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La moindre mesure du monde... Livre de Jean-Pierre Otte, L'Étoile des limites

Couverture-La-moindre-mesure-du-monde.jpg-nggid0295-ngg0dyn-640x426x100-00f0w010c010r110f110r010t010.jpgLa moindre mesure du monde, L’Étoile des limites, coll. Le lieu et la formule, 2023.

Le titre de cet ouvrage d’une quarantaine de pages correspond bien à l’intitulé de la collection, qui pose en exergue une citation de Rimbaud, « …pressé de trouver le lieu et la formule ».  Ainsi « Le lieu et la formule » inviterait des auteurs cherchant à se penser eux-mêmes à travers un espace, et tentant de définir une sorte de géométrie intérieure en questionnant une géographie extérieure. Le mot le plus important serait la « formule », car arpenter un lieu pour le décrire seulement, cela ne présente qu’un intérêt très relatif, s’il n’y a pas une démarche interrogeant le JE dans sa profondeur inconsciente, d’une part, et sa place dans une démarche de conscience d’être, la dimension ontologique, d’autre part. C’est en tout cas ma conception de l’écriture, et comme le poète Daniel Giraud le disait pour lui-même, je ne sépare pas la poésie (vers ou prose fragmentaire) de la philosophie. C'est la seule poésie qui m’intéresse vraiment (à lire ou à écrire), celle qui rejoint le domaine métaphysique, et plus, selon la conception de Jean Rouaud, « l’ambition mystique de la poésie » (je le citais dans ma première note sur la triste polémique autour du Printemps des Poètes).

Il me semblait, avant de lire son texte, que le titre de Jean-Pierre Otte indiquait qu’il allait au-delà de tout parcours de sentier ou de marche dans du « local ». Même s’il parle bien d’un lieu il le dilue dans une sorte d’anonymat qui crée une abstraction propre à faire penser. Il va vers la mer, dont les rives sont une frontière d’univers, finalement, où qu’elle soit, et les oiseaux qu’il mentionne relient terre et ciel (sable et cosmos) comme le feraient les traits d’une gravure.

Je me demandais si je trouverais un lien, dans ces pages, avec ses vers, ceux que j’ai cités dans ma recension de Diérèse (n° 88) : « ...se fabriquer / une âme pour échapper au piège du néant. ». Ou si ce que dit à son sujet le poète Michel Diaz, en recensant un livre de Teo Libardo, me fournirait une clé. J’avais relevé cela, dans ma lecture de Diérèse aussi (mais le n°89). Il notait que Teo Libardo (comme Thoreau et Giono, mais aussi, donc, Jean-Pierre Otte) traçait une voie de conscience pour l’horizon de notre rapport à la nature. Il écrivait ceci :         « Nous sommes ici dans les parages de Thoreau, de Giono, de quelques autres aussi conscients de ce qu’il nous aurait fallu préserver, et tout à fait dans l’esprit de ce que le poète-peintre Jean-Pierre Otte ne cesse de nous dire de livre en livre », le citant ensuite, pour un fragment d’un ouvrage parlant d’enracinement et de détachement, de présence dans une sorte de solitude choisie. Peut-être que ce que je retiendrai surtout, de cette mention, en dehors de la question d’une éthique à la manière de Thoreau, ce sera le paradoxe apparent qui fait s’enraciner et se détacher à la fois. Car cela rejoint ce que j’ai vu dans les pages de La moindre mesure du monde, en accord avec ma citation ci-dessus. L’âme contre le néant. Âme à « se fabriquer ». Albert Camus a dit cela aussi, que l’âme se crée petit à petit, dans un devenir construit consciemment. Il l’a écrit en agnostique éclairé.

J’avais une crainte, cependant, ayant remarqué, en consultant les titres de la collection, la rareté des prénoms féminins. Même si, dans mes lectures et affinités (moi qui préfère écrire auteur, pour le neutre de la fonction…) ce n’est pas du tout un critère. Tsvetaïeva, Dickinson, Yourcenar, Pedaya, oui, mais Blake, Rilke, Celan, Lorca, Jabès, Amichaï, Cheng…  Quelle était donc ma crainte (teintée d’agacement) ? C’est difficile à définir.  Peut-être que le lieu s’ancre trop différemment. Ou qu’il y ait trop d’ego. Peut-être. Mais je n’ai pas ressenti de gêne de cet ordre en lisant.

Dès la première page l’auteur indique avoir besoin de s’éloigner de sa table de travail, pour aller « marcher sans pensées le long d’un rivage » et vivre « la présence au réel du monde ».

Il va donc « vers la mer ».

Avant, dans le train, il n’a pas cru nécessaire de « vérifier » sa « présence » en contemplant son « reflet sur la vitre », rejetant cette « complaisance romantique». Mais, arrivé sur la rive, ce qu’il écrit accentue la portée de cette notation. De son visage il dit que « sous le vent mouillé » il « n’était plus qu’une parenthèse transparente ». Cela m’a fait penser à la « vision sans tête » de Douglas Harding (ou « voie sans tête »), à la démarche d’éveil de ce penseur mystique, qui voulait aider à prendre conscience de la vacuité intérieure, notre essence véritable. (J’ai lu quelques pages de lui et sur lui…).

Je ne sais pas si Jean-Pierre Otte connaît cette pensée. Peu importe, car elle s’inspire des philosophies (ou sagesses) de la non-dualité, pensées communes au bouddhisme, au soufisme, et à d’autres traditions. Et l’expérience qu’il relate ensuite prolonge cette perception, quand il évoque son ombre et le sentiment de sa propre présence à travers cette ombre, vécue comme possible                     « prolongement qui échappe au piège du dedans pour se manifester dans le champ extérieur ». C’est une présence-absence, que deux pages interrogent, ou « l’aimantation d’un mystère » qui s’inscrit.

Le lieu servirait donc ici à fuir ce qui serait limite d’une conscience enfermée dans l’intériorité.

Dans le même sens, quand il s’attable à une terrasse et note la présence d’une femme, il utilise le mot « vacuité » pour qualifier l’espace commun et son propre effacement, par un geste mental volontaire.

Et, marchant au bord de la mer, ce qu’il remarque c’est la trace des « pas mouillés que l’eau noyait ». Encore l’effacement…

Il y a constat et volonté mêlés. C’est un choix, celui de percevoir « un réel qui ne soit pas englué en nous-mêmes ».

L’aboutissement logique de ces effacements voulus et perçus c’est la perte « d’identité », mais pas comme appauvrissement et fermeture. Il ose même parler d’une « sorte de déité » ressentie en lui, « décalquée de la nuit intérieure », avec de nouveau la notion de transparence. D’autres diraient capter leur Soi (le tenter...), ce centre présent en tous, qui dépasse et annule le petit moi. Cela le relie « aux milliards d’êtres orientés en des espaces et des temps différents », conscience d’être lié au Tout de ces multiples vies. Mais pourtant refus de se laisser imprégner par ce qui fait la vie mentale d’autrui, dans un « concert mimétique ». Ce sont deux niveaux de pensée différents. Je reviens au premier en notant ce qu’il écrit, plus loin, du désir de « rêver un mot » pour signifier trois réalités, « l’ombre, l’âme, l’image », dans le but de rédiger un « traité », une « étude » qui « s’efforcerait à la perte de toute dualité ».

Il rêve ce mot qui peut-être n’existe pas. Ou qui existe. Je pense au texte du poète Éric Desordre, Métagraphies (lien en marge gauche, liste Rebelles), qui reprend ce concept d’Isidore Isou pour parler de photographie et de métaphysique. Démarche proche de celle de Jean-Pierre Otte, quand Éric Desordre se demande s’il faut « faire disparaître la dimension initiale des choses et en révéler l’appartenance à un autre univers, infime ou cosmique ».

Le traité rêvé (avec le mot) par Jean-Pierre Otte, en fait il l’a déjà écrit, c’est cet ouvrage en ses quarante pages. Quand il repart c’est en se « délestant de tout au fur et à mesure ». Effacement, le dernier paragraphe confirme ma lecture. Il est repris en quatrième de couverture, ce qui n’est pas par hasard. J’en copie le début : « Ce n’est que dans l’effacement de soi que la réalité de l’Ailleurs ou de l’Autre nous devient sensible ».

Livre bref, donc. Et cela est une qualité supplémentaire. Car avec trop de livres, trop de pages, on est noyé dans un brouillard quantitatif inutile. Quand tout Rilke entre dans deux volumes du Seuil, et que de grands noms se résument finalement à deux ou trois titres (Baudelaire, Rimbaud…).

Mais pourquoi la « moindre mesure » du monde ? Ce n’est pas réduire le réel à un espace minimal, mais, respectant le vaste, dans l’intention du regard, refuser de le charger de projections mentales, de lourdeurs de contenus. Donc trouver ainsi la « formule », en étant « sans aucune idée préconçue et sans intrications inutiles ».

Ce livre est le récit d’une entreprise. Comment, dans un cheminement solitaire, chercher à rejoindre le bord d’une certaine frontière mentale, dont on sait qu’elle pourrait être franchie, et se donner pour mission, personnelle, de traduire cela avec des mots. L’enjeu de l’écriture dépasse le désir de produire un texte. C’est existentiel.

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Recension © Marie-Claude San Juan

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LIENS :

La page du livre sur le site de L’Étoile des limiteshttp://www.letoiledeslimites.com/la-moindre-mesure-du-mon...

L’explication du nom de l’édition. Lieu imaginaire figurant « la croisée des hauts sentiers de l’écriture », emprunt du symbole au premier ouvrage publié... http://www.letoiledeslimites.com/qui-sommes-nous/

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07/04/2024 | Lien permanent

TZIGANES, GITANS, ROMS, MANOUCHES. Les connaître, les lire…

1 TZIGANE .jpgSongez-y : nous sommes tous / Le gitan d’un autre (Félix Monget, Gitanitude/poèmes)  

Je n’ai pas encore compris / comment fonctionne le monde, / mais je sais très bien / ce que le ciel exige de moi. / Le temps du gâchis est fini. / Maintenant je pose la main / sur tout ce qui est beau.  (Alexandre Romanes, Paroles perdues)

1 AME.jpgAu terrain vague des Tsiganes / Où papillonne l’enfant nu, / J’entends un orchestre d’oiseaux. (Esméralda Romanez - liens plus bas dans la note).

1 ROMANES.jpgCe qui m’attriste et me met en colère, c’est que les préjugés sont vivaces et tenaces. Les stéréotypes véhiculés au sujet des Roms demeurent identiques à ceux des années 40. On n’a rien appris de l’histoire qui se répète inlassablement. (Tony Gatlif, Entretien - lien plus bas dans la note).  

 

1. EXILS.jpgIl y a un feu sous les arbres : / on l’entend qui parle bas / à la nation endormie / près des portes de la ville. /// Si nous marchons en silence, / âmes de peu de durée / entre les sombres demeures, / c’est de crainte que tu meures, / murmure perpétuel / de la lumière cachée. (Philippe Jaccottet, Les Gitans, recueil L’Ignorant, 1958) 

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1. FILM.jpgIl y a eu récemment des faits plus que problématiques. Rumeurs et peurs finissant par des menaces et des agressions. Invention d'enlèvements d'enfants et hystéries collectives dans certains quartiers. Contre les Roms.

Peuples nomades, qui ont été victimes à très grande échelle de la catastrophe de l’holocauste, cette mémoire étant largement occultée (voir ci-dessous des liens vers des informations). La Shoah, pour les Gitans c’est "Porajmos" ou "Samudaripen". 

On leur reproche le fait de s’installer n’importe où et de déranger la vie des villages. Mais les accueils prévus sont très largement insuffisants. 

Certes certains font parfois parler d’eux pour des faits de délinquance. Mais comment survivre quand les droits au travail ne sont pas vraiment reconnus (suivant le statut mal compris de ceux qui traversent les frontières). Et quand la mendicité est réprimée (voir l’entretien de Tony Gatlif). Les préjugés, eux, assimilent toute une communauté à une minorité.

D’eux, des apports à la culture de tous, peu est su. Pourtant il suffit de traverser la frontière et de penser « Andalousie » pour voir partout les marques d’une pensée et d’un rapport au corps et au monde qui a une dimension métaphysique. Le geste qui porte à la danse, magnifie la main, c’est une transfiguration de l’être. (Et de même le geste mental, qui ancre dans le réel et dans quelque chose de sacré – ce qui ne veut pas dire religieux).  

De cette réalité qu’est le nomadisme, de la force de liberté qu’elle donne, nous ramenant à une source profonde de l’humain, ontologiquement, peu est compris.

Et que sait-on de la littérature tzigane ? 

D’où la nécessité de cette note. Pour donner à lire, à commencer de lire, le monde gitan. 

MC San Juan

.....................LIENS vers des pages, des SITES. Artistes et auteurs...........................................

Nommer (généralités nécessaires)... https://www.linternaute.com/actualite/societe/1175540-rom...

Aborder le sujet… Page sur les Tsiganes... http://mayvon.chez-alice.fr

FICHE wikipedia. ROMS. Dont partie Littérature… https://fr.wikipedia.org/wiki/Roms

Un SITE. Fils du vent sans pays. Tsiganes, gens du voyage… http://filsduvent.kazeo.com

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Pour commencer (hors axe mais pas tout à fait…)

Le prénom d’Enrico Macias vient de sa rencontre à Constantine avec le groupe gitan de musiciens de la famille Enrico. Il les fréquenta tant qu’ils finirent par l’intégrer et le nommer « petit Enrico ». Il y a en lui quelque chose de gitan (en plus du maalouf appris avec son beau-père)… Il chante "L’âme des Gitans" et "Le feu des Gitans", va sur scène en duo avec  Kendji Girac, jeune gitan catalan, avec lequel on sent une proximité de repères.

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Federico Garcia Lorca, poète du cante jondo, poète des gitans. FlamencoWeb... https://www.flamencoweb.fr/spip/spip.php?article179

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Tony Gatlif, gitan ET français natif d’Algérie. Boualem Dahmani, dit Tony Gatlif, est un cinéaste né  à Alger. Père kabyle, mère tzigane. Engagé dans la défense de la cause tzigane.

Cinéaste (dont Exils. FILM sur le retour en Algérie d’un jeune couple, un fils de Pieds-Noirs, une fille de Franco-Algériens)...  http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=54123.html

ENTRETIEN   informations et réflexions… Son FILM (et livre)  Liberté est mentionné (sur les persécutions subies par les Tziganes)… https://owl-ge.ch/arts-scenes/cinema/article/entretien-to...

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Un poète gitan connu et publié (livres), Alexandre Romanès, du cirque Romanès…

Article d’Alexandre Romanes. "Nomades nous resterons", Le Monde…https://www.lemonde.fr/idees/article/2011/02/26/nomades-n...

SITE sur le cirque Romanes (Voyageurs créateurs)...  http://www.voyageurscreateurs.com/romanes-poetes-tsiganes/

Ses LIVRES...http://www.gallimard.fr/Contributeurs/Alexandre-Romanes

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Manitas de Plata. Considérable musicien...

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LIVRES... 

POÈMES ROMS (et gitans, tsiganes). Une sélection… http://www.revue-secousse.fr/Secousse-02/Carte-blanche/Sk...

LISTE de LIVRES TZIGANES sur BABELIO (et introduction  avec lien vers article de The Conversation)…https://www.babelio.com/liste/7311/Litteratures-Rromani-R...

LIVRE. Anina. "Je suis tzigane et je le reste"… https://www.france-terre-asile.org/actualites/la-presse-e... 

LIVRE. Semi-autobiographique. Sandra Jayat... https://www.decitre.fr/livres/la-zingarina-ou-l-herbe-sau...

Autres livres d’elle (récits de vie de gitans). Cf. El Romanes... https://www.decitre.fr/auteur/230752/Sandra+Jayat

Couleur de fumée, une épopée tzigane, de Menihért Lakatos, Actes Sud, 1986. Traduit du hongrois... https://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature-etrangere/...

Félix Monget (a vécu beaucoup avec les gitans, l’est devenu de coeur). Un poème de lui était dans l’église de Ste Marie de la mer, c’est là que je l’ai lu d’abord, émue. De lui Esmérada Romanez dit qu’il est "tisseur de passerelles".

"Il ne faut pas faire pleurer les anges", L’Harmattan, coll. Poètes des cinq continents. Et autres LIVRES de lui (dont ses témoignages sur le monde gitan)… http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=auteurs&... 

Et c’est par lui (sur un site disparu) que j’avais découvert la poétesse Esmeralda Romanez. 

Qui est Esméralda Romanez (pas Romanes, autre famille)…. http://www.diversite-europe.eu/fr/news/esmeralda-romanez-...

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ÉDITION Wallada (dont une collection tsigane). Édition présente au Marché de la poésie... http://www.wallada.fr

Contes manouches... http://wallada.free.fr/boutique/?p=productsMore&iProd...  

Chansons manouches... http://wallada.free.fr/boutique/?p=productsList&iCate...

Waroutcho. COLLECTION TSIGANE. Liste de LIVRES… http://wallada.free.fr/boutique/?p=productsList&iCate...

Théâtre. "El duende" (textes de Lorca et Romanès). Descendre sur la page jusqu’au titre et texte... https://www.francetvinfo.fr/culture/spectacles/theatre/el...

Chorégraphe d’origine manouche, Michaël Stoll. Compagnie Mémoires vives. "Samuradipen", création sur le génocide… http://cie-memoires-vives.org/samudaripen/

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Porajmos = le génocide des tsiganes... https://fr.wikipedia.org/wiki/Porajmos

Autre nom. Samuradipen. Le génocide des tsiganes (roms, gitans). (Nom, aussi, d’une association qui avait été créée par la poétesse Esméralda Romanez)… https://fr.wiktionary.org/wiki/Samudaripen  

La Croisée des chemins. La guerre secrète des Tsiganes 1840-1944,de Jan Yoors, Phébus/Libretto, 2005... "Né en Andalousie en 1922 et nourri par une enfance cosmopolite, Jan Yoors fut, durant la Seconde Guerre mondiale, agent de liaison entre les Tsiganes et les Forces alliées. Il est mort à New York, le 28 novembre 1977." (page éditeur)... http://www.editionslibretto.fr/la-croisee-des-chemins-jan-yoors-9782752901071

Mémoire du CAMP tsigane, Montreuil-Bellay (Maine et Loire). Camp oublié… https://jacques-sigot.blogspot.com

et aussi... http://memoireducamptsigane.blogspot.com

PAGE (infos de Jacques Sigot qui fut instituteur à Montreuil-Bellay)...https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/camp-dinternement...

Article (2013)... http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2013/07/23/010

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12/07/2019 | Lien permanent

”Comme des marbres issus d'une carrière”... ”La Porte”, recueil de Pierre Perrin-Chassagne

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    Pierre Perrin-Chassagne, La Porte
(Recueil, avec deux photographies de Christine Perrin)
 
tout le trajet à refaire depuis le premier je
comme si l’on devait contempler cette porte à jamais
comme s’il n’y avait pas de porte
(jamais n’atteindre la mère…)
Roger Giroux, Je / pas encore 
Orange Export Ltd (anthologie), Flammarion, 1986 (Relisant les pages de Roger Giroux dans cette anthologie, alors que ma recension était achevée, j'ai été frappée par les éléments qui rejoignaient la thématique de ce recueil). 
 
Poèmes en prose, inscrits dans la lignée des poètes prosateurs. Avec des fulgurances intérieures qui auraient pu offrir des vers pour l’Anthologie du vers unique de Georges Schehadé
Dans ce recueil de Pierre Perrin, La Porte, deux parties. D’abord douze poèmes d’un recueil épuisé depuis longtemps, La Vie crépusculaire (Cheyne éditeur, 1996). Puis choix de textes d’un recueil en chantier, Des jours de pleine terre. Alternance de fragments narratifs et de « morceaux » méditatifs. 
L’épigraphe évoque le silence, qui est et qu’on brise. Manière de dire que publier des poèmes c’est lancer une bouteille à la mer que peu ouvriront pour lire le message, la poésie étant souvent celle que « nul ne lit ». D’autant plus si les livres sont épuisés. Or, quand on regarde la bibliographie de l’auteur (elle emplit deux pages) on voit qu’il y a environ cinquante ans de publications chez divers éditeurs. Ses recueils, mais pas seulement. Des études, dont une au très beau titre (« Les caresses de l’absence chez Françoise Lefèvre »). Des anthologies. J’apprécie cela. Écrire c’est bien, mais inscrire ses lectures et en laisser des traces, c’est essentiel. Je le fais avec mes recensions et j’aime quand ceux qui écrivent savent dire qu’ils lisent et comment ils lisent. D’autant plus que, quoi qu’on puisse en penser, la poésie a besoin de traducteurs. J’écris « traducteurs », car c’est effectivement un travail de décryptage d’une langue à une autre, qui se fait dans la même langue pourtant.Un enseignement nécessaire qui se prolonge au-delà des études (courtes ou longues) des lecteurs potentiels. Lui l’a fait aussi comme chroniqueur critique (NRF), l’a fait et le fait comme revuiste (papier puis web).
 
Les titres (bibliographie et ce recueil), il en a le sens. Ils ouvrent un seuil, on devine l’axe possible, les thématiques qui pourraient être traitées dans ce qui suit. Je suis très attentive aux titres (poèmes, livres) : je peux lire un livre pour le titre, ou au contraire ne pas en avoir envie, à cause du titre. Un titre doit éveiller la curiosité. (Mais j’aurais peut-être préféré que la liste des livres sépare les catégories différentes, en maintenant l’indication chronologique, qui est le choix, là, pour l’ensemble : poésie, récits, notes et carnets,essais. ) 
 
J’ai remarqué quelque chose d’important, la présence de plusieurs recueils co-créés avec des peintres, dessinateurs, photographes. Signe que le visuel est une dimension qui compte pour lui. 
 
D’ailleurs la couverture est une photographie. La mer, la côte, les nuages et le ciel. Du bleu. Le titre, La Porte, sur ce bleu, prend le sens de l’ouvert, pas de la clôture. Symboliquement, le bleu serait une couleur iiée au spirituel, au détachement qui élève, à une vacuité atteinte -- pas le vide-néant, mais le vide qui remplace les noeuds dont on s’est libéré - par la psychanalyse, ou par un processus de méditant, ou, aussi, par la poésie qui est, quand elle est authentique rapport au langage et travail sur les mots, un scalpel efficace. Le terme « scalpel », pour cette écriture, est tout à fait adéquat. Il fouille, triture, brise et coupe. Cruel avec lui-même. L’objectif est la plénitude (chemin de soi et pour soi, mais chemin partagé avec une jumelle d’âme : c’est ce qui apparaît).  
L’autre photographie de Christine Perrin est en noir et blanc. Elle sépare les deux parties du livre et représente une porte, écho du titre et du premier poème, métaphore des questions posées par les textes. Pierres, ruines, verticalité. Et mise en abyme. Une porte suit une porte, et notre imagination complète la profondeur de l’espace, au-delà d’une voûte sombre. Vers où fouiller ses ombres et celles de tous, humains capables d'indifférence ou de haine, de violence fanatique ou gratuite. Tout cela est évoqué dans les textes.
 
Puisque j’ai parlé de la bibliographie je dois ajouter que le titre du récit qui est mentionné dans la quatrième de couverture est « Le Cri retenu ». Dialogue avec une mère morte, « la » mère. À lire pour éclairer autrement la « matière » poétique. Ce sont les premiers textes que j’ai découvert de lui. Scalpel, encore.
 
Ce que je regarde souvent, dans un livre, ce sont les exergues, les citations, évocations… Car cela donne des clés. Comme un commentaire indirect de ce qui est écrit, une mise en profondeur. Et connaître les références invoquées révèle des proximités, une lignée. Donc quels sont les écrivains qu’on retrouve ici
René Char, d’abord, auquel il consacre un poème (p. 25), « Gisant debout ». Le titre est déjà l’hommage. Et je relève : 
« Il est plus grand que son corps d’homme sous la terre. », «  un paysan du cosmos », «  Le lire c’est l’aimer ; l’aimer c’est le relire non plus en aveugle ni à genoux, mais pour le grain de son poème. »  
Puis, p. 31, en exergue à un texte sur la poésie, Ramuz : « Le poète immobilise l’espace ; il tâche de le guérir de sa maladie qui est le temps ». Espace et temps, maya, illusion, pour les sages… La poésie serait-elle un outil pour l’éveil, elle qui « précède la pensée » ? Éveil au sens jungien de l’individuation réalisée, ou au sens mystique des bouddhistes ? Ou les deux, successivement ? Car la poésie «  ébranle », «  témoigne... d’une faille intérieure, d’une tectonique de l’impossible. » Poésie qui « propose… des éclairs froids et des cendres. » (J’aime moins cette dernière notation, qui s’associe à la perception du poète comme celui qui est «  l’instrument » dont joue un archet. Vision sombre, là.) Contredite par le poème sur René Char. (Char, solaire, même .) Donc les deux faces de sa pensée sur la poésie. 
Enfin, je retiens la citation de Jean-Paul de Dadelsen : « La terre apprise avec effort est nécessaire ». Car je suis ravie de le trouver là, ayant une passion pour cet auteur d’un seul livre, et livre posthume, « Jonas », établi grâce à sa femme. Pierre Perrin a choisi un vers du poème que Camus fit publier dans la NRF, Bach en automne. Camus, qui était son ami, devait publier le livre de Dadelsein (dont seuls quelques poèmes étaient connus), mais à sa mort la préparation n’était pas achevée… Je ne suis pas étonnée par cette concordance. Les presciences de Jean-Paul de Dadelsen font écho chez Pierre Perrin. Et ce mot, « effort ». Cela en exergue d’un texte, « Partir », qui commence par poser la question de « l’espérance en désordre » qu’il faudrait savoir « entrer de force dans notre vie ». Car ce n’est pas naturel et facile, pas évident. Quand il y a les douleurs, les ruptures, la mémoire, les deuils. Quand « chaotique est notre ascension ». Et qu’il y a l’amertume qu’on « renifle, crache », la mort, qui est « un compost », la peur qui « ne résiste pas au monde ». Comment interpréter cette phrase ? Est-ce le monde qui impose la vie contre la peur mortifère ? Ou la peur qui ne sait pas résister au réel, ne sait pas nous protéger des dangers du réel ? J’ai l’impression que c’est tout cela à la fois, paradoxe intérieur. Le mot « résiste » ferait presque oxymore, associé à la peur. La terre, comment ne serait-elle pas rappelée, puisque le poète parcourt un univers très terrien. Et d’ailleurs un texte  porte ce titre, « La terre » (celle qu’on travaille avec les mains, celle qui épuise les corps), texte qui précède «  Partir » et qui pourrait avoir le vers de Dadelsen en exergue pareillement.
Autres auteurs mentionnés, cités : Ronsard, Claude Michel Cluny, La Bruyère (pas étonnant, le livre comporte des portraits, avec cette exigence de vérité dure), Jean-François Mathé (à qui un poème de la deuxième partie est aussi dédié, donc une écriture et une conception de la poésie qui compte : conscience de soi, et conscience du monde, dire et déchiffrer l’énigme du processus poétique que l’écriture permet de penser), Annie Salager, Jacques Réda, George Steiner… 
 
Mémoires d’enfance où se confondent douleur et douceur, ce qui se dit et ce qui se tait. Paradoxes d’une lucidité qui « percute ». Mais l’horizon du rêve, de l’écriture, qui saisit et trace les « fils de lumière ». Avec le risque, mesuré, de ne pas garder en soi le lieu de « l’impossible », « habitat toujours précaire ». Et l’exigence d’une radiographie de lui écrivant.  Retour à la présence de l’autre : une femme aimée, associée à la plénitude, comme dans le message en épigraphe interne.
 
Ce ne sont pas des pages enroulées sur un univers clos. Le bruit des drames du monde est présent. Ainsi, les réfugiés, par le texte sur l’enfant noyé, celui d’une photographie qui a bouleversé le monde entier, symbole d’une réalité terrible, et plusieurs autres notations, dispersées. Ainsi la dénonciation rageuse de la cruauté gratuite envers les animaux. Indifférence aux êtres humains, aux détresses, et froideur émotionnelle devant la souffrance animale. Même cuirasse qui coupe du coeur.
 
Pour conclure, ceci :
« Qu’est-ce que vivre, sinon s’approprier l’infini particulier d’une éclipse de la mort ? »
(Tombeau de papier, p. 87).
 
© MC San Juan
 
LIEN vers le site de Pierre Perrin...
Livres, poèmes, études critiques (nombreuses), revue...
 

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02/07/2019 | Lien permanent

”Sous la cendre”... la lumière du regard. Un itinéraire d'écriture...

recensions,livres,citations,écriture,création,regard,roland chopard,sous la cendre,écripeindre,lettres vives,claude louis-combet,feu,cendreElle avait tant désiré vouloir être haute et intelligible. Autre que sous-entendue, en suspens, voire insoupçonnable. 

Roland Chopard, La voix du silence / Sous la cendre (incipit)

Je porte le temps brûlé dans mes yeux et je voyage vers vous 

Nizar Kabbani, Femmes (Arfuyen)

Après le feu, le bois devient cendre; le bois ne peut contempler les cendres, et les cendres ne peuvent voir le bois. 

Tozan (Hokyo Zan Mai), cité par Taisen Deshimaru, La Pratique du zen (Albin Michel)

Les êtres sont en attente, ils l’étaient avant l’incendie, ils l’étaient sous la cendre, ils le sont, plus que jamais, en ce livre né du feu et en réponse au désastre. 

Claude Louis-Combet, Postface / Sous la cendre

« Le temps brûlé », c’est exactement cela : « dans » les yeux. Car ce sont les écrits accumulés dans un temps antérieur qui ont disparu, détruits par un incendie, et avec eux le temps linéaire. Mais pas le regard. Au contraire. Dans ce livre qui cherche la mémoire de ses textes brûlés (et ne les cherche plus, car la « voix » a changé de registre en opérant une transmutation hors temps et hors « je » : elle n’a plus besoin de cette mémoire vraiment), dans ce livre un écrivain vient vers nous, depuis longtemps, d’avant le feu.

Pourquoi ai-je choisi de mettre Tozan en exergue? Rien dans cet ouvrage ne parle de zen. Mais quelque chose en lui rejoint un détachement proche de cette sagesse a-religieuse dépouillée. Une raison sobre capable d’élargir son espace à l’ouvert rilkéen, à cette hauteur. C’est né de l’alchimie du feu. Pas celui de l’incendie, celui des mots de l’écrivain, celui de l’imaginaire né des feuilles en forêt, celui de l’oeil qui peint à partir d’un centre de l’être.

On entre dans ce livre comme dans un fleuve, un flux de mots et de cendre qui draine une lumière. C’est une ample méditation sur l’écriture et la trace, sur le deuil de son oeuvre, quand les manuscrits ont été détruits et qu’il n’en demeure que de vagues réminiscences en soi. Ce presque rien est cependant fait de bribes qui seront matière inconsciente pour le cheminement d’une interrogation qui dépasse l’histoire personnelle de la perte. L’écriture, là, affronte le silence et le risque du silence, car devant la béance de l’absence des pages créées il pourrait y avoir le choix du renoncement. Recommencer, c’est impossible. Ne plus écrire, en voyant dans l’incendie un signe du destin, c’est ce qu’un certain vertige pourrait produire. Mais au contraire, écrire l’essentiel, créer « le » livre du rêve mallarméen, cela est l’autre choix, qui ne se fera pas consciemment ou pas complètement consciemment. 

Car les mots vont se mettre à sourdre d’un centre de soi qui n’est ni cérébral ni émotionnel. Ce qui se met en mouvement transcende le biographique. Je pense à ce que dit Alain Borer préfaçant Zéno Bianu : racontant une anecdote, un échec vécu à deux (moins dramatique), il dit qu’ils ont compris longtemps après que c’était un koan zen, en quelque sorte. Et j’ai associé, lisant, l’incendie à un koan magistral, qui, intuitivement perçu et intégré par l’auteur, l’a propulsé plus loin, semble-t-il, que ce qu’il croyait pouvoir attendre de son écriture jusque-là (par excès d’effacement aux raisons multiples).

On a sous les yeux, non seulement une réflexion sur un itinéraire particulier, mais, à partir d’une plongée singulière dans le questionnement sur le processus de création, un texte qui se meut en art poétique à portée bien plus large. Les citations que Roland Chopard a choisies comme exergues annoncent une thématique qui englobe son expérience et rejoint les démarches de méditants de l’écriture : Maurice Blanchot et Pascal Quignard. C’est « la voix du silence » qui s’exprime, sans que que le « je » intervienne. Cette voix qui perdure car elle puise dans tout ce qui échappe à l’anecdotique. Et c’est cela, écrire. Refuser les mièvreries subjectives et se mettre en face du miroir que le feu a créé, même s’il fait advenir des remontées de vécus, de deuils. Plonger dans ce que le silence recouvre, lui résister tout en l’acceptant (mais autrement), et le révéler en trouvant les mots. Cette voix… « n’est pas soutenue par l’addiction à un égocentrisme pourtant si nécessaire à la plupart des accapareurs de paroles. » (p. 22). 

La poésie vers laquelle tendre se dilue dans le langage, écrit-il (p. 26-27). Doute et peur, sont les freins du passé. Mais ces obstacles intérieurs sont aussi les signes d’un immense refus de ce qui n’est que mirages formels, conformité à des codes plus sociaux que littéraires ou artistiques (lire p. 25). Ce refus est l’expression d’une exigence radicale. C’est à Gilbert Lascault que je pense en relisant certaines pages que je perçois comme des textes rebelles (p. 25, notamment). Dans « Écrits timides sur le visible », Gilbert Lascault inscrit sa démarche « loin des certitudes, hors des polémiques », et, pour la défense de son « esthétique dispersée », il fait l’éloge d’un pluriel qui ne néglige ni l’errance nomade ni le goût du « peu » (comme la poussière prisée par léonard de Vinci). Mais aussi il fait le procès de ceux qui construisent des schémas et des normes pour « établir des ordres et des hiérarchies », interdire le « territoire » de l’art « à ceux qui ne seraient pas dignes d’y entrer ». C’est vrai aussi pour ce qu’on nomme poésie, littérature. Au point que, indépendamment de drames tels que des incendies qui détruisent (ou des sauvegardes qui se perdent) le plus grand obstacle à l’existence d’une oeuvre peut être le long évitement qui maintient indéfiniment les textes dans le tiroir de la maturation hésitante. Cet évitement qui a précédé le feu, l’auteur en parle. Mais il a deux faces. Dont une est la résistance qu’il faudrait savoir déjouer (et qui peut faire que jamais l’oeuvre n’existe, le temps passant, ou qu’elle soit tragiquement posthume). Et l’autre c’est ce retour à Mallarmé, l’attente de l’achèvement, de l’intense dont on sait qu’il est en train d’advenir. 

Ici le feu a été le déclencheur pour dire stop, et accepter l’achèvement. Alors se tisse cette méditation lente qui est poésie autrement. Et le gris que le feu a créé en recourant les couleurs de cendre il le choisit ou se laisse le choisir. Ce gris dont Gilbert Lascault dit (même ouvrage) qu’il est du côté des béances et du mouvant, éduquant l’oeil. 

De la « Suite » sur le silence on passe à « Écripeindre » (p.39), entre regard et forêt, lieu « mythique » et lieu réel qui semble avoir été le maître en fugue et leçon d’oeil. Derrière le poète (car ce long texte ample est poème) se cache l’oeil du peintre. Est riche de sensualité la parole tracée pour dire cette fascination pour la forêt, l’imaginaire et les feuilles. Une des clés est donnée par les citations de William Blake et Léonard de Vinci (p.47) : le « grain de sable » de l’un, où tout peut être vu, si on contemple suffisamment, et le « vieux mur » de l’autre, où se créent nos fantasmagories, si on accepte de regarder librement et assez longtemps. Tentation de la peinture : « Partir d’un signe, d’une trace et tourner autour, le traverser, le masquer, le mettre en évidence ou l’effacer au prix d’un travail qui se contenterait d’obéir à des injonctions. » Autre clé, la citation de Pessoa (p. 55), qui affirme la force de la littérature pour échapper à l’incommunicable… Mais les clés sont plurielles, références de lecteur avide, et qui relit : Pound (pp. 79-80), Giroux (p. 80), Ponge (p. 82), pour ne citer que quelques noms (voir citations, exergues, évocations…). Relire, nous aussi : c’est posé pour qu’on déchiffre… Clés dans une clé dans une clé. Tableaux dans un tableau dans un tableau. Mot dans un mot (« écripeindre »), texte dans texte. Construction en abyme, affirme-t-il, comme méthode « qui permet le retour » (p.74). La voix singulière s’ouvre à une « polyphonie » (p. 78), car des bribes multiples affleurent. 

Roland Chopard a réussi à éviter d’abandonner la voix au piège du « perpétuel chantier » (p. 87), en acceptant la fin de cette écriture-là, en décidant de donner à lire ce qui est advenu. 

Et du poème en prose il a fait un réel art poétique, valable au-delà de lui, car toute écriture se fonde sur des cendres écartées (de tout autres cendres), sur la pénétration dans un labyrinthe à déchiffrer. Toute écriture authentique affronte le vide et le doute et cherche le « comment » en raturant un infini palimpseste, en prenant le risque de tout effacer ou de ne jamais donner à lire. Tout poète est lecteur d’oeil. (Ou n’est pas). L’auteur le sait qui écrit-peint et cite Edmond Jabès : « c’est l’oeil qui déclenche le vrai questionnement » (p. 103). L’écrivain écoute Bach en recouvrant de mots ses pages. Bach « comme un baume » (p. 112). 

Le drame du feu devient une métaphore universelle pour dire la création et la mort, le doute, le vide, et la force d’une alchimie transformatrice. Où l’auteur naît à lui-même. Où le poète non seulement crée mais enseigne, par cette longue lettre-poème avec ses banderoles de fumée grise, porteuses de sens. Théorie littéraire (en refus de l’égocentrisme), humble (par rejet du théorique brut).  Pur poème, enfoui dans sa prose, pierres gravées, en quelque sorte. Comme Bach ce livre peut être un baume. Pour moi, oui...  

Pour clore, j’ai envie de citer un texte de Claude Louis-Combet, car c’est une phrase qui convient à cet ouvrage (ce n’est pas étonnant qu’il ait su saisir à ce point l’enjeu vital du livre dont il a écrit la postface). C’est l’excipit d’un livre de fragments paru en 1992 : « Mais c'est la langue qui est l’organe majeur de la création verbale. Elle a le goût du désir et le goût de l’infini et c’est un seul et même goût. » (« Le Don de Langue », Lettres vives).

MC San Juan

« Sous la cendre ». La page sur le site de l’édition Lettres vives (parution mai 2016) : http://www.editions-lettresvives.com/2016/05/parutions-pr... 

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03/07/2016 | Lien permanent

ANTISÉMITISME. Des clés (savoir, dénoncer). Revue de textes... et SITES.

On rend hommage à Ilan Halimi, on a marqué en janvier la mémoire d’attentats (et d’attentats antisémites), avec le souvenir d’autres assassinats, une enquête vient de montrer la permanence de clichés, signe de grande ignorance, et, enfin, des rumeurs envahissent la Toile en diffusant des théories du complot nourrissant la haine des Juifs… notamment en liaison avec le fondamentalisme islamiste, idéologie politique, et en liaison avec les réseaux négationnistes liés à l'extrême droite... Il est donc important de revenir encore sur la nécessité de refuser tout ce qui attise la haine. Mensonges, désinformations, ignorance. D’où cette revue de liens qui proposent des éléments de compréhension de ce qu’est l’antisémitisme et des moyens de lutter contre, par l'information, la connaissance. Ce qui ne peut se séparer, malgré la spécificité de chaque racisme, d'une lutte contre toutes les formes de racisme (haine des Musulmans, des Noirs, des Roms, peur des étrangers, des réfugiés, etc.). 

LIENS. Textes et sites... 

Rapports sur l’antisémitisme en Francehttp://www.antisemitisme.fr 

De l’antijudaïsme à l’antisémitisme, dossier Hérodote  http://www.herodote.net/610_a_1492-synthese-24.php 

Fiche-dossier wikipedia (avec bibliographie et liens) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Antisémitisme 

Antisémitisme, ushmm.orghttp://www.ushmm.org/wlc/fr/article.php?ModuleId=32  

« L’antisémitisme qu’on ne veut pas voir », Libération, 23-01-15  http://www.liberation.fr/societe/2015/01/23/l-antisemitis... 

Antisémitisme. France Culture. Dominique Schnapper : http://www.franceculture.fr/emissions/hors-champs/dominiq...

La haine des Juifs scandée dans des rues parisiennes (manifestation ‘Jour de colère’, intégristes et extrême droite, 26 janvier 14) : http://www.francetvinfo.fr/faits-divers/terrorisme/video-... 

et la réaction de Robert Badinter : http://www.francetvinfo.fr/politique/robert-badinter-deno... 

Slogans antisémites dans des manifestations pro-palestiniennes, comme en juillet 2014 : http://www.huffingtonpost.fr/marc-knobel/violence-manifes... 

Islamisme et antisémitisme, article de 2012  http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/10/08/islamisme-... 

Antisémitisme et fondamentalisme islamiste, article de 2015  http://www.liberation.fr/debats/2015/02/15/antisemitisme-... 

Entretien avec Samir Amghar, spécialiste du salafisme, sur l'antisémitisme associé à l'idéologie de l'islam radical : http://www.cclj.be/actu/politique-societe/radicalisme-mus... 

Antisémitisme d’extrême droite. Par Jean-Yves Camus, conférence, vidéo, Akademhttp://www.akadem.org/sommaire/cours/les-filiations-ideol... 

Informations diverses sur l’extrême droite antisémite et négationniste. Cercle Jean Moulin : http://cercle.jean.moulin.over-blog.com/tag/extreme%20dro... 

Extrême droite et négationnisme : http://the-dissident.eu/6260/valerie-igounet-lextreme-dro...

Michel Wieviorka, un livre (« L’antisémitisme expliqué aux jeunes », éd. du seuil) et des textes http://wieviorka.hypotheses.org/tag/antisemitisme?lang=pt... 

TAGS Antisémitisme, articles… L’Express : http://www.lexpress.fr/actualite/societe/regain-d-antisem... 

Le Figaro : http://plus.lefigaro.fr/tag/antisemitisme 

Antisémitisme. Textes, CRIF : http://www.crif.org/fr/blogs/categorie/antisémitisme 

CICAD, association suisse contre l'antisémitisme...
 
"Qui si je criais ?" (Veille : antisémitisme, génocides)... http://www.scoop.it/t/qui-si-je-criais
 
Le CCLJ belge, Juifs laïques contre le racisme et l'antisémitisme... https://www.cclj-60ans.be

Lutte contre l’antisémitisme et le racisme : LICRA, SOS-racisme, MRAP.

Citation de Martin Luther King, sur le lien entre antisémitisme et antisionisme : « Qu'est-ce-que l'antisionisme ? » dans une revue en anglais (Saturday Review, août 1967, p. 45,  texte cité dans  wikiquote de wikipedia (antisémitisme) : « L'antisémitisme, la haine envers le peuple juif, a été et reste une tache sur l'âme de l'humanité. Nous sommes pleinement d'accord sur ce point. Alors sache aussi cela : antisioniste signifie de manière inhérente antisémite, et il en sera toujours ainsi. Pourquoi en est-il ainsi ? Tu sais que le Sionisme n'est rien de moins que le rêve et l'idéal du peuple juif de retourner vivre sur sa propre terre. Le peuple juif, nous disent les Ecritures, vécut en union florissante sur la Terre Sainte, sa patrie. Ils en furent expulsés par le tyran de Rome, les mêmes Romains qui assassinèrent si cruellement Notre Seigneur. Chassé de sa patrie, sa nation en cendres, le peuple juif fut forcé d'errer sur le globe. Encore et encore, le peuple juif souffrit aux mains de chaque tyran qui vint à régner sur lui. (...) Pour quiconque chérit ce droit inaliénable de toute l'humanité, il devrait être si facile de comprendre, de soutenir le droit du peuple juif à vivre sur l'antique Terre d'Israël. Tous les hommes de bonne volonté se réjouiront de la réalisation de la promesse de Dieu, que son peuple retourne dans la joie sur la terre qui lui a été volée. C'est cela le Sionisme, rien de plus, rien de moins. »

Mais reconnaître le droit d'existence pour un peuple et un pays n'interdit pas le regard critique sur des positionnements politiques. Cependant, pour Israël, comme pour tout autre pays, pas plus... L'antisémitisme commence quand la critique est extrême et obsessionnelle, diabolisant ce pays, démocratique, et ignorant, ailleurs, des dictatures (dans l'indifférence d'un non-engagement complice), ou ne portant aucun regard critique sur les autres forces en jeu dans le conflit israélo-palestinien (idéologie, terrorisme, etc.). 

BDS et l’affaire des feuilles de bricks produites en région parisienne, CRIF : http://www.crif.org/fr/blog/que-se-cache-t-il-vraiment-de...

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Mise à jour 28-02-16... 

…. Comment Dieudonné a sombré dans l’antisémitisme… (L’article ne rappelle pas les liens de Dieudonné avec Jean-Marie Le Pen et le FN, et toutes les dérives complotistes : ce n’est pas le sujet, il note juste le rôle du complotisme dans un moment de basculement. Mais il mentionne le soutien donné au négationnisme) https://fr.news.yahoo.com/président-licra-raconte-lancien... 

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... LIRE ou RELIRE. ÉDITORIAL, de Jean-Pierre Denis, La Vie, "Dire l'antisémitisme avec des mots fermes", 17-02-2015  http://www.lavie.fr/debats/edito/dire-l-antisemitisme-ave... 

ENTRETIEN. Pierre-André Taguieff, « Les mots qui tuent », Marianne, 2015 (Propos recueillis par Alexis Lacroixhttp://www.marianne.net/pierre-andre-taguieff-les-mots-qu...  Et, 2011 (propos recueillis par Christophe Ono-Dit-Biot), "P-A Taguieff décode la théorie du complot", Le Point http://www.lepoint.fr/societe/taguieff-decode-la-theorie-...

Elie Barnavi, entretien, L’Express, 2014. « L’antisémitisme n’est pas le problème des seuls Juifs. il est toujours le signe d’une pathologie sociale plus profonde. » : http://www.lexpress.fr/actualite/societe/elie-barnavi-l-a... 

SOMME. « Dictionnaire historique et critique du racisme ». Dir. Pierre-André Taguieff, 250 contributeurs, 540 articles. PUF, 2013... https://www.puf.com/content/Dictionnaire_historique_et_cr...

Ce qui fut dit sur Hitler (ou l’aveuglement, encore et encore). Slate : http://www.slate.fr/story/114945/permier-article-new-york...

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Pour compléter cette page, lecture possible des précédentes notes :  voir « antisémitisme » dans la liste des catégories (marge gauche, descendre un peu…). De même recherche possible avec le tag « antisémitisme ». ........................................................................................................................................................

Mais... Lutter contre l’antisémitisme c’est connaître l’histoire, la culture juive… LIENS :

Culture juive, jalons, INAhttp://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu04582/la-...

Akadem, conférences (vidéos) : http://www.akadem.org

Musée d’art et histoire du judaïsmehttp://www.mahj.org/fr/index.php 

Portail, culture juive, wikipedia https://fr.wikipedia.org/wiki/Portail:Judaïsme

Judaïsme laïque (voir à « documents » pour trouver certains textes annoncés en sommaire…) : http://www.ajhl.org 

AGIR contre l'antisémitisme  (et signaler), voir les sites des associations antiracistes : Licra, SOS-racisme, Mrap… (liste Agir, ici)

SIGNALER (Internet) : https://www.internet-signalement.gouv.fr/PortailWeb/plane...

Théories du complot (associées souvent à l’antisémitisme)... Décryptage sur ConspiracyWatch (Observatoire du conspirationnisme) : http://www.conspiracywatch.info

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15/02/2016 | Lien permanent

HUMOUR...? Humoristes. Dessins et vidéos. LIENS...

humour,dessins,caricatures,dessinateurs,caricaturistes,humoristes,charlie hebdo,vidéos,cartoonsNote en deux parties. Réflexion personnelle, un peu, pour commencer. Et liens, ensuite, pour sourire, rire, s’émouvoir, s’informer, penser...

Humour, satire, ironie, autodérision, critique, caricatures, blagues, second degré... Moyen de supporter des situations intenables, de lutter contre la censure et la répression, de se révolter contre la violence, d’aborder autrement l’actualité et la critique politique, de poser des questions existentielles ou, même, métaphysiques, l’humour est présent partout. Il est aussi réprimé souvent, et victime de pressions : censure, autocensure... Détournement des clichés et rejet des stéréotypes, il fait réfléchir... Bien sûr (on a eu l’occasion de s’en rendre compte avec des humoristes devenus complotistes et racistes), l’humour peut être dévoyé. De même il peut s’adresser à la paresse vulgaire de spectateurs, dans des blagues grasses de bas niveau, sexistes et malsaines... Mais souvent le rire fait appel à l’intelligence subtile. On rit, on sait qu’on a besoin de rire, que cela nous fait du bien, mais on ne sait pas toujours pourquoi, réellement, on rit (ou sourit). Est-ce le miroir de ce que l’on reconnaît de nos ombres, de nos ridicules, ou est-ce la représentation inversée de ce qui nous angoisse ? Ou, parfois, une scène fictive rassurante, qui permet le lien au lieu de provoquer la séparation... et cela fait rire, parce que c’est décalé par rapport aux tensions de la réalité...

ARTICLES... 

Pourquoi rit-on ? The New Republic, publié le 30 mars 2014 à Washington, et repris par le Courrier international du 26 février 2015, le chercheur en psychologie et universitaire Peter Mc Graw (auteur d’une étude sur l’humour dans le monde, The Humor Code, dit que nous rions quand quelque chose menace, mais de manière bénigne, imaginaire, ou qu’on voit que « quelqu’un a fait quelque chose de mal » (on le voit donc il y a distance...). Rire thérapeutique (« effets physiques bénéfiques »), rire qui « peut changer notre manière de percevoir le monde » : http://www.courrierinternational.com/article/2015/02/26/et-vous-trouvez-ca-drole

Charlie nécessaire. ESPAGNE. HUMOR ofensivo de CHARLIE, es necesario? G.Frasca (oui)... http://cnnespanol.cnn.com/2015/01/08/el-humor-ofensivo-de-charlie-hebdo-es-necesario/  (« Ayer la espada fue más poderosa que la pluma. Sin embargo, a largo plazo, el lápiz siempre es más poderoso que la goma de borrar. ») Le dessin est plus puissant que la gomme...

SITES... 

CaricaturesETcaricature (articles, infos, et liens)... http://www.caricaturesetcaricature.com/tag/interviews/
 
Humoresques, revue (articles, bibliographie, liens)... http://www.humoresques.fr/
 
CARTOONING for PEACE… http://www.cartooningforpeace.org
 
DESSINS à la UNE. Cartoons sur Courrier international...  http://www.courrierinternational.com/cartoons_overview
 
Réseau interdisciplinaire de recherches sur l’humour. RIRH… https://rirh.hypotheses.org
 
FICHE généraliste, wikipedia. Humoriste… https://fr.wikipedia.org/wiki/Humoriste

JOURNAUX... 

Le SITE de Charlie-Hebdo… https://charliehebdo.fr

Canard enchaîné... http://lecanardenchaine.fr

El Jueves. Humour, Espagne… https://www.eljueves.es

HUMORISTES, sites et vidéos... 

Saïdou AbatchaSITE... http://abatchasaidou.free.fr
 
VIDÉO. Si tu sais que tu ne sais pas… https://www.youtube.com/watch?v=1jtsNgp6N00

Fellag. Bled Runner. VIDÉO… https://www.youtube.com/watch?v=PABs9wShekw

Sophia Aram en niqab! Au sujet d’un féministe... DISCRET. VIDÉO (ce prince d’Arabie saoudite, décédé, dont la responsable du FMI vantait les mérites des actions –discrètes - pour les femmes... et dont l’enterrement a déclenché les marques d’estime de tant de gouvernants oublieux des décapitations en augmentation, des femmes lapidées, même si le droit de vote est prévu pour 2015)... https://fr.news.yahoo.com/sophia-aram-niqab-france-inter-151813264.html

Sophia Aram, connue par ses prestations réussies à la radio. Fiche wikipedia (Ou on apprend un fait privé révélateur de choix signifiant un engagement et une grande ouverture d'esprit Ainsi, de famille musulmane, mariée à un protestant de culture familiale, ils ont donné un prénom hébreu à leur fils)… https://fr.wikipedia.org/wiki/Sophia_Aram

Le billet de Sophia Aram sur France InterVidéos. A voir et revoir… https://www.franceinter.fr/emissions/le-billet-de-sophia-...

Nicolas Bedos joue Rachid Walafi pour parler de l’islamisme et du terrorisme, 17-01-15... https://www.youtube.com/watch?v=6dmE1jE2koo

Samia Orosemane, site officiel… Dans le sommaire aller à "Vidéos". Certaines ont été désactivées par Youtube, mais d’autres fonctionnent… https://samiaorosemane.com/biographie/
 
Fiche wikipedia de Samia Orosemane… qui montre comment par l’humour elle sait réagir contre le terrorisme... (On y rappelle sa chaîne Youtube "TéléAïcha" et la chaîne des vidéos "Geneviève et Aïcha"… qui valent effectivement le détour)... https://fr.wikipedia.org/wiki/Samia_Orosemane
 
À part ça tout va bien / Qui a dit que les musulmans n’avaient pas d’humour ?.. Petits films… http://apartcatoutvabien.com
 
et
 
Dix humoristes (sélection du Monde, 2019)… https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/11/29/dix-hum...
 
Les nouveaux humoristes, L’Express (nouvelle génération)… https://www.lexpress.fr/culture/scene/les-nouveaux-humori...

Une autre génération d'humoristes... 

Un couple mythique de l’humour pied-noir. Robert Castel et Lucette Sahuquet. VIDÉO, Les noms… https://www.ina.fr/video/I07114592/robert-castel-et-lucet...
 
et.. Castel-Sahuquet. VIDÉO, Le chômeur… https://www.youtube.com/watch?v=3C45pzUjgHA
 
VIDÉO, La drague, Guy Bedos et Sophie Daumier… https://www.youtube.com/watch?v=ogV0gc9JQuI
 
FILM en ligne. La famille Hernandez. Tourné à Alicante en 1964, avec Jean-Marc Tejera, d’Oran… https://www.youtube.com/watch?v=4Fv7rWxQDls
 
Raymond DEVOS, VIDÉO INA, Devos par Devos
 
Raymond Devos, fiche wikipedia (et indication de livres, dont celui de Jean Dufour sur Devos, funambule des mots)… https://fr.wikipedia.org/wiki/Raymond_Devos

DESSINATEURS...

DESSINS POUR CHARLIE.DIAPORAMA,Courrier int., 18 dessins : http://www.courrierinternational.com/galerie/2015/01/08/des-dessins-pour-charlie

DESSINS à la UNE. Cartoons. Courrier international : http://www.courrierinternational.com/cartoons_overview

Julien NEEL. Conspirationnistes. DESSIN : http://www.conspiracywatch.info/Conference-de-redaction-chez-les-conspirationnistes_a1333.html

SITE. GAGdz, dessinateurs algériens… https://www.gagdz.com

Caricaturistes algériens après Charlie, Le Monde

DILEM. Le DESSIN du JOUR. TV5 : http://www.tv5monde.com/cms/chaine-francophone/info/p-1913-Le-dessin-du-jour-par-Ali-Dilem.htm

Dilem sur gagdz. Un métier à risque. DESSIN : http://www.gagdz.com/un-metier-a-risque/

Dilem en UNE du Canard enchaîné, article Liberté-Algérie... http://www.liberte-algerie.com/actualite/dilem-en-une-du-canard-enchaine-219599

Dilem, sur Liberté-Algérie… https://www.liberte-algerie.com/dilem

Gyps, Oualou en Algérie, La boîte à bulles… https://www.la-boite-a-bulles.com/profil/Gyps
 
Sur Gyps, article du JSD (St-Denis)… L’humour franco-algérien… https://lejsd.com/content/gyps-ou-l’humour-franco-algérie...

LOUNIS sur gagdz. Attentat contre Charlie Hebdo. DESSIN : http://www.gagdz.com/attentat-contre-charlie-hebdo/

KAP.  "Charlie Hebdo : NO TENGO PALABRAS”.DESSIN : http://blogs.lavanguardia.com/elultimomono/charlie-hebdo-24740

ENTRETIENS...

DILEM parle de Charlie Hebdo. Le Point Afrique... http://afrique.lepoint.fr/culture/charlie-hebdo-l-afrique-reagit-dilem-ce-n-est-pas-qu-un-titre-c-est-un-esprit-08-01-2015-1894965_2256.php

Jacques FERRANDEZ et Charlie... http://leblogbd.nicematin.com/2015/01/ferrandez_.html

Benabdelhamid Amine, dit NIME, Actua Bd… Si je ne dessine plus...
 
Entretien. Michel KICHKA, dessinateur israélien… http

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08/03/2015 | Lien permanent

ALGÉRIE. Refus, élans, inquiétudes, et ESPOIR...

ESPOIR... 
ALGÉRIE… Comment ne pas suivre ? Un tel élan... Enthousiasmant, respectable, admirable, même, par la manière dont il est vécu et pensé. Pacifique, joyeux et triste à la fois. Joyeux, car, comme le dit Kamel Daoud, la peur a été cassée. Plus de peur d’affronter le régime. Plus de peur de provoquer des affrontements entre adversaires et soutiens du système (ou peur maîtrisée). Joyeux, l’élan, comme celui  de la danseuse au drapeau qui fait des pointes dans la manifestation, belle photographie, riche en symboles. Elle marquera l’Histoire, sa photographie. (Mais je ne l'ai d'abord trouvée que sur Facebook, sur une page, celle du livre "Alger sans Mozart", de Michel Canési et Jamil Rahman, Folio. Portrait de femme, aussi…). Imaginez une jeune femme élancée qui danse, cheveux au vent. On pourrait la penser Parisienne ou Madrilène. Une femme moderne, libre, d’évidence. Symbole de ce que peut être une Algérie libérée de la pression d’un clan dictatorial. Et, signe de ce qui est déjà en germe dans le pays, qui connaît, malgré le pouvoir, de multiples initiatives pour changer le quotidien (sociales, culturelles, environnementales, etc.). Avec, bien sûr, les archaïsmes qui tentent d’imposer obscurantisme et croyances aberrantes, les islamistes, moins agressifs (pas toujours) qui guettent, le complotisme, nourri, comme en France par la lecture de Russia Today, la voix du Kremlin… . Pays de fractures (mais on peut en dire autant, sur ce plan, de la France et de beaucoup d’autres, en ces temps de populismes et de nationalismes - au pluriel). Triste, l’élan, car portant l’inquiétude des risques de dérives et récupérations, et celle du manque d’alternatives. Mais les voix des intellectuels (universitaires, chroniqueurs, écrivains) portent à la vigilance.
En France, on suit. D’abord la diaspora algérienne et les Franco-Algériens, qui manifestent à Paris et ailleurs, et participent au débat sur les réseaux sociaux et autrement. 
Ensuite les natifs d’Algérie, Pieds-Noirs attachés au pays actuel, et Juifs pieds-noirs (se définissant ainsi ou pas), ayant des liens sur les deux rives (et plus qu’on ne croit, souvent par les villes de naissance, contacts maintenus, mais aussi par des réseaux professionnels, des coopérations diverses). 
Enfin les observateurs (presse, médias, politiques). Avec de la sympathie.
La jeune danseuse s'appelle Melissa Ziad. Et la photographie est sur la page du Matin d'Algérie (celle de la chronique de Tawfiq Belfadel sur les femmes dans ce mouvement, commentaire et lien en bas de note). Choix avisé.
Cette jeune femme est entrée dans l'Histoire. Et pas seulement celle de son pays.
D'abord, de ce pays... Mais symboliquement au-delà. Je vois cette danse comme un signe de l'humain à venir.
SI nous marchons vers cela. La beauté, plutôt que les cris. Sens universel. 
Lien. Pour la PHOTOGRAPHIE, même si le haut est coupé (dommage). Pour l'article c'est plus bas... 
 
La presse française et internationale a couvert aussi les manifestations et relayé des analyses et questionnements.
L’Union européenne a appelé au respect des droits des manifestants. Manière de soutenir, tout en rappelant les liens entre l’UE et l’Algérie… AlgériePart… (D'autres signes et appels similaires suivent, d'après la presse algérienne). Europe, UE :
"La France a-t-telle son mot à dire sur l’Algérie ?" (Risques d'interprétations 
négatives ?).
"Si la France soutient la rue, ce sera de l’ingérence. Si la France
soutient le pouvoir, c’est la main de l’étranger. Dans les deux cas, la France
ne peut que produire un silence assourdissant’’.
Naoufel Brahimi El Mili, politologue. France Culture,4 mars 19… 
https://bit.ly/2ETQR7H
La France réagit, cependant, discrètement, lentement...
Diplomatie.gouv Site officiel. Réponses de Jean-Yves Le Drian,  ministre des Affaires étrangères. 
France 24, 06-03-19. "Pour Jean-Yves Le Drian il faut laisser le processus électoral se dérouler en Algérie."
 
....................
Les FAITS...
 
Refus du 5ème mandat
Dès janvier, le boycott des élections comme riposte.
JeuneAfrique, 25-01-19. "Présidentielle en Algérie, le front du boycott s’élargit"…
Manifestations partout
Des milliers de manifestants (puis beaucoup plus…)… 
Le Parisien, sur les manifestations,
22-02-19. "Manifestations tendues contre un 5ème mandat"…
 https://tinyurl.com/yxc4eo83
Courrier international, REVUE de PRESSE. 
"En Algérie des milliers de manifestants crient leur colère
contre Bouteflika
"...
https://tinyurl.com/y4qjap8l
Belle photographie d’une manifestation… 
BFMtv… https://tinyurl.com/yyu83jc8
Et la diaspora algérienne s’engage…Le Figaro, 28-02-19.
"En France aussi la diaspora descend dans la rue contre Bouteflika"...
 
Mais... Diaspora (et.. autre diaspora)… Fausse note. La Grande mosquée de Paris soutient le 5ème mandat de Bouteflika, y mettant même un budget. Elle se compromet nettement. TSA Algérie, 27-02-19. "La Grande mosquée de Paris au secours du candidat Bouteflika"… https://bit.ly/2HbQpV5
………..
Bouteflika se représente et promet des élections (ensuite…)…
Citations..."Cette nouvelle candidature fait bien sûr aussi la Une de la presse ce lundi. Le journal El Watan titre que le président, par sa décision d’être candidat, défie les Algériens. Dans son éditorial, le quotidien francophone estime que cette décision est une humiliation insupportable." 
"Pendant ce temps, sur les réseaux sociaux, les appels à la désobéissance civile sont relayés en masse. Plusieurs centaines de milliers d'internautes ont d'ores et déjà fait savoir qu'ils participeraient au mouvement."
"Les promesses de Bouteflika n'apaisent pas la colère"RFI, 04-03-19… https://tinyurl.com/y6hg22sa
 
Le Point, 7 mars 19. "Algérie : le 5ème mandat fragilisé par une série de défections importantes." (Et par les informations sur la santé d’Abdelaziz Bouteflika, données par les médecins qui le suivent à Genève)… https://bit.ly/2H63gb6
 
REVUE de PRESSE, France Culture… Au 2 mars 19… 
....................
ANALYSES
 
"Pourquoi la jeunesse algérienne dit non." Omar Belhouchet, Marianne,
1er mars 19.
(Quatre grands paragraphes lisibles en ligne... L’essentiel…).
Omar Belhouchet est le fondateur d’El Watan.
Ce défenseur de l’état de droit dit que le 22 février a été un
'tournant historique’ dans le pays, avec cette jeunesse dont il loue
la maturité. Et il rappelle ce que sont les refus exprimés
par les jeunes (le régime, le système et sa corruption)…
 
La situation actuelle, 2019. 
Analyse approfondie d'El Mouhoub Mouhoud, universitaire (économie), Paris Dauphine.
Citations..."Il est tout d’abord désolant de constater que la préoccupation essentielle de certains observateurs en France, relayant la crainte des autorités, réside dans la peur d’un afflux massif d’immigrés. La « stabilité » garantissant la mise à distance des candidats potentiels à l’émigration vaudrait elle mieux que les espoirs du changement auquel aspire une jeunesse nombreuse et délaissée ? Il est vrai que ce fut déjà la première réaction du pouvoir politique en France au moment du déclenchement de la révolution tunisienne en 2010. Il serait bien plus utile de chercher à mieux comprendre les bases profondes de ce nouveau soulèvement." (...)"Ces propositions ne sont possibles que si une réforme profonde de l’État est réalisée. Il va sans dire que le préalable réside dans la lutte radicale contre la corruption à tous les niveaux et la mise en œuvre de mécanismes garantissant la transparence. Ce dernier point sera au centre des changements que réclament les Algériens." The Conversation, 1er mars 19, "Algérie, économie politique d'une rupture annoncée"… https://tinyurl.com/yxpwe5do
…………..
L’article de The Conversation ci-dessus répond indirectement à celui du Parisien qui parle de l’inquiétude française qui serait de voir s’installer en Algérie l’instabilité… Lien ci-dessous. La France n’a pas à soutenir silencieusement le maintien d’un régime mafieux et dictatorial pour des intérêts discutables et des peurs fantasmatiques… Le Parisien, 26-02-19. "Contestation en Algérie : ce qui inquiète la France"… https://tinyurl.com/yylc3q3f
.

L’état politique… 

"Thomas Serres est lecturer au département de politique à l’université de Californie, Santa Cruz, et chercheur associé à l’UMR développement et Sociétés. Il a publié des articles dans plusieurs revues à comités de lecture, dont « En attendant Bouteflika. Le Président et la crise de sens en Algérie », Année du Maghreb (2014). Il a également dirigé un ouvrage collectif avec Muriam H. Davis, intitulé « North Africa and the Making of Europe », Bloomsbury (2018). Il s’apprête à publier un ouvrage consacré à l’Algérie de Bouteflika chez Karthala, intitulé  'L’Algérie face à la catastrophe suspendue. Gérer la crise et blâmer le peuple sous Bouteflika (1999-2014)' (prévu pour mars 2019)." (....) "Pour le spécialiste de l’Algérie, le mouvement de contestation actuel en Algérie possède ses propres spécificités, ce qui permet de sortir de la « logique catastrophique » de la Libye et la Syrie."... Les clés du Moyen-Orient, 03-03-19. "Entretien avec Thomas Serres","En Algérie…"… https://tinyurl.com/y4vcu4p7

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Aspiration au changement ou révolution ?  L’Orient le Jour, 07-03-19.
"Une prudente aspiration au changement plutôt qu’une révolution."
 
La question de la fraude électorale, par Mourad Benachenhou. (Citations... "L'Etat algérien actuel n'est ni algérien, ni démocratique, ni populaire." (..) "La normalité du quotidien masque l'anormalité du système politique algérien.")
Le Quotidien d’Oran, 03-03-19
 
..................
Des universitaires réagissent."Déclaration...". Actu-Fil...
https://tinyurl.com/y4wftaup
.
Les écrivains s’expriment, analysent, prévoient..
 
"Les écrivains algériens décrient le 5ème mandat", 
El Watan, 04-03-19...https://tinyurl.com/y69uss93
.
Kamel Daoud
Déjà, au moment du 4ème mandat, Kamel Daoud exprimait sa colère. Son texte a été repris cette fois par des lecteurs, notant qu'il suffit de dire 5 au lieu de 4, et tout reste valable. le texte est assez visionnaire, prévoyant
ce grand élan du peuple...
Citation... "Vous allez nous laisser un pays corrompu,
exsangue, défait, ridicule, mort, sans don et humilié
et cette humiliation on vous la rendra. C’est une
promesse et un serment. Ce peuple qui, selon vous
ne vous mérite pas, vous n’en méritez pas la terre.
Ils vous survivra et s’éveillera et vous renverra
vers le désert qui vous sied si bien. La cours des
comptes sera cette fois celle de l’histoire.’.
 
"Honte à toi Bouteflika",
Algérie Focus, 02-03-19https://tinyurl.com/y5c8fsxd
Et en 2019 Kamel Daoud voit une évolutio

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04/03/2019 | Lien permanent

1962-2012. GUERRE D’ALGERIE, Histoire, mémoires, présent, et futur à construire. DOSSIER... et LIENS

MONDE GUERRE.png

La presse a marqué l’anniversaire de mars (fin officielle de la guerre d’Algérie, mais pas des drames et des morts). L’indépendance, c’est après, et l’exode, c’est plus tard, l’été. J’ai lu, bien sûr, parfois avec une impression d’overdose (apprendre encore, apprendre, comprendre ? Ou réactiver des émotions ?). Parfois avec le sentiment, au contraire, d’un manque (tant de choses non dites, mal expliquées, refoulées, occultées).

J’ai mis du temps avant d’acheter le hors série du Monde, « Guerre d’Algérie, Mémoires parallèles ». D’abord à cause du titre. Parallèles, ces mémoires, vraiment ? Parallèles seulement ? Parallèles, lesquelles ? Algérie et France ? Mais quelle Algérie et quelle France ? L’Algérie du peuple ou l’Algérie du pouvoir ? La France métropolitaine ou celle des mémoires des natifs d’Algérie exilés ? Mémoires des historiens, des acteurs, ou des témoins ? Pays de 1962, ou pays actuels, en 2012 ? Oui, le numéro présente des mémoires parallèles, globalement. Mais les mémoires croisées de ceux qui veulent entrer dans la mémoire de l’autre, tout en assumant la leur, où sont-elles ? Je n’ai pas retrouvé tout à fait dans ce sommaire la force des problématiques posées avec tant d’humanisme lors de la conférence sur mémoire et histoire au Forum des images (voir ci-dessous, programme et bilan, deux notes). Mohammed Harbi, cependant, évoque la possibilité de mémoires partagées (pas encore communes, mais partagées).

Autre chose m’avait gênée, quand j’avais entrouvert le journal pour regarder rapidement l’avant-propos. Dès le début, une citation de Sartre, lui qui appelait au meurtre terroriste dans sa préface au livre de Frantz Fanon (ce qui avait scandalisé Jean Daniel). Sartre parlant de névrose au sujet de la France… on a les références qu’on peut… Mais le reste du texte de Michel Lefebvre pose d’une manière correcte la question des mémoires qui ne se rencontrent pas, dans cet avant-propos qui tient lieu d’éditorial…

 J’ai donc lu. En commençant par la fin : la bibliographie. Je la trouve très insuffisante, il aurait fallu deux pages. Ce qui manque semble correspondre à des choix, une vision partielle ou partiale : d’autres titres auraient pu rendre compte d’une réalité plus complexe. Benjamin Stora est omniprésent, et d’autres à peine évoqués, ou pas du tout (Cf. letexte de Roger Vétillard, mentionné plus bas, à propos de La Déchirure : même questionnement). Peu d’Algériens, peu de Pieds-Noirs. Pas de sites, la Toile est négligée : pourtant bien des adresses auraient pu être données, bien des pages indiquées (ne serait-ce que l’INA, mais pas seulement…). Absence de l’apport de la littérature (une bibliographie sans Mouloud Feraoun, Kateb Yacine, Albert Camus, Jean Pélégri, René-Jean Clot, et tant d’autres). Pas de filmographie… 

J’ai apprécié la publication du texte d’Albert Camus, sa « Trêve pour les civils », appel de 1956. J’ai lu les articles sur la torture, les viols (et la page, sur le poignard de Le Pen : http://www.lemonde.fr/afrique/article/2012/03/16/le-grand-blond-au-poignard_1669337_3212.html ), les pages sur Jacques Chevallier, éclairantes aussi sur l’OAS (et je note qu’un livre sur lui va paraître en mai, «J. Chevallier, l’homme qui voulait empêcher la guerre d’Algérie », de José-Alain Fralon). L’entretien avec Mohammed Harbi est riche d’informations, et il y montre un esprit qui rejette le sectarisme, les visions figées : « La colonisation est un fait historique et social. Elle est ambivalente dans ses manifestations et c’est une erreur de dire qu’elle a été globalement positive ou globalement négative. » (Là il renvoie dos à dos les ultras de tous bords, extrémistes de droite ou de gauche). J’ai été intéressée par les témoignages, et notamment l’article sur Ali Aissaoui, fils d'ancien harki. Et j’ai aimé retrouver Jacques Ferrandez et ses BD. Mais je trouve qu’il manque des éclairages importants. Peu ou pas d’antériorité historique (un peu comme El Watan le reproche à La Déchirure : voir ci-dessous). Pas de présence collective des populations qui vivaient en Algérie, la complexité du sentiment d’appartenance à cette terre, la complexité des liens. Absence des « petits », des humbles et des pauvres. Rien ou presque sur la réalité coloniale, avec ses aspects divers – faits sociaux et culturels, injustices et apports. Et pas de questionnement au sujet du terrorisme (comme c’est fait à juste titre pour la torture). Les attentats contre les civils ont juste une place dans la chronologie…

Dans son texte sur les mémoires sous tension, B. Stora évacue d’une phrase la question du mur des victimes du FLN (Disparus), comme si c’était un facteur aggravant des tensions actuelles, comme si ces victimes n’avaient pas droit au respect, et leurs familles à un  lieu de recueillement… (Des controverses les avaient d’ailleurs assimilés à des activistes, ce qui est faux. Laissons les activistes avec les activistes et ne mélangeons pas tout…).

Un passage d'un texte (historienne, Sylvie Thénault) m'a interpellée. Idées reçues sur la guerre. Notamment une. Le fait qu'on ait confondu le rejet du FLN (pour ses méthodes, la terreur) et le rejet de l'indépendance. C'est une idée fausse qui perdure, oui. Mais de la même manière on confond l’anticolonialisme avec des pensées qu’on lui associe et qui n’ont pas à l’être. L'Histoire ne pouvait amener qu'à la fin de toutes les colonisations, quelle que soit leur forme (mais des colonisations continuent à être justifiées, cf. Tibet/Chine, pour ne donner qu’un exemple). Cependant refuser par principe le fait de coloniser ne force pas à penser le passé comme s’il se déroulait en 2012 : la conscience a changé dans les démocraties. Ces prises de conscience doivent être assumées par les pays, donc la France métropolitaine, dont les pouvoirs ont décidé de coloniser. Dénoncer le fait colonial ne doit pas devenir une condamnation des populations immigrées venues vivre et naître dans telle ou telle colonie. C’est pourtant ce qui se fait en France : les Pieds-Noirs sont utilisés comme alibi pour un déni historique (qui donc a colonisé si ce n’est la métropole des Français ? sûrement pas les immigrés espagnols ou les communards expulsés de force, ni les Alsaciens réfugiés, ni les Juifs berbères là depuis toujours… !). Jean Pélégri le disait bien dans son livre « Ma mère l’Algérie », on jettera l’opprobre sur les Pieds-Noirs qu’on accusera de tous les maux : habitude des métropoles, notait-il… Et penser la colonisation ne doit pas devenir (comme c’est souvent le cas) une sorte de catéchisme rigide posant des cadres où toute complexité des faits ne peut qu’échapper…            

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INFORMATIONS :

1830-1940 : "Un siècle de passions algériennes, Une histoire de l'Algérie coloniale", somme de Pierre Darmon : http://www.lepoint.fr/culture/2009-11-29/l-algerie-des-pa...

Guerre d’Algérie, fiche wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_d'Alg%C3%A9rie

Chronologie, sur linternaute.com (quelques repères) : http://www.linternaute.com/histoire/categorie/49/a/1/1/histoire_de_la_guerre_d_algerie.shtml

Livre. « Que sais-je ?». La guerre d’Algérie, par Guy Pervillé : http://guy.perville.free.fr/spip/article.php3?id_article=107

Le camp de LODI. « Le camp des oubliés », Nouvel Observateur, 2010  (Centaines de Pieds-Noirs indépendantistes arrêtés) :   http://tempsreel.nouvelobs.com/culture/20100318.OBS0307/lodi-le-camp-des-oublies.html

La Déchirure, documentaire France 2, de Benjamin Stora et Gabriel Le Bomin, avec la voix de Kad Merad.   Lire l’article du Parisien (Kad Merad raconte la guerre d’Algérie) : http://www.leparisien.fr/tv/kad-merad-raconte-la-guerre-d-algerie-11-03-2012-1899832.php  La qualité de ce documentaire n’est en général pas mise en doute, le sérieux de l’entreprise, mais il y a des controverses entre historiens français autour  de ce documentaire. Cf. Benjamin Stora et Daniel Lefeuvre : http://etudescoloniales.canalblog.com/archives/2012/04/10/23971171.html  Ou Roger Vétillard, qui met en question l’omniprésence de Benjamin Stora, et exprime quelques réserves concernant le film...  La réception en Algérie est assez critique (El Watan pointe la limitation du film à un axe qui occulte l’antériorité historique).

Dossier "Guerre d'Algérie'", sur Herodote  https://www.herodote.net/Guerre_d_Algerie-synthese-319.php 

« Fin de la guerre d’Algérie : le massacre d’Oran reste dans les mémoires » https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_du_5_juillet_1962  

Enlèvements, Disparus. "Les Pieds-Noirs ont-ils été abandonnés par la France?", Le Point, 25-01-12 :  http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/francois-guil...

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La tragédie des HARKIS...

Documents sur le site de l'association AJIR pour les harkis : http://www.harkis.com et sur le blog d'Harkis et droits de l’hommehttp://ahdh.blog.lemonde.fr

Harkis. VIdéo INA : http://www.ina.fr/video/CAA8200509301/les-harkis.fr.html 

L'EXIL. Texte de Serge Molines, sur Algérie-Pyrénées : http://www.algeriepyrenees.com/article-algerie-mon-amour-... 

Comment l'idéologie (des uns et des autres) déforme la réalité historique, jusqu'à nier des faits (massacres) ou à changer la réalité des causes (cf. Pierre Daum et son analyse idéologique haineuse de l'exode des Pieds-Noirs). Lire cette note au sujet des massacres de Harkis : Apprentis historiens (et manipulateurs), un article intéressant sur Harkis et Droits de l’homme : http://ahdh.blog.lemonde.fr/2016/04/02/les-harkis-la-2-cv... 

Sur les PIEDS-NOIRS... 

Les Pieds-Noirs, 50 ans après, Le Figaro : http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2012/01/27/01016-... 

Pied-Noir (wiktionary) : https://fr.wiktionary.org/wiki/pied-noir 

Note historique, dossier Migrations, Pieds-Noirs (7 pages) : http://migrations.besancon.fr/quitter-son-pays/rapatries/... 

Fiche wikipedia, Pieds-Noirs : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pieds-noirs

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12/04/2012 | Lien permanent

Le poète Jacques DUPIN est mort le 27 octobre à 85 ans

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Juste donner à lire articles et citations… pour aller, ou revenir, vers les livres…

« Dehors, les charniers occupent le lit des fleuves perdus sous la terre. La roche qui se délite est la sœur du ciel qui se fend. L’événement devance les présages, et l’oiseau attaque l’oiseau. (...) 

   Ce que je vois et que je tais m’épouvante. Ce dont je parle, et que j’ignore, me délivre. Ne me délivre pas. Toutes mes nuits suffiront-elles à décomposer cet éclair ? O visage aperçu, inexorable et martelé par l’air aveugle et blanc ! »  (…)

« Ivre, ayant renversé ta charrue, tu as pris le soc pour un astre, et la terre t’a donné raison. »

  Jacques Dupin, Lichens

Revue de presse :

« Jacques Dupin, biographe de Miro et poète est mort », L’Express, 29-10-2012 : http://www.lexpress.fr/culture/livre/jacques-dupin-biographe-de-miro-et-poete-est-mort_1180887.html (« Le poète et grand spécialiste d'art Jacques Dupin, biographe de Miro et proche de Giacometti, Bacon, Tàpies mais aussi René Char ou Paul Auster, est décédé samedi à Paris, à l'âge de 85 ans. »)

Même journal, L’Express, un portrait de l’écrivain, en 2001, « Jacques Dupin, le forgeron des mots » : http://www.lexpress.fr/culture/livre/jacques-dupin-le-forgeron-des-mots_804239.html (« Galeriste et critique d'art spécialiste de Miró, le poète livre depuis cinquante ans un combat intime avec le langage. »)

« La mort de Jacques Dupin », Nouvel Obs, 19-10-2012 : http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20121029.OBS7410/la-mort-de-jacques-dupin.html  (« Grand critique d'art et grand poète, l'ami de René Char et Francis Bacon avait 85 ans. » / « Jacques Dupin est mort samedi 27 octobre à Paris. Certains retiendront qu’il était poète, ami de René Char ou Yves Bonnefoy, auteur de recueils comme «Echancré», «le Grésil», «Ecart» ou «Coudrier». D’autres se rappelleront plus volontiers le spécialiste d’art, biographe de Miro et proche de Giacometti, qui a offert les murs de la galerie Lelong, dont il était le cofondateur, à Tapiès ou Bacon./ Il faudra en fait se souvenir de lui comme d'un artiste qui a abrité en lui les passions conjointes de l’écriture et de la peinture, deux activités connexes, au fond. »)

Le Monde (page Disparitions), 01-11-2012, « Jacques Dupin, critique d’art et poète » :  http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2012/11/01/jac...        (« Il avait fait de son œuvre âpre et lyrique, "succession nécessaire de ruptures, de dérives, d'embrasements", écrivait-il, un dialogue fécond et constant avec les grands poètes et peintres de son temps. » (…)  Il continue de creuser le sillon d'une poésie abrupte, nourrie de matières et de couleurs, traversée par des images d'effondrements, ou d'Eboulements (titre de son unique pièce de théâtre), hantée par des lieux à pic, comme l'Ardèche, le Japon et les Pyrénées. L'embrasure (Gallimard, 1969), De singes et de mouches (Gallimard, 1983) témoignent de sa poétique radicale, aiguisée – une poésie qu'il définit comme étant du " refus " : " le poète ne s'approprie rien, il s'appauvrit de tout" »)

Libération, 29-10-12, « Jacques Dupin, feu poète du refus », par Eric Loret : http://www.liberation.fr/culture/2012/10/29/jacques-dupin-feu-poete-du-refus_856859 (« Disparition. Admiré par Paul Auster, l’auteur était un des derniers grands d’un genre sacrifié » / « Les grands textes, les grands écrivains, ne se lèvent pas seuls, pas sur un fond de désolation. Ils sont génération. » / « Le poète Jacques Dupin, ami d’André du Bouchet, de Pierre Reverdy, de Philippe Jaccottet, d’Henri Michaux ou de Michel Leiris est mort samedi à l’âge de 85 ans. On ne sait si son nom dira encore quelque chose. Les poètes sont désormais tous disparus pour les médias et l’industrie du livre. De la famille littéraire à laquelle il appartenait, descendante de René Char, seul Yves Bonnefoy veille encore. L’université appela «littérale» la poésie de ces amis, qui estimaient que la langue ne peut rejoindre l’être, sinon dans l’attente infinie. »

Le Journal des Arts, 30-10-12, « Décès du galeriste et poète Jacques Dupin » : http://www.lejournaldesarts.fr/site/archives/docs_article/105174/deces-du-galeriste-et-poete-jacques-dupin.php (« Poète reconnu, Jacques Dupin s’était vu consacré une exposition en 1992 par le centre international de poésie de Marseille. Son œuvre littéraire donnera également lieu à un colloque à l’Université Lille III en 1995, qui sera publié sous le titre de L’injonction silencieuse. »)

......... SITES....

Page éditeur, chez POL - qui le publie depuis 1986 : http://www.pol-editeur.com/index.php?spec=auteur&numauteur=64

DOSSIER, sur remue.net : http://remue.net/spip.php?rubrique90 (Etudes, commentaires, et le poème Lichens - bilingue)

 BioBibliographie, sur poezibao : http://poezibao.typepad.com/poezibao/2006/02/jacques_dupin.html

Et des textes (anthologie permanente de poezibao) comme celui-ci (extrait) :

« si je le dois je le fais

 je ne dois rien je le fais

l’encre devient invisible

l’espace de l’écriture
une cage électrifiée

qui soude persécuteur
et persécuté »
Jacques Dupin, Sept poèmes, revue Action Poétique n° 172, juin 2003, p. 4.

Plusieurs pages sur Terres de femmes... http://terresdefemmes.blogs.com/mon_weblog/2007/03/4_mars... 

BioBibliographie, sur wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Dupin#Po.C3.A9sie

Citation de Jacques Dupin, sur evene.fr : http://www.evene.fr/celebre/biographie/jacques-dupin-4068.php : "Expérience sans mesure, inexpiable, la poésie ne comble pas mais au contraire approfondit toujours le manque et le tourment qui la suscitent."

........REVUES........

ENTRETIEN. Propos recueillis par Valéry Hugotte, pour la revue Prétexte : Sur la poésie : « Je pense qu'elle se situe, quel que soit le monde, dans la contestation, dans le contre-pouvoir, dans la négation de l'horreur qui se perpétue. Elle est, par son absence, sa blancheur, sa barre de fer chauffée à blanc, le seul horizon qui se pose radicalement contre : l'oppression, les massacres, le viol, la magouille, l'exclusion, le racisme, le trafic d'armes et d'organes, la prostitution des enfants, le génocide, etc... le catalogue est ouvert, est béant... »

Texture.  Lecture de « Ballast » par Bernard Mazo, « Jacques Dupin ou  ‘’l’injonction silencieuse’’ du poème » : http://revue-texture.fr/spip.php?article246

Le Magazine littérairesur « Ballast » : http://www.magazine-litteraire.com/critique/poesie/ballast-jacques-dupin-19-11-2010-31862

Dans Le Matricule des Anges, article d’Emmanuel Laugier sur « Matière du Souffle »lmda.net : http://www.lmda.net/din/tit_lmda.php?Id=3441

.........BLOGS........  

Page sur le blog de Claude Chambardunnecessairemalentendu : http://www.unnecessairemalentendu.com/archive/2012/10/29/jacques-dupin.html  (des liens, un texte).

Jacques Dupin, par Léon Mazzella, sur son blog Kally Vasco (Preuve qu’on peut être l’auteur du « Parler pied-noir » et de l’anthologie « Si tu meurs avant moi je te tue ! » - ouvrages précieux sur une langue populaire inventive et métisse, parlée surtout, écrite aussi - et s’intéresser à la Langue haute, dans les sommets de l’écriture exigeante, abrupte même parfois) : http://leonmazzella.hautetfort.com/archive/2012/11/03/jacques-dupin.html

In memoriam Jacques Dupin, sur le blog d’Alain Freixe, lapoesieetsesentours : http://lapoesieetsesentours.blogspirit.com/archive/2012/10/29/in-memoriam-jacques-dupin.html (Et cette CITATION, en exergue : « "Je n'ai jamais avancé que dans l'ignorance de tout, ce que je sais, je le dilapide en marchant et je suis au bout du chemin" »)

« L’impossible catharsis de Jacques Dupin (Ecart, POL)», par Bernard Simeone, sur maulpoix.net  : http://www.maulpoix.net/dupin.html

« Le poète troglodyte : avec Jacques Dupin dans la proximité du murmure », Ta résonance, blog martinritman.blogspot :  http://martinritman.blogspot.fr/2012/10/le-poete-troglody...

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05/11/2012 | Lien permanent

Claire Légat, Nous nous sommes trompés de monde, Encres vives

Claire Légat,   Encres vives .jpgClaire Légat, 492ème Encres vives, 2019
 
Nous nous sommes trompés de monde, extraits d’outre moi-même (recueil en cours d’écriture), et un inédit (murmuration du vide).
Claire Légat, je l’ai découverte grâce à la belle recension de ce numéro d’Encres vives qu’Arnaud Forgeron avait publiée dans la revue À L’Index 41 (j’en parlais dans ma recension). Séduite par la qualité ainsi révélée et par ce qui était mentionné par Laurence Amaury (il citait sa note de lecture, dont j’ai retrouvé un paragraphe en 4ème de couverture d’Encres vives). "Après des décennies de retrait et de silence, Claire Légat nous revient avec un long poème." Arnaud Forgeron, lui, ajoutait une réflexion plus générale, dont je partage complètement le constat (ayant souvent dit regretter ce goût pour l’immédiateté des publications). "Cela a son importance, surtout dans l’engorgement du trafic qui semble sévir en poésie et dans nos sociétés de l’immédiateté." Et il concluait en parlant de cette "voix" et "voie"... "travaillée par le silence". 
Pour moi, immédiate estime. Quelqu’un capable d’attendre, de ne pas publier sans cesse, de choisir le retrait en silence. Et que l’écriture vienne, comme le dit Laurence Amaury (poète aussi), "comme un coup de tonnerre secouant nos accoutumances, notre passivité, notre aveuglement".
Ou des mots posés "à la margelle" d’un "abîme", en tension d’écriture, d’exigence. Conscience sur le fil d’équilibriste, "la corde d’un violon". C’est cela écrire. Corde vibrante, douloureuse de lucidité. Regard et âme tendus pour capter des gouffres. Ce que devrait faire toute poésie, pour nous inscrire dans la brûlure du réel, sa profondeur. Ces abîmes ils sont nous, l’autre. D’abord en surface. Ce que la peau dit de nous, du corps, et de tous ces corps dans le monde présent. Violence et douleur aussi.
"CORPS CONTEMPORAIN
         est-ce le mien
  écartelé jusqu’aux genèses"
Regard de poète qui témoigne, et présence intime de conscience à conscience, si le lecteur veut recevoir, même, le savoir du "bonheur inhabitable".
Car comment habiter le bonheur quand on a en mémoire l’image de l’insupportable ? 
"ah ce bouquet de mains flottant sur la vague
            ce bouquet en quête d’un vase
                    en marge du destin
 de la lumière initiée dans la prunelle de l’orage"
Il reste à prendre le monde "À LA RENVERSE"… 
 
Voilà le sens du titre. Que faire de ce monde qui ne répond pas aux attentes de solidarité ? Elle choisit de garder "la paume restée ouverte". Geste d’écoute et de don, présence à l’autre. Et malgré notre impuissance peut-être pouvons-nous penser que la paume capte au moins la force de pouvoir dire. 
Puisque la main s’ouvre "à la rosée à l’oiseau à la fougère", la nature est source et message. 
Le regard peut préserver de l’indifférence coupable qui fait du monde un lieu de souffrance et de destruction ("l’essentiel : la symphonie patiente des yeux").
À quoi tiennent les vies, leur sens ?
                         "Une erreur
                           un chiffre
         et nos destinées ne se croiseront plus
           nos détresses deviendront inutiles
   nos regards perdront leurs droits sur la forêt"
Hasard, rien, et tout se jouera sur une virgule, dans les signes offerts pour qu’on se rencontre, soi aussi. 
 
Dans ce volume d’Encres vives une mise en page astucieuse (artisanale, certes, mais j'aime ça - et intuitive) permet de laisser aux poèmes leur amplitude, tout en donnant à lire des chroniques, parcours ou recensions, par un montage efficace. 
Ainsi on peut lire l’article d’Albert Ayguesparse, qui rendait compte d’une évolution de la poésie de l’auteur, trouvant dans son livre (en 1966) un élargissement à une forme libérée de toutes entraves, permettant de penser et dire le monde réel, la fraternité. Il voyait en ce cheminement une "ascèse". Et, même page, je vois, dans un poème, deux mots qui résonnent dans ce sens : "solitude", et "visages". Les deux bords de la présence au réel. 
Robert Goffin, autre page, disait n’être touché que par "la musique de transe", qu’il trouvait donc là. Comprendre l’intense et la traversée des frontières de la perception. 
Car Claire Légat est peut-être la "passagère des pays invisibles" dont elle parle. Celle qui choisit "de deux étoiles la noire" ("une pour vivre / une pour mourir"). Qui sait faire "reculer les dimensions de l’ombre", et, "Parce que l’eau enseignait le feu" … être "l’épée qui tranche". Je pense à l’athanor des alchimistes. L’ascèse de l’œuvre en maturation peut être l’étape de l’œuvre au noir, symboliquement (ou plus). Et, écrit-elle, "Il faut boucler la nuit, pour que chante la grande respiration planétaire…" Mais aussi "J’ENTRE DANS LA SECONDE NUIT". 
Ainsi elle crée aussi son style.
"Il est en tout cas impossible de lire un poème d’elle sans y reconnaître son empreinte", écrivait Christian Hubin
Elle a parcouru, dit-elle, "les illusions et la blessure du monde", senti "le poids des siècles".
Siècles. Alors je regarde la couverture et je lis, sous son nom, tracée légèrement, la mention "POÈTE SANS ÂGE". Avec le titre-programme des publications de son mouvement,"POÉSIE DES LIMITES ET LIMITES DE LA POÉSIE." Tout est dit. Car l’essence n’est pas assignable à un moment, l’œuvre d’une vie à un jour de naissance. 
Écho à ma note sur le temps et la création (où je reprends cette expression, la citant et me citant).
Voilà un instant ineffable, insituable.
                      "Pour une fois j’ai tout compris
j’ai compris que les portes existent ou n’existent pas
je vais librement par ce labyrinthe"
 
Dernière page, bibliographie (très présente en anthologies), événements divers. 
En 4ème de couverture des citations d’auteurs commentant trois recueils, dont un encore inédit. Admiration partagée. 
 
J’ai lu aussi le recueil entier, "Nous nous sommes trompés de monde", dont plusieurs poèmes sont dans le volume d’Encres vives.
Ce livre (éd. Pâturages, Belgique, 1966) a une épaisseur, pas en nombre de pages (une soixantaine). En matérialité concrète. C’est très beau. En couverture un poème (gris-blanc sur noir), le titre est au verso, avec le nom du mouvement (Poésie des limites et limites de la poésie).
Une gravure de Marc Laffineur trace l’image de ce monde dur qui révolte celle qui écrit. Un univers gris, de grilles de prison. Un couple comme traversé par les fers (ni dedans ni dehors, prisonnier de ce qui barre l’espoir). La gravure de Marc Laffineur et les questionnements des poèmes évoquent pour moi, ensemble, un passage de l’essai de Marina Tsvetaïeva, Le poète et le temps. Le rapport du poète avec le temps, son temps (avec le monde tel qu’il est quand on vit et écrit) correspond, pour Marina Tsvetaïeva, à "un mariage forcé". Plus loin elle dit que "C’est le même que celui du bagnard avec son fer" (…) "surtout quand on nous impose d’aimer cette violence" (…) "quand ces fers on nous les enfonce encore spirituellement…" Forte rencontre des esprits (un graveur et deux poètes). Une extraordinaire proximité des intuitions. L’image de la gravure rejoint celle de l’essai autant que le sens des poèmes. Les refus de Claire Légat rejoignent ceux de Marina Tsvetaïeva. 
En exergue Albert Camus (Les Justes). Le nom de l’auteur n’est qu’à la fin, comme une signature. En "Avant-dire" les textes préfaces qu’on retrouve en copie dans Encres vives. Une page commence le recueil, avec des fragments en gras, typographie ample, une dimension qui leur donne la force de programmes, de clés. La typographie des poèmes insère des expressions en majuscules, comme des cris, ou des mots épelés pour être bien lus. Affirmations ou refus. Mourir, la mort est présente aussi. Comme une conscience de veille, un vertige entre nuit et aube.
"Chaque nuit ou presque j’ai rendez-vous avec ma mort"
Mort du sommeil, du temps du rêve où l’on perd son identité, ou de l’insomnie et de la proximité troublante de la mort réelle, qui ressemble à l’absence nocturne.
Dans ce livre il y a, effleuré, un désir d’Espagne (cela me trouble), et il y a la neige. Il y a, certainement, une conscience aiguë de l’exigence d’écrire (et c’est un poème "hors siècle").
"J’écris pour rester dans l’équation."
Recueil dans le réel du monde, en fraternité, méditation métaphysique, sur ce qu’est être vivant ici. Et art poétique. 
J’ai relevé une métaphore intéressante pour dire le processus créatif en poésie. 
"CHAMBRE NOIRE :
 je développe un poème"
La ligne précédente explique, "j’approche l’envers des mots".
Comme la chambre noire du photographe inverse ce qui est capturé, le travail sur les mots doit déplacer, transcrire, l’envers de l’apparence de tout, et de soi. Ce qui est "Derrière les miroirs". Ce qui émerge d’une profondeur nocturne. 
 
À noter. J’a rencontré, par Claire Légat, la poésie de Laurence Amaury, et lu Le Musée d’un Futur supposé / ses Poèmes à peindre. Poèmes tableaux, et cependant réflexion sur ce qui est hors du cadre. La "cacophonie" du monde, cet "infini devenue fou", rêves et peur, et ces étoiles "qui se taisent". Belles rencontres venues de Belgique. 
Un livre révèle autre chose de lui, quand on relit. Dans les poèmes de Laurence Amaury, attentive au visuel, avais-je remarqué la présence des animaux ? Araignée, serpent, oiseaux, aigle. Et même des rats. La vie végétale, et la matière. Mais un poème donne une clé (je peux le lire ainsi), Femme-loup. Comme une vision qui fait miroir d’une puissance en soi. 
"J’agite les bras dans l’ombre
 comme une ressuscitée du crépuscule"
Autre univers, en apparence, L’architecte du silence. Mais non, car c’est bien, dans ce poème, le silence qui ouvre l’œil qui voit. Vitraux ou poèmes en seront la traduction lumineuse.
"Il le construit avec patience
 pierre par pierre
 dans sa tête d’abord
 sur le papier ensuite"
 
Architectes du silence, voilà bien ce que sont ces poètes du mouvement initié par Claire Légat, d'après ces êtres qui apparaissent autour d’elle. J’en ai cité certains. 

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Recension © MC San Juan / Trames nomades

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LIENS…

Trois poèmes de Claire Légat à lire en ligne… https://poetesses.blog4ever.com/legat-claire-annees-1960

Page Claire Légat (bibliographie, activités). Sur areaw.behttps://www.areaw.be/legat-claire/

Encres vives 492. Nous nous sommes trompés de monde, sur Recours au poèmehttps://www.recoursaupoeme.fr/encres-vives-n492-claire-le...

Encres vives, Michel Cosem… https://encresvives.wixsite.com/michelcosem/edition

Pour mémoire, ma recension de la revue À L’index, n°41, revue qui contenait la note de lecture d’Arnaud Forgeron sur ce volume d’Encres vives… http://tramesnomades.hautetfort.com/archive/2020/12/10/po...

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