28/02/2011
ECRIVAINS libyens, de Sifaw El Mahroug à Kamal Ben Hameda. Parcours…
« Ne ressent la brûlure du feu que celui qui marche dessus. » Kamal Ben Hameda, écrivain (texte, Le Monde, 25-2-11).
Connaît-on la littérature libyenne ? (Quand on ne savait rien sur la société même…).
Nous étions tellement obnubilés (à juste titre, mais pas de la même manière que certains dirigeants) par le dictateur à la tête de ce pays (les attentats, les mensonges, la haine, et les menaces), que cela a fait écran. Et notre perception de la réalité sociale de la Libye en a été déformée. On pense « terrorisme » (et c’est), et on n’a plus la place mentale pour penser que, là, des gens écrivent, malgré tout. Certains en meurent, d’autres s’exilent ou sont emprisonnés, d’autres, encore, tentent de créer des bribes de société civile, pour plus de droits (voir, ci-dessous, 2009 : des écrivains sont impliqués).
Dans un entretien du JDD, où une question est posée à Luis Martinez sur l’existence d’une opposition en Libye (pas seulement les révoltes de rue et les manifestations et combats, mais des organisations préparées à une relève) le chercheur (Sciences-Po), avant de répondre, évoque d’abord l’alphabétisation, la culture (puis les études à l’étranger) : « On a très mal pris en compte la société libyenne ces dernières années. Le taux d’alphabétisation est de 90% et celui d’urbanisation de 80%. Bien que ce soit interdit, toutes les familles ont des paraboles et savent très bien ce qui se passe à l’extérieur. » (Journal du Dimanche, 27-2-11).
Donc notre ignorance était grande.
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Traces de ces écritures, de ces résistances, des informations quilaissent leurs petits cailloux de sens, montrant la genèse des évolutions. Je les ai notées chronologiquement.
De 1994 à 2011, on meurt, on écrit, on part, on écrit… Parcours de dates, de noms, et de faits.
Sifaw El Mahroug est un poète berbère libyen, né en 1946, dissident et harcelé, mort en1994 des suites d’un accident douteux, d’après l'ancien site berberoscope :
CITATION :
«Tant de gens
Ont oublié leurs noms
Après avoir oublié
Leur accent.»
(Ce fragment de poème, peut symboliser aussi, je trouve, des annéesaprès,
la situation des Libyens dans un pays au système dictatorial plus qu’étouffant,
et celle des exilés. L’accent sera à comprendre, non plus comme le seul signe
perdu de l’ « amazighité », signe qu’il est mais comme la marque d’une perte
d’identité plus générale : perte d’être dans un monde brutal qui écrase,
perte des racines pour celui qui doit s’éloigner. Formes diverses de l’exil.)
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SurSifaw El Mahroug, et de lui, lire cette page, dans le supplément littéraire mensuel de
L'Orient Le Jour (Liban) : http://www.lorientlitteraire.com/article_details.php?cid=...
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Kamal Ben Hameda (cité en exergue), libyen de Tripoli, est exilé aux Pays-Bas. Et le texte de lui que je viens de lire, dans Le Monde du 24-2-11, est loin d’être juste un article, mais vraiment la page forte d’un écrivain. Ce texte peut servir d’introduction à la pensée, à l’écriture, de ce poète. Un cri, le souffle de la colère et de la douleur : celle de celui qui n’a pas revu sa mère, morte seule, elle aussi exilée, mais là où elle fut toujours («… cette jeune vieille dame que j'appelais jadis maman »), et qui sait que nombreuses sont les mères en deuil de leurs enfants, fils forcés de partir à la mort. « Elles resteront tapies dans la brûlure du manque, ces mères-là, car le grand désert a englouti les leurs dans ses replis ». Il nous parle de la marche des « folles » de Benghazi (écho aux célèbres mères de disparus), qui les premières « ont ouvert un champ à l'espoir » et de ce « Bédouin autiste aux mille visages, golem du désert » que l’Occident semble découvrir après l’avoir accueilli… En humaniste, il poursuit : « Ma parole ne saura qu'ourler nos ruptures et tisser nos distances si le sentiment de l'humain n'est pas en notre partage. » Et il conclut par une anecdote. (Un passant lui ayant demandé d’où il venait, donc qui il était, «… au regard de mon faciès basané », il répondit par un mot latin: « Mens », esprit, «un être humain ») . http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/02/24/qu-il-part...
Commencer par lire, ou relire, et faire lire, un auteur libyen, c’est commencer à entrer dans l’apprentissage de cette culture trop méconnue.
Cinq titres chez L’Harmattan : http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=auteurs&obj=artiste&no=3003
Présentation du livre « Le Saint Je » (poème monosyllabique), 2003 : http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=15844
Et du recueil de poèmes « La tentation de la lumière », 2002 : http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=5047 (« Deuil du moi pour l'ouvrir à toutes les contrées des fonds de l'invisible… ")
« Plis de lumière », 2007 : http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=23992
Texte à lire sur le site africultures.com, Aube... http://www.africultures.com/php/index.php?nav=article&...
EXTRAITS :
« Poésie, acte de connaissance.
Connaissance dans l'acception primaire, matérielle et sensuelle de naissance à l'autre, avec l'autre, aux mondes. Une naissance comme toute autre, réelle et palpable qui élit une nudité, nomme une transparence. » (…) « La poésie, cet instant-là, devient le chemin qui mène de soi vers le Soi, un voyage initiatique, initiation à sa propre parole. »
Dernier livre paru : La compagnie des Tripolitaines, éd. Elyzad, 2011. http://www.babelio.com/livres/Ben-Hameda-La-compagnie-des...
07:53 Publié dans CITATIONS.exergues.incipit.excipit, pays.monde.identités, POÉSIE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : libye, littérature, culture, poésie, citations, dictature, exil, amazighité, livres