12/11/2024
Un refuge autre que l’exil, de Theombogü. Éditions du Cygne
Ouvrant le livre on trouve des pages titrées, qui sembleraient hésiter entre le fragment et le poème. Le poème, oui, même si plusieurs passages affirment le contraire (pp 39, 40, 41). Le mot « dégoût » est même posé comme un rejet total assumé par le personnage d’un court récit qui ressent de l’aversion pour les « poéticiens ». Incompris, il détruit ses manuscrits et se débarrasse des ouvrages de poésie contemporaine. Mais l’auteur en question est « un écrivain exilé ». Le sujet ne concerne alors plus les conditions de l’écriture, mais l’écriture de l’exilé. La page qui suit présente le désespoir d’un universitaire qui perd toute foi en son domaine de recherche et d’écriture : « je ne crois plus à rien : ni à cette poésie aphasique, ni à cette philosophie amnésique, ni à cette sagesse angélique, ni à ces religions monomaniaques. ». Pour conclure : « Aurais-je oublié d’aimer ? » et se résigner « à la solitude ». C’est le portrait de celui qui a pu se laisser piéger par un univers poussiéreux, celui des « poéticiens » critiqués par l’exilé de la page précédente... Et enfin c'est un texte sans personnage extérieur apparent, un narrateur qui dit Je et qu’on pourrait croire être l’auteur. Lui résiste à la poésie : « Je ne suis pas poète », répète-t-il. Pourquoi ? Car... « Si la poésie était seule, je serais devenu poète. Beaucoup d’ingrats cheminent avec elle durant toute leur carrière, durant toute leur existence. Et j’ai horreur de l’ingratitude. ». Carrière, le mot étranger à toute poésie, et pourtant qui définit certains itinéraires. Alors, personnages loin de l’auteur, ou parlant pour lui, ces trois pages sont un éloge de l’authenticité et le refus des postures formelles, des artifices stériles, négation de la poésie. Par inversion, éloge de ce que devrait être la poésie. D’ailleurs l’ouvrage est dans la collection Voix au poème. Et ce n’est pas par hasard que l’auteur fait partie du comité de rédaction de la revue Po&sie.
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11/08/2024
Sous l’étoile du jour, recueil de Michel Diaz
Sous l’étoile du jour, Rosa canina éditions, 2023.
Le préfacier, Alain Freixe, choisit de ne pas faire réellement une préface, si c’est orienter la lecture des textes de Michel Diaz. Il propose « quelques notes prises sur cette partition qu’élabore sa pratique poétique. ». Ces textes, comme en marge, ont, comme exergue, une citation de Jean-Marie Barnaud : « Tu marches cependant / tu ne sais où tu vas / dis-tu / tu vas vers ton secret / telle est l’audace / cela suffit pour une joie. » Choix très judicieux, ces vers, car Michel Diaz aurait pu l’écrire pour lui-même, lui pour qui la marche nourrit la pensée et le geste d’écrire. Et la marche est aussi la représentation d’un processus créatif.
De ces notes je relève un fragment : « C’est toujours la marche en avant. Vers l’impossible salut. À cause de cet appel insensé qui, du fond de notre finitude, nous a fait roi mage de notre vie en quête du vrai lieu. Telle est l’aventure de l’homme cet être des lointains. L’homme dans la poésie de Michel Diaz remonte ses épaules, relève la tête et poursuit. »
Michel Diaz a structuré son recueil en deux parties. Pierre du vent et Sous l’étoile du jour, qui donne donc son titre au livre.
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21/08/2023
De Paul Souleyre, Quelque part dans la foule il y a toi. Récit. D'une rive à l'autre, se trouver soi
Comme Albert Camus à travers son Premier homme, Paul Souleyre, né après l’exil de ses parents pieds-noirs, mène une recherche des origines, de l’identité, quête initiatique où quelques mentions de Camus sont des clés. Douleur du deuil, et naissance à soi-même. L’inconscient sait ce qu’on ignore, et il guide. Histoire initiatique du « retour » guérisseur vers l’Algérie de qui n’y a jamais vécu mais est habité par son algérianité. Retour vers le pays chanté par Camus, même si c’est vers la rouge terre de l’Oranie des racines. La réalité est parfois magicienne, et l’écriture force plus qu’analytique. Quand, à la différence de tous les membres de la famille […] [son] Là-bas tourne dans le vide (p. 127). Camus apparaît dans un moment triste, mais en soutien, pour avoir évoqué la mort et le deuil : À ton enterrement j’ai lu un petit texte de Camus que j’avais entendu dans une chronique. […] Camus n’était pas du genre à enfermer les gens dans des cartons […] …plus de force ; je voulais vivre le même sentiment avec toi (pp. 52-53).
Et dans son parcours de recherche sur les siens il constate des similitudes entre la vie de son grand-père à Oran et celle de Camus (p. 157). Mais l’un a eu la littérature pour transfigurer les traumatismes, l’autre pas.
23:55 Publié dans ALGERIE/Algériens.hist.mémo.culture, PN.H.peuple.Camus, Recensions.livres.poésie.citations©MC.San Juan | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paul souleyre, quelque part dans la foule il y a toi, memoblog oran, algérie, oran, pieds-noirs, exil, identité, deuil, mémoire, transmission, valeurs, amina mekahli, ahmed azeggagh, poésie, citations, albert camus
07/07/2022
Lettres d’hivernage, éd. LaKainfristanaise. Revue littéraire (poésie).
Une nouvelle revue littéraire naît, quand d’autres disparaissent.
Lettres d’hivernage… Le titre est emprunté à Senghor, pour dire une dette et une intention, en plus de rendre simplement hommage, comme l’indique le créateur de la revue, Stève Wilifrid Mounguengui, dans son introduction.
Ainsi, cohérente avec la force que Senghor donne à la possibilité d’aimer, la revue se définit dans l’affirmation d’une éthique, faire pont, ouvrant les pages à une pluralité de voix. Et parcourant les pages on voyage dans les continents et les pays, selon les sujets et les origines. (Afrique, Québec, Haïti, Corée du Sud, Liban, Inde, Vietnam, France, suisse, Tunisie).
Ce premier numéro a pour axe les lieux (de vie ou de naissance).
Deux phrases de l’introduction me retiennent surtout, car elles traduisent impeccablement l’essence du rapport au lieu, en relation avec l’écriture…
Naître ou écrire, c’est advenir et avancer dans l’intimité des lieux qui précèdent et façonnent l’expérience que nous avons de l’existence. Les lieux, antérieurs au langage, inscrivent une trace, c’est comme une empreinte sur le corps et les sens, l’esprit et la mémoire.
19:16 Publié dans Recensions.REVUES.poésie.citations.©MC San Juan | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : la kainfristanaise, lettres d'hivernage, lieux, ancrage, exil, identité, poésie, art, humanisme, stève wilifrid mounguengui, prajna yun, sarah combelles
29/06/2022
Poésie, deux recueils. Les jours suffisent à son émerveillement, d'Anne-Lise Blanchard. Et Seule, Biskra, d'Henri Touitou, éds. Unicité
Deux recueils différents mais qui ont en commun le rapport avec le temps, la recherche, dans la mémoire, de la confrontation avec des souvenirs de joies, de bonheurs passés. Parfois des instants fugitifs, parfois des moments plus intenses, ou même des périodes. Voyage dans des lieux d’autrefois, retour vers des visages, des émotions. En lisant on retrouve un même trouble, car cela invite à prolonger la page avec ses propres confrontations avec ce qui fut. On part dans un ailleurs qui a du mal à être vraiment ailleurs car l’ancrage de mémoire est une identité.
Différents car le regard n’est pas le même, quand il vient d’une source féminine ou d’une nostalgie masculine. Même si ce qui concerne l’enfance rejoint encore un autre espace. Le style n’est pas le même non plus, bien sûr, mais il y a une proximité des univers par ce qui est dit de certaines expériences et par une dimension éthique (qu’on peut nommer autrement, peut-être, mais c’est l’intention qui contient cela), et c’est pourquoi j’ai eu envie de les associer. Et je crois qu’ils pourraient aimer se lire…
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17/06/2022
Leo Zelada, Transpoétique. Anthologie poétique et inédits, éds Unicité
esprit de la nuit
esprit de la nuit
conduis-moi sur le chemin du feu
qui dévore et purifie tout
Machu Picchu, Transpoétique, p.20
Maître, comment atteindre la sagesse ?
Brûle le papier, la plume et le bâton
Koan de l’illumination, Transpoétique, p.34
Le monde regorge de signes pour qui veut voir. Mais c’est un brouillard si épais ce soir…
Dark Poetry, Transpoétique, p.59
Leo Zelada, Transpoétique. Anthologie poétique et inédits, éds. Unicité, 2022. Trad. Laura Magro Peralta et Maggy de Coster
Transpoétique, de Leo Zelada . Intéressant, ce titre de l’anthologie (qui reprend celui d’un des recueils de l’auteur), car suggérant étymologiquement une traversée de l’œuvre au-delà du poétique, et vers le poétique authentique, il dit aussi autre chose de la démarche du poète, dont l’écriture est une incessante traversée, en aller-retour intérieur, d’un continent à l’autre. Parcours intime de l’identité ancrée dans une mémoire et nostalgique d’une langue effacée, d’une culture trahie.
19:35 Publié dans Recensions.livres.poésie.citations©MC.San Juan | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : leo zelada, transpoétique, anthologie, poésie, pérou, espagne, exil, langue, journal du dragon, éditions unicité, unicité
14/12/2021
"Le verger abandonné", de Michel Diaz. Ulysse errant choisissant le non-retour, ou l’ascèse d’écriture et d’être, en récit métaphysique…
01:22 Publié dans POÉSIE, Recensions.livres.poésie.citations©MC.San Juan | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michel diaz, le verger abandonné, éds musimot, david le breton, cercle aliénor, ulysse, rainer maria rilke, le livre de la pauvreté et de la mort, jacques legrand, françois cheng, le livre du vide médian, lao tseu, simone weil, edmond jabès, aragon, taisen deshimaru, lieu, exil, rien, vide, vide médian, lumière, silence, poésie, écriture, être, métaphysique, livres, pierre fuentes
01/04/2021
École d’Alger littéraire : initiateurs, contexte, héritage...
On choisit pas non plus les trottoirs de Manille
De Paris ou d'Alger pour apprendre à marcher
Être né quelque part
Être né quelque part, pour celui qui est né
C'est toujours un hasard Né quelque part, 1988, Maxime Le Forestier (né à Paris, lui)
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J’ai régulièrement besoin, comme homme et comme écrivain, de me retourner vers ce paysage. Par lui je me rapatrie. Jean Pélégri, Ma mère l’Algérie
Elle cherche partout une partie d’elle-même, un frère, une sœur, une herbe d’Algérie, un bleu (…), une odeur d’Afrique. Marie Cardinal, Écoutez la mer
23:39 Publié dans ALGERIE/Algériens.hist.mémo.culture, PN.H.peuple.Camus, Recensions.livres.poésie.citations©MC.San Juan, WEB..LIENS.sites.presse, work.in.progress | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : algérie, littérature, école d’alger, libéraux d’algérie, culture, exil, fraternité, humanisme, mémoire, racines, citations, poésie, gabriel audisio, edmond charlot, albert camus, emmanuel roblès, mouloud feraoun, mohammed dib, jean amrouche, jean pélégri, marie cardinal, rené-jean clot, jeanine de la hogue, jules roy, kaouther adimi, albert memmi, jean sénac, tahar djaout, rené sintès, jean-pierre péroncel-hugoz, kamel abdou, jamel-eddine bencheikh, abdelmadjid kaouah, emmanuel lévinas, saïd kessal, josé lenzini, guy dugas, ahmed azeggah, aziz chouaki, tony gatlif, benjamin stora, livres, bibliographies, anthologies
01/07/2017
Derrida : "J'ai senti qu'au fond j'appartenais à cette solitude"
J'ai senti qu'au fond j'appartenais à cette solitude.
Jacques Derrida et son refus du communautarisme, dans le même esprit qu'Amin Maalouf ou Amartya Sen...
Oui. Même quand la communauté est un refuge, car subissant des attaques, même quand (natifs déplacés) on n'a de région qu'une terre mentale, trouver un équilibre entre le "dedans" de ses appartenances et de ses langages singuliers, et le "dehors" de l'identité commune. Juste humains. Même si cela fait traverser des zones obscures et solitaires. Lumineuses, au bout du compte.
France Culture, 2O-01-2016... https://www.franceculture.fr/2016-01-20-une-enfance-doulo...
texte © MC San Juan
02:41 Publié dans CITATIONS.exergues.incipit.excipit, DERRIDA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques derrida, derrida, solitude, exil, identité, philosophie, livres
07/03/2016
Deux petits films créés par des Syriens en exil...
Dire en quelques images le refus de l’obscurantisme des fondamentalistes, ou les douleurs de la guerre et de l'exil...
Court film créé par des Syriens exilés au Liban. « Fade to black » https://www.youtube.com/watch?v=WIrSDKcO-4M
Et celui-ci, pour dire la douleur… « Yaman » https://www.youtube.com/watch?v=Bjuev58SGCo&ab_channe...
Voir aussi la liste de liens "SYRIE", en marge gauche, dont NOTES (2016, 2020...).
02:29 Publié dans ART.tous arts visuels, DISSIDENCE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : syrie, guerre, exil, films, art
10/01/2016
EXIL...62. Théâtre. "Dis-leur que la vérité est belle"
Retour sur une pièce présentée en… 2010. Mais j’ai revu récemment un extrait (vidéo), et trouvé une connexion à faire, entre la violence qu’on affronte, ou qu’on n’affronte pas, et les formes de violence (terrorisme, mort et peur, et arrachement violent à son pays, exil). Aussi, la mort - encore - mais de ceux qui disparaissent… normalement, mais, par leur mort, suppriment la parole possible, qui expliquerait, pourrait expliquer peut-être enfin, ce qui a été vécu ensemble de violence affrontée (terrorisme, exil(s), ostracisme, etc.). Le silence ne peut plus se combler. Et le silence a été une réponse au traumatisme...
Les expériences passées différentes aident à penser le présent. (A rêver le futur?).
02:48 Publié dans ART.tous arts visuels, PN.H.peuple.Camus | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dis-leur que la vérité est belle, jacques hadjaje, théâtre, vidéo, exil, mort, silence, pieds-noirs, juifs algériens
26/12/2015
HOCINE AÏT AHMED est décédé. Hommage...
Hommage pour l'humanisme d'un indépendantiste qui incluait les Pieds-Noirs dans son rêve d'Algérie libre. Un être de grande fraternité. Il a écrit de belles choses dans ce sens. Un démocrate, qui a dû s'exiler. Son dernier choix est d'être enterré humblement, pas dans le carré des "héros", dont il pensait qu'il y avait là des assassins autant que des sacrifiés, des imposteurs autant que des esprits sincères. Dernier acte d'âme libre.
Lire :
Le Monde http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/12/23/algerie-...
Algérie-Focus : http://www.algerie-focus.com/2015/12/133041/
17:08 Publié dans ACTU/MÉMO.valeurs.idées, ALGERIE/Algériens.hist.mémo.culture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hocine aït ahmed, aït ahmed, algérie, liberté, pieds-noirs, exil, humanisme, fraternité
20/12/2013
Itinéraire d’une artiste : Nicole GUIRAUD, plasticienne
La liste complète de ses expos est sur le site de son galeriste, Peter Herrmann (fiche et expos depuis 2004) - voir ci-dessous, fin de note - mais je fais ici un choix très sélectif, pour présenter l’essentiel de sa démarche… Le travail avec cette galerie date des années 90 (alors à Stuttgart), avec le cycle des Vitrines, la série "Bouteilles à la mer", les collages transparents (plexiglas). Dates clés suivantes, repères : 2004, 2009, 2012, 2013… Trois expositions sont présentes dans l’album EXPOS (2004, Berlin / 2012, Perpignan / 2013, Fdt Prinzhorn, Heidelberg : liens vers ces pages dans cette note, extraits). L’Allemagne est très présente, sa galerie étant à Berlin, et elle, vivant principalement à Francfort… L’exposition d’œuvres de la série « Archives » à Heidelberg me semble une reconnaissance particulièrement importante du sens de son parcours, l’occasion de revenir sur les traces posées pas à pas. Cette note est une première approche, suivant les pages des vignettes (pages des albums, déjà créées pour trois de ses expos, pour un film, un livre). Elle sera suivie par d’autres…
(La valise à la mer… Installation de Nicole Guiraud. Photographie MC SJuan, 2004)
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Exposition à Berlin, 7 Mars - 30 Avril 2004, "Oran - Alger - Constantine", Berlin. Louzla Darabi, Nicole Guiraud, Samta Benyahia. Galerie Peter Herrmann : http://www.galerie-herrmann.de/arts/art2/oran_alger_constantine/index.htm (J’avais fait le voyage à Berlin, pour cette exposition regroupant trois artistes nées en Algérie, et proposant à travers leurs œuvres un dialogue entre trois villes algériennes, comme lieux de mémoires individuelles, d’interrogations sur l’identité : croisement, dialogue entre des femmes du même pays, de communautés différentes, de vécus différents, mais en affinité native. J’avais ramené de cette rencontre des photographies et un entretien avec le galeriste, dont la démarche est née d’un amour pour le continent africain dans son ensemble, du Nord au Sud. (Petit à petit ces traces vont trouver leur place : « retour sur… », notes qui suivront…). Les œuvres de Nicole Guiraud présentées là appartenaient à la série « Le monde en bocal », mais on y voyait des œuvres qui préfiguraient le travail suivant en train de s’élaborer : l’archéologie de la mémoire.
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2009. « Archéologie de la mémoire » / Archäologie des Erinnerns : http://www.galerie-herrmann.com/arts/art2/2009_Guiraud/index.html
Page de Georges Festa sur l’œuvre de Nicole Guiraud. De la série « Le monde en bocal » à « Archéologie de la mémoire » : http://armeniantrends.blogspot.fr/2010/10/nicole-guiraud.html (« Comment dire le démembrement, l’arrachement, au sens le plus littéral du terme ? Victime de la violence aveugle – cette guerre d’Algérie, où sombrera le message humaniste du chantre de Tipasa et de Noces -, Nicole Guiraud choisit l’Allemagne, autre terre de convulsions et d’exils où, au fil du temps, s’élabore une œuvre visionnaire, singulière. / De la série « Die Welt im Einmachglas » [Le Monde en bocal] (1975-2005) à sa récente exposition « Archäologie des Erinnerns » [Archéologie de la mémoire], une entreprise d’épuisement des formes et des mythes nous convie à interroger l’émiettement, la nostalgie, le désir d’altérité. » SUITE SUR LE SITE…)
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Premiers mois de 2012, Perpignan. Nicole Guiraud, « Survivre » : [Dans le catalogue, plusieurs auteurs explicitent le sens profond de cette œuvre, le courage dont elle témoigne (j’en reprendrai la lecture…). Le titre, « Survivre », correspond à l’enjeu réel de la création dans l’itinéraire de cette plasticienne, qui, depuis l’enfance, toujours, dessine, sculpte, et peint. Ce n’est pas, ce titre, « Survivre », une simple formule, pas un jeu avec les thématiques générales de la vie et de la mort. C’est la question centrale que l’artiste se pose et pose à ceux qui regardent son « monde en bocal », ses créations graphiques, les peintures et montages.
Comment, quand on a (c’est son histoire) été atteinte dans son corps, au sortir de l’enfance, quand cette atteinte est irrémédiable et que chaque jour on revit son intégrité physique violemment déchirée, comment peut-on échapper au désespoir, se délivrer de la haine et de la colère, ne pas être prise par la folie ? Comment créer quand même… Justement. Nicole Guiraud crée pour tenir debout, pour que sa vocation d’artiste n’ait pas été détruite aussi par la bombe d’une terroriste, malgré la main manquante, le bras amputé. Elle crée pour témoigner, ayant fait de la lutte contre le terrorisme un axe central de sa vie. Et elle choisit le dialogue : c’est une des signataires du texte fondateur d’Algérie-Djezaïr, texte regroupant des Algériens et des Pieds-Noirs, pour un partage de mémoire, un lien entre les communautés natives d’Algérie. L’expo de Berlin en 2004 fut un de ces signes de partage.]
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Expo décembre 2013, Nicole Guiraud à la Fondation Prinzhorn,
Texte de Nicole Guiraud,courriels : « Le cycle des ARCHIVES retrace, au moyen d'assemblages d'objets, de textes et de dessins, le travail de mémoire - recherche des sources - entrepris sur trois décennies autour du thème de l'Algérie, celle de la paix, de la guerre, et pour finir de l'exil. /// Cette oeuvre est difficile, austère, mais essentielle dans mon parcours artistique, et centrale dans mon parcours personnel. /// Le cycle des ARCHIVES documente en grande partie le travail de mémoire sur l'identité (exil) et le vécu en Algérie (aussi l'enfance dans la guerre), entrepris pendant trois décennies entre la France et l'Allemagne. »
Site de la Fondation Prinzhorn : http://prinzhorn.ukl-hd.de/
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Nicole Guiraud, galerie Peter Herrmann (page de présentation et rappel des dates et titres des expositions principales : en bas de page cliquer sur les titres pour voir les œuvres correspondantes) : http://www.galerie-herrmann.de/arts/guiraud/index.htm
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Pour mémoire… Film, livre, galerie Peter Herrmann :
FILM. « Der Koffer, La valise à la mer », 1991. Mise en scène des déchirements de l’exil, des traumatismes de la mémoire et du corps. Parole de Nicole Guiraud, déchiffrant objet par objet la traversée d’une mer, la traversée du temps, fracture entre l’enfance blessée et le lent travail de construction de soi et de l’œuvre
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LIVRE. « Algérie 1962. Journal de l’Apocalypse », éd. Atlantis, 2013 (bilingue allemand-français : Nicole Guiraud vit surtout en Allemagne, où elle a sa galerie)
Page (Algérie 1962, Journal de l’Apocalypse)
Nicole GUIRAUD, plasticienne, fut victime d’un attentat terroriste l’année de ses dix ans, juste avant la rentrée scolaire, le 30 septembre 1956, au Milk Bar, café qui, comme son nom l’indique, avait une clientèle familiale, on y amenait ses enfants. (Le Milk Bar a encore été la cible d’un attentat pendant la « décennie noire » du terrorisme islamiste. Héritage de la violence, cibles choisies pour des raisons similaires : comment faire naître le plus de terreur si ce n’est en tuant ou mutilant des enfants.). / Boualem SANSAL, le dit bien dans sa préface (« L’histoire se vit deux fois ») : ce Journal qu’écrivait Nicole Guiraud, en 1962, pour supporter ce climat de terreur, une adolescente algérienne aurait pu en écrire un de très similaire, car l’horreur a recommencé, héritière d’une violence légitimée, normalisée.
Commentaire (lecture du Journal), sur le blog armeniantrends, de Georges Festa : http://armeniantrends.blogspot.fr/2012/12/nicole-guiraud-algerie-1962-journal-de.html (« Dimanche 30 septembre 1956, 18 heures 30 : Nicole, une fillette de dix ans se trouve, comme chaque année à la fin des vacances d’été, avec son père dans le Milk Bar, au coeur d’Alger, pour y déguster une glace, lorsqu’une bombe explose, déposée par le FLN (Front de libération nationale). Quatre personnes sont tuées et cinquante-deux autres blessées. Nicole perd son bras gauche. » (…) « Dans son journal, la jeune Nicole, âgée de quinze ans, note jour après jour les violences d’une guerre civile qui prend de plus en plus les traits d’une apocalypse » SUITE sur le SITE armeniantrends…)
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Textes de Georges FESTA inspirés par des œuvres de Nicole GUIRAUD (ces liens vers le blog de cet auteur sont dans ma liste « Poèmes », ici) : NG/GF : « Le Marabout de Sidi Moussa », prose : http://armeniantrends.blogspot.fr/2013/02/nicole-guiraud-le-marabout-marabout.html /// NG : « Le peintre », GF : « Puisqu’ils ont voulu m’enfermer » : http://armeniantrends.blogspot.fr/2011/10/nicole-guiraud-der-maler-painter.html /// NG « Le Couple », GF « Sables » : http://armeniantrends.blogspot.fr/2013/12/nicole-guiraud-das-muschelpaar-couple.html /// NG « Bouteille à la mer », GF « Et je m’enivrerai de mers / et de morts » : http://armeniantrends.blogspot.fr/2012/12/nicole-guiraud-flaschenpost-message-in.html
07:51 Publié dans ART.tous arts visuels, PN.H.peuple.Camus | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nicole guiraud, art, création, algérie, peter herrmann, fondation prinzhorn, mémoire, guerre, terrorisme, traumatismes, résilience, louzla darabi, samta benyahia, oran-alger-constantine, alger, georges festa, survivre, la valise à la mer, dieter reifarth, bert schmidt, journal, apocalypse, éd.atlantis, 1962, exil, armeniantrends
04/11/2012
« HAÏR C'EST ENCORE DEPENDRE ». Réflexion à partir d'un texte de Daniel Maximin citant Césaire (texte à méditer...)
Des récupérations idéologiques et politiques ont cours en ce moment, là ou ailleurs, à propos de la reconnaissance des crimes du 17 octobre 1961 (déguisée par certains - qui y sont hostiles - en « repentance » : ce qui attise les passions, remue les émotions, les colères, les rancoeurs - ce qui, aussi, autorise la mauvaise foi…). Dans ces heurts où les mémoires et souffrances s’opposent (et intimement dans les questionnements personnels identitaires que ces débats réactivent) parfois la haine affleure (ou déborde). Haine et haines d’autant plus dangereuses que, dans un contexte de crise, des groupes politiques (des mouvances, des partis) instrumentalisent mémoire et Histoire pour, dans l’actualité sociale, introduire des thématiques discriminatoires, des divisions entre les communautés qui composent le pays, provoquer la peur (de l’autre, forcément). Et quand, en plus, la commémoration en hommage aux victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie entraîne une lutte de dates qui recouvre un conflit mémoriel plus important... on ne sait plus qui va crier le plus fort.
Il est donc peut-être nécessaire de relire certains textes qui proposent de prendre recul, de faire un peu silence en soi avec ces remuements douloureux sur un passé individuel et collectif. Qu’est-ce qui libère et qu’est-ce qui entrave ? Penser dans la solitude permet de retrouver son autonomie de pensée, de réfléchir autrement, sans influence politicienne ou communautaire (ce qui ne veut pas dire reniement d’appartenances : mais il y a plusieurs manières d’appartenir – en se faisant piéger par un enfermement idéologique et passionnel univoque, ou en acceptant de constater la complexité des regards sur la réalité et la complexité des communautés humaines elles-mêmes).Ce qui ne veut pas dire non plus renoncement à l'expression, ni même aux revendications justes...
Daniel Maximin, à propos de la commémoration de l’esclavage, se pose les mêmes questions. On remplace « esclavage » par guerre d’Algérie, colonisation, décolonisation, et on a de quoi méditer sur les choix possibles (quels positionnements?) à ce sujet. (« On » renvoie à des « mondes », divers : Pieds-Noirs et Harkis, oui - personnes, communautés, et associations - mais aussi Algériens sur les deux rives, Franco-Algériens, anciens appelés, métropolitains, pouvoirs, partis, médias… Mais c’est d’abord un appel à la conscience individuelle… exigence qui interfère… (Et c'est valable pour d'autres conflits passés et actuels...).
« La commémoration a un sens si elle n'est pas déviée. Car, plus important que le devoir de mémoire, il y a le droit à l'Histoire. Il faut que toute l'Histoire soit dite: pas seulement celle des douleurs, mais surtout la plus cachée, celle des résistances. La mémoire doit autant privilégier la parole des opprimés que la condamnation du discours de l'oppresseur. Elle doit montrer que l'esclavage a perdu, qu'il n'était pas fait pour fonder des sociétés, des cultures. Donc il ne doit y avoir ni ressentiment, ni resserrement, ni posture victimaire. Césaire disait : "Attention, haïr, c'est encore dépendre." » Evidemment, d'un lecteur du texte à l'autre l'opprimé et l'oppresseur auront des visages différents. Peu importe : ce qui compte surtout c'est la mise en garde... Attention...
Le sens du mot « dépendre » peut être compris diversement. Ceux qui ont dépendu de l’autorité politique des autres, subi des oppressions (colonisation, esclavage), doivent se libérer du lien qui demeurerait avec la colère et la haine, et les maintiendrait dans une sorte de paradoxale dépendance, intérieure surtout, inconsciente. Mais les situations sont parfois plus complexes, autres, l’oppression avoir des formes très diverses, camouflées, les contraintes être de l’ordre de la manipulation (manipulation d’opinion, aussi, comme le montre et le dénonce Jean Pélégri dans son livre « Ma Mère l’Algérie » : comment la métropole – avec ses pouvoirs – a construit une image collective des Pieds-Noirs, en faisant de cette communauté un bouc émissaire). Et cependant, dans tous les cas, prolonger les luttes passées, ne rien remettre en question de ses croyances antérieures, rester dans la douleur des exils, quels qu’ils soient, cela aussi crée dépendance, autrement. Collectivement il faut travailler à une résilience libératrice, en déconstruisant les manipulations passées et présentes, en refusant les injonctions qui font jouer un rôle, créent une fausse identité, piègent dans de fausses valeurs (qu’on croit siennes et qui sont étrangères profondément). Bien sûr, parler de résilience (Algériens, Pieds-Noirs, Harkis, Appelés, Métropolitains) est plus difficile quand on évoque les plus terribles traumatismes (victimes du terrorisme, enfants de disparus ou de victimes d’assassinats ciblés, survivants d’un massacre, témoins de meurtres, de tortures, nés d’un viol, victimes de viol). C’est là que les communautés peuvent avoir un rôle apaisant ou au contraire aggravant (en croyant même parfois accompagner – mais en réactivant les souffrances, les colères, en les figeant dans un éternel passé, quand le présent est déjà assez dur). Attention aux héros qu’on se crée, aux icônes qu’on fabrique : certains masques peuvent être dévastateurs… Le défi est de ne pas choisir ce qui dévaste… Quand ceux qui haïssent ne dépendent pas seulement (encore…) de ceux qui les ont opprimés ou agressés (ou, c’est pareil, rôles inversés, de ceux qu’ils ont opprimés ou méprisés), mais dépendent aussi (et c’est peut-être la pire prison) de la part la plus sombre d’eux-mêmes, de l’ombre intérieure qui les hante et qu’ils projettent sur le monde, pour une vision manichéiste…
L'entretien complet est à lire sur le site de L’Express. « Haïr, c’est encore dépendre », Daniel Maximin, 07-05-2009 : http://www.lexpress.fr/culture/livre/daniel-maximin-hair-c-est-encore-dependre_823480.html
Autre entretien, éclairant aussi. « Il faut arrêter d’être esclave de l’esclavage », Daniel Maximin, décembre 2006, L’Internaute : http://www.linternaute.com/histoire/magazine/interview/daniel-maximin/retranscription-daniel-maximin.shtml (CITATIONS :« La volonté d'oppression est constitutive d'une partie de chacun d'entre nous. C'est le désir de mort pour soi ou pour l'autre qui s'oppose en permanence au désir de vie ou de faire vivre. » (…) « Il reste nécessaire de pratiquer "l'auto-surveillance" dont vous parlez (il répond à une question) vis-à-vis de chacun de nous et vis-à-vis des autres. Il n'est pas utopique de penser que la mort et le mal existeront toujours mais que la Résistance à leur empire est aussi permanente dans l'histoire des hommes. »)
C’est une leçon de lucidité. Ne risquons-nous pas, nous, tous, en effet, d’être esclaves des attachements à la condition d’exilé (par exemple), quand nous ne sommes ici que de passage? (Ce peut être aussi le contraire, avec les pièges de l'ancrage local, ou des visions ethnicistes, à la façon des Identitaires ou des Indigènes de la République...). Ne sommes-nous pas, tous, souvent, dans l’illusion de l’innocence intime, communautaire, ou nationale, quand personne n’a échappé, en réalité, aux choix les plus mortifères. Ne serait-ce que par contagion. Ne serait-ce qu’en se taisant…
21:07 Publié dans ACTU/MÉMO.valeurs.idées, CITATIONS.exergues.incipit.excipit, POÉSIE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : haïr, haine, luttes, communautés, appartenance, histoire, mémoire, idéologie, politique, récupérations, 17 octobre, 17 octobre 1961, reconnaissance, repentance, algérie, france, guerre d’algérie, colonisation, décolonisation, victimes, victimisation, partis, daniel maximin, liberté, autonomie, solitude, silence, algériens, pieds-noirs, harkis, esclavage, exil, jean pélégri, ma mère l’algérie, identité, résilience, traumas, oppression, inconscient
01/10/2011
Litanie pour juillet plusieurs fois… (Pages données au vent)
23:44 Publié dans PAGES DONNÉES AU VENT, POÉSIE | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : juillet, poésie, poème, algérie, maghreb, méditerranée, exil, mémoire, identité, lieux, écriture, marie-claude san juan daniel