Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

03/04/2024

Hommage… Daniel Giraud, poète et traducteur

daniel rigaud,poésie,traduction,tao,anarchie,libertaires,mystiques,spiritualité,poètes chinois,citations,révolution intérieureDaniel se déshabille nu, jusqu’à l’os.

Théo Lésoualc’h, revue Bunker, Marc Questin éditeur (cité par Claude Pélieu)

La vigie, le barbare à rencontrer, le témoin, un collage d’être et d’âme  (…) un « grand » poète, il embrasse l’entre-deux, il est à demi-plein, à demi-vide (…).

Claude Pélieu, préface de All to no-thing

Mais la nature est un temple qui suppose la surnature. La métaphysique n’est-elle pas l’au-delà de la nature ? (…) La simplicité et l’oisiveté du poète ouvrent aussi aux vertiges et dérives dans l’indicible tout-autre qui n’est autre que nous-mêmes.

Daniel Giraud, Ch’an poèmes beat tao (éditorial de sa revue Révolution intérieure n°5, 1987)

The Outsider is a man who cannot live in the comfortable (…) He sees too deep and too much, and what he sees is essentially chaos. He is the one man who knows he is sick in a civilization that doesn’t know it is sick.

Colin Wilson, The Outsider

..........................................

Daniel Giraud... est décédé dans les premiers jours d’octobre 2023, pour rejoindre le Tout des anarchistes mystiques, le vide ternaire du Tao, cet absolu non-duel…

Quand j’ai vu par hasard ce fragment de Colin Wilson, extrait de The Outsider1, j’ai tout de suite pensé à Daniel Giraud, cet Outsider qui voyait « trop profond et trop », et que le « chaos » du monde révoltait, en libertaire rêvant d’un autre horizon du possible, et trop seul à le rêver. Si la civilisation « ne sait pas qu'elle est malade », cela rend malade ceux que cela désespère. Et Daniel Giraud, qui oscillait entre une tension vers ce qui pouvait rejoindre la joie et la bascule dans le désespoir, posait, contre cette solitude de conscience, l’écran de multiples dons permettant d’atteindre le tout-autre qu’il évoquait justement. Tant de curiosité pour des connaissances formant le puzzle d’une même recherche, que Claude Pélieu, dans sa préface de 2014 (pour All to no-thing), liste une litanie de mots pour le définir : traducteur, astrologue, poète, nomade, chanteur de blues, libertaire, citoyen du monde, grand voyageur, etc.

Lire la suite

01/04/2024

Poésie. Revue DIÉRÈSE n° 89

diérèse,lesdeux-siciles,daniel martinez,poésie,livres,citations,lecture d’images,hommagesL’éditorial de Gilles Lades met, dès l’exergue (citation d’Antoine Emaz) et sa première phrase, l’accent sur l’émotion : « le cœur et la chair de notre existence ». Il montre comment l’émotion émerge de l’intime, avec sa part inconsciente et son rapport avec l’imaginaire. Donc, écrit-il, elle ne peut être écartée de la pensée du poétique. Mentionnant Valéry, Goethe, et plusieurs autres auteurs dont René-Guy Cadou et Yves Bonnefoy, il considère que « seul le verbe poétique » a la force, « en unissant auteur et lecteur », de relier « l’intime » au « cosmique ».

……………………………………………………………………………..

Ouverture… En page-titre intérieure, une citation…

La Poésie est une présence infiniment légère et infiniment comblante.

                                     Nicolas Dieterlé (1963-2000)

.……………………………………………………………………………..

Lire la suite

20/03/2024

Revue DIÉRÈSE 88. Suite du parcours...

diérèse,les deux-siciles,daniel martinez,poésie,livres,citations,lecture d’imagesDans la note précédente, j’avais fait un parcours rapide de la revue, accompagnant la lecture de la recension de Michel Diaz et de son récit. Je mentionnais déjà l’intérêt de l’éditorial d’Alain Fabre-Catalan, que j’ai encore relu. Il écrit que la poésie s’inscrit « dans cette extrême tension entre le mutisme de l’existence immédiate et l’invention du langage face au foisonnement du réel ». C’est pourquoi, le poème qui est lu « ne se donne jamais d’emblée ». Je trouve que ce qu’il dit de la lecture pourrait s’appliquer aussi à l’écriture : « Rencontrer une parole autre qui retentit à l’intérieur de soi », permettre « un dialogue avec l’inconnu d’une voix qui soudain vous révèle à vous-même ». Car le processus est proche, écoute de sa propre voix, qui contient aussi une part d’inconnu et provoque une révélation à soi-même de ce qu’on ne savait pas avant que les mots du poème le tracent. Et d’une certaine manière la lecture est une écriture qui participe de la création du poème. Comme l’écriture est une lecture des signes qui deviennent langage en laissant émerger les mots de la langue qui travaillaient souterrainement en soi.  C’est d’ailleurs ce qu’il propose aussi pour penser le poème comme « expérience de soi à travers l’écriture ». Je retiens les mots « énigme », concernant poète et lecteur, et « déchiffrement » comme opération de lecture (mais elle succède au déchiffrement premier de notre part d’inconnu que le langage va traduire). Dans les deux moments, écriture et lecture, c’est la possibilité d’un accès à cette « énigme » qui fait qu’écrire ou lire un poème est vivre un triple « franchissement vers un au-delà de soi-même » (poème, poète, lecteur). Et encore plus quand le lecteur est aussi poète qui déchiffre « un au-delà de soi-même » en écrivant ses textes. Sachant que le poète authentique ne naît que par ses lectures de ceux qui l’ont précédé et de ceux qui vivent dans son temps.

Alain Fabre-Catalan appuie son texte sur deux citations de Claude Esteban, hommage à un auteur qui savait « épouser mieux l’obscur / pour avancer ».

………………………………………………………………………

Ouverture… Citation en page-titre intérieure :

Chaque poème est un monde neuf qui nous reçoit

Comme si nous l’avions toujours connu. 

Claude Albarède

………………………………………………………………………..

Lire la suite

26/02/2024

La recension de Michel Diaz pour Le réel est… / DIÉRÈSE, revue de poésie (1er temps de lecture du n° 88…).

Diérèse.jpgPremier temps de lecture de la revue Diérèse (Daniel Martinez) car (très occupée autrement) j’ai cumulé un retard de plusieurs mois (revues et livres qui s’entassent mais ne seront pas abandonnés…). Et le numéro 89 attend aussi… 

Dans ce numéro 88 j’ai la joie de lire la superbe, et ample, recension que Michel Diaz a consacré à mon dernier recueil, Le réel est un poème métaphysique (extraits après mon introduction, 2ème partie de la note, suivie du lien vers le site de l’édition). Dans ce numéro je suis en compagnie des lectures qu’il a faites des livres de Jacques Robinet (Clartés du soir, Unicité - recueil que je suis en train de lire...), Richard Rognet (Dans un nid de flammes, L’herbe qui tremble), Jean-Pierre Boulic (Enraciné, La Part Commune). Mais j’ai découvert aussi autre chose. Un texte de Michel Diaz dont je lis surtout les recueils de poèmes et fragments poétiques (écriture que j’apprécie particulièrement et place « haut ») : dans cette revue, pages 199 à 215, un récit troublant, Un petit théâtre de ruines, dont l’exergue (La Rochefoucauld) révèle un sens, un questionnement (frontière indistincte entre vérité et mensonge, ou les fils étranges du destin).

Donc, sa recension. Une capacité intuitive qui lui fait savoir, au-delà des pages à déchiffrer, ce que celle qui écrit tente de décrypter, cet autre savoir dont l’écriture veut dire la souterraine conscience. Il sait, parce que sa démarche d’écrivain se situe dans un espace de profondeur signifiante.

Lire la suite

23/02/2024

ROBERT BADINTER, hommage.

robert badinter,abolition,justice,engagement,humanisme,valeurs,livres,citationsCet homme remarquable, Robert Badinter, a prolongé l’action de Victor Hugo, Albert Camus, Arthur Koestler, et quelques autres… L’abolition de la peine de mort, en 1981, est sa réalisation principale, aux répercussions importantes dans la conscience nationale et internationale (car la lutte pour l’abolition se nourrit des choix des pays abolitionnistes, surtout quand la parole a la force de celle de Robert Badinter). Mais en tant qu’avocat il a associé ce combat de justice à celui concernant les conditions de vie des prisonniers et l’état des prisons, en se désolant des difficultés et des lenteurs à réformer, soucieux aussi de penser la réinsertion des prisonniers après leur libération.

Lire la suite

22/02/2024

JEAN MALAURIE, hommage

Borm.jpeg

 

Jean Malaurie c’est pour moi (et pour beaucoup) d’abord deux repères. Les Inuits, et la collection Terre humaine. Il nous a fait découvrir les uns (leur univers, leurs croyances, leur animisme) et il a créé une collection fabuleuse, un espace pour les publications des ethnologues, ouvrant le monde aux lecteurs.

Lire la suite

08/02/2024

Lire Paul CELAN

510AZOkDBOL._SY385_.jpg

Seules de vraies mains écrivent de vrais poèmes.

Paul Celan, Lettre à Hans Bender, in Le méridien et autres proses.

Lire Celan : se lire en le lisant, se laisser traverser par sa langue neuve, sa musique de douleur et de combat (…) en touchant aux signifiants on touche aux « amarres de l’être » [1].

Florence Signon, Paul Celan, le poète aux vraies mains, revue L’En-Je lacanien, 2013.

[1] Jacques Lacan, L’instance de la lettre dans l’inconscient, in Écrits.

...........................

J’ai relu Paul Celan... 

Revenir toujours aux grandes écritures, aux pensées fortes.

Choisissant, parmi les livres rangés dans ma bibliothèque j’ai feuilleté les pages, saisissant les phrases qui le faisaient s’adresser à moi, à travers le temps, pour répondre aux questions. Voici quelques fragments…

Lire la suite

06/02/2024

Israël, Gaza, et le Hamas. Le 7 octobre et après… Israël-Palestine ? / Dernière mise à jour, le 14-5-24...

Le 1 Israël.jpegMais on ne sème pas le mensonge, il prolifère, il occupe l’étendue qu’il doit constituer lui-même peu à peu, ce qui lui est facile quand tous les moyens sont prêts pour cela. Et pendant ce temps, la vérité enterrée germe.

María Zambrano, Sentiers (trad. Nelly Lhermillier), éd. des femmes 1992.

La Basilique de l'Annonciation expose mosaïques et vitraux de la vierge Marie selon l'imagerie d'une trentaine de nations différentes. Dans les circonstances actuelles ces images rappellent que la chose que nous devrions sacraliser au-dessus de tout est la vie humaine. Albert Cohen disait que ce qui nous rend frères c'est notre sort commun, la mort prochaine. Ces figures de mères et d'enfants revêtent aujourd'hui une importance particulière. Qu'aucun de nous n'endurcisse jamais son cœur au sort d'un camp ou de l'autre. Nous sommes semblables par notre désarroi.

Joann Sfar, post Facebook public, 15-12-2023.

Les lucioles sont partout dans le monde. Le jour, elles disparaissent ; la nuit, elles dissipent le doute et la peur et orientent les humains./Voici ma conviction : la révolte dépourvue de tout désir de paix n’est qu’un vacarme de train rouillé en partance pour le néant.

Karim Akouche, Les lucioles de l'espoir, extrait d’un texte, post Facebook public, 3-11-2023.

À ceux qui... à Paris, Tel-Aviv, Gaza ou ailleurs… se relèveront de la haine et sauront être des bougies dans le noir.

Delphine Horvilleur, fragment de la dédicace du livre à paraître (le 21-02-2024). Comment ça va pas ? Conversations après le 7 octobre, Grasset. (Citations supplémentaires, voir dossier de liens, "Livres").

Aider la Palestine ou aider à la paix, c'est créer des lieux de dialogue. Si vous pensez qu'importer la guerre va sauver quiconque vous êtes des clowns. Gloire à celles et ceux qui au milieu de ce concours mondial de barbarie parviennent à maintenir la discussion, l'écoute, l'espace nécessaire pour que chacun apprenne à faire évoluer son narratif.

Joann Sfar, post public, 14-03-24

......................................................

J’étais dans l’esprit de Hanouka et Noël, deux fêtes célébrant différemment la lumière, et exprimant le besoin humain de créer du sens et de l'espoir, et j’ai trouvé le message de Joann Sfar, posé le 15 décembre, particulièrement juste. (Mais pour en saisir toute la force lire l'ensemble de ses posts, sa solidarité profonde avec les victimes du 7 octobre, avec l’angoisse des familles pour les otages, mais aussi sa compassion pour les souffrances causées par la guerre pour la population de Gaza, victime d’ailleurs autrement du Hamas). Il s'adresse, sans déni mais sans haine, à ceux qui se savent "semblables" par leur "désarroi". D’autres préfèrent guerroyer en lançant des mots et des certitudes (et des arguments et références pour confirmer ces certitudes...). Écho aux messages fraternels de Joann Sfar, la page d'un metteur en scène, Ismaël Saidi, qui, comme lui, dénonce les faiseurs de haine, l'antisémitisme, le terrorisme, et diffuse des messages de fraternité, d'humanisme, sans concessions.

 

(Après un TEXTE introductif, un DOSSIER de citations et liens... / Et, après les liens, un texte en CONCLUSION (questionnement et citation...)

Lire la suite

21/08/2023

De Paul Souleyre, Quelque part dans la foule il y a toi. Récit. D'une rive à l'autre, se trouver soi

Quelque_part_dans_la_foule_il_y_a_toi.jpgComme Albert Camus à travers son Premier homme, Paul Souleyre, né après l’exil de ses parents pieds-noirs, mène une recherche des origines, de l’identité, quête initiatique où quelques mentions de Camus sont des clés. Douleur du deuil, et naissance à soi-même. L’inconscient sait ce qu’on ignore, et il guide. Histoire initiatique du « retour » guérisseur vers l’Algérie de qui n’y a jamais vécu mais est habité par son algérianité. Retour vers le pays chanté par Camus, même si c’est vers la rouge terre de l’Oranie des racines. La réalité est parfois magicienne, et l’écriture force plus qu’analytique. Quand, à la différence de tous les membres de la famille […] [son] Là-bas tourne dans le vide (p. 127). Camus apparaît dans un moment triste, mais en soutien, pour avoir évoqué la mort et le deuil : À ton enterrement j’ai lu un petit texte de Camus que j’avais entendu dans une chronique. […] Camus n’était pas du genre à enfermer les gens dans des cartons […] …plus de force ; je voulais vivre le même sentiment avec toi (pp. 52-53).

Et dans son parcours de recherche sur les siens il constate des similitudes entre la vie de son grand-père à Oran et celle de Camus (p. 157). Mais l’un a eu la littérature pour transfigurer les traumatismes, l’autre pas.

Lire la suite

13/08/2023

Diérèse, revue, et Les Deux-Siciles, parcours de lecture

DIERESE87.jpgParcours des trois derniers numéros de la revue Diérèse, n° 85-86-87 (et une échappée vers un plus ancien, 82, pour deux réflexions importantes, et des poèmes). Mais plutôt que prendre numéro par numéro je vais regrouper par rubriques (éditoriaux, études / poèmes / recensions, notes de lecture).

J’apprécie que les éditoriaux soient rédigés par des auteurs différents, qui présentent ce qu’est l’écriture pour eux, ce que signifie profondément cette entreprise de création. Tous ceux que j’ai lus, ne se limitant pas à une réflexion formelle ou à des questions de pure esthétique littéraire, développent plutôt une analyse de ce que signifie l’expérience d’écrire, son enjeu vital. Écrire fait intervenir des parts de sa vie différentes, dimensions qui s’imbriquent en strates complexes, et chacun peut mettre l’accent sur tel ou tel aspect : psychologie, corps, société, théorie, métaphysique…  Lisant ces textes on peut avoir envie de découvrir certains auteurs qu’on ne connaissait pas, quand on sent que la démarche correspond à ce qu’est, pour soi, juste exigence.

Couverture de la revue, maquette de Xavier Makowski.

Cependant, avant ce parcours j’ai envie de mentionner trois livres rapportés du Marché de la Poésie de juin, stand des Deux-Siciles. Ils feront l’objet d’une vraie lecture en automne…

Fragments & cætera. Une anthologie de poésie brève.

Établie et présentée par Jacques Coly.

Si profonde est la forêt. Anthologie de la poésie des Tang.

Traduite et présentée par Guomei Chen. Préface de Pierre Dhainaut.

D’Ores et Déjà (poésie), de Daniel Martinez.

Lire la suite

09/05/2023

8 mai. Mémoire. Donc relire Albert Camus...

lettres.jpgEn ce 8 mai, relire Lettres à un ami allemand d'Albert Camus...

Le 8 mai marque la mémoire de la victoire contre le nazisme et la fin de la 2de guerre mondiale. C'est aussi un jour d'hommage à Jean Moulin, résistant, qui mourut le 8 juillet 1943 des tortures de l'Occupant. 

Camus, résistant (Combat clandestin), écrivit ses Lettres à un ami allemand, dont seules les deux premières furent publiées pendant la guerre, les deux autres à la Libération. 

Regroupées par Gallimard en 1948, elles sont disponibles en collection de poche, Folio,1991.

Ce sont des textes qui donnent la mesure du refus de tout totalitarisme meurtrier. Échos pour l'actualité mondiale... 

Lire la suite

30/03/2023

Le monolinguisme de l'autre, de Jacques Derrida

Mono JD.jpgJacques Derrida (1930, El-Biar, Algérie - 2004, Paris) fut le co-fondateur du Groupe de recherches sur l’enseignement philosophique (Greph) et du Collège international de philosophie. Œuvre abondante (livres publiés par Galilée, Le Seuil, Minuit, des femmes…).

Pour commencer, trois exergues, citations de Jacques Derrida qui éclairent le contenu du livre commenté ici, Le monolinguisme de l’autre. [Sommaire de la note : exergues, commentaire, citations, bibliographie (livres de Jacques Derrida, livres sur lui), 3 articles et 2 textes (résumés + citations), sites....]

Néanmoins, dans la culture des Français d'Algérie et de la communauté juive des Français d'Algérie, une chose faisait que, malgré tout, la France n'était pas l'Algérie ; la langue française avait sa source, sa norme, son autorité ailleurs. Et, d'une certaine manière, on apprenait confusément, je l'apprenais confusément, comme la langue de l’autre.                                                                    Jacques Derrida, entretien avec Didier Cahen, diffusé sur France-Culture, le 22 mars 1986, publié sous le titre Entretien avec Jacques Derrida dans la revue Digraphe N°42, décembre 1987. Repris dans le livre Points de suspension. Entretiens (pp. 209-228, et p. 217, pour cette citation), Galilée, 1992.

Cette parole à circoncire, à circoncire pour quelqu'un, à quelqu'un, cette parole qu'il faut donc donner, et donner une fois circoncise, entendons-la comme une parole ouverte.
Comme une blessure, direz-vous. Oui et non. Ouverte d'abord comme une porte, ouverte à l'étranger, à l'autre, au prochain, à l'hôte ou à quiconque.          Jacques Derrida, Schibboleth pour Paul Celan (p. 103), Galilée, 1986.

Il me faut essayer d'écrire de telle sorte que la langue de l'autre ne souffre pas de la mienne, me souffre sans en souffrir, reçoive l'hospitalité de la mienne sans s'y perdre ou intégrer. Et réciproquement, mais la réciprocité n'est pas la symétrie […].  Cela doit s'inventer à chaque instant, à chaque phrase, sans assurance, sans garde-fou absolu. Autant dire que la folie, une certaine « folie », doit guetter chaque pas, et au fond veiller sur la pensée, comme le fait aussi la raison.                                                                                               Jacques Derrida, entretien avec François Ewald, Le Magazine Littéraire, numéro spécial Derrida, N°286, mars 1991. Repris dans Points de suspension. Entretiens (pp. 349-375, et p. 374, pour cette citation), Galilée, 1992.

Lire la suite

26/03/2023

SI MOHAND Ou M'HAND, Isefra (poèmes)

livre Si Feraon.jpgL’asefru, pl. isefra (poème en kabyle), appartient à la tradition berbère de Kabylie (depuis, pense-t-on, le XVIIIè siècle). C’est un poème à la construction rigoureuse. Trois strophes de trois vers. Chaque tercet comporte une structure de 7-5-7 syllabes et les rimes sont organisées suivant le schéma AAB – AAB – AAB. On peut penser à la structure du sonnet, et, par d’autres aspects, au haïku japonais, ou à certains chants de l’Espagne andalouse.

Les poètes connus surtout pour l’utilisation de cette forme sont Si Mohand, Taos Amrouche, Slimane Azem, et la chanteuse Malika Domrane.

Au sujet de SI MOHAND, Mouloud Mammeri écrit ceci : Pour lui, la poésie n'était ni un métier, ni un accident, c'était un destin : il ne l'avait ni cherchée ni choisie, elle s'est imposée à lui comme un fatum.

Si Mohand est né entre 1849-1850, dans un village détruit par l’armée française qui construira une ville fortifiée (Fort national, renommé Tizi Rached). Réfugié dans un village voisin. En 1871 une révolte aboutit à l’exécution de son père par l’armée, à la déportation de son oncle en Nouvelle Calédonie (les Kabyles du Pacifique), à la dispersion de sa famille. Il devient un errant qui dit ses poèmes (après avoir dissipé ce qu’il possédait, et aussi pour avoir été chassé de la maison de son frère). Il est mort le 28 décembre 1905. Quand il disait un poème (asefru, singulier de isefra) il déclarait ne pas vouloir le répéter. Et il refusa de les transcrire, laissant ce soin à ceux qui écouteraient et retiendraient. Une stèle est érigée à sa mémoire à Akbou, wilaya de Béjaïa (Bougie).

Quand on lit la vie de si Mohand on pense à des personnalités hors normes, comme Rimbaud et Artaud. Ou voir en lui une synthèse Rimbaud-Artaud-Prévert-Aragon (mais kabyle). Avec quelque chose de Don Quijote.

La légende raconte qu’il entendit un ange lui annonçant son destin de poète (« Rime et je parlerai », dit l’ange. « Je parlerai et tu rimeras » décide Si Mohand). Sa poésie traite d’amour, de désir, d’errance, mais aussi de révolte et d’engagement.

(Sources : fiches Wikipédia, articles en ligne, introductions des publications qui le mentionnent, ouvrages dédiés, revue Études et Documents, sites culturels berbères - voir titres et liens ci-dessous)

Lire la suite

19/02/2023

Camus et le FLN, essai de Tarik Djerroud. Publication en France et en Algérie

albert camus,camus,f.l.n.,algérie,guerre d’algérie,camus et le f.l.n.,tarik djerroud,erick bonnier,tafat,kamal guerroua,robert mazziotta,mare nostrum,jean-pierre ryf,georges-marc benhamou,alain vircondelet,jean-jacques bedu,josé lenzini,valeurs,humanismeVoici ma lecture de l'essai de Tarik Djerroud (écrivain et éditeur), Camus et le FLN. (Publication sur les deux rives, en Algérie et en France. Erick Bonnier, France, et Tafat, Algérie, 2022. Mes références renvoient aux pages des éditions Erick Bonnier).

Pour commencer, l'incipit (qui me servira d'exergue). La première phrase de l'introduction (quatre pages, qui mériteraient un tiré à part ) : Sous la voûte céleste, sur la terre des hommes et des femmes, chaque siècle déverse son lot de frayeurs, rendant la condition humaine souvent tragique.

Sujet brûlant, s’il en est… Et traité avec la justesse de ton qu’il fallait. Livre important, la position d’Albert Camus étant souvent mal comprise car mal connue. Or l’essai se base sur des documents et informe.

Déjà, les trois exergues sont un programme : choix de lucidité, refus des pièges idéologiques, goût du débat. (Georges Clémenceau, sur le mensonge. Malek Haddad, pour la difficulté de vivre l’Histoire et de l’étudier en même temps. Dudley Field Malone, et l’utilité du débat contradictoire…)

Puis l’introduction. Quatre pages (pp. 9-12) qui définissent l’intention de déconstruire les manipulations de ceux qui utilisent l’Histoire pour leurs stratégies et non pour rechercher la vérité des faits.  Donc expurger la démesure, cette fille de la peur, de l’ignorance et de la haine ou du calcul intéressé ! Et commencer par des questions : Mais de prime abord, qui était vraiment Camus, enfant de la terre algérienne ? Qui était vraiment le FLN ? La méthode est exposée, en quatre points : approche mémorielle, puis choix d’un angle analytique contradictoire et rejet des lectures dogmatiques, et enfin volonté d’évacuer tout tribunal sacralisant ou manichéisme infantilisant. Pour saisir les vérités des uns et des autres.

Démarche qui suivra la chronologie de l’Histoire. Du Centenaire de 1930 (avec ses paradoxes), vécu si différemment par les uns ou les autres, jusqu’à la mort de Camus en janvier 1960, puis l’indépendance de 1962 et les suites (autre pouvoir, autres tensions).

Constat : l’eau tiède de l’histoire laissait flotter à sa surface un Camus pluriel et un FLN multiple.

 

Et en conclusion de ces quatre pages : En fait, la recherche d’une sagesse, par temps de paix comme par temps de guerre, est la plus belle ambition de cet ouvrage.

 

En fin de note, lien vers la page des Éditions Erick Bonnier. Et trois notes de lecture de cet essai (citations et liens) : page du site Mare Nostrum (par Robert Mazziotta), chronique du journal Le Matin d'Algérie (par Kamal Guerroua), note de blog de Jean-Pierre Ryf (le créateur et administrateur principal du groupe Facebook Les Amis d'Albert Camus - fréquenté sur les deux rives).

Lire la suite

03/02/2023

Théâtre. El Ajouad, Metteur en scène Kheireddine Lardjam

J’ai vu les deux pièces, Tenir jusqu’à l’aube et L’exploitation à la cool.

Choix d’y aller parce que c’est El Ajouad, la compagnie de Kheireddine Lardjam, dont j’ai aimé tout ce que j’ai vu de ses mises en scène. Je l’avais découvert en apprenant sa création des Justes de Camus en Algérie, il y a des années.  Puis j’avais vu (et revu, tant c’est fort) End/igné, adaptation d’un texte de Mustapha Benfodil sur la tragédie de jeunes Algériens qui s’immolaient en se suicidant par le feu (on a plus su le cas du suicide d’un jeune Tunisien de cette manière). Terrible et superbe texte. Et de même, j’avais été impressionnée aussi, notamment, par la pièce O-Dieux (revue aussi), adaptation d’un texte de Stefano Massinii sur le conflit israélo-palestinien (ce que j’ai vu de plus intelligent sur ce sujet, loin des projections partisanes haineuses et des certitudes militantes). L’humanité réelle et complexe (voir plus bas, citation – texte d’intention - et lien). Hélas je n’ai pas vu La quête de l’absolu (voir citations et liens en fin de note). J’espère que ce sera repris à Paris…

Et que ces deux pièces du programme soient jouées au Lavoir Moderne était un argument de plus. Beau lieu. Murs comme lavés et déchirés par le temps, qui donnent l’impression d’être une création de street art, mais dont les gris favoriseraient un dépouillement pouvant convenir comme décor nu à toutes sortes de pièces.

J’ai consulté le site (la compagnie El Ajouad est dans le Jura), regardé les autres créations, relevé des citations et des liens (à voir en fin de note).

Autres créations récentes (voir en fin de note) : La dernière (Une histoire française) et En pleine France.

C'était donc au Lavoir Moderne Parisienhttps://lavoirmoderneparisien.com/

Par la compagnie El Ajouad… https://elajouad.com/

Lire la suite