23/06/2020
Jacques Ancet, Portrait d’une ombre
Quelle ombre ?
La vraie, celle qu’on voit ou devine, et la symbolique, celle de l’effacement de soi, de l’autre, du réel. L’ombre sujet de méditation. Et d’autant plus quand la réflexion sur le regard et la création est à la mesure du sujet.
L’auteur parle de "bruissement, froissement... murmure, frôlement"...
Il traite de l'imperceptible de l’être et des choses, et des mots qui peuvent saisir cela. Travail de miniaturiste en écriture, orfèvre qui peint en mots, en face de quelques créations d’ombres du peintre Alexandre Hollan, rêveur messager des arbres (et auteur de notes sur la création, regroupées sous le titre Je suis ce que je vois, éd. Le temps qu’il fait).
Les fragments en prose de Jacques Ancet sont des poèmes denses, une poésie "éblouissement" ("On ne voit rien, mais on voit ce rien"). Écrire ce qui est à peine perceptible, ce qui échappe, qu’il faut accepter de déchiffrer en étant disponible à une autre manière de regarder. En laissant advenir le subtil des formes à peine tracées, des pensées que l’œil extirpe de ce qu’il ne saisit pas complètement. Même si les mots les traduisent ce ne sont pas des idées venues de l’intellect mais des captures de sens issues du corps. Œil corps qui traverse le voile écran du réel, ou au contraire s’intéresse au voile qui ne masque pas mais révèle.
INCIPIT, double :
"Le revoilà. Il raye l’iris d’un rai de lumière, secoue les feuilles, jette des poignées d’ombre dans le vert pâle. Il essaye des voyelles aiguës et parfois graves, refait un ciel plus lisse, plus tranchant. Un temps d’avant ou d’après. Il cherche. Il trouve. On ne garde dans les doigts que l’air de son passage. Quand il se tait, on écoute. Plus rien ne bouge."
Jacques Ancet, Portrait d’une ombre, éds. érès, 2011
Mais un texte de Jacques Ancet - qui fait office de 4ème de couverture - est en quelque sorte aussi incipit. J’en copie le début :
"Il y a une ombre. On dit ombre, faute d’un autre mot. Pour donner forme à ce qui n’en a pas. On pourrait dire tout aussi bien compagnon - ‘ce latent compagnon qui en moi accomplit d’exister’ écrivait Mallarmé. Mais ombre est moins net, plus évasif. Alors, faire le portrait d’une ombre ? Faire signe non pas vers une image déjà visible, mais vers ce non-visible qui peu à peu se trame aux lisières du visible."
recension © MC San Juan
Page des éditions Érès. Jacques Ancet…
Jacques Ancet, site personnel... Textes et traductions...
Des extraits de ses livres, sur Terre à ciel (l'ancien site)...
Jacques Ancet. Fiche wikipedia. (Où on voit la part immense, dans son œuvre, de ses traductions de poètes hispanophones parmi les plus importants)...
09:09 Publié dans INCIPIT.EXCIPIT.citations, POÉSIE, Recensions.livres.poésie.citations©MC.San Juan | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques ancet, portrait d’une ombre, incipit, alexandre hollan, poésie, fragments
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