre ne suffit pas."
          (…)
"J’entre dans le silence avec douceur
 Toute chose autour de moi s’embellit
 C’est un jour de longue trame."
.......................
Hervé Delabarre nous raconte, lui, une histoire venue d’un rêve (sans doute très transformé par l’imagination au réveil, le fil du rêve tiré…). Avec des faits extravagants, un chat qui parle, une atmosphère particulière. (Et d’ailleurs l’adresse censée être celle de l’immeuble du récit est ceci : 3 rue de l’Équivoque…). Un univers de littérature fantastique, qui ne manque pas d’humour. 
.....................
Jacques Boise déroule, sous le titre "Carré", des poèmes en prose. Ce sont des tableaux. Le carré est un espace réel, de terre et d'eau, mais il est aussi l’espace des textes. L’aube, et la nuit. La pluie "d’orage", le silence, ou "la trille d’un oiseau". Couleurs, lumière, parfums.
...................
Fabien Drouet commence à d’abord se rappeler qu’il n’est pas mort, puis à penser au temps "qui n’existe que pour les vivants", pluriel, éclaté en "parallèles". Dans le poème qui suit, où Michaux sert de repère, ou de destinataire non su, il dit une parole qui va sans savoir vers qui. Son "J’appelle" est répété, anaphore pour "un dehors", "ce qui m’appelle", "au dedans / celui qui parle"…
 
"J’appelle au fond.
 Le secours sans y croire d’un regard aux issues."
  (…)
"J’appelle sans
 Destinataire,
 Dans l’odeur de Michaux,
 De Juarroz et de Pessoa."
........................
Irina Breitenstein dit la conscience de quelque chose qui advient en elle d’un savoir de la poésie, de ce que la poésie est vraiment, dans l’exigence, et au-delà même d’être seulement la poésie (car éthique de vie). (L’absence de majuscules est son choix).
 
"apprends à être avec ta solitude. le poème est une solitude
 ouverte"
   (…)
"j’écris pour ouvrir les lèvres, j’écris pour ouvrir les mains, j’écris pour ouvrir les vers
 
 pour être 
 plus que ce corps qui respire."
.
Il y a aussi des haïkus bilingues (allemand-français), de Gerhard Spiller. (Toujours la présence des langues : on a lu des poètes turcs et de diverses langues, dans d’autres numéros…). 
........................................
L’univers de Thierry Lancien est celui de pierres, d’une île, de la mer, et du bleu : "ce bleu qui invente un autre bleu".
 
"Il y a aussi le calme des pierres
 le grand calme sorti de la nuit.
 
 L’énigme des pierres,
 l'énigme"
...................................................................................
Mais avec les poèmes d’Isabel Voisin, je reviens à l’espagnol.
Sombre sujet.
 
"Estaciones de los Muertos / Stations des Morts"
 En exergue, Gabriel Sandoval.
 
Puis ses "coplas peu orthodoxes" (c’est son sous-titre).
 
"Enterrada viva me como
 la tierra del cementerio 
 en el suelo olvidada’
.
"Vivante enterrée je mange
  la terre du cimetière
  sur le sol oubliée"
 
"la muerta me mira" / "la morte me regarde"
.
Sin raíces todo
se tambalea
y la tierra 
se descompone
 
Sans racines tout
chancelle
et la terre
se décompose
.
Vois-tu Lucia
c’est maintenant mon tour de compter
pero José María
no bailaba
.
Questionnement sur le rapport avec la mort en soi de la mort de l’autre.
et pourtant la recherche de ce qui vit..
Ainsi elle "attrape" 
"una transparencia un destello"... "une transparence une lueur"
    (…)
"a veces / un canto de pájaro"… "parfois / un chant d’oiseau"
 
Méditation, ici, sur ce qui fait qu’on s’ancre à la terre malgré ce que la mort peut attirer de nous, parce qu’il y a en nous aussi l’attrait pour la lumière du vivant, des choses simples, comme le passage d’un oiseau. Et, c’est essentiel, aussi, chez Isabel Voisin, méditation sur l’enracinement dans nos langues, quand on pense dans un monde intérieur bilingue, même si on perd un peu ce bilinguisme, parfois. Cela nourrit sa conception de l’écriture, où elle fait se croiser l’espagnol et le français. 
Dans le "puits infini du miroir" … "pozo infinito del espejo", elle regarde un visage, des racines, des mots entrelacés, et la question de l’identité.
 
MC San Juan
..........................................................................
Note suivante, méditation sur le frontispice (vignette d'Yves Barbier), et regard sur mes textes, réflexion sur l'écriture... 
 
LIENS
Vers la note de parution (et informations pour se procurer la revue)... http://lelivreadire.blogspot.com/2018/09/a-lindex-n37-paraitre-en-octobre.html
et infos diverses... 
À L’Index éditeur de livres. Coll. Les Plaquettes (recueils, textes et photographies ou dessins ou encres). Même lien, livres publiés comme hors série (hors abonnement) de la revue. Ainsi "Quelqu'un d'absent", de François Vignes.
Commande : Le livre à dire, Jean-Claude Tardif, 11 rue du Stade, 76133 Épouville. La revue, 17€, port compris.

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04/05/2019 | Lien permanent

POÉSIE. À L'INDEX, N° 41...

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Dans ce numéro, entre les textes, de beaux dessins de Peter Neu, très structurés, architectures sombres, rues, lieux, maisons. Et une création de Claude Jacquesson.
 
Des traductions, comme toujours, textes bilingues d’auteurs à découvrir. Poèmes traduits de l’anglais américain, du grec, de l’allemand, cette fois… Des recensions, deux, de qualité (je les mentionne largement). Je suis présente (poèmes), mais je me cite en fin de note, tout en bas.
De Peter Gizzi (traduit de l’américain par Vladimir Claude Fisera) je copie un fragment de poème : 
 
Je ne suis pas un poète
parce que je vis dans le monde factuel
où la peur divise la lumière 
Je n’ai pas de protection contre
le vrai mal et l'argent
qui est le monde
où la plupart des vies sont vécues
(…)
Je ne suis pas un poète
mais un témoin qui porte
l’espace libre qui va bien à nos cœurs
…..
J’ai lu avec attention le texte de Michel Lamart sur poésie et peinture. Étude érudite à partir d’un tableau de Rembrandt et de son titre, La Ronde de nuit. Mais il met l’accent sur la lumière : "Il s’agit de peindre non la nuit mais, bien davantage, le mouvement marquant l’accès à la lumière." Dans sa réflexion il fait intervenir les Goncourt, Huysmans, et il analyse la manière dont ce tableau fut reçu et compris, regrettant l’absence de "l’approche sociale du tableau".
….
J’ai lu, surtout, les poèmes (nombreux), et certaines proses.
Pour les poèmes, il faut citer. J’en choisis certains… 
….
Du poème Présence/absence de Line Szöllösi, je note le début  et la fin :
 
De la présence à l’absence
ou l’inverse
 
sait-on ce qui se cache dans l’ici
si l’ici est ailleurs
(…)
mais nous n’avons pas la clé
pour être.
…..
De Jean ChatardL’oubli fait loi, je note deux fragments :
 
L’haleine des grands fonds 
dissimule au regard ces monstres
fabuleux qui naissent en nos cœurs
et se vêtent d’azur
(…)
La peau sait s’embraser
devant le sorcier fou lorsqu’il
demande au ciel de mutiler l’espace
                     
                                    et d’oublier midi
….
Suit une étrange nouvelle de Jean-Claude Tardif,
Rencontre de nuit
ou une homophonie
Comme souvent, dans ses textes, on bascule entre réel et fantastique. Une rencontre mystérieuse sur une route, ou une hallucination à deux ? Personnages inventés ou fantômes, projections imaginaires nées des contes ? Homophonie. Satire ? Satyre ? Et on voyage dans la mythologie. Le mystère est inscrit sur des notations très concrètes, c’est cela qui déstabilise.
…..
Nouvelle, aussi, de Jean Bensimon. Un passé lointain.
Un rêve entraîne le narrateur dans une recherche de vérité sur son histoire familiale
…...
Poésie, de nouveau, Résistance, de Roberto San Geroteo, dont je commence à connaître l’univers, et l’idéal de justice et fraternité.
 
Citations :
 
Quand je fume tard dans la huit 
je reviens vers vous à l’époque
où nous avons appris à démêler le vrai du faux
question ou sentiment de fraternité
liée à la lutte à l’écoute du silence
propre à chacun(e)
parole singulière passant de l’un à l’autre
rétive à l’oubli
utopie pure et simple
ou est-ce encore la nostalgie
l’anesthésie sur les épaules de la vieille veille.
(…)
Et de la bougie en phase terminale
tombent en silence les derniers pétales.
…...
Et enfin, poème de Jacques Nuñez-Teodoro, Le jour d’après (sous-titré Conte à dormir debout)…
Les douleurs du monde…
 
Citation :
 
Vous
hommes innommés innommables
errant à travers les effrois emmurés de géographies convulsives
gosses enfance abolie école démolie
enfoncés dans le boyau assassin d’une mine
hommes ancêtres indiens arrachés
par les bulldozers saignant vos forêts incendiées
hommes mendiants accroupis translucides
dominos branlant au gré des calculs diagnostiques 
…...
Et enfin, dernières pages, deux longues (et passionnantes) critiques.
 
Une pour la revue de Michel CosemEncres vives (août 2019), un dossier sur Claire Légat, par Arnaud Forgeron.
Extraits de Nous nous sommes trompés de monde (recueil de 1966) et D’outre toi-même (recueil en cours de création). Une formule semble qualifier l’univers de cette poésie (au sujet du premier recueil, mais on sent que c’est plus fondamental et permanent). En fait c'est la reprise d'un titre regroupant plusieurs auteurs (mention sur un dossier la concernant, en ligne), mais cela peut traduire une démarche, une interrogation : "Poésie des imites et limites de la poésie". Et Arnaud Forgeron évoque la métaphore de l’alpinisme pour dire les sommets entrevus dans cette poésie (je pense à Erri De Luca...!). Précisant sa pensée il cite André Suarès (Carnets) : "Le grand poète, qu’il s’en doute ou non, est l’oracle d’une religion ou d’une métaphysique". Oui. Ce qui finit de me séduire, c’est ce qu’il note du long retrait de Claire Légat, des décennies de silence. Pour moi qui met de la valeur dans la rareté, c’est là que va surtout mon estime. Et je recopie les dernières phrases de cette lecture, écho à ma tristesse quand je vois passer sur FB tant de poèmes du jour (cette autopromotion de l’immédiateté…) : "Cela a son importance, surtout dans l’engorgement du trafic qui semble sévir en poésie et dans nos sociétés de l’immédiateté." Et "Une voix, celle de Claire Légat, la voie travaillée par le silence". Je vais commander la revue (en espérant qu’elle ne soit pas épuisée), et chercher à trouver l’ancien recueil, en attendant le dernier.
…...
Et l'ample recension d’un recueil de Monique W. Labidoire, par André Prodhomme, qui connaît bien son œuvre.
Voyelles bleues, consonnes noires, éds. Alcyone.
Il dit donc son admiration, et c’est efficace, car si on ne la connaît pas encore on a forcément envie d’aller découvrir l’œuvre de l’être chez qui il y a, dit-il, "une lumière qui résiste à tout". Preuve, ce qu’il dit de son histoire, qui commence "avec le noir absolu de l’abjection"  (père disparu en camp, se cacher pour survivre, enfant très jeune, presque bébé). Il explique comment elle "ancre son chant" dans le poème, contre la terreur et les blessures, les ombres de la vie. De ce livre il nous dit qu’il est à prendre "comme une boussole", car donnant des clés vers une sagesse "en humanité", et la beauté... "Je suis acquise à l’échappée", écrit-elle dans un poème. On peut l’interpréter comme le sens de la liberté intérieure, retour lucide sur nos ténèbres et  porte vers le sacré (qui dépasse le religieux). André Prodhomme cite Reiner Maria Rilke pour évoquer Orphée, le poète des poètes, sommet légendaire, et montrer une direction...
J'ajoute que deux autres recueils de Monique W. Labidoire sont disponibles aux éds. Alcyone : D'une lune à l'autre, et Gardiens de lumière... Pour moi, repère fait.
 
Et décidément, je vais fouiller dans ma collection de plusieurs années de la revue, pour voir si je n'ai pas raté des pistes précieuses données, comme là, avec ces deux lectures.
…….
 
Je reviens en arrière, car j’ai suivi les pages… 
Entre deux nouvelles (celles de Jean-Claude Tardif et Jean Bensimon) mes trois (longs) poèmes… Je cite…
 
Elle, d’elles, non obscures
(En exergue, Emily Dickinson et Anise Koltz)
 
Se souvenir des visages que les mers séparent.
Se souvenir des visages perdus en eau morte.
 
Jeter sept cailloux et tracer le sillon du hasard et du calme.
Penser au regard de l’enfant.
 
Mais comment faire devant le monstre intérieur qui crée les guerres et l’absolu du mal ?
 
Comment faire ? 
 
Jeter sept cailloux, et deviner la route, le hasard de la route.
…….
 
Ode aux visages
(en exergue, Emmanuel Lévinas, Charles Juliet, Claude Louis-Combet)
 
On regarde certains visages, comme une pause reposante hors de l’étrangeté habituelle et du déchiffrement qu’il faut faire constamment.
On peut reconnaître la marque de l’accent sur les traits silencieux.
Les voisins, les lointains.
 
De tous ces êtres il faut garder des images, en rêver, et reconstruire un pays de papier dans l’eau déchirée des regards.
…..
Chant multiple
(en exergue, Rainer Maria Rilke, Zéno Bianu)
 
Le silence serait total. Rien, ni bruissement ni souffle ni frôlement. Pas même la soie des pas.
(…)
Dans l’ombre, aussi,

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10/12/2020 | Lien permanent

Les Plaquettes À L’Index. Des livres où la poésie dialogue avec l’art visuel... Lire Pierre Rosin, Werner Lambersy, Jean

Index.jpgLes Plaquettes/À L’Index, Le livre à dire (Jean-Claude Tardif). Parcours de quelques livres...
 
Plaquettes, livres légers. Ouvrages dédiés à l’art, au dialogue entre plasticiens ou photographes et poètes en affinité, ou à l’écriture d’un artiste-poète qui pose ses mots en marge de ses créations visuelles. Une quarantaine de pages, des textes et des reproductions pour exercer le regard, auquel ces ouvrages donnent une importance particulière.
À cette collection, où j’ai picoré ce que j’ai pu (mais raté un livre, épuisé, et failli en rater un autre) j’ajoute un ouvrage d’un des auteurs, autre édition (Éditinter) mais même esprit. 
Les reproductions d’œuvres plastiques méritent attention et commentaire au même titre que les textes. Autre "lecture". (Œuvres de Pierre Rosin, Otto Ganz, Sylvie Basteau, Léo Verle, Hervé Delabarre, Jean-Michel Marchetti).
Je termine ma note par un commentaire autour du titre d’une plaquette de Michel Lamart, jouant à deviner ce que le livre (épuisé) pourrait être et ce que ce titre peut signifier…
 
Voici les titres des plaquettes, qui serviront en quelque sorte d’exergues (c’est très important, un titre) :
 
un reste de beau pour le reste du jour suivi de je émigration 
Pierre Rosin (et ses dessins-peintures)
 
Entrées maritimes, précédées de Portrait de l’œil
Werner Lambersy 
 
La peintre le sait-elle ?
Jean-Claude Bourdet
 
Le Havre de Grâce, suivi de… Un caillou dans la bouche
Roberto San Geroteo
 
Dans l’entre-temps j’écris / et (autre édition) Noir, suivi de Métamorphose du corps noir
Jean-Claude Tardif
 
Ritournelle pour un jardin de pierre
Michel Lamart 
 
Autres lectures sur ce blog, TAG "À l’Index"… catégorie "recensions REVUES.poésie..." Ou (livres), tag nom auteur, catégorie "RECENSIONS.livres.poésie...". Les notes étant publiées au format notes longues (seul le début apparaît), pour les notes plus récentes l'adresse du blog suffit, et les titres se voient, déroulé des pages... Pour voir les vignettes et listes en marge lire sur ordinateur (sur smartphone seules les notes sortent, mais le déroulé fonctionne...).
 
À L’Index/Le livre à dire...
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Rosin je émigration.jpgun reste de beau pour le reste du jour, suivi de je émigration, de Pierre Rosin, 2018
 
les ombres t’entourent
le murmure du vent
module tes songes
en un bruissement soyeux
dans le feuillage
de l’arbre d’oubli
P. Rosin
 
un reste de beau pour le reste du jour
 
"J’ai longtemps habité sous de vastes portiques"… Non. L’auteur, lecteur de Baudelaire, ironise, lui, et complète autrement le vers de La vie antérieure, pour parler de la vie présente et du passé. Mémoire, toute vie qu’on raconte est antérieure, mais pas un rêve. Réelle, concrète, avec joies et tristesses, heureux aboutissements et regrets. Ordinaire, d’abord.
"J’ai longtemps habité une boîte à chaussures
 une vie ordinaire
 ni trop grande ni trop étroite"
Douce ironie, que ce détour d’un vers célèbre. Et ainsi une intention est posée. Refus des rôles qu’on s’invente pour magnifier des moments qui n’étaient pourtant pas encore ceux de notre vrai accès à nous-même. Et lien avec le grand poème qui suit, je émigration, qui explique précisément qu’ici, pas de vastes portiques… Mais "longtemps" signifie aussi une rupture. La "vie ordinaire" revendiquée a aussi été le temps d’une mise au monde de soi créateur. C’est un peu ce que nous racontent ces poèmes. La réalité d’une présence au monde tel qu’il est, des refus, et l’obtention du possible qui était en germe. Et alors, lui, "fait poète" par lui, en sachant suivre ses "chemins de hasard et de fantaisie".
 
Et le peintre est là, qui regarde. Cependant le paysage est dehors et dedans. C’est "le regard tourné vers soi" qui rend la perception possible, opération de mise à jour, par le dépouillement des "sédiments / qui s’effritent", ces couches de soi qu’on lâche simplement en les sachant. 
Mais la vie se poursuit, et il y a autrui, dans la mémoire et le présent. Paradoxe du "dire", avec ce "goût du silence", du "retrait", des mots qui laissent "à distance".
 
En même temps qu’on lit on regarde les dessins-peintures. On tourne les pages et on revient aux reproductions, car la correspondance est totale entre les textes et les lignes entrelacées qui figurent un personnage qu’on peut imaginer avoir "le regard tourné bers soi". Visage en transparence sur des feuillages (peut-être des feuillages) ou les traits de la pensée. Ou des algues (dit un texte, plus loin). Puis courbes et spirales formant un torse et une tête, comme devant un mur qui serait celui du poème évoquant "sur les parois / de petites taches / des griffures" (…) "de petites moisissures", et même "un reste d’écriture". Sur ce mur je vois aussi, derrière l’homme qui songe, l’esquisse d’une femme dressée, tête en arrière, claire, et des ombres plus sombres ou à peine tracées de gris, et peut-être un vieillard à barbe blanche. C’est comme pour les formes sur des affiches déchirées, que le hasard a créées. Je vois, devine, invente. Mais la main de celui qui dessine-peint a laissé des traces qui font sens, si on veut entrer dans le mystère des formes. Surtout quand il nous donne des indices, et l’écrit. 
"en marge d’anciennes tempêtes
 lambeaux de rêves solitaires et gris"
Et "les souvenirs se dispersent". Dans la mémoire et sur le papier. 
Laissant d'abord les poèmes je regarde encore, plus loin, mais le texte en face de l’image donne des clés. On voit le personnage replié sur lui-même, sur un fond qui peut être de verdure. Des taches suggèrent le "jardin / aux allées tranquilles". On voit une main dont le poème désigne celle qui fait le geste, "elle touche mon épaule". Mystère : attendue, elle, dit le texte, et "près". Deux moments mêlés, et encore de l’attente dans la présence. Peut-être dans toute présence une part d’absence. 
Retour en arrière, textes ("mémoire", "fissures"… "et tout effacer"). Blessures, éloignements, réflexion sur ce qui lie et délie. Résumé. 
"chaque rencontre est un miracle"
(…)
 "chaque rencontre est un mirage"
Lisant je retrouve encore l’univers d’un dessin. Algues, mes feuillages…
"une forme qui passe
 des algues flottent en silence
 dans la pénombre
 dans ses replis
 tous savent 
 le goût du naufrage"
 
Sommes-nous tous des naufragés avec des chagrins gardés en soi ? Pour qui "une larme de pollen se pose
                 fragile au coin des yeux".
Naufragés sauvés par "l’arbre d’oubli" ? Autour de cet arbre doit-on tourner neuf ou sept fois comme en ce rituel triste inventé par le roi Agadja afin de soumettre des hommes ? Alors on oublierait les racines et les gens. Sans espoir d’arbre du retour. 
Peut-être à cause des "mystères", des "secrets", de vécus "impénétrables" cachés, intimes. Il ne dit plus simplement "je", là, mais "on" et "nous". Universalité des expériences. Puis il revient au "je", interrogeant ses "visages qui s’ignorent", le "masque dessus", la solitude et les regrets. Partage, en soi, des catégories qui sont tous les pans de la vie, rangés comme dans des boîtes, plus ‘un espace libre’. Celui, sans doute, où naît la création. 
"mais qui a besoin de comprendre le chant des oiseaux"… Pas de ponctuation, donc pas de point d’interrogation - mais une question, qui affirme en même temps un secret de l’art. Ce secret est dans la sagesse du poète qui sait "la dureté des choses" mais choisit de la taire (au moins un peu…) pour "qu'elle ne ferme pas nos yeux à la beauté du monde". D’ailleurs la tendresse est là, aussi. Et "la douceur des mots", une chance pour "un reste de beau pour le reste du jour".
Une autre reproduction, en face d’un poème sur un "bord de mer", une silhouette de femme vue de dos.
…...
 
je, émigration
 
Très différent, ce grand poème. L’histoire familiale, l’exil, l’Histoire, aussi, celle avec le H majuscule. L’intégration, les douleurs, non sues, puis sues. La conscience vient ensuite, avec le temps (mais même un bébé se souvient). 
"la solitude la peur
 le rejet
 cela
 je ne le savais pas 
 je l’ai compris plus tard"
Et le paradoxe de la survie gagnée "contre soi", de la perte de la transmission car "celui qui se retourne / se transforme en pierre".
Histoire de migration émigration. "On part
                                                  on change de nom
                                                  de visage."
Pensant à ce qui aurait été sans l’exil familial on sait que l’histoire aurait été différente, et soi aussi. 
"mon regard ne serait plus le même
 je serais un autre"
Tous les exilés le savent. Leurs parents parlent "derrière une vitre", des savoirs échappent, un écran les brouille, car la vitre est une protection qui fait effacer ou taire, et l’incompréhension aussi est une protection de qui écoute, pour ne pas se transformer "en pierre". 
Mais 
"Peu à peu
 au fil des jours
 la vitre s’est faite miroir
 j’y vois mon image et des ombres passent."
Pour ce grand texte le dessin est très sombre. Les ombres ont envahi le mur et elles dessinent une treille comme une prison (celle du père ? Histoire avec majuscule… ou celle de la mémoire des douleurs de ceux dont on vient). Le visage est un masque, le corps est pris dans des barbelés noirs. La mémoire trans-générationnelle de l’exil est une douleur, même quand pour soi l’exil a finalement peut-être été une chance. 
 
////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////
 
Lambersy Œil.jpgEntrées maritimes, précédées de Portrait de l’œil, de Werner Lambersy, 2020
 
Je marchais sur les sciures du soleil et les cendres encore chaudes du crépuscule (…)
W. Lambersy
 
Portrait de l’œil
 
Après le titre je regarde le frontispice d’Otto Ganz, dont j’ai déjà vu (et apprécié) quelques reproductions d’œuvres. Je retrouve le même univers. Des couleurs intenses et sourdes (comment dire ?). La couleur est ce qui frappe d’abord, attire, du bleu-gris au rose-mauve, le blanc de crânes chauves, ronds comme des lunes (et peut-être la lune, aussi), des taches rouges, comme des flaques de sang sur un fond, un mur, ou un dôme de ciel, au-dessus d’un personnage au dos large, mais voûté, face à un visage, d’un autre qui ne le regarde pas, lui aussi corps comme ployé sur lui-même, sous un poids. Peut-être le même devant un miroir imaginaire, regard vers le bas. Taches rouges, flaques. Alors, relisant le dernier poème (Entrées maritimes) je relève ce vers "Je traversais des fleuves de sang". Mémoire, naissance dans la guerre des anéantissements.
 
Portrait de l’œil est constitué de fragments en prose, le plus souvent de trois lignes, parfois quatre (rarement), une fois six, deux fois deux. Et une seule fois, tout au début, une seule ligne. Justement pour noter une marche solitaire, qui semble être encore dans le "songe".
"Je marchais seul : qui pourra me dire où j’étais…"
Peu de ponctuation forte, dans ces pages. Rares points d’exclamation ou d’interrogation. Points de suspension pour ce qui est très bref, tout au début. Des virgules, cependant. Majuscules, comme des pointes pour commencer les fragments. Un trait d’œil. Mais on remarque vite que l’espace qui les sépare peut nous tromper. Car il n’en fait pas des textes fermés sur eux-mêmes. Souvent on glisse d’un texte bref à un autre par un enjambement. Donc on doit chercher pourquoi cette structure… 
 
Mais déjà les exergues que l’auteur a choisis peuvent donner des indications sur le sens et la forme. D’abord, la "fenêtre sur la mer" de Ruy Belo, que, dit-il, "nous avons tous"… Or cette fenêtre symbolique est un espace, un cadre, qui n’englobe pas tout, malgré l’idée qu’elle contient d’une amplitude d’horizon et d’une profondeur (cet exergue, comme d’autres éléments des pages qui suivent, nous renvoie au titre du poème final - un de ces fils tissés entre les deux parties du livre). Donc, cadre rectangulaire, comme les lignes sous nos yeux. Même si, comme pour Henri Michaux ouvrant sa tente au réveil, on soulève "la paupière d’un géant". Ample est le monde regardé ici par l’auteur du Portrait de l’œil, et autant intérieur qu’extérieur ("Je viens depuis dedans" écrit Enrique Huaco, et donc Werner Lambersy). Ample monde à scinder, pour aider le lecteur à passer d’un espace vu à un espace déchiffré "depuis dedans", ou passer du dedans au dehors. Pour dire que l’espace entre les lignes est celui d’un cillement d’œil. 
Cependant "la paupière d’un géant" (Michaux) représente aussi la part immense de cet œil sollicité pour voir au-dehors et voir en soi. Profondeur des "simples lumières" (Ariane Dreyfus) et de "l’obscurité" (Erri De Luca).
Cillement d’œil, l’espace au creux des phrases, et respiration. L’enjambement c’est aussi comme une apparente hésitation avant le pas, le choix. Séparer un verbe d’un complément, un sujet d’un verbe, c’est accentuer le mot qui précède la rupture formelle, visuelle, lui donner du poids, forcer l’attention. 
Autre raison, la lenteur. Méthode d’accès au sens.
"Il suffisait lentement, lentement de soulever un peu de peau tendre et je verrai, plus loin et hors de moi, éclater une lumière qui joue à la marelle avec les grands espaces du lotissement des astres" 
Remarquez la place de la virgule. Entre les deux adverbes, et pas avant ou a

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19/05/2021 | Lien permanent

À L'Index n°42. Dossier Jean-Claude Pirotte...

A L'INDEX n°42.jpgma vie est dans le livre / que je n’écrirai pas                          J-C. Pirotte, À Joie (citation choisie comme exergue à sa chronique, par Michel Lamart)

ce ne sont que poèmes / qui ont l’air de poèmes / et qui n’ont l’air de rien / car ils ne valent rien                                               J-C.P., Je me transporte partout (exergue choisi par Christian Travaux pour son texte, L’A-poésie de Jean-Claude Pirotte dans Je me transporte partout)

Et c’est vrai que je suis moins attentif au sens qu’à la mélodie feutrée, aux articulations obscures du ton, aux assonances, aux dissonances du timbre. Souvent je pense qu’il suffirait de me laisser pénétrer ainsi pour qu’éclose en moi comme une réponse, un répons plutôt, et qu’enfin ma propre voix délivrée aille se mêler au chœur composé de toutes les voix qui m’enchantent.                                                  J-C.P. Rue des Remberges (fragment cité par James Sacré)

le saurons-nous jamais / nous n'apprenons à vivre // qu'avec le murmure et l’éclat / des pluies sur les toits à lucarnes                                                              J-C.P. Passage des ombres (mon choix, cette dernière citation en exergue...)

......

La raison de cette note ? Faire lire la revue, ce numéro d'À L'Index, dédié au poète Jean-Claude Pirotte (décédé en 2014). Et donner envie d’aller ouvrir, ensuite, le volume de la collection Poésie/Gallimard ou le recueil final, Je me transporte partout (Le Cherche Midi).

J’ai donc lu la revue. Un poète lu par des poètes… Mais, aussi… Un homme lu par des hommes. Effectivement, à la lecture de ce beau numéro d’hommage (beau et très riche, par la qualité des commentateurs), impression d’entrer dans un univers très masculin, de manquer de certaines clés (de ce fait). Sans doute eux ne le voient pas ainsi. J'ai su que Sylvie Doizelet, qui fut sa compagne, n'avait pu répondre à l'invitation à participer au numéro d'hommage. Pour compenser je renvoie vers elle par deux liens en fin de note (elle a préfacé le recueil de Poésie/Gallimard). Les clés qui manquaient, j'ai fini quand même par les avoir, grâce à la complexité des regards, et aux nombreuses citations.

La deuxième impression vient du visage de Jean-Claude Pirotte. D’abord la photographie au chapeau, prise par Jean Pol Stercq. On voit surtout le sourire de la bouche et des yeux, de quelqu’un qui a dû inspirer amitiés et tendresses (ce que les chroniqueurs expriment souvent dans leurs hommages). Deux autres photographies (archives privées) témoignent de moments simples - partages, convivialité. Les portraits dessinés (d’Henri Cachau et Jean-Michel Marchetti) capturent autre chose. Un peu les yeux, mais une attitude du corps, une expression, comme de retrait en soi, une tristesse peut-être, un déchirement. Et, toujours, la cigarette, ou le verre de vin. La cigarette qui a fini par le tuer, et le vin qui rendit difficiles parfois la rencontre (comme c’est dit par certains, qui préfèrent témoigner autant de la vérité complexe et des fragilités d’un être que de l’admiration qu’ils éprouvent pour le même être, homme et poète). 

Pirotte.jpgMais l’essentiel revient donc au poète et à ses paradoxes, dans son rapport à l’écriture et à la poésie. Des textes en font la racine de sa force d’écrivain, ces paradoxes. Parcours…

Jean-Claude Tardif voit en lui un Don Quichotte. Dans une réception, rencontre poétique, il le voit comme "un Don Quichotte égaré dans une salle des mariages". D’autres le voient ainsi. Henri Cachau aime "son côté Don Quichotte", et ajoute qu’il aurait "aimé l’accompagner dans ses errances rabelaisiennes ou franciscaines, partager avec lui le pain et le vin, plus encore ce ciel étoilé de la poésie qu’il traversa tel une comète à la trajectoire incertaine, dont demeurent, brillant de mille feux, ses incandescents débris…". Quant à Gilles Grosrey il écrit que "Parler de Jean-Claude, c’est parler / de Don Quichotte et des cathédrales / cristallnes, des moulins d’une Flandre / imaginaire (…)".

Pour Jean-Claude Tardif, du vagabond "en cavale" il pense que sa fuite était plutôt une recherche. "… s’il fuyait, c’était me semble-t-il non pas qu’il cherchait à s’échapper mais plutôt qu’il essayait de retrouver une part de lui-même. Part de rêve laissée ça et là au fil des renoncements, des échecs qui touchent chacun de nous." Complétant son portrait par une qualité, la fidélité aux amitiés, et une mention qu’on retrouve diversement dans les autres textes, "Ce désespoir qui a le tact de se conjuguer avec l’élégance de la langue, sa seule beauté ! (…) Le spleen a des arômes (…) Ils font les mots longs en bouche, longs en cœur et de livre en livre nous disent l’amour, la perte, la nostalgie ; toutes ces choses qui nous font au final si tragiquement et intensément vivants".

Werner Lambersy nomme en lui un "délivreur" (on pense aussi à l’avocat qu’il fut, soupçonné même d’avoir aidé une tentative d’évasion, ce qu’il nia, injustice douloureuse mais qu’il trouva finalement fondatrice car elle le fit se vouer tout entier, ensuite, à l'écriture), mais c’est de l’écrivain dont il parle, le styliste rigoureux. Et il mentionne lui aussi "son inexpugnable mélancolie pour un passé (une jeunesse) dont il a toujours parlé comme d’un Vieux Présent !".

Carl Norac voit en lui "un passeur d’ombres", se référant au livre Passage des ombres, mais pas seulement, à des moments de nuit, partagés, pour exprimer la perception d’une part lumineuse. "Et là je vis que cet homme de la nuit, / en ses méandres, en ses détours, / ne m’avait parlé que de l’éclat des jours."

Lumière, aussi, dans un poème de Jean-Claude Tardif dédié à Jean-Claude Pirotte. "la lumière n’est peut-être qu’une figure de style / dont nous ignorons tout."

Michel Lamart interroge l’identité littéraire de J-C. Pirotte, dont il dit qu’elle "demeure ouverte. Perpétuellement en quête d’elle-même". Il interroge aussi son paradoxal rapport au lieu,  son hésitation entre errance et sédentarité. Questions sur le temps, la chronologie repensée. "Espace/temps. S’affranchir du temps pour mieux s’inscrire dans le lieu."

Dans certains textes s’exprime une reconnaissance pour l’aide reçue aux abords d’un commencement d’écriture ou dans une période de doute. Ainsi Claude Andrzejewski exprime une ambivalence. D’une part, l’expression d’une dette sue. "Pirotte a été mon sauveur, m’a extirpé du caniveau, m’a projeté dans les sphères célestes parmi les grands auteurs ; il m’a permis de croire assez en moi pour m’enfuir de la vie banale qu’on m’avait tracée au cordeau et au ras des pâquerettes, et alors j’ai pu vivre la mienne (…)." Mais d’autre part il témoigne de la nécessité de s’abstraire de cette relation, de s’éloigner, pour éviter des partages toxiques (l’alcool destructeur). Nécessité vitale d’être infidèle, en quelque sorte, et douleur de l’avoir dû. D’où "un vent de tempête sous mon crâne".

Pirotte 2.jpgChristian Travaux, relisant Je me transporte partout, cherche, lui, surtout, à définir ce qu’est la poésie de J-C. Pirotte, ce poète refusant la "modernité" et préférant des formes qu’il dit lui-même "désuètes", insistant sur ses paradoxales détestations et revendications. Octosyllabes, sonnets, rimes. Rimes utilisées et détestées à la fois. Christian Travaux rappelle que Pirotte dénigre aussi sa propre poésie, parlant, lui-même, à son propos de "débris de cantine". Et plus. "pour sûr rien de moins poétique / que ces sonnets à coups de trique". Donc plutôt que poète, pour Christian Travaux, Pirotte est (se veut) "un artificier de la langue, au sens où il montre, où il révèle cet artifice qu’est la pratique poétique dans son ensemble" (…) et "brûle" (…) "cet attirail".

Poèmes-hommages, encore, avec Michaël Glück. Trois poèmes, portraits qui disent je pour Pirotte. Trois exergues. De J-C. Pirotte : "le soleil s’est levé sans moi", puis "allons les mots sont à tout le monde", et "ici-bas me fait envie". Fragments de Michaël Gluck : "stèle parmi les stèles / je suis stèle mouvante (…) la nuit n’a pas encore / cousu mes paupières". Puis "j’ai mis / le verbier commun sur la table". Et "à quoi bon l’outre-monde /ici-bas me fait envie"… 

Philippe Claudel, aussi, comme Claude Andrzejewski, exprime de la reconnaissance, pour celui qui fut, pour lui, "une sorte de parrain en littérature", favorisant des publications en revues, et une édition de livre. Mais son estime ne l’empêche pas de parler aussi de la "face sombre" de J-C. Pirotte. Disant qu’un mort n’a pas à être doté "de qualités indiscutables", juste parce qu’il est mort. Alors qu’il fait partie, tout simplement, comme tous, "des êtres avec leur lot de défauts". Donc il se souvient que Pirotte "aimait le désastre et l’a semé", rendant sa fréquentation directe difficile, le faisant se réfugier dans la communication par correspondance. Mais  que ses ouvrages, eux, n’ont pas cette "face sombre". "Ils exhibent leur haute tenue. Voilà bien de la littérature, exigeante, bâtie sur des riens (…) et qui s’inscrit avec une évidence fraternelle dans la chair et l’âme de celui qui la parcourt." Et Philippe Claudel souhaite à d’autres la joie de découvrir "son univers et son inimitable phrasé". 

James Sacré, lui, regrette que J-C. Pirotte ne soit que dans trois anthologies (celles de J-B. Para, J. Orizet, J-J. Juland), même s’il est présent dans la collection Poésie/Gallimard. Il se demande ce qui a freiné ces reconnaissances. Et lui aussi parle du rapport paradoxal de Pirotte à la rime, et le fait qu’il mélange prose et vers. Des auteurs d’anthologies qui ne l’ont pas publié il dit qu’ils "n’ont pas su voir… que Pirotte ouvrait à la poésie un champ bien plus vaste que ce que proposent les formalistes et autres 'modernes' du moment (lesquels enferment le plus souvent la poésie en des carcans prétentieusement intolérants)".

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LIENS 

À l’Index Aujourd'hui. Le livre à dire… http://lelivreadire.blogspot.com

Jean-Claude Pirotte, fiche wikipedia… https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Claude_Pirotte

350 citations de Jean-Claude Pirotte, sur Babelio… https://www.babelio.com/auteur/Jean-Claude-Pirotte/46715/...

Début d’un article du Monde, 04-11-2020, sur le recueil Je me transporte partout, 5000 poèmes publiés par Le Cherche-Midi… Xavier Houssin écrit : « Du très grand Pirotte ». Et... Citation : "« Nulla dies sine linea » : pas un jour sans une ligne. Le gamin a fermement tracé la petite devise latine sur la première page de son carnet. Il n’a pas 12 ans. Jean-Claude Pirotte (1939-2014) n’oubliera jamais ce serment décidé, qu’il s’était fait enfant. « Je me l’étais promis », se souviendra-t-il dans Autres arpents (La Table ronde, 2000). Cette promesse, il l’a tenue, tout au long d’une vie qui s’est très souvent montrée hostile."... https://www.lemonde.fr/critique-litteraire/article/2020/1...

Sur Lisez.com, au sujet de Je me transporte partout, voici ce qu’écrit Sylvie Doizelet, qui fut sa compagne…  "Ce livre est fait pour durer toute une vie. Dès l’instant où vous l’ouvrirez, vous ne pourrez plus vous en séparer. Vous le lirez d’une traite – une histoire en 5 000 poèmes, une « série » en 40 épisodes (40 recueils) –, ou bien vous prendrez l’habitude de l’ouvrir au hasard, et vous tomberez sur un poème destiné spécialement à cet instant de votre vie. ///  Si vous lisez un poème par jour, il vous faudra plus de treize ans. Mais vous ne lirez pas un poème par jour, vous tournerez page après page pour vite découvrir la suite, vous serez envoûté, troublé, bouleversé souvent, empli d’un indicible bonheur d’accompagner Jean-Claude Pirotte pendant les deux dernières années de sa vie." … https://www.lisez.com/auteur/jean-claude-pirotte/85805

Le recueil de la collection Poésie/Gallimard, préfacé par Sylvie Doizelet… http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Poesie-Gallim...

Recension © MC San Juan

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28/04/2021 | Lien permanent

À L’Index N°44, revue, poésie…

1182750108.jpgCe numéro est dédié par Jean-Claude Tardif à l’ami Werner Lambersy (1921-2021), décédé en octobre dernier (mais présent dans le numéro 43, cité dans ma note précédente). Il lui consacre d’abord un texte poétique sur la mort et la poésie, mort qui arrête son souffle avec celui qui part, et crée une perte (sue ou pas) pour chacun. Mais, dit-il...  « Un poète a rejoint ses poèmes jusqu’à ne faire qu’un avec eux, n’être plus que son verbe et le grandir encore. » Et il cite un fragment du poète, comme un testament murmuré…

« Quand je serai mort, je serai un poème et vous n’en saurez rien. »

Et de nouveau il parle de lui, dans le texte introductif de ce numéro. Une page sur Werner Lambersy poète. Un hommage à l’écrivain, pour son exigence. Et un éclairage qui met l’accent sur l’éthique et le rapport au monde qu’avait celui qui écrivait, comme en rend compte Jean-Claude Tardif :    "Résister par les mots, les actes ; faire de l’anarchie une bonté.". Créer des livres qui sont « des actes de résistance où la beauté le dispute au sens et à sa profondeur ». Mais, comme il a noté que les écrits de Werner Lambersy étaient pour lui « des textes d’initiation, de fortification » il aborde ensuite l’écriture telle qu’il la vit, prolongement logique de ce qui est dit de l’amitié vécue avec le  poète, un processus de rencontre. « On ne peut pas écrire sans l’autre. » C’est donc un partage qui demande un double mouvement, intérieur et d’ouverture vers autrui. 

 

Je vais suivre l’ordre des pages, cette fois. Je lis des poèmes ou essais, en lecture subjective, gardant mon axe... (toujours peu lectrice de nouvelles…).

Un long poème de Catherine Baptiste, Hamlet ou ne pas être, interroge la poésie (et sans doute la vie) à partir de la question d’Hamlet. « La question du sens ». Et en face l’ombre d’Ophélie. Sans vouloir de réponses et de certitudes….

« et si c’était dans l’entre-deux, dans l’entre-temps

   qu’il faisait bon se tenir »

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Sous le titre Légers Ressacs, plusieurs poèmes de Myette Ronday, onze précisément. Fusion entre la matière du monde et la conscience de l’être humain, soi. Monde reflet en cet "étang" que peut être l’esprit « ainsi qu’un miroir ». Fusion, au point de se faire « N’ÊTRE qu’une vague comme les autres / venue s’échouer sur le rivage »

Mais avec un désir, « être réelle ». Force de la présence lumineuse du monde, paysage et éléments. Et aussi intuition d’un pouvoir des mots pour dire « l’inexprimé » de la réalité,    « de l’éternellement vivant ». Approche de la part de mystère que la nature révèle à partir du quotidien, et des signes que les objets peuvent transmettre, objets réels ou rêvés peut-être,     « perles roses et bleues » et crayon, « un oracle dans la mine du crayon ». Une robe devient l’objet transférentiel d’un dépouillement de mémoire. Et la nage dans la mer, réelle ou pas peu importe, est la plongée, au moins symbolique, dans « son espace intérieur ». Encore cette identification entre le dehors et le dedans. La nature comme deuxième corps et deuxième conscience, proximité presque chamanique. « Seule et pourtant sans solitude », dehors le vent et les arbres, à l’intérieur l’écriture qui invente ses langues. L’aube est un moment de métamorphose, de traversée vers autre chose…

« juste avec l’immuable nécessaire certitude

   de ne plus faire partie d’un seul et même monde. »

D’un poème à l’autre il y a comme l’histoire d’un itinéraire d’éveil à une autre réalité, une perception qui révèle, en défaisant l’identité apparente.

« DEVIENT-ON visionnaire ? N’est-ce pas

   plutôt que jusque-là on était aveugle ? »

Cet itinéraire c’est l’abandon de l’ego comme seul repère (enfermant) et le chemin vers la force du vide, ou pour le vide. (Peut-être celui que François Cheng expliquerait, ce vide médian dont il nous dit être la clé pour comprendre la philosophie du Yin et du Yang, fausse dualité que le vide tisse en vérité ternaire.) Or c’est cela qu’on peut lire dans un poème. Perception de la peur devant le vide, et transformation…

« Jusqu’à avoir la force délibérée

   et l’envergure nécessaire pour que

   ce grand vide emplisse notre être entier,

   comme la matrice de l’espace où la lumière

   se meut éternellement sans jamais s’éteindre. »

Et, en conclusion, dernière page, dernier poème… 

« Il est préférable de se conjuguer au présent. »

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Mystérieux texte que celui d’Emma Hourcade, Le premier rêve. Texte en prose donné comme un rêve intiatique, ou cauchemar, regard acide sur les femmes et les hommes, peinture de rapports de pouvoir et de soumission, et la peur qui régit la perversité de liens. On peut lire cela comme un poème. 

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De nouveau un long poème, Le chant/champ de la danse, d’Omer Massem. Le Congo vivant et l’histoire des hommes, force et tragédie. Un peuple qui danse.

« Nous sommes une danse. »

Mais la parole est d’abord chant, « le chant de l’homme en marche ».

Et ce que le poète affirme c’est justement la présence absolue du poème, inscrite dans la culture et l’identité, moyen privilégié d’atteindre le sens par le langage.

« Nous sommes cet espace de corps sans paroles

   prolongé par la seule parole de poésie. »

La mort, le malheur, la peur, le mal. Et « le cœur des veilleurs » (et des poètes, veilleurs par choix… ?).

Si la mémoire est « entre la pierre et la terre », la poésie combat le silence qui tait. 

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Plusieurs poèmes dans l’anthologie du Jeu de paumes. Et de nouveau Claire Légat, quatre textes inédits en quatre pages. Lecture et CITATIONS… 

Des touches subtiles, légères, des vers brefs, parfois un seul mot mis ainsi en relief, appuyant le rythme, la syntaxe. Murmure qui frôle les abords du silence pour entrer intimement dans une recherche de vérité intérieure, comme s’il fallait aborder le centre silencieux de l’être, des mémoires archaïques revenant de loin, en soi.

  «  j’ai charge

 de

 commencements »

(….)

   « dans la filiation

      des

      silences « 

Qui est la part de soi qui choisit ce qui doit être fait et inscrit ? Se transforme-t-elle en visage inconnaissable ? Ou transforme-t-elle le réel au point de devenir difficile à saisir en identité connue ? 

« me reconnaîtrez-vous

   quand j’orchestrerai la poussière

   et

   les

   transes

   jusqu’à la tendresse

   infinitésimale »

 C’est une part présente assez pour pouvoir trouver son centre dans le temps présent…

 « rien

    qui ne soit l’éloge de l’instant »  

(…)

« nous étançonnons

 les

 falaises

 de

 l’éphémère » 

Et même s’il y a « piège » ou « cri » il y a le mot « réconciliations ».

Réconcilier les forces apparemment contraires, intérieures et relationnelles, ou terriennes (« l’arbre / le rocher »)…

« comme pour ceindre malgré elles

   les constellations

   rebelles »  

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Plusieurs poèmes de Christine Busta (Vienne, 1915-1987)

Bilingues allemand-français. 

Extraits d’un recueil, Der Regenbaum / L’arbre à pluie

CITATIONS….

Der Wanderer / L’Errance d’un homme

« und alle Dinge sind

   so heilig und uralt. »    

« et toutes chose me sont 

   tout aussi sacrées et hors d’âge. » 

 April / Avril

« Von Regen rauscht und rinnt die Nacht » 

« Bruissante de pluie coule la nuit » 

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Suit un texte très érudit de Michel Lamart, sur Jean de Sponde.

Petit itinéraire spondien / en forme d’hommage baroque  Synthèse de l’étude…

Généalogie pour tracer le chemin linguistique. Le français n’est pas la langue maternelle, apprise ensuite. Religion, marques des tensions du siècle (XVIème) entre catholicisme et calvinisme. Formation universitaire poussée, culture et hellénisme. 

Grande précocité, qui fait de Jean de Sponde, très jeune (il a une vingtaine d’années) le maître d’œuvre de l’édition d’Homère, L’Iliade et L’Odyssée. Texte grec (d’Henri Estienne) et traduction latine (d’Andreas Divus). Mais surtout il commente, en privilégiant les interprétations théologiques. Lisant Homère il relie poésie et célébration de la divinité. Il écrit cependant des poèmes, Amours, qui mêlent flamme amoureuse (« désincarnée ») et élan spirituel. Plus graves textes, Stances de la Mort, avec une sagesse qui peut emprunter à celle de Montaigne. 

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Deux poèmes bilingues de Dylan Thomas (1914-1953) sont traduits par Philippe Pasquet Radenez, qui ajoute un précieux commentaire au sujet du deuxième poème, pour conseiller d’être attentifs à ce qu’il désigne par mots « à double fond ». Un autre sens est derrière le premier, permettant une lecture plus profonde, voyant une richesse symbolique à dévoiler.

CITATIONS

I dreamed my genesis / Ma genèse, je l’ai rêvée…

« I dreamed my genesis in sweat of sleep, breaking 

  Through the rotating shell, strong »

« En eaux, en mon sommeil, j’ai rêvé ma genèse, perçant

   La vrille démente de l’obus, puissant »

...

The force that through the green fuse drives the flower

La force qui pousse la fleur à travers verte tige   

« And I am dumb to tell a weather’s wind

   How time has ticked a heaven round the stars. »

« Et je suis une tombe pour dire au vent changeant 

   Comment, en s’écoulant, le temps a tendu cieux

  Tout autour des étoiles. »

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Dans les poèmes de Roxana Artal (traduits de l’espagnol, Argentine, par elle) j’ai aimé trouver une dimension particulère où se mêlent des thématiques sociales, philosophiques et peut-être psychanalytiques (intentionnelles ou pas).

CITATIONS

En cage

« La mienne est voix sans

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14/05/2022 | Lien permanent

POÉSIE. À L'INDEX - espace d'écrits, N° 40...

INDEX couv n°40.jpgL’introduction de Jean-Claude Tardif rappelle les publications récentes hors revue, dont plaquettes de poésie, comme celle de Werner Lambersy. Il insiste aussi sur la place donnée aux traductions. Il regrette l’invisibilité générale de la poésie, qui a cependant les revues pour refuge (elles-mêmes survivant parfois difficilement).
Après mon parcours de lecture (sélectif et subjectif) je reprendrai mes commentaires antérieurs du frontispice d’Yves Barbier et du texte de Jean-Pierre Chérès en 4ème de couverture (repères permanents qui disent une conception de la poésie).
Publications bilingues… Justement, les poèmes de Mascha Kaléko (1907-1975), traduits de l’allemand par Jean-Marc Couvé. Textes choisis dans plusieurs recueils, dont un posthume. L’amour, le temps, l’exil (avec le Monologue de l’émigrant). Exil qu’elle a vécu, en 1938, en fuyant l’Allemagne nazie (famille juive venue de Russie). Dans ce poème elle parle de patrie perdue, "Bouffée par la peste, engloutie sous la tempête". C’est elle, c’est tout exilé pour cause de guerre ou de désastre totalitaire. Je remarque aussi un titre de recueil : Dans mes rêves l’orage fait rage
 
Des poèmes de Jacques  Nuñez-Teodoro je note déjà la présence d’exergues. (J’aime que les poètes tissent des liens avec les auteurs qu’ils lisent, dont les phrases posées disent quelque chose de leur langage, de leur éthique). Il cite Henri Krea (pour Poèmes en Forme de Vertige - quel beau titre !), Robert Nash (Maine), Juan Agustin Goytisolo (Palabras para Julia), Catherine Ribeiro (La petite fille aux fraises), Jean L’Anselme : "Je suis du côté des cognés plutôt que de celui du manche". Et ceux qui souffrent sont présents. Ainsi les migrants qui meurent en mer, évoqués dans un poème. Les sentiments personnels sont mêlés à l’amertume née de la conscience des menaces qui guettent la planète, ou nées d’ombres passées.
Citations...
Parler de bonheur  (…) / c’est voler à l’oiseau ses ailes de lyre
.
Il y a des villes de l’autre côté du silence
.
Il fait froid dedans mon cœur / un vieux frisson d’enfance mutilée
(…) Des flots féroces noient déjà des enfants / Des eaux glacées s’avalent déjà des îles entières
(…) ll fait froid dedans mon cœur / un frisson de rêve en morceaux
 
Du poème de Gabriel Mwènè Okoundji, je retiens, comme trace pour l'ensemble, quelques vers et fragments, une parole de conscience...
Citations... 
Récit venu d’un rêve d’une nuit
(…) il disait : / - si tu te reconnais homme témoin de l’homme, c’est assez.
(…) Parle-nous ta langue mbéré ouvre en elle tes paupières.
(…) Cette terre n’a aucune borne voyante dans l’histoire du Congo. Nous ses natifs, nous sommes beaucoup de fleurs et peu de fruits, beaucoup de noix, peu d’amandes, beaucoup de vacarme, peu de parole, et nos rivières coulent toutes à l’envers des fleuves…
 
J’ai beaucoup aimé les textes (en prose) de Fabien Sanchez, et notamment celui, superbe, qu’il consacre à Abdelkader Djemaï. Récit d’un après-midi passé avec lui, magnifique portrait qui traduit l’évidence d’une présence forte. Estime, admiration. Mais à travers ce partage de rencontre on lit indirectement l’autre présence, celle de celui qui admire, qu’on devine, en surimpression. J’ai lu attentivement, aussi, ce qu’il dit sur ses lieux d’enfance, ce que l’on perd ou veut perdre, pour de multiples raisons. Et j’ai aimé aussi ce qu’il dit, autre texte, du rapport avec soi-même, la perception qu’on a de soi, du corps et de l’esprit-âme s’y sentant parfois prisonnier, des paradoxes de la conscience extrême. J’y vois une grande profondeur lucide et une grande sensibilité. (Je me sens en affinité avec cet univers de pensée, de "vivre"…).
Et il y a enfin le grand texte d’évocation d’un été de 1993 habité par la lecture d’Anaïs Nin, en prolongement de celle d’Henry Miller. (Tiens, moi aussi j’ai lu l’une après l’autre). Il peint, dans ce texte, des moments un peu glauques, et un personnage qu’il connaissait, glauque encore plus, décrit des hommes perdus avec des désirs sans amour. Certains passages pourraient faire grincer la féministe en moi. Mais non. Il y a trop de lucide vérité pour ça. Profondeur du regard, encore. 
Citations...
J’incline à dire ceci : Abdelkader Djemaï a l’épaisseur humaine que j’aime ; il fait le poids. (…) Tout ce qu’il dit fait écho à ce que je cherche en cette vie, la liberté par les mots.  (…) L’homme qui me parle côtoie les nuées lyriques et métaphysiques qui font la jonction entre l’art de vivre et l’art d’écrire, c’est-à-dire entre la poésie et l’être. (…) Il a le beau visage d’un homme dont les rides du temps soulignent plus profondément la douce gravité qu’il confère au présent.
.
L’envie me prend de me défaire de moi-même, sans savoir par quel bout commencer. (…) Heureusement que tout est voué à l’impermanence, et que ce que je prenais aujourd’hui pour un trouble vigoureux, demain s’atténuera, transporté de célestes douceurs.
 
Et, justement, suit un grand poème d’Abdelkader Djemaï, Vivantes pierres. Et c’est tout à fait comme l’a dit Fabien Sanchez, le texte d’un écrivain qui a en lui une grande beauté d’être. Les pierres ne sont pas choses vues mais élément d’un univers concret faisant partie du réel comme nous. Il invoque des présences multiples (végétales, animales), et les éléments (sable, argile, vent…). Animaux qui perçoivent quand les hommes n’entendent pas ce qui guette. C’est un lieu, un moment, mais des lieux, des moments. Le temps au-delà du temps, la terre et la réalité d’un fragment de cosmos. C’est comme un parcours métaphorique de l’histoire humaine, un appel à la conscience de nos limitations intérieures. Présence et disparition de l’humain sur terre. Grand texte, grand poète.
Citations...
Les pierres sont vivantes / Comme la chair d’un figuier / La pulpe d’un agave, le cœur d’un palmier   
(…) Les corps sont au tracé de la faille / À la déchirure de la page / À l’évaporation de l’encre
(…) Oui, les pierres sont vivantes / Et nous sommes morts / Sous nos paupières de schiste / Nous sommes morts / Sans avoir connu la neige / L’éternuement des nuages  / Et les pleurs de la pluie // Nos souvenirs en miette / Ne sont que les cailloux du gué / Qu’il faudra emprunter / Pour vivre à cru / À fleur d’image / À fleur de peau 
 
De Jean-Claude Tardif il y a une nouvelle. Moi qui ai du mal avec les nouvelles, j’aime celle-ci. C’est dans sa veine un peu fantastique, le mystère proposé par petites touches. Création de l’atmosphère d’un lieu, d’un moment, avec le goût pour la pluie, peut-être pour l’univers de brume qui sert le propos. Un personnage va vivre une sorte de métamorphose, à partir d’une double rencontre. Une femme entrevue sous l’averse, puis une silhouette qui semble se dissoudre dans le tronc d’un arbre. Et un jeune homme irréel qui a le visage d’un saint d’un autre temps. La transformation du personnage peut être interprétée comme le symbole d’une interrogation métaphysique ou d’un questionnement sur l’opposition entre raison et croyances.
 
Fantastique, aussi, le récit de Pierre Mironer. Un lieu qui mêle art, mort, mémoire et dérision. L’amoureux d’une morte hante sa tombe, dans ce qui n’est pas vraiment un cimetière.  
 
Je lis ensuite les fragments de Dominique Sampierro. Le beau titre intrigue (et c’est bien pour un titre), Neuf fragments de la lettre à l’emmuré dans son murmure. L’emmuré, c’est l’auteur, qui s’enferme avec la promesse des mots à inscrire sur un carnet. Méditation sur l’écriture, le processus qui y fait entrer : gestes, objets concrets et sens métaphorique. Le monde de l’écriture comme "un jardin sans clôture". Et ce qui attend, "au fond de mon silence comme au fond d’un puits". Le carnet qu’il ouvre est "fenêtre", "seuil ?". Et paradoxalement ce qui permet l’émergence de l’écrit c’est le "passage de la vacuité". Le vide "au cœur de la langue" ouvre le plein de la voix intérieure.
Citations...
L'impression que tout est là, à attendre de naître, sans contour, dispersé dans le souffle recueilli du papier.
(...) Car écrire c'est rester assis ici dans le lieu étrange d'une rencontre dont nous ne décidons rien à part notre juste présence. J’ouvre un cahier et j’ouvre mes mains en fait. Mon souffle. Mon regard du dedans.
(...) Un besoin de page blanche va succéder à cet envol de révoltes et d'abîmes, ouvrant loin derrière les yeux une frontière intime, insoupçonnée.
(...) La page blanche est le rêve de chacun d'effacer toute sa peine, toute sa douleur, de danser avec ce qui nous invente, réveillant toutes les mémoires anciennes et celles à venir aussi, les caresses les plus secrètes de l'invisible sur notre âme (...).
 
J’ai lu avec attention les textes de Kamel Bencheikh dont je connais d’autres publications. Il y a d’abord un grand texte sur une double mémoire amoureuse. D’autres lecteurs le préféreront sans doute à ce qui suit, pas moi (tout en appréciant cependant). J’ai aimé surtout les deux poèmes de colère et la Lettre. J’y retrouve son combat contre le fondamentalisme, contre les intégristes. Pour l’égalité des femmes et des hommes. J'y retrouve l'élan d'une force intérieure.
Citations...
Que la tempête s’acharne sur ceux qui égorgent la poésie, / Que la bourrasque souffle sur leur inhumanité galeuse, / Que le tonnerre balafre toute trace mortifère des ténèbres.
(…) Ils ont emprisonné les cheveux des filles de la Kahina dans une serpillière
(…) Il est grand temps pour l’oranger et le citronnier de mûrir 
(…) Et que mon peuple carbonise les servitudes hivernales
(…) Rien de ce qui est religieux n’est spirituel 
 
En lisant le récit de Michel Lamart j’ai tout de suite pensé à Maupassant, pour cette peinture réaliste, ces portraits cruels de vérité et d’ironie. Et, tournant les pages, j’ai vu qu’il le mentionnait... Confirmation de proximité.
 
Poèmes bilingues, de nouveau. De Wilfred Owen (1885-1918), traduits par Philippe Pasquet Radenez. Textes contre l’horreur de la guerre. Forts.
 
Enfin les poèmes d’André Prodhomme. Un souvenir d’enfance, le Monopoly, revu avec les yeux et la conscience de l’adulte. Puis un texte sur l’alternance des états d’âme, et, surtout (ma préférence)un poème sur une photographie d’enfant kurde sur les épaules du grand-père.
Citations...
C’est plus qu’une photographie / C’est au-delà d’une plainte 
(…) De quel imaginaire d’humanité commune / Témoigne cet instant recueilli / D’amour sublime entre un grand-père et une enfant 
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Le frontispice d’Yves Barbier, en couverture. Comment je le déchiffre… (reprise du texte d'une recension antérieure).

Cette vignette est une absolue réussite, car elle donne matière à interprétation et vaut manifeste. Dans un rectangle, qui peut figurer une page, une silhouette androgyne pousse une spirale, en dansant, ou la suit en courant, à moins qu’elle ne lui résiste, reculant. Spirale monde ou temps, centre d’écriture déroulé ou centre en construction, perspective cosmique, si je veux le voir ainsi, et c’est ainsi que je le lis. Il ne pourrait y avoir meilleure traduction de ce qui est offert en poésie. Une part de jeu et de danse avec les mots, mais dans un contexte d’ancrage réel dans le monde tel qu’il est. J’y vois le poète qui trace ses signes, en alphabet archaïque, originel, et qui les déchiffre (ou déchiffre en lui ce qui émerge de lettres et de mots). Signe spirale ou Terre, lien avec le monde, cette planète ronde et son feu central, et nous dans ce circulaire cosmos des galaxies, dont Hubert Reeves dit que nous sommes "poussières d’étoiles". La main touche la surface. La silhouette danse un peu, le cercle est peut-être aussi un cerceau, celui du jeu, pour garder l’esprit d’enfance et faire de la poésie une divinité intérieure "qui saurait danser" (Friedrich Nietzsche…). Ou c’est un fil lancé comme un lasso pour attraper mots et sens, ou s’attraper soi-même, et faire naître la possibilité d’accepter ce qui peut advenir, secousses de conscience. Je vois aussi une surimpression de O, cercle symbole de ce qui fait chercher et créer un centre (de soi, d’un texte, d’une oeuvre visuelle)... Mais aussi l’immense et lourde pierre que Sisyphe pousse jusqu’au sommet qu’il doit atteindre, et inlassablement recommence encore à gravir, encore et encore. Car si l’élan est là, qui fait créer, si la page est tracée, encore faut-il qu’elle sorte du rectangle. Et si la "présence au monde" (Jean-Pierre Chérès) fait s’impliquer celui ou celle qui écrit, et se sait "embarqué" (Albert Camus), il peut désespérer devant son impuissance. Désespoir, quand l’obscurantisme et la violence règnent, qu'on sent que ce qui ressemble au fascisme guette, et que cela menace toute possibilité d’entrer dans le silence de l’intériorité. On tend d’aller vers le sommet de soi-même, et tout bouscule et ramène aux réalités triviales. Redescendre, reprendre l’ascension.

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Ma lecture du très beau texte de Jean-Pierre Chérès, La Poésie, qui sert de manifeste permanent, paragraphe dense de la quatrième de couverture… (Reprise, ici, du texte d'une recension antérieure).
Citations...
"Préserver le présent dans sa respiration" et "se donner corps et esprit à la présence du monde", "être possédé par le monde, ouvrir en permanence ses antennes sensibles à l’univers".  
Et, donc, mon commentaire. Comment je le lis...
L’humain. L’humain d’abord. Dans la réciprocité du regard, dans l’inscription de tous les sens. L’autre, différent ou étranger, l’autre respecté. Ethique d’une poésie qui se soucie peu de fariboles superficielles. Beaucoup de ceux qui écrivent ainsi sont dans un permanent grand écart entre l’implication (qui ne peut être "que" d’écriture) et la création. Engagement non doctrinaire. Au contraire, liberté rebelle de la pensée critique, recherche en profondeur de sa propre authenticité, loin de la volonté dogmatique de possession du monde et de la pensée d’autrui. La poésie réelle est une clé contre le fanatisme.
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recension © MC San Juan
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Je regrette que des gens bruyants…

« Je regrette que des gens bruyants stigmatisent une communauté à des fins électoralistes. J’avais écrit Musulmanes pour rendre hommage à une civilisation, une culture déjà montrée du doigt à l’époque. Mais là, ça devient dément. »

Michel Sardou,  JDD, 25-11-12

Entretien à lire sur le Journal du Dimanche. Michel Sardou :  « Je suis un anarchiste qui paye ses impôts », 25-11-12 : http://www.lejdd.fr/Culture/Musique/Actualite/Michel-Sardou-Je-suis-un-anarchiste-qui-paye-ses-impots-577564 

"Musulmanes",  la vidéo (Bercy) : https://www.youtube.com/watch?v=J15L8KhqCvs&list=RDJ1... 

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27/11/2012 | Lien permanent

”Paroles de sagesse juive”...”Que l'homme ait toujours deux poches”. Citation... et citations.

Sagesse juive.jpgQue l’homme ait toujours deux poches.

       Dans l’une il inscrira :
   
"Je ne suis que poussière et cendre"
                 
             Dans l’autre : 
   
"Le monde n’a été créé que pour moi."
                         
                   Bounam de Pssiskhe
 (Paroles de sagesse juive, coll. Carnets de sagesse, éd. Albin Michel)
 
En face de cette citation, "Noé et l’arc-en-ciel", reproduction du tableau de Marc Chagall. Comme pour toutes les pages de cet ouvrage (une cinquantaine), l’iconographie, superbe, reproduit des oeuvres du musée Chagall de Nice. Une page, à la fin, est consacrée au peintre, et cite ce qu’il dit de ses tableaux ("pas le rêve d’un seul peuple mais celui de l’humanité").
La couverture (lettres hébraïques) et les vignettes (couverture et page titre intérieure, étoiles) sont de Danielle Siegelbaum.
La préface, trois pages précieuses de Victor Malka, expose le sens de la sagesse juive, philosophie et spiritualité, vision éthique, et libre arbitre de l’être humain. Une de ses phrases fait écho au message du poète François Cheng (présent dans deux notes précédentes). 
Car les sagesses se rejoignent dans la profondeur...
Je cite : "Se rappeler que vivre est une grâce et que, pour peu qu’on le veuille, le monde peut rayonner."
 
Cette citation est la première du livre, anthologie de merveilles. Et la dernière est un poème d’Edmond Jabès, pris dans un ouvrage collectif, Art Contre, l’art contre l’apartheid.
"Il ma dit :
 Ma race est… (...)
 J’ai répondu :
 J e suis de ta race."
   (...)
"Car mon âme… " (...)
(Je vous laisse lire le texte dans le livre...)
 
Une bibliographie propose une dizaine de titres. Lectures pour aller plus loin. Des livres qui iront aussi vers des livres…
 
J’aime beaucoup ces brèves anthologies de la collection Carnets de sagesse (Albin Michel)
Je commence par ce "carnet", mais d’autres suivront, de la même manière, autour d’une citation principale… 
 
Carnets de sagesse. Les livres. Librairie Decitre
et
Albin Michel Spiritualités...

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25/04/2019 | Lien permanent

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